15.1.2020 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 14/105 |
Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen et au Conseil — Un processus décisionnel plus efficace et démocratique pour la politique de l’UE en matière d’énergie et de climat»
[COM(2019) 177 final]
(2020/C 14/15)
Rapporteure: Baiba MILTOVIČA
Corapporteur: Dumitru FORNEA
Consultation |
Commission européenne, 3.6.2019 |
Base juridique |
Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
Compétence |
Section «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information» |
Adoption en section spécialisée |
11.9.2019 |
Adoption en session plénière |
26.9.2019 |
Session plénière no |
546 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
136/39/11 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. Conclusions
1.1.1. |
La communication vient compléter le quatrième rapport sur l’état de l’union de l’énergie. Elle porte principalement sur le cadre législatif nécessaire à un processus décisionnel plus démocratique pour la politique de l’UE en matière d’énergie et de climat, et propose que les questions de fiscalité liées à l’énergie ne soient plus soumises à un vote à l’unanimité mais passent à la majorité qualifiée (et à la procédure législative ordinaire prévue dans ce cas). |
1.1.2. |
Le CESE accueille favorablement la proposition d’utiliser les clauses passerelles afin d’instituer un vote à la majorité qualifiée au Conseil et un système de codécision avec le Parlement européen. Dans ce nouveau cadre, le CESE pourrait jouer un rôle important pour appuyer le trilogue, auquel il devrait être associé.
Le CESE soutient la communication, mais il estime qu’une gouvernance efficace de la stratégie en matière de climat et d’énergie et une plus grande cohérence de la législation de l’UE sur la fiscalité de l’énergie rendent nécessaire la prise en compte des préoccupations des entreprises, des travailleurs et des autres acteurs européens concernés, notamment des consommateurs. La participation et l’engagement de la société civile, le soutien des États membres, ainsi que l’accord et l’engagement des partenaires sociaux sont importants pour la réussite de ce processus. |
1.1.3. |
Le CESE demande que, lorsqu’elle recourt à l’instrument du vote à la majorité qualifiée, l’Union européenne reste tenue au respect du principe de subsidiarité et se concentre, dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, sur les secteurs dans lesquels les objectifs communs ne peuvent être atteints de manière plus efficace au niveau national, régional ou local. |
1.1.4. |
Le CESE est conscient du caractère potentiellement controversé de certains types de taxation de l’énergie actuellement à l’examen; il recommande donc vivement à la Commission de préciser qu’une approche similaire à celle exposée dans la communication COM(2019) 8 intitulée «Vers un processus décisionnel plus efficace et plus démocratique en matière de politique fiscale de l’UE» s’applique également dans ce cas de telle manière que soient déterminés les domaines de taxation les moins controversés afin de les examiner en premier lieu. |
1.1.5. |
Le CESE déplore que la communication COM(2019) 177 n’aborde pas en détail les types de décisions fiscales spécifiques susceptibles d’être débattues dans le cadre du vote à la majorité qualifiée et prie instamment la Commission d’y remédier. |
1.1.6. |
Il convient d’adopter une approche appropriée tenant compte des spécificités locales et de prendre des mesures pour assurer une transition juste afin d’éviter que des travailleurs, des consommateurs et des communautés ne soient laissés pour compte. En pareil cas, toute nouvelle mesure de taxation de l’énergie pourrait nécessiter un financement compensatoire de la part de l’UE pour contrebalancer les préjudices socio-économiques subis. |
1.2. Recommandations
1.2.1. |
La communication sur les procédures de taxation de l’énergie devrait:
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1.2.2. |
La Commission dispose d’une marge de manœuvre pour agir en utilisant ses compétences actuelles avant de demander aux États membres de renoncer à leur souveraineté (au moyen des clauses passerelles générales ou spécifiques), en particulier:
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1.2.3. |
Il convient de donner un nouvel élan à la politique industrielle de l’UE en tirant parti des investissements réalisés ces dernières années dans le domaine de l’énergie propre. Le soutien apporté aux entreprises de l’UE à cet égard contribuerait à stimuler davantage le produit intérieur brut, à créer des emplois et des revenus et, partant, à gérer plus efficacement les augmentations attendues des coûts de l’énergie. |
1.2.4. |
La Commission devrait améliorer les nouvelles mesures d’organisation du marché, notamment l’amplification du soutien aux coopératives citoyennes de production d’énergie ou la remunicipalisation éventuelle des réseaux de distribution locaux, et revoir la manière dont ses travaux sont organisés, par exemple en réexaminant la structure et le nombre d’agences de l’UE participant à l’élaboration de la politique énergétique.
À cet égard, le CESE pourrait apporter une contribution supplémentaire en vue de déterminer si les consommateurs et les communautés, ainsi que les entreprises et les travailleurs européens disposent des outils nécessaires pour s’approprier la transition énergétique afin de renforcer les objectifs de l’union de l’énergie. Cela pourrait se faire par l’intermédiaire d’un avis d’initiative du CESE sur la nouvelle organisation du marché de l’énergie. |
1.2.5. |
Le coût de l’énergie a une incidence directe et immédiate sur toutes les entreprises, les travailleurs, les consommateurs et sur la vie des citoyens, de sorte que les conséquences d’une initiative déséquilibrée en matière de fiscalité de l’énergie doivent être soigneusement prises en considération. Dans ce contexte, le CESE se félicite de l’annonce de la nouvelle présidente de la Commission, qui souhaite mettre en place une nouvelle taxe carbone aux frontières afin de garantir la compétitivité des entreprises européennes sur le marché mondial et d’éviter la délocalisation des émissions de CO2. Des mesures sont nécessaires afin de soutenir la transition vers une production d’énergie plus durable et d’aider de nombreux groupes sociaux à faire face à la transition énergétique. En cas de pertes d’emplois, il importe d’offrir de nouvelles perspectives, notamment des possibilités de requalification professionnelle et d’autres solutions négociées pour les travailleurs concernés. |
2. Introduction
2.1. |
La communication traite de la fiscalité de l’énergie et de la réforme du traité Euratom, ces deux questions étant étroitement liées à la souveraineté. Il s’agit d’une question controversée, et les demandes de transfert de souveraineté dans un domaine aussi sensible que la fiscalité, et en ce moment précis, nécessitent une approche empreinte de sagesse. Comme l’a souligné la Commission dans la sous-partie de son document intitulée «La réforme de la fiscalité de l’énergie devrait tenir compte des considérations de justice sociale» (point 2.3), toute taxation des énergies les plus «polluantes» pourrait directement porter préjudice aux couches les plus vulnérables de notre société. Cette mesure pourrait ainsi être perçue par de nombreux citoyens européens comme une charge supplémentaire, raison pour laquelle le CESE se félicite que la Commission reconnaisse le caractère sensible de cette question. Le CESE attire l’attention sur le nombre important d’avis antérieurs qui ont présenté à la Commission des propositions pour traiter ce problème.
La nécessité d’une gouvernance plus efficace de la stratégie en matière de climat et d’énergie et d’une plus grande cohérence de la législation de l’UE doit donc impérativement s’accompagner d’un débat sensiblement plus intense que jusqu’à présent, à tous les niveaux de la société, sur la manière dont les décisions relatives à la fiscalité de l’énergie sont prises, compte tenu des préoccupations des entreprises, des travailleurs et des autres acteurs européens, notamment les consommateurs. L’outil adéquat pour ce faire est un dialogue efficace sur l’énergie avec la société civile organisée aux niveaux européen, national, régional et local. |
2.2. |
Enfin, il y a lieu de se rappeler que, si ces vingt dernières années, la politique énergétique de l’UE a été étroitement et presque exclusivement liée à sa politique environnementale, elle entrera d’ici 2020 dans une nouvelle ère avec des objectifs plus généraux qui doivent être envisagés dans la perspective des objectifs de développement durable. L’énergie est également au cœur de la politique industrielle et les investissements de l’UE engagés ces dernières années dans l’économie de l’énergie propre peuvent désormais produire des résultats en soutenant les entreprises européennes dans plusieurs secteurs innovants à travers le monde. |
3. La communication de la Commission
3.1. |
La Commission a élaboré la communication à l’examen en vue de demander que les questions de fiscalité liées à l’énergie passent du vote à l’unanimité au vote à la majorité qualifiée (avec la procédure législative habituelle qui accompagne ce type de vote). |
3.2. |
La communication vise également à renforcer la responsabilité démocratique dans le cadre du traité Euratom, qui ne place pas le Parlement européen sur un pied d’égalité, contrairement au traité de Lisbonne. |
3.3. |
La Commission décrit le cadre qui prévaut actuellement: outre le vote habituel à la majorité qualifiée [article 194, paragraphes 1 et 2, premier alinéa, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE)] et le droit explicite des États membres de déterminer certaines politiques énergétiques (article 194, paragraphe 2, deuxième alinéa, du TFUE), dans le domaine de l’énergie, c’est l’unanimité qui est de mise au Conseil pour adopter des dispositions de nature essentiellement fiscale (article 194, paragraphe 3, du TFUE), à l’instar de ce qui est requis pour les mesures fiscales environnementales (article 192, paragraphe 2, du TFUE). |
3.4. |
La Commission estime que passage à une prise de décision à la majorité qualifiée est essentiel pour achever la transition vers une énergie propre et la réalisation des objectifs en matière de climat et d’énergie à l’horizon 2030, ainsi qu’au regard de l’influence pertinente et croissante des taxes et des prélèvements sur les prix de l’énergie. À cet égard, la Commission fait valoir que la règle de l’unanimité n’a pas permis jusqu’à présent de procéder à la révision de la directive-cadre sur la taxation de l’énergie de 2003 (1), qui repose en grande partie sur des postulats obsolètes et n’est pas guidée par des objectifs en matière d’énergie propre:
En outre, la Commission est d’avis que les exonérations/réductions fiscales sectorielles (dans les secteurs de l’aviation, du transport maritime, du transport routier, de l’agriculture et de la pêche et pour les industries à haute intensité énergétique) affaiblissent les incitations à une plus grande efficacité énergétique. |
3.5. |
La Commission estime que la communication ouvre la voie à la révision de la directive de 2003, qui vise à:
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3.6. |
Afin de parvenir à l’objectif qu’est le vote à la majorité qualifiée, la communication présente deux options, chacune permettant d’éviter de modifier le TFUE et n’ayant pas d’incidence sur partage actuel des compétences entre l’Union et les États membres: précisément, il s’agit d’utiliser soit la clause passerelle spécifique prévue dans le titre consacré à l’environnement (article 192, paragraphe 2, du TFUE), ce qui permettrait d’atteindre l’objectif recherché au niveau de la procédure pour les mesures de fiscalité de l’énergie qui sont essentiellement de nature environnementale, soit la clause passerelle générale prévue à l’article 48, paragraphe 7, du traité sur l’Union européenne (TUE), pour les mesures fiscales conçues principalement pour atteindre des objectifs énergétiques. Dans les deux cas, il appartiendrait au Conseil de décider du passage de l’unanimité à la majorité qualifiée. |
3.7. |
Enfin, la communication entend favoriser le développement de la responsabilité démocratique dans le cadre du traité Euratom, qui couvre des questions sensibles d’intérêt général, notamment en envisageant un système auquel participeraient à la fois le Parlement européen (qui n’a actuellement qu’un simple rôle consultatif, mais pas dans le cadre de la conclusion de traités internationaux) et les parlements nationaux. |
3.8. |
La substance du traité Euratom ne serait pas modifiée, si ce n’est pour ce qui est d’étendre les droits d’information de la société civile, d’assurer une consultation transfrontière entre les États membres lorsqu’il existe un risque d’incidence transfrontière, d’associer plus étroitement le groupe des régulateurs européens dans le domaine de la sûreté nucléaire (ENSREG) et de renforcer la capacité de réaction aux accidents nucléaires. Le traité devrait donc faire l’objet d’un réexamen dans le cadre de la procédure ordinaire de révision prévue à l’article 48 du TUE. |
4. Observations générales
4.1. |
Le CESE accueille favorablement la communication de la Commission européenne à l’examen, qui propose d’introduire des modalités de vote à la majorité qualifiée dans le domaine de la taxation de l’énergie afin de relever les défis du changement climatique. Il approuve également le renforcement du rôle du Parlement européen et des parlements nationaux (qui ne sont pas associés actuellement) dans le processus décisionnel au sein d’Euratom, ainsi que la proposition de la Commission visant à accroître la participation de la société civile lors de l’élaboration des politiques relatives à l’énergie nucléaire, même si la communication elle-même adopte une approche à long terme s’agissant de ces développements. Le CESE demande la mise en place d’un lien plus étroit entre les futurs rapports sur l’état de l’union de l’énergie et les stratégies à moyen et à long termes, proposées respectivement pour 2030 et pour 2050. |
4.2. |
Tout en reconnaissant que des mesures immédiates doivent être prises (vu que plus de 80 % des émissions de CO2 sont dues à la production et à l’utilisation d’énergie), le CESE invite l’UE, lorsqu’elle recourt à l’instrument du vote à la majorité qualifiée, à continuer à respecter le principe de subsidiarité et à se concentrer, dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, sur les secteurs dans lesquels les objectifs communs ne peuvent être atteints de manière plus efficace au niveau national, régional ou local. Il en est de même pour le principe de proportionnalité, selon lequel le contenu et la forme de l’action de l’Union ne peuvent aller au-delà des objectifs définis dans les traités (2). |
4.3. |
Le CESE relève avec préoccupation que la communication COM(2019) 177 ne fait aucune mention de l’approche graduelle évoquée dans la communication COM (2019) 8 intitulée «Vers un processus décisionnel plus efficace et plus démocratique en matière de politique fiscale dans l’Union», qui plaide en faveur d’une transition progressive, en quatre étapes, vers le vote à la majorité qualifiée dans le cadre de la procédure législative ordinaire dans certains domaines relevant de la politique fiscale commune de l’UE (3). Le CESE est conscient du caractère potentiellement controversé de certains types de taxation de l’énergie actuellement à l’examen; il recommande dès lors vivement à la Commission de clarifier qu’une approche similaire s’applique dans ce cas, de manière à définir les domaines de taxation les moins controversés à examiner en premier lieu. |
4.4. |
Le CESE déplore que la communication COM(2019) 177 n’aborde pas en détail les types de décisions fiscales spécifiques susceptibles d’être débattues dans le cadre du vote à la majorité qualifiée et prie instamment la Commission d’y remédier. Le CESE serait préoccupé par l’adoption, au niveau de l’UE, de décisions relatives à la taxation de l’énergie qui entraînent des effets distributifs négatifs, tels que l’aggravation de la précarité énergétique, par exemple en supprimant les aides au paiement des factures énergétiques pour les consommateurs les moins aisés. Certaines questions sensibles concernent différemment les États membres en fonction de leur dépendance à l’égard des combustibles fossiles et de la disponibilité de solutions de remplacement. Il convient d’adopter une approche appropriée tenant compte des spécificités locales et de prendre des mesures pour assurer une transition juste afin d’éviter que des travailleurs, des consommateurs et des communautés ne soient laissés pour compte. En pareil cas, toute nouvelle mesure de taxation de l’énergie pourrait nécessiter un financement compensatoire de la part de l’UE pour contrebalancer les préjudices socio-économiques subis. |
4.5. |
Les prix de l’énergie, qui augmentent plus rapidement que les budgets des ménages, les inégalités de revenus en Europe et les coûts induits par la transition énergétique (décentralisation et numérisation des marchés de l’électricité et du gaz) déterminent le degré de précarité énergétique dans une société (4). L’indice européen de précarité énergétique (EEPI) évalue et classe les progrès accomplis par les États membres dans l’atténuation de la précarité énergétique des ménages et dans le domaine des transports (5). La communication, en s’appuyant sur les conclusions de l’Observatoire européen de la précarité énergétique, devrait faire le lien avec un plan d’action européen visant à éradiquer la pauvreté énergétique en ciblant ses causes profondes (6). Comme indiqué dans les avis précédents du CESE (7), «l’efficacité et la non-consommation énergétique ne constituent pas en soi une source d’énergie». Elles ne peuvent donc à elles seules résoudre les problèmes liés au changement climatique, à la sécurité de l’approvisionnement ou à la pauvreté énergétique. |
4.6. |
Les consommateurs ne reçoivent pas la part qui leur revient des efforts déployés par l’UE en matière d’énergie, vu le découplage des marchés de gros et de détail (8): en raison de plusieurs facteurs (notamment la dissociation tardive de la distribution, la charge des subventions et le taux d’échec élevé de nouveaux distributeurs), la longue baisse des prix des marchés de gros survenue après la libéralisation ne s’est pas répercutée sur les marchés de détail.
Les redevances d’accès aux réseaux pour les utilisateurs d’énergie de l’UE sont déjà très élevées (9). Étant donné qu’environ 40 % du prix final de l’électricité payé par les consommateurs européens est constitué de taxes et de redevances, il incombe à la Commission de procéder à une analyse d’impact des effets potentiels des prix de l’énergie, y compris en ce qui concerne les effets de l’harmonisation fiscale sur les ménages les plus pauvres. |
4.7. |
Sans abandonner le lien avec la politique environnementale, une coordination renforcée avec une politique industrielle plus large et le développement économique qui en résulte permettrait aussi:
|
4.8. |
En vertu soit de l’article 192, paragraphe 2, du TFUE, relatif à la clause passerelle spéciale, soit de l’article 48, paragraphe 7, du traité sur l’Union européenne, relatif à la clause passerelle générale, la mise en place d’une véritable union de l’énergie doit aller de pair avec un transfert de souveraineté. |
4.9. |
Malgré les progrès accomplis au fil des ans dans le domaine de l’énergie, en partie grâce aux politiques de l’UE (telles que l’augmentation de la capacité des énergies renouvelables) et en partie en raison de facteurs internationaux (tels que l’assouplissement des conditions d’approvisionnement en GNL, l’indexation du charbon et la baisse des prix), certains problèmes (y compris les plus importants énumérés ci-dessous au paragraphe 4.11) continuent d’entraver la poursuite du développement d’un véritable marché unique de l’énergie et de priver les consommateurs d’une part équitable des bénéfices. |
4.10. |
Parmi les obstacles majeurs figurent le développement limité de la capacité d’interconnexion transfrontière, en particulier dans le secteur de l’électricité, en raison de décisions nationales et de retards dans l’action de l’Union pour atteindre l’objectif d’interconnexion électrique de 10 % d’ici 2010 et de 15 % d’ici 2030 (objectifs qui sont déjà très limités, insuffisants et non contraignants) (11). |
4.11. |
Le consensus social devrait figurer parmi les principales priorités, dans la mesure où les données les plus récentes montrent que 4 à 8 % du budget de la consommation des ménages de l’UE du Nord et de l’Ouest sont consacrés à l’énergie, contre 10 à 15 % pour les familles d’Europe centrale et orientale (12). La précarité énergétique et son lourd tribut figurent au rang des nouvelles priorités sociales pour lesquelles il y a lieu de se battre à tous les niveaux, nationaux et européen. Elle perdure cependant. |
5. Observations particulières
5.1. |
L’énergie est un système rigide dans lequel il faut une décennie pour mener à son terme la mise en œuvre d’infrastructures et de changements réglementaires, alors que, dans le même temps, la concurrence continue de faire rage (ce qu’illustrent clairement le cas des panneaux solaires chinois et la montée en puissance de l’industrie des véhicules électriques). Il est nécessaire de mettre en place un nouveau modèle plus large de politique en matière d’énergie comprenant, par exemple, la reconnaissance d’une valeur ajoutée pour les entreprises de l’UE grâce à la recherche menée sur la continuité énergétique liée aux énergies renouvelables, ou le soutien apporté aux entreprises européennes dans des secteurs tels que les voitures électriques, les batteries de dernière génération, l’hydrogène ou les éoliennes, secteurs qui bénéficient d’un avantage concurrentiel. |
5.2. |
L’élaboration et la mise en œuvre complémentaires de la politique énergétique par la Commission sous la forme d’une feuille de route semblent nécessaires dans la mesure où la politique énergétique va au-delà des seules taxes, et qu’elle comprend en tout état de cause des taxes sur les activités énergétiques ainsi que sur les produits énergétiques. L’expérience antérieure dans d’autres domaines montre qu’un transfert de souveraineté sans véritable union peut entraîner des désaccords profonds (comme ce fut le cas pour l’Union économique et monétaire). |
5.3. |
Le coût de l’énergie a une incidence directe et immédiate sur toutes les entreprises et sur la vie des citoyens, de sorte que les conséquences d’une initiative déséquilibrée en matière de fiscalité de l’énergie doivent être soigneusement prises en considération. Dans ce contexte, et sur la base de l’évaluation nécessaire des incidences sociales et économiques, le CESE se félicite de l’annonce de la nouvelle présidente de la Commission, qui souhaite mettre en place une nouvelle taxe carbone aux frontières afin de garantir la compétitivité des entreprises européennes sur le marché mondial et d’éviter la délocalisation des émissions de CO2. Les travailleurs concernés par les pertes d’emplois doivent se voir offrir de nouvelles perspectives, et notamment des possibilités de requalification professionnelle et d’autres solutions négociées. |
5.4. |
Tout en envisageant d’éventuelles distorsions du marché intérieur dues à des niveaux différents de taxation de l’énergie produite à partir de combustibles fossiles, la Commission devrait tenir compte du fait que les accords de libre-échange peuvent avoir une incidence similaire en raison des effets de dumping résultant des différents cadres juridiques des pays tiers dans le domaine de l’énergie et de la concurrence. Les secteurs d’activité de l’UE visés par les mesures fiscales proposées, tels que les transports aériens, maritimes et routiers, l’agriculture, la pêche et les industries à haute intensité énergétique, sont susceptibles d’être touchés. Par conséquent, l’UE doit systématiquement exiger, dans le cadre de négociations commerciales bilatérales ou multilatérales, l’équivalence des conditions imposées par sa législation sociale et environnementale aux produits importés (13). |
Bruxelles, le 26 septembre 2019.
Le président
du Comité économique et social européen
Luca JAHIER
(1) JO L 283 du 31.10.2003, p. 51.
(2) SOC/626 – «Clause passerelle» (voir page 87 du présent Journal officiel).
(3) JO C 353 du 18.10.2019, p. 90.
(4) JO C 198 du 10.7.2013, p. 1.
(5) Indice européen de la précarité énergétique (EEPI): https://www.openexp.eu/sites/default/files/publication/files/european_energy_poverty_index-eepi_en.pdf
(6) JO C 341 du 21.11.2013, p. 21.
(7) JO C 345 du 13.10.2017, p. 120.
(8) JO C 383 du 17.11.2015, p. 84.
(9) COM(2019) 1 final.
(10) Dans de précédentes résolutions, le Parlement européen a averti que la stratégie de décarbonisation pourrait également provoquer «une augmentation spectaculaire du phénomène de la précarité énergétique» (14 mars 2013, résolution sur la «Feuille de route pour l’énergie à l’horizon 2050») et a donc invité la Commission à «rapprocher la politique sociale de la politique énergétique» (14 avril 2016, résolution sur le thème «Remplir l’objectif de lutte contre la pauvreté dans le contexte de l’augmentation des coûts des ménages»).
(11) Selon le groupe d’experts de la Commission, ce niveau diminue progressivement et certains États membres n’atteindront pas l’objectif de 10 % en 2020. «Towards a sustainable and integrated Europe» (Vers une Europe durable et intégrée), rapport du groupe d’experts de la Commission sur les objectifs d’interconnexion électrique, novembre 2017, p. 25. Voir aussi JO C 383 du 17.11.2015, p. 84.
(12) COM(2019) 1 final.
ANNEXE
Les amendements suivants, qui ont recueilli au moins un quart des suffrages exprimés, ont été rejetés au cours des débats:
Paragraphe 4.5
Supprimer:
En vertu soit de l’article 192, paragraphe 2, du TFUE, relatif à la clause passerelle spéciale, soit de l’article 48, paragraphe 7, du traité sur l’Union européenne, relatif à la clause passerelle générale, la mise en place d’une véritable union de l’énergie doit aller de pair avec un transfert de souveraineté.
Voix pour |
: |
73 |
Voix contre |
: |
91 |
Abstentions |
: |
11 |
Paragraphe 1.1.2
Modifier comme suit:
Le CESE accueille favorablement un débat sur l’utilisation des la proposition d’utiliser les clauses passerelles afin d’instituer un vote à la majorité qualifiée au Conseil et un système de codécision avec le Parlement européen. Dans ce nouveau cadre, le CESE pourrait jouer un rôle important pour appuyer le trilogue, auquel il devrait être associé.
Le CESE soutient plusieurs des idées exprimées dans la communication, mais il estime qu’une gouvernance efficace de la stratégie en matière de climat et d’énergie et une plus grande cohérence de la législation de l’UE sur la fiscalité de l’énergie rendent nécessaire la prise en compte des préoccupations des entreprises, des travailleurs et des autres acteurs européens concernés, notamment des consommateurs. La participation et l’engagement de la société civile, le soutien des États membres, ainsi que l’accord et l’engagement des partenaires sociaux sont importants pour la réussite de ce processus.
Voix pour |
: |
65 |
Voix contre |
: |
105 |
Abstentions |
: |
9 |