16.7.2021   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 286/82


Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à un système de communication informatisé pour les procédures civiles et pénales transfrontières (système e-CODEX), et modifiant le règlement (UE) 2018/1726

[COM(2020) 712 final — 2020/345 (COD)]

(2021/C 286/15)

Rapporteure:

Ozlem YILDIRIM

Consultation

Commission européenne, 24.2.2021

Base juridique

Article 81, paragraphe 2, et article 82, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section «Marché unique, production et consommation»

Adoption en section

31.3.2021

Adoption en session plénière

27.4.2021

Session plénière no

560

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

247/0/3

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE accueille favorablement l’initiative réglementaire présentée, qui doit être complétée par des propositions du Parlement européen. Le système e-Codex induira des effets bénéfiques indirects, dans la mesure où il simplifie et accélère les procédures et la coopération judiciaires au niveau transfrontière et, ainsi, il contribuera aussi à améliorer le fonctionnement du marché intérieur.

1.2.

Il convient de noter que le champ d’application d’e-CODEX ne se cantonne pas à la justice en ligne. Pour anticiper sur l’avenir, le CESE recommande d’ajouter une disposition qui ouvre la possibilité d’utilisations supplémentaires, effectuées par d’autres administrations publiques, y compris, par exemple, pour le transfert de dossiers de santé en ligne.

1.3.

Le CESE recommande que la Commission intègre dans le périmètre du règlement la dimension de l’évolutivité. Jusqu’à présent, e-CODEX n’a fonctionné que dans quelques États membres, qui ont été les promoteurs initiaux du projet. Néanmoins, sa version actuelle doit passer à l’échelle supérieure et continuer à fonctionner sans heurts dans l’ensemble des États membres, ainsi que le règlement proposé en affiche l’intention.

1.4.

La numérisation de la société, de l’économie et de l’administration est un phénomène qui s’accélère, tout en constituant un objectif ambitieux: il est nécessaire que cette réalité soit clairement prise en considération. Le système e-CODEX représente une composante essentielle, entre autres initiatives, du train de mesures relatives à la coopération judiciaire numérique et de l’infrastructure de services numériques d’e-Justice. Parce qu’il concerne la justice et les droits fondamentaux, le CESE estime que le système doit s’articuler avec la stratégie numérique globale «Façonner l’avenir numérique de l’Europe» (1); or, cette connexion n’apparaît pas explicitement dans le règlement proposé.

1.5.

Dès lors que eu-LISA ne constitue pas une agence de régulation, le CESE estime que le chapitre 2 du règlement proposé doit traiter de la transparence de son processus décisionnel, de l’association des États membres et autres acteurs concernés à sa démarche et de l’indépendance qui doit caractériser les décisions prises par les organes participant à sa gouvernance.

1.6.

Si l’on considère que le système e-CODEX se présente sous la forme d’un ensemble de produits logiciels qu’il est possible d’utiliser afin de mettre en place un point d’accès pour une communication sécurisée, un des objectifs fondamentaux du règlement doit consister à garantir qu’il présente un niveau élevé de sécurité, en ce qu’il devra instaurer des mesures de sécurisation qui préservent un exercice sans entraves des droits individuels.

1.7.

Un point qui mériterait davantage d’attention, de l’avis du CESE, est d’assurer que l’accessibilité de la justice électronique soit large et effective. Le système e-CODEX doit déboucher sur des avantages qui aillent au-delà des aspects touchant à l’amélioration des performances de gestion, de fonctionnement et de communication. Le CESE a la conviction que le déploiement de la justice en ligne doit viser à garantir que dans l’Union européenne, tous les citoyens disposent d’un accès à la justice qui soit sécurisé, sûr, fiable et aisé.

1.8.

Le CESE attire l’attention sur les inquiétudes existantes, telles que soulevées par plusieurs parties prenantes et États membres, s’agissant de savoir si le principe de l’indépendance du pouvoir judiciaire bénéficiera des garanties voulues lorsque l’agence eu-LISA assurera le fonctionnement permanent d’e-CODEX et la poursuite de son développement.

2.   Contexte et contenu essentiel de la proposition de la Commission

2.1.

Le système e-CODEX (pour «e-Justice Communication via On-line Data Exchange» — «communication pour l’e-Justice grâce à l’échange de données en ligne») a été lancé dans le cadre du plan d’action pluriannuel 2009-2013 relatif à l’e-Justice européenne (2), en premier lieu dans l’objectif de promouvoir le passage au numérique des procédures judiciaires transfrontières et de faciliter la communication entre les autorités judiciaires des États membres.

2.2.

Le dispositif e-CODEX constitue le principal outil utilisé pour établir un réseau de communication interopérable et décentralisé entre les systèmes informatiques nationaux dans le cadre des procédures transfrontières au civil et au pénal. Il se présente sous la forme d’un progiciel qui assure la connexion entre ces systèmes nationaux et donne ainsi à des utilisateurs tels que les autorités judiciaires, les praticiens du droit ou les particuliers la possibilité d’envoyer et de recevoir des actes, formulaires juridiques, preuves ou autres informations d’une manière qui soit rapide et sûre. Le système consiste en un ensemble de produits logiciels qu’il est possible d’utiliser afin de mettre en place un point d’accès pour une communication sécurisée.

2.3.

Le système e-CODEX constitue une des pièces maîtresses de la politique de la Commission en matière de justice en ligne, s’agissant d’améliorer l’accessibilité et l’efficacité de la justice dans les États membres. Il est repris dans le plan d’action pluriannuel relatif à la justice en ligne européenne pour la période 2019-2023 (3). La communication de la Commission intitulée «Numérisation de la justice au sein de l’Union européenne — Une panoplie de possibilités» a confirmé elle aussi que le système e-CODEX est le principal outil pour une communication numérique sécurisée dans les procédures judiciaires transfrontières (4). Dans le contexte d’un marché unique numérique qui vise à fournir une infrastructure et des services à haut débit avec un niveau élevé de sécurité et de fiabilité, les dispositifs destinés à promouvoir la justice en ligne avaient été intégrés dans le plan d’action 2016 pour l’administration en ligne (5).

2.4.

Le système e-CODEX a été mis au point par 21 États membres, avec la participation d’autres pays ou territoires et organisations tiers (6), entre 2010 et 2016.

2.5.

Actuellement, le système e-CODEX est géré par un consortium d’États membres et d’autres organisations et son financement est assuré grâce à une subvention de l’Union européenne.

2.6.

Il convient que la gestion du système e-CODEX s’effectue d’une manière qui ne compromette pas l’indépendance des autorités judiciaires nationales.

2.7.

La Commission soumet à présent une proposition de règlement visant à établir le système e-CODEX au niveau de l’Union européenne, et elle en confie la gestion opérationnelle à l’Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, dite «eu-LISA». En dotant e-CODEX d’une gouvernance stable, il deviendra possible d’en faire le système par défaut pour l’échange de messages électroniques dans le cadre de la coopération judiciaire au niveau de l’Union. Sa reprise par l’agence eu-LISA n’interviendra pas avant juillet 2023.

3.   Observations générales

3.1.

Le CESE accueille favorablement l’initiative réglementaire présentée, qui doit être complétée par des propositions du Parlement européen. Le système e-Codex induira des effets bénéfiques indirects, dans la mesure où il simplifie et accélère les procédures et la coopération judiciaires au niveau transfrontière, contribuant ainsi à améliorer également le fonctionnement du marché intérieur.

3.2.

L’Europe figure parmi les principales forces motrices de la transformation numérique. Le système e-Codex joue un rôle de catalyseur pour opérer cette mutation au sein de l’Europe et des États membres, et, surtout, entre eux. Sa portée dépasse les simples besoins fonctionnels de type informatique pour s’étendre à des enjeux aussi essentiels que l’harmonisation, la culture, les droits de l’homme et d’autres démarches que les pays de l’Union européenne se doivent de prendre en compte dans la numérisation de leur société et de leur économie.

3.3.

Dès lors que le règlement proposé donne aux citoyens la possibilité de bénéficier d’un meilleur accès transfrontière à la justice, le CESE considère qu’il doit également aborder spécifiquement la question du renforcement et de l’harmonisation dont doivent faire l’objet les moyens des États membres en matière de coopération judiciaire. Cet impératif s’applique en premier à l’écosystème numérique sous-tendant e-Codex, qui doit permettre d’évoluer dans un environnement interopérable et interconnecté. Le CESE tient à souligner qu’en Europe l’adoption de l’informatique par la justice s’est effectuée jusqu’à présent de manière hétérogène. Aussi appelle-t-il de ses vœux une coopération plus étroite entre les services judiciaires nationaux, ainsi que leur convergence à leurs différents niveaux, dans le plein respect des spécificités des structures des États membres en la matière, dont les rôles et les responsabilités des différents intervenants concernés. Sur un plan technique, il y a lieu de garantir que les pays de l’Union européenne présentent des niveaux d’automatisation similaires et disposent de la capacité technique voulue pour traiter et stocker des documents électroniques volumineux, ainsi que pour interconnecter les fournisseurs de services d’une manière hautement sécurisée.

3.4.

Renforcer la confiance portée aux échanges électroniques transfrontières entre les citoyens, les entreprises et les pouvoirs publics représente un enjeu capital. L’impact que le règlement sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur («règlement eIDAS») exerce sur l’infrastructure et le fonctionnement du système e-CODEX constitue un paramètre que l’on ne saurait négliger. Dans la mesure où ce texte régit les signatures et les transactions électroniques, ainsi que les instances concernées et leurs procédures, le CESE fait observer que le système e-CODEX joue le rôle d’un outil efficace pour une communication à large échelle. Son infrastructure doit fonctionner d’une manière qui respecte les exigences du règlement eIDAS et permettre une interopérabilité sécurisée.

3.5.

Il convient de noter que le champ d’application d’e-CODEX ne se réduit pas à la justice en ligne. Pour anticiper sur l’avenir, le CESE recommande d’ajouter une disposition qui ouvre la possibilité d’utilisations supplémentaires, effectuées par d’autres administrations publiques, y compris, par exemple, pour le transfert de dossiers de santé en ligne. Une telle extension de l’usage d’e-CODEX au-delà de la seule justice en ligne contribuera à assurer son utilisation sur le long terme et encouragera les États membres à procéder aux investissements nécessaires dans leurs infrastructures. Étant donné que le règlement proposé ne régit que les aspects judiciaires, des propositions législatives distinctes devraient alors être élaborées à cette fin.

3.6.

Le CESE exprime son soutien au système e-CODEX, parce qu’il permet une transmission électronique sécurisée des informations et des documents dans les procédures civiles et pénales transfrontières. Comme le souligne la Commission, le règlement proposé est nécessaire pour deux grandes raisons, à savoir 1) élaborer le système e-CODEX et garantir sa pérennité et 2) confier sa gestion, la poursuite de son développement et sa maintenance à l’agence eu-LISA. Le CESE fait toutefois observer que pour assurer une gouvernance efficace du système judiciaire numérique, il faut disposer tout à la fois d’une architecture technique robuste et stable et d’une solide infrastructure de gestion.

3.7.

Le CESE recommande que la Commission intègre dans le périmètre du règlement la dimension de l’évolutivité. Jusqu’à présent, e-CODEX n’a fonctionné que dans quelques États membres, qui ont été les promoteurs initiaux du projet. Néanmoins, sa version actuelle doit passer à l’échelle supérieure et continuer à fonctionner sans heurts dans l’ensemble des États membres, ainsi que le règlement proposé en affiche l’intention. Le CESE souligne que chaque pays de l’Union européenne a la responsabilité de veiller à ce que ses systèmes et infrastructures informatiques nationaux fonctionnent correctement, soient sécurisés et assurent la protection des données à caractère personnel et le respect de la vie privée.

3.8.

Le CESE exhorte la Commission européenne à étudier la possibilité d’apporter aux entités actives en dehors de l’Union européenne, en particulier dans les pays qui lui sont associés, une assistance pour l’installation de l’ensemble de produits logiciels du système e-CODEX. Toutes les parties concernées retireraient des avantages d’une telle extension apportée au champ d’application du projet, qui devrait reposer sur un modèle de cofinancement bien défini. Il y a lieu de veiller à la nécessité de garantir que le système soit capable d’évoluer et s’avère fonctionnel.

4.   Observations particulières

4.1.   Articulation et cohérence avec les stratégies fondamentales de l’Union européenne

4.1.1.

La numérisation de la société, de l’économie et de l’administration est un phénomène qui s’accélère, tout en constituant un objectif ambitieux, et cette réalité doit clairement être prise en considération. Le système e-CODEX représente une composante essentielle, entre autres initiatives, du train de mesures relatives à la coopération judiciaire numérique et de l’infrastructure de services numériques d’e-Justice. Parce qu’il concerne la justice et les droits fondamentaux, le CESE estime que le système doit s’articuler avec la stratégie numérique globale «Façonner l’avenir numérique de l’Europe» (7); or, cette connexion n’apparaît pas explicitement dans le règlement proposé.

4.1.2.

De l’avis du CESE, il convient que la future initiative législative sur l’intelligence artificielle (IA), que la Commission devrait dévoiler au printemps 2021 (8), se penche spécifiquement sur la question du rôle que les approches basées sur l’intelligence artificielle jouent pour donner naissance à des mécanismes de justice en ligne, ainsi que sur les risques liés à l’utilisation de ces processus par les autorités judiciaires. Parmi ces usages possibles figurent la «justice prédictive» et les défis qu’elle pose, le recours aux plates-formes de règlement en ligne des litiges ou l’usage d’algorithmes dans les enquêtes pénales.

4.1.3.

Le CESE reconnaît que le système e-CODEX n’implique pas qu’il soit fait recours à l’intelligence artificielle. Il n’en reste pas moins que les systèmes judiciaires en font un usage de plus en plus fréquent. Considérant la relation indirecte ainsi établie, le CESE recommande que le premier réexamen du plan coordonné dans le domaine de l’intelligence artificielle (9), qui doit s’effectuer au premier trimestre de 2021, aborde la question de l’articulation de l’intelligence artificielle avec la justice en ligne et le système e-CODEX.

4.2.   La gouvernance efficace et les aspects opérationnels du système e-CODEX

4.2.1.

Dès lors que eu-LISA ne constitue pas une agence de régulation, le CESE estime que le chapitre 2 du règlement proposé doit traiter de la transparence de son processus décisionnel, de l’association des États membres et autres acteurs concernés à sa démarche et de l’indépendance qui doit caractériser les décisions prises par les organes participant à sa gouvernance. Ainsi, du fait qu’ils formeront un des principaux groupes d’utilisateurs potentiels du système e-CODEX, il conviendrait de prévoir une participation des avocats au niveau de la définition comme de la mise en œuvre des politiques, de manière, par exemple, à répondre à la nécessité de garantir que le dispositif favorise un environnement qui soit équitable pour toutes les parties du point de vue de l’accessibilité et qu’il satisfasse à tous les demandes de la profession. Les praticiens du droit judiciaire devraient donc être intégrés dans les rouages mêmes du système plutôt que simplement consultés.

4.2.2.

Sur le plan du fonctionnement, le CESE souligne que certaines clarifications doivent être apportées concernant, par exemple, la délimitation exacte des questions relevant des affaires intérieures et la problématique du «guichet unique». Il s’impose également d’harmoniser les formats à utiliser pour le dépôt d’éléments probants et leur échange entre juridictions.

4.2.3.

L’agence eu-LISA, quant à elle, doit être dotée à la fois de ressources humaines et financières suffisantes. À l’appui de cette affirmation, le CESE réitère sa recommandation concernant la formation qu’il s’impose de dispenser au personnel de cet organe (10), en particulier celui des services informatiques, et qui devrait consister à lui faire clairement comprendre comment la gestion du système e-CODEX doit garantir l’indépendance de la justice et le droit à un procès équitable. Cet aspect pourrait être développé plus avant dans l’article 13 du règlement proposé.

4.3.   Un niveau élevé de sécurité pour protéger les droits et les libertés

4.3.1.

Si l’on considère que le système e-CODEX se présente sous la forme d’un ensemble de produits logiciels qu’il est possible d’utiliser afin de mettre en place un point d’accès pour une communication sécurisée, un des objectifs fondamentaux du règlement doit consister à garantir qu’il présente un niveau élevé de sécurité, en ce qu’il lui faudra instaurer des mesures de sécurisation qui préservent un exercice sans entraves des droits individuels (11). Le CESE estime également que dans son chapitre 2, le règlement sur le système e-CODEX doit souligner qu’un accord de coopération est en vigueur entre l’agence eu-LISA et l’agence de l’Union pour la cybersécurité (ENISA) (12).

4.3.2.

Les dispositifs numériques doivent garantir un niveau élevé de protection de la vie privée et des données. Ce haut degré de sécurité implique aussi d’assurer que les données soient protégées de manière harmonisée au niveau national. Le CESE répète qu’il est nécessaire que dans les États membres, les responsables du traitement des données prennent les mesures techniques et organisationnelles adéquates, assurent une mise en œuvre efficace des principes régissant la protection des données et s’assurent de disposer des ressources financières suffisantes pour réaliser ces objectifs.

4.3.3.

Les risques en rapport avec la sécurité prennent un tour de plus en plus imprévisible. Le CESE reconnaît que l’évaluation des risques et leur atténuation occupent une place centrale dans le cycle annuel de l’agence eu-LISA en matière de planification, d’activités récurrentes et de compte rendu. Il considère qu’en plus de ces stratégies d’atténuation et du recensement des «risques majeurs», l’agence pourrait renforcer son cadre d’action en la matière en faisant le relevé des éventuels risques aux conséquences inattendues. Ce faisant, elle deviendra une instance qui sera plus résiliente et anticipera davantage.

5.   Conformité avec les droits fondamentaux

5.1.   Une justice numérique accessible à tous comme moyen d’assurer l’égalité et la non-discrimination

5.1.1.

Un point qui mériterait davantage d’attention, de l’avis du CESE, est d’assurer que l’accessibilité de la justice électronique soit large et effective. Le système e-CODEX doit déboucher sur des avantages qui aillent au-delà des aspects touchant à l’amélioration des performances de gestion, de fonctionnement et de communication. Le CESE a la conviction que le déploiement de la justice en ligne doit viser à garantir que dans l’Union européenne, tous les citoyens disposent d’un accès à la justice qui soit sécurisé, sûr, fiable et aisé. Il convient que le règlement donne une place centrale à l’égalité d’accès, pour éviter la discrimination et les inégalités. Le CESE recommande que le règlement e-CODEX souligne davantage que les citoyens doivent absolument bénéficier d’une protection juridique et de la possibilité d’accéder à la justice en ligne et aux services numériques connexes sur un pied d’égalité et en toute efficacité.

5.1.2.

Les avantages du système e-CODEX doivent parvenir et profiter à un public plus étendu. En ce qui concerne la dimension frontalière, les autorités judiciaires et les pouvoirs publics transfrontières ne sont pas les seuls acteurs concernés. L’environnement dans lequel s’inscrit e-CODEX doit couvrir non seulement les autorités de justice et les points d’accès du système mais s’étendre aussi à toute une série d’autres intervenants, qu’il s’agisse des citoyens, des tribunaux et de leur personnel, des autres employés de l’administration, des personnels du secteur des technologies de l’information et de la communication, des organismes chargés de faire appliquer la loi, des notaires, des experts en criminalistique numérique, des avocats ou de tierces parties qui comptent parmi les bénéficiaires du système, directs ou indirects.

5.1.3.

En outre, vu l’importance du rôle que joue le système e-CODEX pour donner aux citoyens et aux entreprises l’assurance de pouvoir accéder efficacement à la justice, il conviendrait également que la proposition de règlement fasse référence à la protection des droits procéduraux.

5.2.   Respect de l’indépendance de la justice et du droit à un procès équitable

5.2.1.

L’indépendance du pouvoir judiciaire constitue la pierre angulaire du principe de la séparation des pouvoirs et l’un des fondements essentiels de l’État de droit. Le recours à la technologie ne doit pas s’effectuer aux dépens de la cohérence dans l’administration de la justice. C’est pour cette raison que le CESE appelle la Commission à évaluer dûment si le dispositif utilisé pour interconnecter les systèmes nationaux de justice en ligne est à même de respecter les impératifs du procès équitable et de la procédure régulière. De telles garanties devraient tout particulièrement être de mise si le système e-CODEX est confié à l’agence eu-LISA.

5.2.2.

Le CESE attire l’attention sur les inquiétudes existantes, telles que soulevées par plusieurs parties prenantes et États membres, s’agissant de savoir si le principe de l’indépendance du pouvoir judiciaire bénéficiera des garanties voulues lorsque l’agence eu-LISA assurera le fonctionnement permanent d’e-CODEX et la poursuite de son développement. Les dispositions de la proposition actuelle qui mentionnent l’indépendance du pouvoir judiciaire ne sont pas satisfaisantes. Une formulation plus prégnante est nécessaire, vu l’importance que revêt ce principe. En outre, le CESE demande que soit clarifiée la manière dont son respect sera effectivement assuré par la structure de gouvernance qui est proposée pour le système e-CODEX.

5.3.   Respect et rappel des droits fondamentaux

5.3.1.

Le CESE souligne que le règlement se doit de respecter les droits fondamentaux et d’observer les principes sanctionnés, en particulier, par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et les constitutions des États membres. Parmi ces impératifs figurent notamment le droit à la sûreté, ainsi qu’à un recours effectif, et le principe de légalité et de proportionnalité. Le Comité souligne que la protection de ces droits dépend également des conditions dans lesquelles ils peuvent faire l’objet d’empiètements et de l’instance qui est habilitée à trancher en la matière.

5.3.2.

Le recours aux technologies numériques ne peut affaiblir le droit à un procès équitable et à un recours juridique effectif. Cet aspect est particulièrement important en ce qui concerne l’égalité qui doit exister entre les parties pour faire valoir leurs arguments (égalité des armes), le droit d’avoir connaissance de l’ensemble des éléments probants et observations qui ont été versés au dossier et de formuler des observations à leur sujet (procédure contradictoire), le droit à une audience publique et, dans les procédures pénales, la non-ingérence dans les droits de la défense.

5.3.3.

En conséquence, il y a lieu d’ajouter dans la proposition une référence spécifique à l’applicabilité du titre VI, relatif à la justice, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et à son article 47.

Bruxelles, le 27 avril 2021.

La présidente du Comité économique et social européen

Christa SCHWENG


(1)  COM(2020) 67 final.

(2)  JO C 75 du 31.3.2009, p. 1.

(3)  Règlement (UE) 2018/1726.

(4)  COM(2020) 710 final.

(5)  COM(2016) 179 final.

(6)  Jersey, la Norvège, la Turquie, le Conseil des barreaux européens (CCBE) et le Conseil des notariats de l’Union européenne (CNUE).

(7)  COM(2020) 67 final.

(8)  https://www.europarl.europa.eu/news/en/headlines/eu-affairs/20201208STO93329/coming-up-eu-spearheads-efforts-for-recovery-in-2021

(9)  COM(2018) 795 final, https://eur-lex.europa.eu/legal-content/fr/ALL/?uri=CELEX:52018DC0795

(10)  JO C 283 du 10.8.2018, p. 48.

(11)  Avis EESC-2020-05923, adopté lors de la session plénière d’avril 2021 (voir page 76 du présent Journal officiel).

(12)  https://www.enisa.europa.eu/publications/artificial-intelligence-cybersecurity-challenges