24.3.2020 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 97/18 |
Avis du Comité économique et social européen sur «L’aide extérieure, l’investissement et le commerce comme instruments pour réduire les causes de la migration économique, avec une attention particulière portée à l’Afrique»
(avis d’initiative)
(2020/C 97/03)
Rapporteur:
Arno METZLERCorapporteur:
Thomas WAGNSONNER
Décision de l’assemblée plénière |
23-24.1.2019 |
Base juridique |
Article 32, paragraphe 2, du règlement intérieur |
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Avis d’initiative |
Compétence |
Section «Relations extérieures» |
Adoption en section |
28.11.2019 |
Adoption en session plénière |
12.12.2019 |
Session plénière no |
548 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
152/0/9 |
1. Conclusions et recommandations générales
1.1. |
La politique de développement de l’Union européenne s’efforce d’encourager le développement durable des pays en développement, avant tout dans le but d’éradiquer la pauvreté, de stimuler la croissance durable et la création d’emplois et de promouvoir la paix, la sécurité et la stabilité, la bonne gouvernance et les droits humains. Elle constitue une pierre angulaire des relations de l’Union européenne avec le reste du monde et contribue aux objectifs de l’action extérieure de l’Union, parallèlement à la politique étrangère, commerciale et de sécurité (ainsi qu’aux aspects internationaux d’autres politiques comme l’environnement, l’agriculture et la pêche). Dans le cadre de la mise en œuvre de ces objectifs, les politiques devraient dans tous les cas de figure garantir une vie digne, faire respecter l’état de droit et créer des conditions de travail de qualité. À cet égard, le CESE souligne de manière explicite la nécessité de parvenir à l’égalité entre les femmes et les hommes, et de donner aux filles et aux femmes les moyens de développer leur autonomie. |
1.2. |
Dans un monde en constante mutation, une chose est sûre: l’Afrique et l’Europe resteront des voisins proches. Les 54 pays d’Afrique et les 28 États membres de l’Union européenne partagent un voisinage, une histoire et un avenir communs. Le CESE souligne que les erreurs passées doivent absolument être évitées à l’avenir, qui sera commun aux deux continents. |
1.3. |
Il y a soixante-dix ans, l’Europe était un continent d’émigration nette dont les citoyens fuyaient des fléaux tels que la guerre, la faim, la pauvreté, le chômage, la dégradation de l’environnement, l’oppression et la discrimination. La réussite de l’Union européenne, qui a créé des opportunités pour ses habitants, l’a transformé en continent d’immigration nette. Nous devrions collaborer avec les pays africains pour leur proposer de réaliser des progrès similaires. |
1.4. |
Il est difficile de définir une stratégie économique européenne cohérente pour l’Afrique dans son ensemble. Le CESE souhaiterait souligner l’engagement qui le pousse à participer à cette approche transparente et cohérente, en sa qualité d’organe représentant la société civile organisée et en tant que partenaire actif de tous les accords européens de ce type. Le Service européen pour l’action extérieure (SEAE) a annoncé que l’Union européenne était déjà un solide partenaire politique de l’Afrique et que l’étape suivante serait de devenir des partenaires économiques véritables et d’approfondir nos relations en matière de commerce et d’investissement. Le CESE a joué un rôle majeur pour définir les relations de la société civile dans le cadre de l’accord de Cotonou. Il importe à présent qu’un engagement continu, voire renforcé, du CESE et de ses structures devienne un élément important de l’accord sur l’après-Cotonou. De cette manière, la société civile de l’Union européenne sera habilitée à aider la société civile des pays africains à devenir un partenaire fiable et digne de confiance pour les investisseurs. Cela ne sera possible qu’en favorisant un partenariat organisé sur un pied d’égalité, qui tienne réellement compte des asymétries actuelles de la situation économique. |
1.5. |
Si l’on veut réaliser des objectifs communs, il est essentiel de renforcer la collaboration économique. Ces dernières années ont vu apparaître des approches visant à élaborer un nouveau paradigme des relations entre l’Union européenne et l’Afrique (par exemple dans le domaine de l’agriculture), de plus en plus axées sur la coopération politique et sur la promotion de l’investissement durable et d’un environnement économique stable, responsable et inclusif. Il convient de réussir à développer davantage ce paradigme dans le secteur agricole ainsi que dans d’autres secteurs, et d’y associer davantage d’intervenants locaux présents sur le terrain. |
1.6. |
Le CESE recommande de mettre en place au niveau de l’Union une politique de guichet unique et un mécanisme de consultation approprié, destinés à fournir des informations et des contacts à ceux qui souhaitent investir en Afrique et collaborer avec ce continent. Cela permettrait également d’assurer un suivi, sous la forme d’un instrument politique. La mise en place d’un guichet unique pour toutes les initiatives liées à l’Afrique éviterait le chevauchement de projets et garantirait la transparence et l’efficacité de l’aide de l’Union européenne. |
1.7. |
Le CESE recommande également la création d’une plateforme appropriée pour améliorer le partage d’informations entre les PME européennes et africaines au sujet des bonnes pratiques en matière d’investissement et de collaboration. |
1.8. |
Il est nécessaire de promouvoir une architecture institutionnelle claire et transparente au service de la coopération au développement de l’Union en faveur de l’Afrique, reposant sur le nouveau consensus pour le développement (1) qui permet d’analyser et de mettre en œuvre la perspective du développement de manière plus réaliste. Le CESE espère que l’accord sur l’après-Cotonou pourra proposer une plateforme pragmatique en vue d’une réforme de la politique de coopération au développement, qui tienne compte de la complexité du processus de développement. Cette plateforme devrait reposer sur une collaboration entre tous les États membres et les institutions européennes en vue d’enregistrer tous les programmes, projets et initiatives à l’échelon national et européen. Cela permettrait d’éviter les chevauchements et les doubles emplois concernant les activités dans certains domaines, alors que les aides manquent dans d’autres domaines. |
1.9. |
Dans le même temps, le CESE est favorable à un processus visant à renforcer autant que possible l’influence des autres politiques européennes sur le développement social et économique (2). En particulier, celles qui concernent le commerce, l’investissement, la fiscalité (3), l’aide extérieure (4), la lutte contre la criminalité organisée et la lutte contre le changement climatique doivent être cohérentes avec les objectifs de la politique de coopération au développement. |
1.10. |
Le CESE est fermement résolu à rendre le financement européen du développement plus efficace et plus efficient. Compte tenu des fonds d’investissement de l’Union européenne qui sont déjà présents en Afrique, le CESE recommande la création d’un fonds d’investissement semblable au FSE afin de nouer des partenariats en qualité de co-investisseur avec des investissements privés et publics. Ce fonds devrait reposer sur les critères et principes du programme à l’horizon 2030 et sur la reconnaissance des normes fondamentales reconnues au niveau international (5). Les projets bénéficiant d’un soutien devraient faire l’objet d’un suivi et être répertoriés dans des registres ou des plateformes centralisés. Le CESE invite à pratiquer une collaboration encore plus étroite avec les organisations de la société civile (en particulier le CESE) au sujet de leurs valeurs éthiques dans le cadre de tous les projets. |
1.11. |
Le CESE plaide en faveur de la mise en œuvre d’une approche qui passerait «de l’aide à l’investissement»: au lieu de distribuer des aides, il faudrait travailler, en vue de les soutenir, avec des acteurs économiques autonomes et indépendants et sur des projets économiques intercontinentaux, dans un esprit de coopération et dans des conditions de concurrence équitables. |
1.12. |
Les structures financières présentes en Afrique devraient être renforcées de manière à soutenir le financement à long terme, en ce qui concerne tant les investissements privés que les investissements publics. Il s’agit d’une condition préalable importante à un développement durable à long terme. Les expériences européennes menées avec des banques coopératives et des banques nationales de développement, en particulier au service des municipalités, peuvent éventuellement servir de modèle. En particulier, le microcrédit et l’investissement pourraient constituer un élément clé de l’avenir de l’économie africaine. Le développement durable passera obligatoirement par des aides aux chaînes de valeur et aux marchés de consommation régionaux destinés à une classe moyenne (6). |
1.13. |
Le CESE estime que la coopération au développement de l’Union européenne devrait se concentrer sur la recherche d’un partenariat axé sur les personnes, garantir la participation de la société civile, des syndicats et du secteur privé et apporter des avantages directs aux citoyens africains et européens. |
1.14. |
Le CESE souligne que la société civile organisée pourrait contribuer à créer un environnement fiable en structurant la société civile africaine au moyen d’instruments permettant l’accès au droit, le maintien de la sécurité et la lutte contre la corruption en partenariat avec les structures africaines. Cela devrait être la valeur ajoutée apportée par la société civile européenne au développement africain, fondée sur les mêmes valeurs communes que sont la démocratie, l’état de droit ainsi que les droits politiques et civiques. |
1.15. |
Les ALE et les APE conclus par l’Union européenne avec les pays africains ne prévoient aucun mécanisme de dialogue avec la société civile organisée. L’Union européenne devrait s’efforcer, dans le cadre de la révision de ces accords, de mettre en place des mécanismes de dialogue de ce type pour les acteurs non étatiques. |
1.16. |
S’appuyant sur l’approche et sur l’expérience émergente des plateformes d’entreprises durables pour l’Afrique (SB4 A), principalement axées sur l’engagement du secteur privé, l’Union européenne devrait cibler une plus grande partie de ses aides et encourager une initiative similaire concernant la société civile au sens large, soit dans le cadre même du cadre SB4 A, soit à ses côtés ou encore en parallèle. Ces plateformes pourraient devenir des plateformes multipartites de commerce et d’investissement durables au service de l’Afrique. |
1.17. |
Le CESE estime que l’Union européenne devrait consacrer une partie des ressources de l’initiative «Aide pour le commerce» à soutenir la participation et le renforcement des capacités des organisations de la société civile et des syndicats, et leur permettre ainsi de consentir des efforts en ce qui concerne le commerce et les investissement durables. |
1.18. |
Grâce à une approche associant de multiples parties prenantes ainsi que les organisations de la société civile, le CESE promeut des initiatives et des ajustements aux régimes de libre-échange des ALE/APE/SPG qui aboutissent à une mise en œuvre efficace et durable de la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA) ainsi qu’à l’intégration du marché africain. Ces démarches devraient en particulier renforcer le commerce intra-africain ainsi que l’intégration régionale et continentale et développer de grands secteurs de l’économie dans l’ensemble de l’Afrique. |
1.19. |
En Europe, l’investissement dans les infrastructures publiques, en particulier dans l’éducation, a été au cœur de l’amélioration des conditions de vie. L’un des objectifs fondamentaux de notre politique de développement en Afrique doit être d’y améliorer le niveau d’éducation, en particulier parmi les groupes vulnérables sur le plan économique. |
1.20. |
Le CESE se félicite de l’augmentation prévue du financement de l’Union européenne en faveur de l’Afrique, qui devrait passer à 40 milliards d’EUR (46,5 milliards d’USD) au cours de la prochaine période budgétaire, et il espère qu’elle incitera les investisseurs privés à mobiliser eux aussi des sommes importantes. |
2. Contexte
2.1. |
L’Europe, plus grand fournisseur d’aide publique au développement de la planète, est un leader mondial en matière de développement. Étant donné qu’ils fournissent plus de 50 % de la totalité de l’aide au développement dans le monde, l’Union européenne et ses États membres sont collectivement le premier bailleur de fonds au monde. |
2.2. |
Selon la Banque mondiale (7), les envois de fonds des expatriés vers les pays en développement s’élevaient en 2016 à environ 426 milliards d’USD, soit environ trois fois le montant de l’aide publique au développement dans le monde entier. Offrir des possibilités d’emploi légal aux migrants africains en Europe et garantir la sécurité des infrastructures de transfert de fonds contribuerait grandement au développement de l’Afrique. |
2.3. |
L’Afrique et l’Europe sont des voisins immédiats, liés par une histoire commune. Elles partagent des valeurs et des intérêts communs sur lesquels asseoir leur coopération à l’avenir. Aujourd’hui, elles s’attaquent ensemble à des défis qui sont les mêmes à l’échelle mondiale, tels que le changement climatique ainsi que la paix et la sécurité. L’Afrique sera en effet particulièrement vulnérable au changement climatique, même si elle contribue à hauteur de moins de 4 % aux émissions mondiales de gaz à effet de serre. 27 des 33 pays les plus menacés par le changement climatique se trouvent en Afrique. |
2.4. |
La coopération au niveau continental entre l’Afrique et l’Union européenne est guidée par un partenariat stratégique fondé sur des valeurs communes et des intérêts partagés. En 2007, l’Union européenne et l’Union africaine ont adopté la stratégie commune Afrique-UE en vue de renforcer les liens qui unissent les deux continents dans des domaines stratégiques de coopération, d’approfondir le dialogue politique et de préparer une feuille de route concrète en prévision des futurs travaux conjoints. |
2.5. |
L’Union européenne entretient la coopération la plus ancienne qui soit avec le groupe des ACP, inscrite depuis 1975 dans la convention de Lomé et mise à jour depuis 2000 avec l’accord de Cotonou, auquel 48 États d’Afrique subsaharienne sont parties. |
2.6. |
L’Union européenne négocie actuellement avec les États ACP le successeur de l’accord de Cotonou, qui couvre la période 2000-2020. Le contexte politique et économique a considérablement évolué au cours des deux dernières décennies; les relations commerciales entre l’Union européenne et les pays ACP sont désormais largement régies par des accords de partenariat économique bilatéraux et régionaux, et le cadre de l’Union africaine a pris la première place, ce qui soulève la question de la cohérence, de la complémentarité et des synergies entre les cadres des ACP et de l’UA. |
2.7. |
Le successeur de l’accord de Cotonou doit offrir la possibilité de moderniser les règles en matière d’investissements, de services, de commerce équitable, de droits de l’homme, de conditions de travail décentes et de migrations. Mais la coopération doit s’appuyer sur de nouvelles bases, reposant sur le programme de développement durable à l’horizon 2030, et les États africains devront décider s’ils veulent négocier ensemble, en tant que continent. |
2.8. |
Ces éléments poussent le CESE à insister sur le développement d’une stratégie socio-économique cohérente en matière de relations entre l’Union européenne et l’Afrique, et à montrer la place adéquate qui devrait revenir à la participation de la société civile et des partenaires sociaux dans les négociations de l’après-Cotonou. |
2.9. |
Le CESE a constaté l’absence totale de contrôle ou d’enregistrement centralisé de l’ensemble des initiatives, programmes et partenariats, tant au niveau de l’Union européenne qu’au niveau national. En outre, il n’existe aucune information complète au sujet du montant des fonds destinés à l’Afrique. |
3. Goulets d’étranglement
3.1. |
Il est essentiel de souligner l’hétérogénéité croissante du continent africain, et l’Union européenne devrait adapter ses politiques à ces réalités. Nous avons besoin d’une approche qui soit beaucoup plus pragmatique et réaliste pour développer les relations entre l’Union européenne et l’Afrique. |
3.2. |
La relation directe entre l’Union européenne et l’Union africaine (UA) a pris de l’ampleur depuis la publication de la stratégie commune Afrique-UE en 2007. L’Union européenne a également encouragé d’autres initiatives, comme le fonds fiduciaire d’urgence, la facilité d’investissement pour l’Afrique, le plan d’investissement extérieur ainsi qu’une série d’accords infrarégionaux. La multiplicité des modalités des relations entre l’Union européenne et l’Afrique engendre une architecture complexe et parfois incohérente, dans laquelle des éléments d’autres politiques viennent se mêler à la coopération au développement. À cette confusion s’ajoutent les divergences d’intérêts entre les États membres. |
3.3. |
Encourager les investissements du secteur privé passe par la paix, la sécurité et la stabilité, ainsi que par un climat d’investissement et un environnement favorables aux entreprises. Les enquêtes menées auprès des investisseurs (8) indiquent clairement qu’il reste beaucoup à faire dans ce domaine pour améliorer la compétitivité de l’Afrique face à la concurrence mondiale en vue d’attirer des capitaux d’investissement. L’état de droit, la lutte contre la corruption, l’indépendance du système judiciaire et la prévisibilité de la fiscalité, tout comme la paix et la stabilité, sont autant de facteurs essentiels qui influencent les décisions des investisseurs tant nationaux qu’étrangers. On estime que le coût de la création d’une entreprise est environ trois fois plus élevé dans les États fragiles, ce qui décourage considérablement l’investissement privé (9). |
3.4. |
Dans son avis sur «Le rôle clé du commerce et des investissements dans la réalisation et la mise en œuvre des objectifs de développement durable» (10), le CESE indiquait: «La mise en œuvre des ODD nécessitera la participation directe de la société civile, dans la mesure surtout où cette participation favorise le respect de l’état de droit et la maîtrise de la corruption». Cet avis mettait également l’accent sur la nécessité de construire des infrastructures en Afrique, ce que font actuellement les Chinois. Le commerce intra-africain est limité, surtout en ce qui concerne les produits agricoles; il représente entre 10 et 15 % de l’ensemble des échanges commerciaux africains, ce qui devrait s’améliorer avec la mise en œuvre de l’accord de l’OMC sur la facilitation des échanges signé en 2017. |
3.5. |
Selon les projections, des ressources d’environ 600 milliards d’USD par an sont nécessaires pour mettre en œuvre les ODD en Afrique (11). Même s’il bénéficie de l’engagement des investissements étrangers et de l’aide publique au développement, le développement durable de l’Afrique dépendra de la mobilisation et de la production de ressources nationales. Ce type de ressources reposent sur l’investissement et la création de valeur à long terme pour créer des emplois de qualité ainsi que des chaînes de valeur locales et régionales. Une meilleure éducation et la consommation privée font partie des principaux moteurs de croissance en Afrique, ce qui signifie que la création de marchés — et donc de consommateurs — en Afrique, pour ses propres produits, joue un rôle important dans la réussite du développement. Les infrastructures publiques sont absolument essentielles pour permettre également des investissements privés à long terme. |
3.6. |
Le CESE souligne l’importance du programme Erasmus+ qui permet à un plus grand nombre de jeunes Africains d’avoir accès à l’enseignement supérieur. |
3.7. |
Il convient de ne pas faire abstraction du lien existant entre développement économique et migrations. Des études (12) ont montré que le besoin de migrer diminue une fois atteint un certain revenu par habitant (en fonction des auteurs, les chiffres sont compris entre 6 000 et 10 000 USD par habitant et par an). Outre le fait que la plupart des migrations africaines se produisent à l’intérieur même de ce continent, les chiffres mettent en exergue la nécessité de pratiquer une politique de développement visant à permettre aux citoyens de vivre dignement, en obtenant un emploi et en ayant des perspectives dans leur propre pays. Il s’agit là d’un défi considérable car les projections démographiques prévoient que 2,5 milliards de personnes vivront en Afrique d’ici à 2050 (13). |
3.8. |
Les ODD indiquent qu’il est nécessaire de parvenir à l’égalité entre les femmes et les hommes et de donner aux filles et aux femmes les moyens de devenir autonomes; les défis auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui en matière de développement sont intimement liés aux questions d’égalité entre les femmes et les hommes, et cette dimension doit être évaluée lors de l’élaboration des politiques et prise en considération au moment de leur mise en œuvre. |
3.9. |
La corruption est un problème majeur, et pas uniquement en Afrique. Il est nécessaire de promouvoir une bonne gouvernance économique et financière, et il faut donc à cette fin: renforcer la gestion transparente des finances publiques, mettre en place un système crédible de lutte contre la corruption fondé sur l’indépendance du pouvoir judiciaire, et améliorer le climat des affaires ainsi que les conditions du progrès social. |
3.10. |
La société civile organisée pourrait exercer une importante fonction de contrôle à cet égard. Renforcer le rôle des ONG, des syndicats et des associations professionnelles et soutenir ce type d’initiatives dans les pays partenaires permettrait de promouvoir la bonne gouvernance, la justice et la démocratisation. |
3.11. |
L’Europe perd du terrain en Afrique au profit d’autres acteurs mondiaux, comme la Chine, qui investit des milliards sur ce continent. Les États membres de l’Union européenne craignent de se retrouver relégués au second rang. Dans l’hypothèse où l’engagement de l’Europe, comme celui de la Chine, ne seraient pas exclusivement axés sur les profits, mais s’attacheraient également au développement durable de l’Afrique et favoriseraient un niveau de vie digne, la nécessité de migrer pourrait s’en trouver réduite. |
3.12. |
Le CESE plaide en faveur de la mise en œuvre d’une approche qui passerait «de l’aide à l’investissement»: au lieu de distribuer des aides, il faudrait travailler, en vue de les soutenir, avec des acteurs économiques autonomes et indépendants et sur des projets économiques intercontinentaux, dans un esprit de coopération et dans des conditions de concurrence équitables. |
3.13. |
Les réticences de certaines structures conservatrices (par exemple les églises) à l’égard du contrôle de la croissance démographique réduit les possibilités de développer une stratégie en faveur de la croissance économique et sociale. |
4. Les investissements
4.1. |
Pendant de nombreuses années, la politique de l’Union européenne vis-à-vis de l’Afrique a été caractérisée par de bonnes intentions et des promesses non tenues. La crise des réfugiés a toutefois suscité un fort regain d’intérêt à l’égard d’une nouvelle stratégie de coopération avec ce continent. L’Union européenne prévoit d’investir davantage en Afrique et souhaite intensifier ses relations commerciales, car la prochaine étape est de devenir de véritables partenaires économiques. Un partenariat de ce type devrait être fondé sur un postulat d’égalité des chances, en tenant compte des asymétries évidentes qui existent entre l’Afrique et l’Europe. |
4.2. |
Les investissements en Afrique présentent un tableau inégal qui reflète les incertitudes au niveau mondial: les flux d’investissements directs étrangers vers l’Afrique fluctuent et n’affichent pas la forte tendance à la hausse dont elle aurait besoin. L’Afrique du Sud, le Nigeria, le Kenya, l’Égypte et le Maroc ont attiré à eux seuls 58 % du total des investissements directs étrangers en 2016, tandis que les pays les moins avancés et les plus fragiles sont confrontés à des difficultés systémiques pour attirer des investissements privés. |
4.3. |
L’Union européenne est le principal investisseur en Afrique, ses États membres détenant environ 40 % du stock d’investissements directs étrangers, pour une valeur de 291 milliards d’EUR en 2016 (14). Les progrès économiques considérables réalisés par l’Afrique au cours des vingt dernières années et le potentiel d’avenir intrinsèque à ce continent permettent de penser qu’il est tout à fait possible d’en faire davantage. Les projections démographiques relatives à l’Afrique démontrent qu’il y a également une nécessité de créer des millions de nouveaux emplois de qualité, en particulier pour les jeunes qui entrent sur le marché du travail. Les indicateurs macroéconomiques ne se traduisent pas d’eux-mêmes en meilleures conditions de vie pour tous. Les politiques doivent veiller à ce que le développement économique améliore le niveau de vie de l’ensemble de la population. |
4.4. |
Si l’on veut parvenir à un développement durable et créer des emplois de qualité pour la population africaine, qui devrait doubler d’ici à 2050, il convient d’augmenter en particulier les investissements publics et privés. |
4.5. |
L’investissement est devenu un enjeu essentiel du futur développement de l’Afrique, et sera l’un des éléments des négociations concernant le successeur de l’accord de Cotonou. Compte tenu de la multitude des instruments existants, les négociations relatives à un régime d’investissement qui associent une protection appropriée des investisseurs à égalité avec des engagements en matière de durabilité, en particulier dans les domaines des droits de l’homme, de la protection de l’environnement et de la création de conditions de vie décentes, promettent une valeur ajoutée particulièrement importante. |
4.6. |
Au cours de la prochaine période budgétaire, l’Union européenne prévoit d’augmenter le financement destiné à l’Afrique à hauteur de 40 milliards d’EUR (46,5 milliards d’USD), dans l’espoir que cette somme soit ensuite multipliée par des investisseurs privés. À titre d’incitation, l’Union européenne souhaite fournir des garanties contre les risques, afin d’encourager le secteur privé à s’engager à investir dans des pays africains. Les investissements qui remplissent et visent clairement les objectifs de durabilité définis dans le programme de développement durable à l’horizon 2030 devraient être soutenus en priorité. Parallèlement à ce système de garantie des risques, un système adéquat de contrôle et de surveillance est nécessaire pour garantir la réalisation des ODD. Le CESE recommande vivement que la société civile organisée contribue à lutter contre l’utilisation abusive de fonds européens. |
4.7. |
Les investisseurs potentiels, principalement ceux issus de PME, signalent un manque de confiance dans l’environnement des investissements en ce qui concerne la stabilité politique, la justice, les droits de propriété intellectuelle, l’accès aux marchés et la situation au regard de la mise en œuvre des accords commerciaux. |
4.8. |
Le CESE recommande la création d’un fonds d’investissement similaire au FSE permettant de s’associer, en qualité de co-investisseur, à des investissements privés et publics. Ce fonds devrait reposer sur les critères et principes du programme à l’horizon 2030 et sur la reconnaissance des normes fondamentales reconnues au niveau international (15). Les projets bénéficiant d’un soutien devraient faire l’objet d’un suivi et être répertoriés dans des registres ou des plateformes centralisés. Le CESE insiste sur la nécessite d’une collaboration encore plus intense avec la société civile organisée (en particulier le CESE) au sujet de ses valeurs éthiques dans le cadre de tous les projets. |
4.9. |
Le CESE est favorable à la création d’un environnement économique qui facilite l’accès au financement pour les micro, petites et moyennes entreprises africaines et européennes, qui améliore le cadre juridique pour les investissements tant publics que privés, et dans lequel les systèmes de passation des marchés publics deviennent plus efficaces, où les investissements profitent aux citoyens au sein des économies locales et favorisent la création d’emplois de qualité à l’échelon national, et où les nécessaires normes internationales sont encouragées. |
4.10. |
Les structures financières présentes en Afrique devraient également être renforcées de manière à soutenir le financement à long terme. Il s’agit d’une importante condition préalable au développement durable à long terme. En outre, les banques coopératives ont par exemple constitué une pierre angulaire du développement dans de nombreux pays européens, et les banques de développement nationales, également au service des municipalités en particulier, ont favorisé les investissements en Europe. Grâce à ces mesures, les pays européens ont financé en particulier des infrastructures sociales et des infrastructures publiques locales, qui ont constitué non seulement une base importante pour les investissements privés et une croissance économique durable, mais aussi pour le développement des États-providence européens. |
4.11. |
L’Union européenne et ses États membres devraient concentrer leurs instruments financiers sur des objectifs et des institutions spécifiques afin d’éviter une concurrence contre-productive. La concurrence entre différentes institutions, européennes et internationales, a donné lieu à des malentendus et à des difficultés pour accéder aux marchés africains. Il est nécessaire de prévoir un engagement, un contrôle et une transparence qui soient davantage conjoints et directs. La société civile pourrait jouer en l’occurrence un rôle institutionnel de contrôleur indépendant. |
4.12. |
Une politique d’investissement qui favorise les investissements européens privés en Afrique devrait notamment viser à créer des chaînes de valeur régionales produisant des biens susceptibles d’être consommés principalement en Afrique, créant ainsi des marchés nationaux. Cela pourrait refléter le modèle européen de la croissance dans les décennies qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, où l’Europe dépendait fortement de ses marchés intérieurs pour développer ses entreprises. |
4.13. |
Les ONG africaines et européennes, principalement celles qui ont des racines en Afrique, pourraient avoir une fonction d’intermédiaire au service du développement économique et devenir acteurs du soutien au développement économique durable de leurs pays d’origine. |
5. Le commerce
5.1. |
L’Union européenne est toujours le principal partenaire commercial de l’Afrique, qui représente 36 % de l’ensemble de ses exportations, devant la Chine et les États-Unis. La Commission européenne a pour objectif d’intensifier cette coopération et de la fonder sur une nouvelle base contractuelle. |
5.2. |
En sa qualité de principal partenaire commercial de l’Afrique, l’Union européenne a eu à cœur de proposer ses préférences commerciales les plus généreuses aux pays africains, que ce soit par l’intermédiaire de son SPG [et de l’initiative «Tout sauf les armes» (TSA) à destination des PMA, dont un grand nombre se trouvent en Afrique], ou dans le cadre d’accords de libre-échange, notamment les accords de partenariat économique, qui ont le développement pour objectif premier. |
5.3. |
Cependant, contrairement aux dispositions de la nouvelle génération d’ALE de l’Union européenne et de l’APE concernant les Caraïbes, les ALE et les APE conclus par l’Union européenne avec les pays africains ne contiennent aucun mécanisme de dialogue avec la société civile organisée. Les ALE conclus avec les pays d’Afrique du Nord ne contiennent pas encore de clauses concernant les groupes consultatifs internes, ni aucun chapitre sur le commerce et le développement durable. Et les APE, qui portent sur le développement, ne prévoient pas de clause relative à un comité consultatif qui favoriserait le dialogue entre les acteurs non étatiques au sujet de la mise en œuvre et de l’incidence durables de l’APE. |
5.4. |
L’engagement et le dialogue avec la société civile organisée peuvent également avoir lieu en dehors des accords commerciaux (ou parallèlement à ceux-ci). Les relations de commerce et d’investissement entre l’Union européenne et l’Afrique visant à favoriser le développement durable, toutes les parties prenantes, et non seulement les acteurs étatiques, devraient y participer. |
5.5. |
La structure actuelle des échanges commerciaux entre l’Afrique et l’Europe est à l’origine de certaines difficultés en matière de développement. Même lorsqu’ils sont ratifiés, tous les APE ne sont pas réellement mis en œuvre par les pays partenaires. Cette situation n’est pas tout à fait dénuée de justification, étant donné les nombreux cas rapportés d’exportations européennes qui empêchent le développement des entreprises et des secteurs locaux (16). Le développement du libre-échange constitue un changement structurel certain pour les pays partenaires, qui étaient auparavant capables de réguler leurs secteurs économiques grâce à des régimes préférentiels. De même, les APE sont négociés avec des blocs économiques dont les membres se trouvent souvent dans des situations différentes, ce qui mériterait des approches diversifiées en matière de politique commerciale. Enfin, la négociation d’accords commerciaux globaux pourrait représenter en soi un défi organisationnel en ce qui concerne les négociations concernant les pays en développement et les pays nouvellement industrialisés. |
5.6. |
Favoriser l’engagement accru de la société civile a des implications en ce qui concerne le renforcement des capacités et les coûts, qu’il convient d’assumer en vue de mettre en place des mécanismes d’engagement efficaces. L’Union européenne devrait cibler une partie de son aide au commerce (dont un pourcentage pourrait être défini à cet effet) pour soutenir la participation de la société civile, le dialogue social et le renforcement des capacités, afin de leur permettre de consentir des efforts durables en matière de commerce et d’investissement. |
5.7. |
L’Afrique est également engagée dans la mise en place de l’accord sur la ZLECA, qui vise à créer un marché unique africain. À ce jour, il compte plus de 40 signataires et est considéré comme extrêmement important par de nombreux acteurs étatiques et non étatiques dans toute l’Afrique. Celui-ci devrait renforcer le commerce intra-africain ainsi que l’intégration régionale et continentale et développer d’importants secteurs économiques dans l’ensemble de l’Afrique. L’Union européenne peut soutenir efficacement cet effort et contribuer à faire en sorte que ses régimes commerciaux préférentiels avec les pays et régions d’Afrique (ALE avec l’Afrique du Nord, APE et régime SPG conclus par l’Union européenne) permettent de soutenir l’intégration du commerce continental, en s’orientant vers un accord commercial de continent à continent. |
6. Vers une nouvelle «Alliance entre l’Afrique et l’Europe»
6.1. |
L’Afrique n’a pas besoin de charité, mais d’un véritable partenariat équitable, conformément à l’Alliance en faveur d’investissements et d’emplois durables entre l’Europe et l’Afrique, proposée en septembre 2018. Cette proposition indique que cela contribuerait à créer jusqu’à dix millions d’emplois en Afrique rien qu’au cours des cinq prochaines années. Il doit être implicite que ces emplois doivent garantir un revenu qui permette d’assurer un niveau de vie décent. Cette Alliance vise à libérer des investissements privés et à explorer les possibilités considérables qui peuvent en découler pour les populations comme pour les économies d’Afrique et d’Europe. L’Union devrait envisager de faire évoluer les nombreux accords commerciaux entre l’Union européenne et l’Afrique en un accord de libre-échange de continent à continent, sous forme de partenariat économique entre égaux. En tant que telle, l’Alliance constitue un signal politique important. Un partenariat de ce type devrait être fondé sur un pied d’égalité, être conscient des asymétries existantes et prendre en compte les capacités respectives de chacun. |
6.2. |
Pour établir une véritable alliance, il est nécessaire de mener une réflexion des deux côtés, de renforcer de part et d’autre la compréhension, la coordination et la coopération, ainsi que:
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7. L’après-Cotonou et le rôle de la société civile
7.1. |
La Commission européenne a entamé des négociations en vue d’élaborer un nouveau partenariat ambitieux avec 79 États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (pays ACP). Tant les ACP que l’Union européenne tiennent à la «dimension politique», qui est une réalisation de l’accord de Cotonou, et souhaitent la conserver. Elle met l’accent sur le dialogue politique relatif aux questions nationales, régionales et mondiales d’intérêt commun, ainsi que sur un engagement en faveur des droits de l’homme, de la bonne gouvernance et de la paix et de la stabilité. |
7.2. |
Une nouvelle relation commerciale équitable de ce type, développée avec les pays africains, devrait promouvoir le travail décent et préserver les services publics. La politique commerciale doit garantir le plein respect et la protection des droits de l’homme, des emplois de qualité et de l’environnement, et doit également tenir compte des besoins en développement des pays les moins développés. Le commerce ne peut représenter une excellente opportunité que s’il crée des emplois de qualité et favorise une croissance durable. Tout accord commercial devrait garantir l’inclusion de la société civile organisée, la bonne gouvernance et la transparence. |
7.3. |
Le CESE a joué un rôle majeur pour favoriser les relations de la société civile dans le cadre de l’accord de Cotonou. Il importe à présent qu’un engagement continu, voire renforcé, du CESE et de ses structures devienne un élément important de l’accord sur l’après-Cotonou. De cette manière, la société civile de l’Union européenne sera habilitée à aider la société civile des pays africains à devenir un partenaire fiable et digne de confiance pour les investisseurs. |
Bruxelles, le 12 décembre 2019.
Le président du Comité économique et social européen
Luca JAHIER
(1) JO C 246 du 28.7.2017, p. 71.
(2) http://www.africa-eu-partnership.org/sites/default/files/documents/eas2007_joint_strategy_fr.pdf
(3) JO C 81 du 2.3.2018, p. 29.
(4) Il s’agit de l’aide humanitaire et de la prévention des catastrophes naturelles, de la prévention des conflits, de la démocratisation et de la coopération au développement, mais non de l’appui à l’armée et à la police des frontières ou de la coopération avec elles.
(5) Tels que par exemple la déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale.
(6) Les études montrent qu’un certain niveau minimal de revenus aboutit à réduire la pression migratoire, par exemple: Michael A. Clemens, «Does Development Reduce Migration?» («Le développement réduit-il les migrations?») (2014) (http://ftp.iza.org/dp8592.pdf).
(7) http://pubdocs.worldbank.org/en/992371492706371662/MigrationandDevelopmentBrief27.pdf
(8) Voir notamment le rapport de la Banque mondiale intitulé «Doing Business» («Faire des affaires»), 2017.
(9) Note du Centre européen de stratégie politique (EPSC) intitulée «The Makings of an African Century» («Les réalisations d’un siècle africain»), 2017.
(10) JO C 129 du 11.4.2018, p. 27.
(11) Ministère allemand du développement: «Afrika und Europa — Neue Partnerschaft für Entwicklung, Frieden und Zukunft — Eckpunkte für einen Marshallplan mit Afrika» («L’Afrique et l’Europe — un nouveau partenariat au service du développement, de la paix et de l’avenir — Les jalons d’un plan Marshall avec l’Afrique») et rapport 2016 de la Cnuced sur le développement économique en Afrique.
(12) Par exemple, Michael A. Clemens, «Does Development Reduce Migration?» («Le développement réduit-il les migrations?») (2014) (http://ftp.iza.org/dp8592.pdf).
(13) Dynamiques du développement en Afrique 2018 — Croissance, emploi et inégalités, CUA/OCDE 2018.
(14) Eurostat, 2018.
(15) Par exemple la déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale.
(16) Par exemple: https://www.deutschlandfunk.de/das-globale-huhn-ghanas-bauern-leiden-unter-gefluegel.766.de.html?dram:article_id=433177; https://www.wienerzeitung.at/nachrichten/wirtschaft/international/835163_Was-Altkleider-fuer-Afrikas-Wirtschaft-bedeuten.html; https://www.dialog-milch.de/im-fokus-eu-milchpulver-und-der-milchmarkt-in-afrika/