COMMISSION EUROPÉENNE
Bruxelles, le 20.7.2016
COM(2016) 505 final
COMMUNICATION DE LA COMMISSION
relative à la proposition de directive modifiant la directive concernant le détachement de travailleurs, en ce qui concerne le principe de subsidiarité,
conformément au protocole nº 2
1.Introduction
Dans le cadre de ses orientations politiques, la Commission s’est engagée à œuvrer en faveur d’un marché intérieur plus approfondi et plus équitable. L’Union a établi un marché intérieur dont elle assure le fonctionnement sur les bases d’une économie sociale de marché hautement compétitive, tendant au plein emploi et au progrès social.
Dans ce contexte et conformément à son programme de travail 2016, la Commission a adopté le 8 mars 2016 une proposition de révision ciblée de la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs. Les raisons motivant les mesures envisagées ainsi que les choix politiques figurant dans la proposition sont expliqués dans l’exposé des motifs, dans les considérants de la proposition de directive et dans le rapport d’analyse d’impact accompagnant la proposition.
En substance, la proposition vise à faire en sorte que la libre prestation des services au sein de l’Union se fasse dans des conditions qui garantissent l’égalité de traitement des entreprises ainsi que le respect des droits des travailleurs. La Commission a estimé que la directive 96/71/CE, adoptée il y a de cela vingt ans, ne permet plus d’assurer le respect de telles conditions, compte tenu de la situation économique et sociale prévalant actuellement dans les États membres. C’est pourquoi, elle a soumis une proposition d’action législative. La proposition de la Commission vise à résoudre les problèmes spécifiques identifiés en apportant un nombre limité de modifications ciblées à la directive 96/71/CE.
Le protocole nº 2 aux traités, qui concerne l’application des principes de subsidiarité et de proportionnalité, donne aux parlements nationaux la possibilité d’émettre des avis motivés lorsqu’ils considèrent qu’une proposition législative n’est pas conforme au principe de subsidiarité. Lorsque les avis motivés émis par les parlements nationaux représentent au moins un tiers de l’ensemble des voix qui leur sont attribuées, la proposition doit être réexaminée par la Commission. Sur la base de ce réexamen, la Commission peut décider de maintenir la proposition, de la modifier ou de la retirer, et elle doit motiver sa décision.
Dans le délai fixé à l’article 6 du protocole nº 2, quatorze chambres des parlements nationaux ont transmis un avis motivé à la Commission expliquant que la proposition de la Commission présentée le 8 mars 2016 n’était pas conforme au principe de subsidiarité, entraînant ainsi le déclenchement de la procédure exposée à l’article 7, paragraphe 2, dudit protocole. L’objet de la présente communication est de répondre aux préoccupations exprimées, pour autant qu’elles se rapportent au principe de subsidiarité.
Dans ce contexte, la Commission tient à rappeler que l’une de ses priorités est de renforcer les liens avec les parlements nationaux et d’instaurer un nouveau partenariat avec ceux-ci, afin de rapprocher l’Union européenne des citoyens. La Commission attache une grande importance à l’approfondissement des connaissances nationales spécifiques au sein de l’institution, au renforcement de la compréhension mutuelle et à l’établissement de canaux de communication efficaces entre l’échelon national et le niveau européen.
2.Procédure
La procédure prévue à l’article 7, paragraphe 2, du protocole nº 2 met exclusivement l’accent sur le principe de subsidiarité tel que défini à l’article 5, paragraphe 3, du traité sur l’Union européenne (TUE). Dans les avis motivés au sens de l’article 6 du protocole nº 2, les parlements nationaux doivent donc indiquer les raisons pour lesquelles ils estiment qu’un projet d’acte législatif n’est pas conforme à ce principe.
Dans le cas présent, quatorze chambres de onze États membres ont émis des avis motivés dans le délai visé à l’article 6 du protocole nº 2, entraînant ainsi le déclenchement de la procédure exposée à l’article 7, paragraphe 2, dudit protocole. Les chambres ou parlements concernés sont les suivants (nombre de voix entre parenthèses): chambre des députés roumaine (1), sénat roumain (1), chambre des députés tchèque (1), sénat tchèque (1), diète polonaise (1), sénat polonais (1), diète lituanienne (2), parlement danois (2), parlement croate (2), diète lettone (2), assemblée nationale bulgare (2), assemblée nationale hongroise (2), parlement estonien (2) et conseil national slovaque (2). Ces avis motivés représentent 22 voix.
En outre, six parlements nationaux (les Cortes Generales espagnoles, la Camera dei Deputati italienne, l’Assembleia da República portugaise, la House of Commons britannique, le Sénat français, le Senato della Repubblica italien) ont transmis des avis dans le cadre du dialogue politique, considérant essentiellement la proposition comme compatible avec le principe de subsidiarité.
La Commission a confirmé publiquement le déclenchement de la procédure prévue à l’article 7, paragraphe 2, du protocole nº 2 le jour suivant l’expiration du délai prévu à l’article 6 dudit protocole.
Dans la continuité de son engagement visant à garantir que les parlements nationaux font clairement entendre leur voix dans le processus décisionnel de l’UE, la Commission a soigneusement analysé les avis motivés. Avant de tirer ses conclusions, elle a dialogué directement avec les parlements nationaux à propos des questions soulevées, notamment lors de la réunion de la Conférence des organes parlementaires spécialisés dans les affaires de l’Union européenne (COSAC) qui s’est tenue le 13 juin 2016, où un échange préliminaire a mis l’accent sur les questions de procédure, et lors de la réunion du 11 juillet 2016, durant laquelle une discussion de fond s’est déroulée dans le cadre d’un débat plus vaste sur la dimension sociale de l’UE.
3.Proposition de directive modifiant la directive concernant le détachement de travailleurs présentée par la Commission
La proposition de directive modifiant la directive de 1996 concernant le détachement de travailleurs, présentée par la Commission le 8 mars 2016, est fondée sur une base juridique du marché intérieur, à savoir l’article 53, paragraphe 1, et l’article 62 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Le détachement de travailleurs est, par définition, de nature transfrontière. Toute activité de détachement a des effets dans deux États membres au moins. Les dispositions relatives au détachement créent nécessairement des droits et des obligations entre des personnes établies dans différents États membres – à savoir un employeur dans l’État membre d’origine et un travailleur résidant temporairement dans un autre État membre. Dans certaines conditions, le bénéficiaire du service dans le second État membre peut être en outre tenu conjointement responsable.
Le détachement de travailleurs joue donc un rôle essentiel dans le marché intérieur, notamment dans le domaine de la prestation transfrontière de services. La Commission est déterminée à renforcer le marché intérieur, ce qui signifie notamment qu’il convient de faciliter la libre prestation des services, en général, et la libre prestation de services des entreprises détachant des travailleurs, en particulier. Cet objectif ne peut être atteint que si le cadre législatif applicable au détachement prévoit des règles claires, équitables et pouvant être appliquées et respectées.
La proposition de la Commission apporte trois modifications à la directive de 1996:
– premièrement, elle précise que l’ensemble des dispositions contraignantes en matière de rémunération dans l’État membre d’accueil s’appliquent aux travailleurs détachés dans cet État membre. Les dispositions fixées en droit national ou par des accords collectifs d’application universelle revêtent ainsi un caractère contraignant pour les travailleurs détachés, quel que soit leur secteur d’activité. Dans les cas où les États membres, conformément à leurs règles et pratiques nationales, obligent les entreprises à ne sous-traiter qu’à des entreprises qui accordent aux travailleurs les mêmes conditions de rémunération que celles qui sont applicables au contractant, la proposition prévoit que lesdits États peuvent également appliquer ce régime aux entreprises qui détachent des travailleurs sur leur territoire;
– deuxièmement, la proposition prévoit que les conditions qui s’appliquent aux entreprises transfrontières de travail intérimaire mettant des travailleurs à disposition doivent être celles qui, en vertu de l’article 5 de la directive 2008/104/CE, sont appliquées aux entreprises nationales mettant des travailleurs à disposition;
– troisièmement, dès lors que la durée prévisible ou effective du détachement est supérieure à 24 mois, la proposition dispose que l’État membre d’accueil est réputé être le pays dans lequel le travail est habituellement accompli. En application des dispositions du règlement Rome I, le droit du travail de l’État membre d’accueil s’appliquera donc au contrat de travail de ces travailleurs détachés si aucun autre choix n’a été fait par les parties à cet égard.
La proposition ne porte sur aucune des questions abordées par la directive d’exécution de 2014 visant à renforcer les instruments destinés à combattre et sanctionner les contournements ainsi que les fraudes relatives au détachement de travailleurs. Au lieu de cela, elle met l’accent sur les questions liées au cadre réglementaire de l’Union fixé par la directive initiale de 1996. Par conséquent, la proposition de révision ciblée de la directive de 1996 ainsi que la directive d’exécution sont complémentaires et se renforcent mutuellement.
4.RÉEXAMEN DE SUBSIDIARITÉ
4.1 Principe de subsidiarité et protocole nº 2
Conformément à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, le contrôle juridictionnel de la conformité avec le principe de subsidiarité exige de vérifier si le législateur de l’Union pouvait considérer, sur la base d’éléments circonstanciés, que l’objectif poursuivi par l’action envisagée pouvait être mieux réalisé au niveau de l’Union. La Cour accorde donc une certaine marge de manœuvre aux institutions de l’Union lorsqu’il s’agit d’apprécier la conformité avec le principe de subsidiarité. Ce même contrôle juridictionnel est également requis lorsque la Commission réexamine des propositions législatives au titre du protocole nº 2.
Au sens de l’article 6 du protocole nº 2, les parlements nationaux doivent indiquer dans leur avis motivé les raisons pour lesquelles ils estiment qu’un projet d’acte législatif n’est pas conforme au principe de subsidiarité. Le présent réexamen se limite donc à déterminer si l’objectif visé par la proposition de modification de la directive peut être mieux atteint au niveau de l’Union.
Considérant que l’ensemble des arguments soulevés par les parlements nationaux joueront un rôle dans le contexte du processus législatif, la Commission entend les examiner un par un et y répondre en détail, dans des lettres adressées aux parlements concernés, dans le cadre du «dialogue politique».
4.2 Doutes sur la subsidiarité exprimés par les parlements nationaux
Dans leurs avis motivés, les parlements nationaux ont fait valoir les arguments suivants en ce qui concerne la subsidiarité:
les règles actuelles sont suffisantes et adéquates (point 4.2.1);
l’Union ne constitue pas le niveau d’action approprié (point 4.2.2);
la proposition ne reconnaît pas explicitement les compétences des États membres en ce qui concerne la rémunération et les conditions d’emploi (point 4.2.3);
la justification avancée dans la proposition par rapport au principe de subsidiarité est trop succincte (point 4.2.4).
4.2.1. Les règles actuelles sont suffisantes et adéquates
Plusieurs parlements nationaux font valoir que les règles en vigueur sont adéquates au moins lorsque la directive actuelle donne la possibilité aux États membres d’aller au-delà des règles générales (extension des conventions collectives au-delà du secteur de la construction, travailleurs intérimaires). Le Parlement estonien présente un argument similaire en ce qui concerne les conditions de travail des travailleurs détachés.
L’objectif de la proposition est d’offrir des conditions plus équitables aux prestataires de services nationaux et transfrontières et de faire en sorte que les travailleurs exerçant leur activité sur le même site soient protégés par les mêmes règles, qu’il s’agisse de travailleurs locaux ou détachés, dans tous les secteurs de l’économie. Cet objectif ne peut être pleinement atteint par les États membres ayant la faculté, mais non l’obligation, d’appliquer de telles règles dans des secteurs autres que le secteur de la construction. En effet, dans de telles circonstances, les États membres peuvent choisir de ne pas appliquer ces règles, manquant ainsi d’offrir des conditions de concurrence homogènes et une protection adéquate des travailleurs détachés dans ces autres secteurs. L’obligation pour l’ensemble des États membres d’appliquer ces règles dans tous les secteurs de l’économie ne peut pas être établie au niveau national, mais doit être prévue au niveau de l’Union. La Commission considère donc que l’objectif de la proposition sur ce point peut être mieux atteint au niveau de l’Union.
Il en va de même de l’obligation qui incombe aux États membres d’appliquer les mêmes conditions aux travailleurs intérimaires transfrontières et aux travailleurs intérimaires nationaux.
L’assemblée nationale bulgare, le sénat tchèque, le parlement estonien, l’assemblée nationale hongroise, la diète lituanienne, la diète lettone, la chambre des députés roumaine ainsi que le conseil national slovaque font valoir que l’alignement des salaires dans les États membres devrait être la conséquence du développement économique et non celle d’une action législative de l’Union. À cet égard, il convient de noter que la proposition n’a pas pour objectif d’aligner les salaires dans les États membres. La proposition vise simplement à faire en sorte que les dispositions contraignantes en matière de rémunération dans l’État membre d’accueil s’appliquent aussi aux travailleurs détachés dans cet État membre. De plus, le fait que le développement économique puisse entraîner une plus grande convergence des salaires dans la durée n’exclut pas la nécessité de s’assurer – également dans l’intervalle – que les entreprises sont traitées équitablement et que les travailleurs détachés bénéficient d’une protection adéquate.
4.2.2. Niveau d’action approprié
L’ensemble des avis motivés, à l’exception de celui du parlement danois, font valoir que l’objectif de l’action pourrait être mieux atteint au niveau des États membres ou que la Commission n’a pas suffisamment prouvé que l’action devrait être menée au niveau de l’Union.
Certains des parlements nationaux ayant émis un avis motivé soutiennent que tel est notamment le cas de certaines des règles proposées: l’extension de l’applicabilité d’accords collectifs généralement contraignants en dehors du secteur de la construction (assemblée nationale bulgare, chambre des députés et sénat tchèques) et les dispositions relatives aux chaînes de sous-traitance et aux travailleurs intérimaires (diète et sénat polonais). L’assemblée nationale hongroise estime qu’en introduisant la notion de «rémunération» en lieu et place de celle actuellement utilisée de «taux de salaire minimal», la proposition n’apporte pas de valeur ajoutée, en raison de la prétendue absence de clarté de la notion de rémunération.
Comme cela est rappelé au point 3, les objectifs de la proposition sont de faciliter le bon fonctionnement du marché intérieur, en particulier la libre prestation des services, tout en garantissant des conditions de concurrence plus équitables entre les prestataires de services nationaux et transfrontières, une protection adéquate des travailleurs détachés ainsi que la clarté et la prévisibilité du cadre juridique applicable aux travailleurs détachés. La Commission considère que ces objectifs sont interdépendants et peuvent donc être mieux réalisés au niveau de l’Union. Si les États membres agissaient de façon unilatérale, au niveau national, sur les modifications ciblées proposées par le projet d’acte législatif, leur action pourrait conduire à une fragmentation du marché intérieur en ce qui concerne la libre prestation de services.
Déjà en 1996, en adoptant la directive initiale, puis, de nouveau en 2014, avec la directive d’exécution, le législateur de l’Union a décidé que l’objectif visant à faciliter la libre prestation de services, tout en garantissant des conditions de concurrence plus équitables entre les prestataires de services nationaux et transfrontières ainsi qu’une protection adéquate des travailleurs détachés, était mieux atteint au niveau de l’Union. Le législateur a établi un cadre réglementaire pour le détachement des travailleurs au niveau de l’Union, en tenant compte de la nature transfrontière inhérente au détachement des travailleurs et en prenant en considération le fait que si les États membres agissaient de façon unilatérale, au niveau national, leur action pourrait conduire à une fragmentation du marché intérieur en ce qui concerne la libre prestation de services.
En présentant sa proposition, la Commission facilite l’exercice des droits consacrés par l’article 57 du TFUE, selon lequel toute personne fournissant un service peut, pour l’exécution de sa prestation, exercer, à titre temporaire, son activité dans l’État membre où la prestation est fournie, dans les mêmes conditions que celles que cet État impose à ses propres ressortissants.
Une action individuelle par les États membres ne permettrait pas d’atteindre un autre objectif important des mesures: apporter une cohérence juridique dans l’ensemble du marché intérieur et clarifier le cadre juridique applicable aux travailleurs détachés, puisque la protection qui leur est accordée varierait en fonction de l’approche de l’État membre d’accueil. En effet, le fait que le cadre juridique au niveau de l’Union ne soit pas suffisamment harmonisé contribue à un manque de connaissances des droits tant par les travailleurs que par les entreprises et les agences d’intérim utilisatrices.
Pour les raisons exposées ci-dessus, la Commission considère que les objectifs de sa proposition peuvent être mieux réalisés au niveau de l’Union.
4.2.3. Absence de reconnaissance explicite des compétences des États membres
Pour le parlement danois, la préoccupation concernant la subsidiarité tient au fait que la proposition, contrairement à la directive 96/71/CE, ne ferait pas explicitement référence à la compétence des États membres en ce qui concerne la définition de la rémunération et des conditions de travail et d’emploi.
Toutefois, la proposition de la Commission respecte pleinement et sans équivoque la compétence des États de fixer la rémunération et les autres conditions de travail et d’emploi, conformément aux lois et pratiques nationales, et elle insiste explicitement sur ce point. Le considérant 12 confirme qu’il «relève de la compétence des États membres de fixer les règles relatives à la rémunération conformément à leur législation et à leurs pratiques». En outre, le texte proposé pour modifier l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, indique clairement que les conditions de travail et d’emploi applicables aux travailleurs détachés sont celles qui sont, dans l’État membre sur le territoire duquel le travail est exécuté, fixées par la loi ou par des conventions collectives d’application générale Dans la modification proposée, la rémunération comprend «tous les éléments de la rémunération rendus obligatoires par des dispositions législatives, réglementaires ou administratives nationales, par des conventions collectives ou des sentences arbitrales déclarées d’application générale et/ou, en l’absence d’un système permettant que les conventions collectives ou sentences arbitrales soient déclarées d’application générale, par d’autres conventions collectives ou sentences arbitrales au sens du paragraphe 8, deuxième alinéa, dans l’État membre sur le territoire duquel le travailleur est détaché».
Par conséquent, la proposition ne réglemente pas la rémunération, pas plus qu’elle ne définit la rémunération ou ses éléments constitutifs au niveau de l’Union. Elle prévoit simplement que des règles contraignantes en matière de rémunération, telles que définies par les États membres, s’appliquent de manière non discriminatoire aux prestataires de services locaux et transfrontières, ainsi qu’aux travailleurs locaux et détachés.
Le parlement danois fait également valoir que la proposition suscite des doutes quant à la compétence des États membres pour déterminer les conditions applicables aux travailleurs intérimaires. Le parlement danois ne conteste pas la possibilité pour l’Union d’agir dans ce domaine ou le fait que la possibilité actuellement donnée par la directive de 1996 est rendue obligatoire par la proposition. C’est l’approche consistant à faire expressément référence à l’article 5 de la directive 2008/104/CE qui est susceptible de porter atteinte à la compétence nationale, d’après le parlement danois.
Afin de faciliter la prestation transfrontière de services par des entreprises de travail intérimaire, tout en assurant des conditions équitables et une protection adéquate des travailleurs intérimaires, il convient de prévoir que les travailleurs intérimaires transfrontières bénéficient des mêmes droits que ceux qui sont prévus par la directive 2008/104/CE pour les travailleurs intérimaires nationaux. Ce principe laisse intacte la compétence de chaque État membre de déterminer ces droits.
4.2.4. Manque de justification
Plusieurs parlements nationaux font valoir que la Commission n’a pas satisfait à l’exigence de l’article 5 du protocole nº 2 du traité, qui prévoit que les projets d’actes législatifs sont motivés au regard des principes de subsidiarité et de proportionnalité, considérant que la justification figurant dans l’exposé des motifs de la proposition est trop succincte.
Ce point a été mentionné par l’assemblée nationale bulgare, la chambre des députés tchèque, le sénat tchèque, le parlement croate, l’assemblée nationale hongroise, la diète lettone, la diète polonaise, le sénat roumain et le conseil national slovaque.
Selon la jurisprudence de la Cour de justice, l’obligation de motiver les actes juridiques, consacrée par l’article 296, deuxième alinéa, du TFUE, impose que tous les actes concernés contiennent un exposé des raisons qui ont amené l’institution à les arrêter, de manière telle que la Cour puisse exercer son contrôle et que tant les États membres que les intéressés connaissent les conditions dans lesquelles les institutions de l’Union ont fait application du traité. Dans le même arrêt, la Cour a admis qu’une motivation implicite et assez limitée pouvait être suffisante pour justifier le respect du principe de subsidiarité. Dans un arrêt plus récent, la Cour a précisé que le respect de l’obligation de motivation en ce qui concerne le respect du principe de subsidiarité doit être apprécié au regard non seulement du libellé de l’acte attaqué, mais aussi de son contexte et des circonstances de l’espèce. La Cour examine, notamment, si la proposition de la Commission et son analyse d’impact comportent suffisamment d’éléments faisant apparaître d’une façon claire et non équivoque les avantages liés à une action entreprise au niveau de l’Union, plutôt qu’au niveau des États membres.
En l’espèce, en ce qui concerne la subsidiarité, l’exposé des motifs précisait: «Une modification d’une directive existante nécessite l’adoption d’une nouvelle directive». Bien que cette indication soit succincte, elle est complétée par les considérants de la proposition de directive et le rapport d’analyse d’impact qui l’accompagne.
Les considérants de la proposition de directive précisent les raisons pour lesquelles une action au niveau de l’Union est nécessaire afin d’améliorer le cadre réglementaire de l’Union concernant le détachement de travailleurs à certains égards.
Comme cela a déjà été indiqué, le considérant 12 précise qu’il «relève de la compétence des États membres de fixer les règles relatives à la rémunération conformément à leur législation et à leurs pratiques».
En outre, le rapport d’analyse d’impact qui accompagne la proposition donne une appréciation plus détaillée du respect des principes de subsidiarité et de proportionnalité de la proposition.
La Commission estime que ces indications sont suffisantes pour permettre tant au législateur de l’Union qu’aux parlements nationaux de déterminer si le projet d’acte législatif en question est conforme au principe de subsidiarité.
5.CONCLUSIONS
Compte tenu de ce qui précède, la Commission considère que sa proposition de révision ciblée de la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs, présentée le 8 mars 2016, est conforme au principe de subsidiarité consacré à l’article 5, paragraphe 3, du TUE et qu’il n’est pas nécessaire de la retirer ou de la modifier. Elle la maintient donc.
La Commission poursuivra son dialogue politique avec l’ensemble des parlements nationaux sur les arguments ne concernant pas le respect du principe de subsidiarité et elle est disposée à mener des discussions avec le Parlement européen et le Conseil sur ces préoccupations afin de faire adopter la proposition de directive.