ISSN 1977-0936

Journal officiel

de l'Union européenne

C 228

European flag  

Édition de langue française

Communications et informations

62e année
5 juillet 2019


Sommaire

page

 

I   Résolutions, recommandations et avis

 

AVIS

 

Comité économique et social européen

2019/C 228/01

Avis du Comité économique et social européen relatif à La maîtrise des outils numériques de santé — pour des soins de santé adaptés aux besoins des citoyens en Europe en période de changement démographique (avis d’initiative)

1

 

AVIS

2019/C 228/02

Avis du Comité économique et social européen sur Des possibilités d’emploi pour les personnes inactives sur le plan économique   (avis d’initiative)

7

2019/C 228/03

Avis du Comité économique et social européen sur Des systèmes éducatifs porteurs pour prévenir l’inadéquation des compétences — Quelle transition s’impose? (avis d’initiative)

16

2019/C 228/04

Avis du Comité économique et social européen sur Une démocratie résiliente grâce à une société civile forte et diverse   (avis d’initiative)

24

2019/C 228/05

Avis du Comité économique et social européen sur Le chemin de la colombe blanche (WhiteDoveWay) — Proposition en faveur d’une stratégie de consolidation de la paix à l’échelle mondiale menée par l’Union européenne   (Avis d’initiative)

31

2019/C 228/06

Avis du Comité économique et social européen sur Être à l’écoute des citoyens de l’Europe pour un avenir durable (Sibiu et au-delà)

37

2019/C 228/07

Avis du Comité économique et social européen sur L’avenir de la politique de cohésion pour la période d’après 2020  (avis exploratoire)

50

2019/C 228/08

Avis du Comité économique et social européen sur L’avenir de l’UE: avantages pour les citoyens et respect des valeurs européennes  (avis exploratoire à la demande de la présidence roumaine du Conseil de l’Union européenne)

57

2019/C 228/09

Avis du Comité économique et social européen sur l’Éducation à l’Union européenne  (Avis exploratoire à la demande de la présidence roumaine)

68


 

III   Actes préparatoires

 

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

 

Comité économique et social européen

2019/C 228/10

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Programme de travail annuel de l’Union en matière de normalisation européenne pour 2019  [COM(2018) 686 final]

74

2019/C 228/11

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen — Normes harmonisées: renforcer la transparence et la sécurité juridique pour un marché unique pleinement opérationnel  [COM(2018) 764 final]

78

2019/C 228/12

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Vers un cadre complet de l’Union européenne en matière de perturbateurs endocriniens[COM(2018) 734 final]

83

2019/C 228/13

Avis du Comité économique et social européen relatif à la communication conjointe au Parlement européen, au Conseil européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Plan d’action contre la désinformation [JOIN(2018) 36 final]

89

2019/C 228/14

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication conjointe au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen, au Comité des régions et à la Banque européenne d’investissement — Relier l’Europe à l’Asie — Éléments fondamentaux d’une stratégie de l’Union européenne”»  [JOIN(2018) 31 final]

95

2019/C 228/15

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) no 1303/2013 en ce qui concerne les ressources affectées à la dotation spécifique allouée à l’initiative pour l’emploi des jeunes  [COM(2019) 55 final — 2019/0027 (COD)]

103


FR

 


I Résolutions, recommandations et avis

AVIS

Comité économique et social européen

5.7.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 228/1


Avis du Comité économique et social européen relatif à «La maîtrise des outils numériques de santé — pour des soins de santé adaptés aux besoins des citoyens en Europe en période de changement démographique»

(avis d’initiative)

(2019/C 228/01)

Rapporteure: Renate HEINISCH

Décision de l’assemblée plénière

20.9.2018

Base juridique

Article 32, paragraphe 2, du règlement intérieur

Avis d’initiative

Compétence

Section spécialisée «Marché unique, production et consommation»

Adoption en section spécialisée

7.3.2019

Adoption en session plénière

21.3.2019

Session plénière no

542

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

153/0/2

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) soutient la Commission européenne dans ses efforts visant à élever la maîtrise des outils numériques de santé au rang des principales priorités du programme relatif à la santé en ligne (eHealth). Le CESE recommande d’élaborer une stratégie européenne globale dotée d’objectifs clairs et faisant l’objet d’un suivi étroit en matière d’éducation à la santé, afin de soutenir les droits des citoyens dans le domaine de la santé et d’éviter les inégalités grâce aux dispositifs numériques.

1.2.

Le CESE se félicite des résultats du projet IC-Health (1); à cet égard, la recommandation visant à associer les citoyens actifs à ces efforts mérite tout particulièrement d’être mentionnée. Le CESE recommande dès lors de poursuivre la mise en œuvre du projet IC-Health afin d’achever les programmes de formation en ligne déjà en cours.

1.3.

Le CESE fait valoir que les différentes générations nécessitent des approches différenciées s’agissant de l’amélioration de la maîtrise des outils numériques de santé, en fonction de leur degré d’utilisation des outils numériques dans la vie quotidienne. Les citoyens, quels que soient leur âge, leur culture, les personnes affectées par différents types de handicaps ainsi que les migrants doivent être associés à l’élaboration des sources d’information numériques. L’accent doit être mis sur les personnes appartenant aux générations les plus âgées, dont on attend de plus en plus qu’elles s’impliquent dans la gestion de leur bien-être et de leurs soins de santé.

1.4.

Le CESE recommande d’élargir les efforts aux informations numériques sur les médicaments et les dispositifs médicaux, et d’encourager toute organisation susceptible d’y contribuer. Le CESE recommande d’établir un lien avec les efforts déployés par l’Agence européenne des médicaments (EMA), les Directeurs des agences des médicaments (HMA) et la Commission européenne.

1.5.

De l’avis du CESE, les solutions de santé en ligne pourraient constituer des outils efficaces et d’un bon rapport qualité-prix dans les systèmes de soins de santé. Des outils numériques attrayants pourraient accroître l’ouverture des citoyens vis-à-vis des médias numériques.

1.6.

Toutefois, le CESE souligne que les avantages des services numériques ne peuvent être pleinement exploités que si les personnes sont en mesure d’accéder à l’information fournie, et de la comprendre de manière adéquate. Des connaissances fondamentales en lecture et en mathématiques sont des conditions préalables essentielles de l’éducation à la santé en ligne et doivent être acquises au cours du parcours scolaire dans le but de rendre les citoyens autonomes.

1.7.

Le CESE insiste sur le fait que le plan d’action pour la santé en ligne doit favoriser une large collaboration et couvrir toute la durée de vie des individus. Au niveau local, le point de départ de la maîtrise des outils numériques dans le domaine de la santé se situe au jardin d’enfants et à l’école. Il appartient aux éducateurs, aux enseignants, aux parents et aux grands-parents de concevoir des initiatives visant à améliorer la maîtrise des outils numériques de santé, en collaboration avec le personnel concerné des services de santé (par exemple les médecins, sages-femmes, infirmiers, pharmaciens et auxiliaires de vie). L’étroite collaboration entre médecins généralistes et pharmaciens, notamment, peut contribuer à accroître la maîtrise des outils numériques de santé chez les patients. À l’avenir, cette expérience devra être intégrée à l’élaboration du plan d’action. Les États membres doivent élaborer et mettre en œuvre un plan d’action visant à améliorer la maîtrise des outils numériques dans le domaine de la santé.

2.   Introduction

2.1.

L’information numérique joue un rôle croissant dans la société. La maîtrise des outils numériques de santé par les citoyens est un facteur essentiel de la réussite du déploiement de la santé en ligne. L’on entend par maîtrise des outils de santé la capacité à rechercher, comprendre, évaluer et utiliser concrètement les informations relatives aux soins de santé, à la prévention et à la promotion de la santé. Cela suppose d’une part des compétences personnelles et, d’autre part, des conditions-cadres favorables telles que la fourniture d’informations dans un langage compréhensible. Ce sont là les premières étapes; l’utilisation de l’internet à cette fin exige des compétences supplémentaires.

2.2.

Les aspects liés à la maîtrise des outils numériques de santé peuvent être décrits de manière très pragmatique: il ne s’agit pas tant de trouver des informations sur la santé que de savoir où les chercher, si les sources auxquelles l’on a accès fournissent des informations adéquates et utiles et si elles sont fiables (2).

2.3.

Les «outils de santé numériques» désignent les services numériques qui fournissent des informations générales en matière de santé aux utilisateurs, les applications de santé (suivi et contrôle d’un traitement), les outils qui aideront les personnes à rester chez elles (surveillance à distance pour les personnes âgées), les dossiers médicaux partagés, les outils numériques destinés aux professionnels de la santé (service de messagerie sécurisé, télémédecine, téléexpertise) et les informations numériques générales dans le domaine de la santé.

2.4.

En 2012, la Commission européenne a publié un plan d’action qui recense les obstacles au déploiement complet de solutions numériques au sein des systèmes de santé européens. Ce plan est actuellement mis en œuvre sous l’intitulé «Plan d’action pour la santé en ligne 2012-2020 – Des soins de santé innovants pour le vingt-et-unième siècle» (3).

2.5.

Une communication de la Commission intitulée: «Permettre la transformation numérique des services de santé et de soins dans le marché unique numérique; donner aux citoyens les moyens d’agir et construire une société plus saine» est venue compléter en avril 2018 les objectifs de ce plan d’action pour la santé en ligne (4).

2.6.

Cette communication, citant le rapport sur l’état de la santé dans l’Union européenne (5), conclut que la seule manière de garantir que nos systèmes de santé et de soins restent adaptés aux objectifs poursuivis est de les repenser fondamentalement. L’un des piliers à cet égard est l’intégration de solutions numériques dans le domaine de la santé et des soins. Ces outils numériques peuvent transformer les connaissances scientifiques en outils permettant aux citoyens de rester en bonne santé.

2.7.

Les financements de l’Union européenne soutiennent la recherche et l’innovation en matière de solutions numériques dans le domaine de la santé et des soins dans le cadre du programme Horizon 2020 (6) et de partenariats public-privé. Dans son examen à mi-parcours de la mise en œuvre de la stratégie pour le marché unique numérique (7), la Commission a indiqué son intention de prendre des mesures supplémentaires dans trois domaines:

l’accès sécurisé des citoyens à leurs propres données en matière de santé et le partage de ces données avec d’autres États membres;

l’amélioration de la qualité des données dans le but de faire progresser la recherche, la prévention des maladies et la personnalisation des soins de santé;

des outils numériques visant à l’autonomisation des citoyens et à des soins centrés sur la personne.

En outre, il convient d’encourager les États membres à mettre au point des mécanismes permettant d’identifier et, dans la mesure du possible, de supprimer les sites internet contenant de la désinformation, ou encore de placer les sites web dignes de confiance de manière à les afficher en première position dans les résultats de recherches en ligne.

2.8.

Le bureau européen de l’OMS a publié (8) un aperçu très complet des projets en cours et leurs résultats dans son rapport HEN-57 (Réseau des bases factuelles en santé). Dans leurs conclusions, les auteurs affirment que le développement de compétences tout au long de la vie, y compris par le biais des activités préscolaires, de l’enseignement scolaire officiel et de la formation des adultes, est capital pour la maîtrise des outils de santé. Ils préconisent des initiatives propres à promouvoir le développement de politiques globales de promotion des connaissances dans le domaine de la santé dans les États membres ainsi que l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation rigoureuse des activités stratégiques afin de démontrer les avantages des politiques de l’éducation à la santé pour les citoyens et la société.

2.9.

La Commission européenne a inclus des programmes visant à renforcer la maîtrise des outils numériques de santé dans ses stratégies de recherche et a également financé des projets importants au titre du 7e PC et d’Horizon 2020 (9).

2.10.

Il est reconnu que les personnes plus âgées et/ou ayant un niveau d’éducation plus faible ont une moins bonne maîtrise des outils numériques de santé. Ce retard a une incidence sur la possibilité d’impliquer ces personnes dans la gestion de leurs soins de santé ainsi que sur leur capacité à accéder à l’information en matière de santé. Le projet IROHLA offre des solutions destinées aux générations plus âgées (10). Le CESE (11) a déjà abordé de nombreux aspects de l’insertion numérique (conformément à la déclaration de Riga (12)).

2.11.

Le projet IC-Health (13) (IC-Santé) comporte un nombre considérable d’analyses et de ressources au sujet de la culture numérique en matière de santé. IC-Health est un projet qui vise à mettre en place une série de cours en ligne ouverts à tous (MOOC), destinés à contribuer à l’amélioration de la maîtrise des outils numériques de santé par les citoyens européens et à promouvoir la compréhension des outils numériques de santé et de la manière dont ils peuvent servir à améliorer les résultats en matière de santé. L’on est actuellement en train de résumer les résultats de ce projet.

3.   Observations générales

3.1.

La question de la promotion de la culture et des compétences en la matière devient d’autant plus importante compte tenu du défi sociétal que constitue le changement démographique. Afin de maintenir la viabilité des systèmes de santé et de soins, notre société qui vieillit à un rythme rapide nécessite un renforcement des formations afin de mettre en adéquation les compétences des professionnels de la santé avec les nouveaux besoins, une gestion optimale des dépenses en matière de santé, ainsi qu’une meilleure maîtrise des outils numériques par la population en général.

3.2.

Le CESE soutient les initiatives de la Commission européenne axées sur la transformation du système de santé et qui visent à promouvoir l’autonomisation des citoyens. Il estime toutefois que dans le même temps, les citoyens doivent être en mesure d’utiliser ces outils numériques; il y a lieu pour ce faire de mettre en œuvre un plan d’action pour améliorer à la fois l’éducation à la santé et la maîtrise des outils numériques de santé dans l’ensemble des États membres.

3.3.

Certains pays européens, préoccupés par les résultats de l’étude comparative de l’OCDE (14), ont réalisé leurs propres analyses. La France (2004-2005) a découvert qu’elle compte environ 3,1 millions d’adultes classés comme analphabètes fonctionnels (soit 9 % de la population en âge de travailler). Une étude menée au Royaume-Uni en 2011 a révélé que 14,9 % (plus de 5 millions) de Britanniques étaient en situation d’analphabétisme fonctionnel. Une étude réalisée en Allemagne a montré que 4,5 % de la société allemande située dans la tranche d’âge de 18 à 64 ans est complètement analphabète (sans aucune compétence en lecture ni en écriture). L’analphabétisme fonctionnel touche 10 % des personnes de cette tranche d’âge. La population totale des analphabètes complets et fonctionnels est de 7,5 millions d’habitants (15). Cette réalité doit être prise en compte lorsque l’on parle de la maîtrise de la santé numérique.

3.4.

Le CESE souligne que toutes les professions dans les domaines de l’éducation, de la recherche et de la santé doivent collaborer. Les membres du CESE doivent promouvoir cette coopération par l’intermédiaire de leurs organisations. Tous ces efforts doivent avoir pour objectif une utilisation accrue, bien informée et pertinente des outils numériques dans toutes les couches de la société.

3.5.

Le CESE recommande de se référer aux résultats du projet IC-Health afin de poursuivre la mise en œuvre des priorités de la Commission européenne en matière de santé en ligne, destinées à sensibiliser davantage l’opinion publique aux solutions dans ce domaine, qui figurent dans la communication d’avril 2018 (16). Le programme européen Horizon Europe 2020 (17) devrait assurer le suivi des actions et des conclusions qui seront tirées de ce projet, et valoriser l’expérience acquise dans le cadre de l’utilisation des MOOC.

3.6.

Il est important que les citoyens, quel que soit leur âge, leur culture et leurs différents types de handicaps éventuels, participent aux processus liés à la maîtrise des outils numériques de santé. Le CESE, soucieux de rallier les professionnels de la santé et les travailleurs à domicile aux changements susceptibles de se produire dans leur environnement de travail et de répondre à leurs besoins, conseille d’associer également ces catégories à la mise au point des nouveaux outils numériques. Cela concerne notamment la formation initiale et la formation continue des infirmiers.

3.7.

Le CESE prend acte de l’initiative du groupe de réflexion «Les amis de l’Europe» («Friends of Europe») consistant à repenser le système de santé en Europe et à développer des idées afin de parvenir à des «choix intelligents en matière d’investissement – ou de désinvestissement – dans les soins de santé» (18). L’objectif est de procéder au recensement et à la suppression des mesures inefficaces dans le système des soins de santé, et de veiller ainsi à ce que les fonds supplémentaires disponibles contribuent à de meilleurs résultats en matière de santé.

3.8.

Le CESE soutient l’approche des «Amis de l’Europe» consistant à responsabiliser les citoyens en bonne santé, quelle que soit leur classe d’âge, conformément à la recommandation du Conseil européen de 2018 sur les compétences clefs pour l’éducation et la formation tout au long de la vie (19). Les individus doivent prendre conscience «des éléments constitutifs d’un esprit, d’un corps et d’un mode de vie sains». C’est là une base solide sur laquelle s’engager et mobiliser les citoyens. Les États membres devraient considérer cette approche comme une priorité transversale englobant l’éducation, la santé, et les politiques sociales et de l’emploi, ainsi que comme un mécanisme essentiel permettant de réduire les dépenses de santé et d’améliorer les résultats en matière de santé. Par exemple, si la fermeture d’un hôpital entraîne toujours des réactions négatives, celle-ci peut parfois s’avérer nécessaire lorsque l’établissement n’est plus rentable, ou ne parvient pas à fournir les soins qu’il promet. Des éléments d’automatisation peuvent simplifier le processus d’organisation des soins. Par exemple, au cours d’un récent projet pilote mené dans trois hôpitaux du Royaume-Uni, des assistants virtuels fonctionnant grâce à l’intelligence artificielle étaient huit fois plus productifs que les secrétaires médicaux pour gérer l’orientation de routine vers des spécialistes, ainsi que les résultats d’examens.

3.9.

Les citoyens informés prennent des mesures pour améliorer leur santé. Cela conduit à des modes de vie plus sains, à un recours accru à la vaccination, à un vieillissement en bonne santé, à une plus grande adhésion aux traitements et à une plus grande utilisation des services de prévention des comportements à risque. Les outils numériques pourraient donc être utiles dans le domaine de l’éducation thérapeutique, en permettant de sensibiliser davantage les personnes souffrant de maladies chroniques à leur traitement.

3.10.

Le CESE (20) a déjà souligné l’importance de la maîtrise des outils numériques de santé dans le cadre de la vaccination afin de permettre d’accéder à des informations numériques au sujet des vaccins et de les comprendre.

3.11.

Les services numériques peuvent notamment aider les personnes faiblement qualifiées (par exemple, des personnes ayant des difficultés pour lire ou illettrées), ainsi que les personnes malvoyantes, si l’information est fournie sous la forme de vidéos ou de podcasts. De même, des programmes de formation destinés aux migrants disposant de compétences limitées dans la langue de leur pays d’accueil pourraient être soutenus de cette manière. Il convient de prévoir des mesures et des ressources appropriées pour permettre à ces catégories de personnes d’avoir accès aux outils de santé numériques.

3.12.

Les individus, quel que soit leur âge ou leur état de santé, doivent pouvoir utiliser ces ressources numériques (sites web, applications) pour trouver les réponses aux questions qu’ils se posent et gérer eux-mêmes leurs données en matière de santé (par exemple les ordonnances en ligne supervisées par des professionnels de la santé, les données numériques relatives à leur santé, les informations numériques sur leurs médicaments, etc.). Les caisses d’assurance maladie, par exemple, devraient systématiquement éduquer leurs assurés. D’autres mesures relatives à l’assurance maladie sont couvertes par une initiative du CESE (21).

3.13.

Les programmes scolaires et d’autres initiatives d’ordre pédagogiques destinés aux enfants et aux adolescents devraient également être utilisés pour stimuler le dialogue entre les générations. La Fondation allemande «Lire» (Stiftung Lesen) (22) et d’autres projets seront abordés dans le cadre de ce débat.

3.14.

Le CESE suggère d’examiner s’il y a lieu de diffuser des informations sur l’état de santé général par le biais des employeurs. Les outils numériques sont fréquemment utilisés dans le cadre du travail. La formation relative à la prévention des accidents sur le lieu de travail est devenue courante. Elle pourrait être élargie à l’information sur la santé.

3.15.

Le CESE réaffirme l’importance de former les patients afin que ces derniers puissent accéder à leurs données et en faire usage – ces données sont souvent, à l’heure actuelle, «verrouillées» dans les systèmes d’information sur la santé, ce qui a été renforcé par le règlement général sur la protection des données (RGPD) (23); il est également indispensable d’inclure les connaissances en matière de santé en ligne dans les programmes de formation des professionnels de la santé (24).

4.   Observations particulières

4.1.   Infrastructures

4.1.1.

La Commission européenne a lancé plusieurs programmes destinés à renforcer les infrastructures techniques et à permettre une interaction transfrontalière.

4.1.2.

À titre d’exemple, les résultats de l’enquête menée au cours du projet IC-Health a révélé dans certains cas que les jeunes comme les personnes ayant un faible niveau d’alphabétisation préféreront parfois les appareils mobiles aux ressources en ligne sur ordinateur. Le CESE propose d’examiner ces aspects de manière plus approfondie et de les intégrer aux considérations qui sous-tendront les programmes futurs.

4.2.

La Commission européenne, l’Agence européenne des médicaments et les chefs des agences des médicaments ont entamé un processus visant à établir des principes fondamentaux pour les informations électroniques relatives aux produits (ePI) sur les médicaments (25). Il existe déjà, dans de nombreux États membres, des bases de données comportant des informations électroniques relatives aux produits approuvées par les autorités de réglementation et simples d’utilisation pour les patients. L’importance de la fiabilité des informations électroniques relatives aux produits sur les médicaments a déjà été exposée en détail par le Comité dans son avis sur «La santé numérique en passe de devenir la règle? les informations électroniques pour une utilisation sûre des médicaments» (26). Cette approche et la priorité axée sur la fiabilité des informations numériques devraient également inclure les dispositifs médicaux.

4.3.

Le CESE estime que ces informations pourraient être utilisées pour améliorer les connaissances dans le domaine de la santé, en complément des sources examinées jusqu’à présent. L’on pourrait par exemple envisager des informations sur les médicaments approuvées par les autorités de réglementation. L’on disposerait ainsi en permanence d’informations actualisées sur les médicaments et les traitements. Le CESE estime que l’on pourrait, de cette façon, assurer une utilisation sûre et efficace des médicaments, renforcer l’adhésion à la médication et optimiser le résultat du traitement.

4.4.   Autres besoins en matière de recherche

4.4.1.   Recherche et développement technologiques

4.4.1.1.

Le CESE recommande d’explorer les synergies possibles au moyen de partenariats public-privé supplémentaires associant des citoyens de tous âges et de tous horizons, afin de concevoir des sources d’information numériques attrayantes et d’autres outils numériques qui évoluent au même rythme que les sources d’information numériques commerciales, les médias sociaux et le divertissement numérique, et qui puissent être utilisés, par exemple, lorsque des mesures proposées par la Commission européenne sont mises en œuvre. Ces partenariats doivent respecter une charte concernant la fiabilité des données et l’absence de conflits d’intérêts.

4.4.2.   Aspects liés à l’éducation

4.4.2.1.

L’utilisation de l’internet varie fortement selon les milieux sociaux et les classes d’âge. De nombreuses personnes utilisent les réseaux sociaux, mais pas les plateformes d’information. Un petit nombre n’utilise jamais l’internet. Conformément aux précédentes initiatives (27) du CESE, des recherches doivent être effectuées afin de répondre aux questions suivantes:

Comment encourager l’apprentissage actif et permanent, qu’il s’agisse de la manière d’accéder à l’information ou de savoir faire la différence entre sources numériques fiables et non fiables, par exemple en promouvant les cours en ligne ouverts à tous sur la maîtrise des outils numériques de santé? Des mesures importantes de soutien et de formation sont nécessaires pour remédier à ce problème, étant donné que 47 % de la main-d’œuvre de l’Union européenne ne dispose pas des compétences numériques nécessaires (28).

Comment proposer des ressources (par exemple des méthodes à caractère ludique) capables de susciter chez les citoyens un intérêt pour l’utilisation de sources d’information numériques fiables?

Comment pouvons-nous soutenir la transposition de programmes performants? Voir par exemple «Sophia» (29), un outil d’assurance maladie innovant en France pour les patients souffrant de diabète ou de BPCO (pneumopathie chronique obstructive), sur la base d’un accompagnement médical. Le programme Sophia s’inspire d’expérimentations étrangères en matière de gestion des maladies menées aux États-Unis, en Allemagne et au Royaume-Uni (30).

Quel rôle les différentes institutions de formation (universités, centres de formation pour adultes, etc.) peuvent-elles jouer dans la consolidation des nombreuses compétences nécessaires – telles que la capacité à travailler avec les nouvelles technologies, à s’investir et à gérer sa santé de manière socialement bénéfique et à transmettre un savoir-faire social et technique?

Comment exploiter les matériaux existants (par exemple les informations sur les médicaments approuvés)?

Comment encourager les échanges de connaissances et d’expériences dans le domaine de la maîtrise des outils de santé et des compétences numériques entre les générations?

4.4.2.2.

Le projet IC-Health a révélé une nouvelle approche de l’apprentissage, à savoir l’«édudivertissement» (divertissement éducatif): comprendre le processus de changement d’attitude et de comportement suppose de procéder à des expériences plus contrôlées afin de mettre au jour les facteurs cognitifs et/ou affectifs susceptibles d’évaluer les effets de l’édudivertissement et de recenser les conditions dans lesquelles les discours de l’édudivertissement peuvent fonctionner ou pas.

4.4.3.

Nécessité d’une stratégie plus large de l’éducation à la santé:

La maîtrise des outils de santé en ligne est fonction à la fois du contexte et du contenu. Une stratégie en matière de maîtrise des outils numériques de santé en Europe est souhaitable pour renforcer les droits des citoyens en matière de santé, en mettant notamment l’accent sur la culture numérique en matière de santé tout au long de la vie.

La maîtrise des outils numériques de santé allie compétences numériques et état de santé. Acquérir ces capacités suppose une éducation et une formation spécifiques.

Une stratégie et un plan de mise en œuvre sont nécessaires.

4.4.4.

Nécessité de l’égalité d’accès à l’internet:

Le monde numérique n’est accessible qu’aux personnes ayant accès à l’internet. Comment combler la fracture numérique en Europe, qui exclut des régions, des îles et des zones rurales de l’accès à l’internet, ce qui signifie qu’à l’avenir, les citoyens seront exclus de l’accès aux soins de santé en ligne? L’Europe et les États membres doivent consentir des investissements importants pour garantir à tous les citoyens un accès à l’internet, si nous voulons que chacun puisse bénéficier des avantages de ces évolutions.

De nombreux services publics s’appuient sur l’internet et leur utilisation nécessite des compétences et des ressources spécifiques. Un fossé numérique peut accroître les inégalités dans les sociétés européennes de bien-être.

L’environnement, le cadre de vie, les communautés et les villes peuvent contribuer à faciliter un accès libre et ouvert à l’internet afin de permettre aux citoyens de participer activement à la société.

Le partenariat public-privé peut contribuer à offrir un accès gratuit à l’internet pour tous en Europe.

L’accès à l’internet est un droit de l’homme, à une époque où les administrations dépendent à ce point des services numériques.

Bruxelles, le 21 mars 2019.

Le président

du Comité économique et social européen

Luca JAHIER


(1)  Ce projet a bénéficié d’un financement du programme pour la recherche et l’innovation «Horizon 2020» de l’Union européenne dans le cadre de la convention de subvention no 727 474.

(2)  https://ichealth.eu/wp-content/uploads/2018/10/ICH-FC_Final-Presentation_allDay.pdf.

(3)  COM(2012) 736 final.

(4)  COM(2018) 233 final.

(5)  État de la santé dans l’Union européenne, «Rapport d’accompagnement 2017», https://ec.europa.eu/health/state/summary_fr.

(6)  COM(2011) 808 final.

(7)  COM(2017) 228 final.

(8)  http://www.euro.who.int/__data/assets/pdf_file/0006/373614/Health-evidence-network-synthesis-WHO-HEN-Report-57.pdf?ua=1.

(9)  JO L 347 du 20.12.2013, p. 104.

(10)  https://www.age-platform.eu/project/irohla.

(11)  JO C 318 du 29.10.2011, p. 9.

(12)  UE, Déclaration ministérielle «Les TIC pour une société inclusive», Riga, Lettonie, 11.6.2006, pt 4.

(13)  https://ichealth.eu/.

(14)  http://www.oecd.org/fr/competences/piaac/competencesdesadultesdocumentsparpays.htm.

(15)  https://ec.europa.eu/epale/fr/blog/analfabetyzm-funkcjonalny-doroslych-w-krajach-bogatego-zachodu.

(16)  COM(2018) 233 final.

(17)  COM(2018) 435 final.

(18)  https://www.friendsofeurope.org/event/smart-disinvestment-choices-healthcare.

(19)  https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32018H0604(01)&rid=7.

(20)  JO C 440 du 6.12.2018, p. 150.

(21)  JO C 434 du 15.12.2017, p. 1.

(22)  https://www.stiftunglesen.de/.

(23)  JO L 119 du 4.5.2016, p. 1.

(24)  JO C 271 du 19.9.2013, p. 122.

(25)  https://www.ema.europa.eu/NL/events/european-medicines-agency-ema-heads-medicines-agencies-hma-european-commission-ec-workshop.

(26)  JO C 13 du 15.1.2016, p. 14.

(27)  JO C 13 du 15.1.2016, p. 14.

(28)  JO C 13 du 15.1.2016, p. 161.

(29)  Nom du Service commun de surveillance de l’assurance maladie.

(30)  https://www.oecd.org/governance/observatory-public-sector-innovation/innovations/page/sophia.htm.


AVIS

5.7.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 228/7


Avis du Comité économique et social européen sur «Des possibilités d’emploi pour les personnes inactives sur le plan économique»

(avis d’initiative)

(2019/C 228/02)

Rapporteur: José CUSTÓDIO LEIRIÃO (Pt-III)

Décision de l’assemblée plénière

15.2.2018

Base juridique

Article 29, paragraphe 2, du règlement intérieur

Avis d’initiative

Compétence

Section spécialisée «Emploi, affaires sociales et citoyenneté»

Adoption en section spécialisée

13.2.2019

Adoption en session plénière

20.3.2019

Session plénière no

542

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

99/20/6

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) constate l’existence d’une fraction substantielle de la population qui continue à ne pas être occupée professionnellement et ne pas entrer pas dans les statistiques du chômage alors qu’elle recèle un important potentiel pour l’emploi et la création de richesse, et il presse la Commission et les États membres de placer au premier rang de leurs priorités d’action une stratégie destinée à faire face à la question du grand nombre de personnes économiquement inactives.

1.2.

Alors que la reprise économique prend vigueur en Europe, le CESE estime que la Commission et les États membres doivent également axer leurs efforts sur des politiques qui réactivent et qui ouvrent des perspectives d’emploi pour tous, en particulier en faveur des personnes qui se trouvent être les grands exclus du marché du travail mais souhaitent travailler et sont à même de le faire.

1.3.

Conscient qu’une recommandation générale sur l’inclusion active des personnes exclues du marché du travail a déjà été émise en 2008 (1) et soucieux d’éviter une approche décousue, le CESE recommande que la Commission évalue les progrès réalisés et, s’il y a lieu, qu’elle adopte une nouvelle stratégie, globale et assortie de plans d’action et d’objectifs assignés aux États membres pour chaque sous-groupe de personnes économiquement inactives. Elle devrait comporter davantage d’innovations sociales, détailler plus précisément les actions destinées à obtenir des résultats et témoigner d’une volonté accrue d’intégrer dans le marché du travail cette population qui souhaite travailler.

1.4.

Le CESE recommande à la Commission européenne d’encourager les États membres à donner plus d’efficacité à leurs politiques du marché du travail et à garantir que leurs services publics de l’emploi soient en mesure de fournir une assistance plus ciblée aux personnes qui souhaitent intégrer le marché de l’emploi, en tenant compte de leurs capacités et de leurs ambitions.

1.5.

Pour garantir que les politiques mises en œuvre soient fondées sur des réalités, le CESE conseille de créer dans chaque État membre une plate-forme qui récolte et analyse des informations sur cette population, concernant notamment les différentes caractéristiques de ses sous-groupes, les motivations des personnes concernées vis-à-vis de l’emploi, le type de travail qu’elles souhaitent effectuer, ainsi que leurs compétences, de manière que l’offre et la demande puissent s’articuler plus aisément et satisfaire ainsi les aspirations de chaque sous-catégorie de la population économiquement inactive qui est désireuse de travailler.

1.6.

Si l’on étudie plus précisément le sous-groupe des personnes handicapées, en particulier en se plaçant dans une perspective sociale et axée sur l’emploi, on constate qu’elles ont certes enregistré une certaine amélioration entre 2011 et 2016 mais qu’elles n’en continuent pas moins à se heurter à des obstacles et qu’elles souffrent toujours d’un retard significatif dans le domaine professionnel et dans leur qualité de vie. Le CESE a la conviction que des efforts concertés sont nécessaires, en particulier pour ce qui concerne l’accès à l’enseignement supérieur et les dispositions spéciales en matière de soins de santé, afin de favoriser les possibilités d’emploi pour les personnes handicapées dont le niveau d’éducation est faible. En outre, le CESE presse les États membres de l’Union européenne (UE) de créer un système de quotas d’emplois pour les personnes handicapées, qui s’applique aux institutions et aux entreprises publiques, ainsi qu’à celles du secteur privé, en fonction du volume de leurs effectifs et de leur chiffre d’affaires.

1.7.

Si l’on prend en considération la grande hétérogénéité que présente la population inactive et les multiples barrières auxquelles elle se heurte, son intégration ou sa réintégration sur le marché du travail pose un défi qui doit être relevé par tous les États membres. Le CESE considère que lorsqu’ils doivent élaborer les politiques publiques ou d’autres initiatives pour parvenir effectivement à relever ces défis, par exemple en augmentant l’offre relevant du public en matière de crèches, qui est une condition préalable décisive pour que les intéressés soient libérés des tâches de soins familiaux et puissent prendre leur place sur le marché du travail, il est capital que les décideurs politiques, dans chaque État membre, aient une connaissance et une compréhension approfondies de ces barrières et des spécificités de chaque sous-groupe, tout en tenant compte de la problématique de l’équilibre entre les hommes et les femmes.

1.8.

En outre, il est primordial, de l’avis du CESE, que les États membres améliorent l’articulation entre les services locaux de l’emploi, les municipalités et les différentes branches de la sécurité sociale, afin d’avoir davantage de chances d’atteindre cette population, ainsi que de l’encourager et l’inciter à travailler.

1.9.

Le CESE prône que les États membres lancent, le cas échéant dans le cadre des services publics locaux (municipalités), des activités spécifiques propres à développer et mettre à jour les capacités et compétences de la population économiquement inactive et des autres groupes exclus en vue de leur intégration dans le marché de l’emploi en tenant compte de leurs aptitudes.

1.10.

Étant donné que la population économiquement inactive compte nombre de personnes qui ont le potentiel pour intégrer le marché du travail de manière classique, le CESE insiste pour que la Commission et les États membres entreprennent de créer des dispositifs incitatifs, ciblés et avantageux, en faveur des entreprises qui recrutent des travailleurs dans cette situation d’inactivité économique. Une des manières de procéder consiste à mettre en place des mesures, législatives ou non, pour garantir que le Fonds social européen couvre l’intégralité des coûts que la formation de ces personnes requiert afin que les entreprises puissent les employer. En parallèle, il est également indispensable que l’Union européenne encourage ses États membres à promouvoir des conditions de travail attrayantes, des rémunérations décentes et des régimes de sécurité sociale qui incitent la population inactive à investir le marché du travail et à participer à la création de richesse et de bien-être économique, social et environnemental.

1.11.

La confiance des citoyens à l’égard de l’Union européenne et leur sentiment d’en être partie prenante seront également tributaires de sa capacité à encourager efficacement l’inclusion et le bien-être de chacun d’entre eux, tout en respectant leur diversité.

1.12.

Le CESE appelle la Commission et les États membres à garantir que l’industrie 4.0 et le développement des nouvelles technologies tiennent dûment compte des évolutions du monde du travail, en produisant des effets bénéfiques tant pour les travailleurs que pour les entreprises.

1.13.

Le CESE propose une réduction des horaires de travail hebdomadaire, à commencer par ceux des services publics, de manière à offrir ainsi davantage de possibilités d’emploi pour tous.

2.   Introduction

2.1.

Selon la définition de l’Organisation internationale du travail (OIT), on considère que les personnes économiquement inactives sont celles qui ne travaillent pas, ne cherchent pas d’emploi ou ne sont pas disponibles pour travailler. Le présent avis a pour objectif d’attirer l’attention de la Commission et des États membres sur les besoins spécifiques de cette population, que les décideurs politiques ont marginalisée, exclue et oubliée dans le processus de définition des politiques actives en matière d’emploi et qui entend pourtant s’intégrer dans la société grâce à son activité et à son travail, de manière à contribuer à la création de richesse et au bien-être économique, social et environnemental.

2.2.

Des efforts sont déployés, notamment par les États, les organisations d’employeurs, les syndicats et les établissements d’enseignement et organismes de formation, afin de créer un marché du travail inclusif et de garantir que l’ajustement des niveaux de compétences suive le rythme des mutations technologiques. Ces actions restent cependant en-deçà des objectifs souhaités, comme le montrent les milliers d’offres d’emploi qui restent insatisfaites du fait de cet hiatus entre offre et demande, qui est à l’origine de forts déséquilibres sur le marché du travail. Cette inadéquation produit des effets négatifs pour la productivité, la compétitivité et le potentiel de croissance. Dans le même temps, il s’est créé des barrières à l’emploi qui ont amené à exclure de la population active des milliers de citoyens. Cette situation a abouti, par exemple à un chômage de longue durée chez les jeunes, de sorte que bien des gens, de tous âges, se trouvent n’entretenir qu’un lien fragile avec le marché du travail, contribuant ainsi à grossir les rangs de la population inactive au plan économique, dont ceux des personnes qui ne sont pas aux études, ni n’exercent un métier, ni ne sont en formation (NEET).

2.3.

Dans l’Union européenne, plus du quart des personnes qui appartiennent à la tranche d’âge de 15 à 64 ans sont classés dans la catégorie des inactifs (2). Elles ne sont pas reprises dans les statistiques officielles en matière d’emploi et se trouvent bien souvent marginalisées du point de vue économique et social, de sorte qu’elles ne disposent pas des ressources ou des ouvertures nécessaires pour participer pleinement à la société. Or, dans leur grande majorité, elles voudraient travailler (3).

3.   Observations générales

3.1.

Augmenter les taux d’emploi et créer des emplois en plus grande nombre et d’une meilleure qualité est et reste un objectif essentiel pour l’UE. Tous les États membres souscrivent à la stratégie européenne pour l’emploi, dont la mise en œuvre s’effectue au moyen du Semestre européen, la procédure annuelle qui promeut une coordination étroite des politiques entres les pays de l’UE et ses institutions (4). De manière tout à fait justifiée, les décideurs politiques ont mis l’accent sur les personnes qui ont perdu leur emploi à la suite de la crise financière, en s’efforçant de tracer des pistes bien dégagées pour la création de postes de travail. La Commission a particulièrement insisté sur des actions destinées aux jeunes, comme la garantie pour la jeunesse, de 2013 (5), l’initiative pour l’emploi des jeunes, de 2015 (6), ou la nouvelle stratégie pour la jeunesse pour 2019-2027 (2018) (7). Une autre initiative énergique a débouché sur la recommandation du Conseil du 15 février 2016 relative à l’intégration des chômeurs de longue durée sur le marché du travail (8). Le CESE appuie et salue ces actions, qui s’inscrivent dans la logique du socle européen des droits sociaux.

3.2.

Si l’offre et la demande d’emploi et la population professionnellement occupée ou provisoirement sans travail constituent des questions qui ont été étudiées à maintes reprises et ont donné lieu à diverses réflexions et stratégies de politiques actives de l’emploi, les études et les recherches consacrées à la population inactive sont très rares. L’un des premiers documents de la Commission à reconnaître explicitement les personnes se trouvant dans cette situation a été la recommandation 2008/867/CE qu’elle a adressée aux États membres sur l’inclusion active des personnes exclues du marché du travail, conseillant de lancer, en faveur de cette population, divers types de stratégies visant à l’intégrer sur le marché de l’emploi. En avril 2017, elle a publié un document de travail de ses services (9), évaluant jusqu’à quel point chacun des États membres a développé une approche plus intégrée des politiques actives d’inclusion. Sa conclusion a été que les progrès qu’ils ont réalisés dans la mise en œuvre des recommandations ont varié d’un pays à l’autre, que les stratégies nationales ont divergé dans de très larges proportions et que la mise en œuvre n’a abouti qu’à des résultats fort indigents. Depuis 2008, on n’a relevé aucune autre initiative de la Commission qui s’adresse à cette catégorie de population spécifique. Le CESE recommande à la Commission de publier une nouvelle stratégie globale, assortie de plans d’action et d’objectifs assignés aux États membres pour chaque sous-groupe de personnes économiquement inactives.

3.3.   Caractéristiques de la population inactive

3.3.1.

Les personnes inactives forment un groupe d’une taille imposante: en d’autres termes, on constate que dans la majeure partie des États membres de l’UE, il existe une partie substantielle de la population qui n’a pas d’occupation professionnelle et qui échappe aux statistiques du chômage, alors qu’elle recèle pourtant un potentiel pour travailler. Bien que dans l’UE, les politiques actives de l’emploi tendent à se concentrer essentiellement sur les personnes qui sont provisoirement sans emploi, le CESE considère qu’un effort supplémentaire doit être consenti pour établir des politiques d’emploi qui ciblent explicitement la population susmentionnée.

3.3.2.

La population inactive est hétérogène. La Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail (Eurofound) (10) en a étudié plus spécifiquement quatre grands sous-groupes, à savoir les personnes qui déclarent être en phase d’éducation, comme dans le cas des jeunes, celles qui sont au foyer, les retraités et les personnes handicapées. Ces différents sous-groupes marginalisés divergent fortement en ce qui concerne leurs caractéristiques et les obstacles qu’ils rencontrent, en rapport avec la santé, le vécu personnel, le niveau d’éducation et de formation et les besoins d’orientation de carrière ou de stages professionnels. En effet, le manque d’expérience professionnelle constitue le trait commun le plus fréquent chez les jeunes et les personnes au foyer, et il se retrouve le moins souvent chez celles qui sont handicapées et chez les retraités en âge de faire partie de la population active. En revanche, ces deux dernières catégories sont plus fréquemment touchées par des problèmes de santé et font état d’un niveau élevé d’exclusion, semblable à celui des chômeurs de longue durée. En général, les personnes inactives affrontent de multiples obstacles à l’emploi. Beaucoup d’entre elles aimeraient travailler, sous une formule ou une autre: les quatre cinquièmes environ affirment qu’elles souhaiteraient exercer un travail d’au moins quelques heures par semaine, tandis que pour la moitié, approximativement, elles désireraient le faire pour un horaire hebdomadaire de 32 heures ou plus (11). Cet indicateur nous amène à considérer que ces personnes économiquement inactives sont à la recherche d’un type de travail qui soit décent et adapté et qui excède un horaire hebdomadaire réduit à quelques heures, ce constat pouvant indiquer par ailleurs qu’elles pourraient se trouver dans des situations financières délicates. Le CESE considère que ce souhait positif de travailler doit inciter les décideurs politiques à concevoir des actions et initiatives qui prennent efficacement appui sur les caractéristiques de chacun des sous-groupes.

3.3.3.

Il s’impose également de clarifier quelle est la situation des personnes inactives lorsqu’elles font usage de leur droit à la mobilité. Selon des données de la Commission européenne, de 2014, quelque 3,7 des 14,3 millions d’Européens qui exercent ce droit à être mobiles à l’intérieur de l’UE sont des personnes économiquement inactives. Environ 80 % de ces citoyens inactifs au plan économique bénéficient de droits (résidence) et d’autres prestations à l’égal des membres économiquement actifs de leur famille avec lesquels ils vivent dans leur État membre d’accueil, et ils peuvent prétendre à être traités de la même manière que les personnes qui font partie du cercle familial des travailleurs nationaux. Toutefois, les 20 % restants pâtissent du manque de clarté et de transparence concernant leur droit à réclamer certaines prestations sociales dans le pays de l’UE qui les accueille. Le CESE invite la Commission à se pencher d’urgence sur cette lacune dans l’aide sociale et à légiférer pour remédier à ladite déficience.

4.   Le contexte

4.1.

Dans son rapport intitulé «Réinsertion: possibilités d’emploi pour les personnes économiquement inactives» (12), la Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail met en lumière certains des grands obstacles que rencontrent les quatre sous-groupes de la population inactive qu’elle a étudiés, à savoir les personnes déclarant être dans le circuit éducatif, comme les jeunes, celles qui sont au foyer, les retraités en âge de faire partie de la population active et, enfin, les personnes handicapées. L’absence d’expérience du travail constitue le motif d’inactivité le plus communément mentionné par les individus qui se rattachent aux sous-groupes des jeunes et des personnes au foyer; il représente un problème de moindre ampleur pour celles qui ont un handicap ou sont retraitées mais sont en âge de faire partie de la population active, lesquelles invoquent en général leurs problèmes de santé. Pour moitié environ de ses membres, le sous-groupe des personnes handicapées déclare subir un fort degré d’exclusion sociale, qui est répandu dans plusieurs États membres où un nombre élevé de personnes économiquement inactives butent sur des obstacles multiples pour entrer sur le marché du travail, cette situation ayant pour conséquence que les politiques actives de l’emploi deviennent plus difficiles et complexes à mener.

4.2.

Par ailleurs, il n’est pas certain que les personnes économiquement inactives soient enregistrées dans les services locaux de l’emploi, de sorte que ces organismes éprouvent de grandes difficultés pour les repérer et leur proposer des possibilités d’emploi. Le CESE soutient toutes les initiatives qui entendent encourager l’inscription de ces personnes auprès des services locaux de l’emploi. Il recommande de mettre en place, au sein de l’administration publique, une structure spécifiquement chargée de coordonner et de faciliter le suivi des personnes inactives et leur inscription auprès des services locaux de l’emploi, qui proposerait des mesures et des programmes attrayants qui correspondent à leurs besoins particuliers. Il est évident que lesdits services locaux de l’emploi sont confrontés à des défis extrêmement ardus, du fait de la complexité des marchés de l’emploi, qui n’offrent encore que des perspectives réduites d’activité aux personnes absentes depuis longtemps du monde du travail. En raison de cette situation générale, ils doivent supporter une importante charge de travail et se trouvent soumis à forte pression.

4.3.

Dans les États membres, il convient aussi que les décideurs politiques reconnaissent les difficultés qu’affrontent ces services locaux de l’emploi pour atteindre la population inactive au plan économique et répondre à ses besoins, qui sont complexes, ainsi que pour appréhender ses nombreux points vulnérables. Il s’impose d’élaborer pour chaque sous-groupe une stratégie, assortie de ses plans d’action, afin de pouvoir réussir efficacement à fournir des emplois aux personnes qui en cherchent et souhaitent travailler et prendre part à la création de richesse et de bien-être social et environnemental dans la société.

4.4.

Parmi les défis fondamentaux à relever, on peut notamment citer les exemples suivants:

il manque de services publics d’assistance aux enfants et aux personnes dépendantes, qui permettent de faciliter l’accès au marché du travail pour les personnes accaparées par les tâches ménagères, en l’occurrence principalement des femmes;

a)

les personnes qui sont économiquement inactives devraient avoir la possibilité d’accéder à des projets de perfectionnement professionnel ou de requalification tout en percevant des indemnités de chômage;

b)

par des mesures spécifiques et efficaces, il convient de faciliter, favoriser et promouvoir l’intégration des personnes handicapées, qui doivent bénéficier de plans d’intégration à l’emploi et de soutiens plus particuliers;

c)

l’attention doit également se porter sur d’autres groupes vulnérables, tels que les migrants ou les destinataires du programme Roma;

d)

il est clair que pour les motifs les plus divers, bien des personnes ont jeté l’éponge et qu’elles ne sont plus inscrites auprès des services de l’emploi, lesquels doivent donc renouer le lien indispensable avec elles et réactiver ainsi leurs possibilités d’accéder à un emploi;

e)

si au niveau des services publics de l’emploi dans les États membres, il est manifestement nécessaire de travailler plus et mieux, il est clair cependant qu’il s’agit là d’une tâche que bon nombre d’entre eux n’ont pas les moyens d’assumer, et il s’impose donc de recruter des fonctionnaires dotés des compétences adaptées pour trouver des emplois pour les personnes qui en cherchent un et, par ailleurs, souhaitent travailler;

f)

s’agissant de résoudre ces difficultés, il sera certainement possible de trouver dans certains États membres des «bonnes pratiques», qu’il conviendrait de transposer dans toute l’Union européenne;

g)

l’augmentation des salaires à des niveaux décents s’avère également indispensable dans l’UE.

4.5.

Les marchés du travail sont en phase de mutation, les réformes qui y ont été menées ayant abouti à y introduire un haut degré de diversité et de nouvelles formes d’activité. Les personnes qui travaillent selon des formules atypiques ont des emplois de moindre qualité et sont davantage exposées à être pauvres tout en ayant un travail (13). En 2017, 13,7 % des travailleurs de l’UE travaillaient à leur compte (14), 11,3 % étaient des temporaires (15) et 18,7 % occupaient des emplois à temps partiel (16). Appuyés par des programmes de soutien adéquats de l’Union européenne, les États membres se doivent d’augmenter leurs investissements dans l’enseignement, qui doivent être de qualité et produire un effet multiplicateur dans l’économie, en renforçant l’enseignement des sciences, de l’ingénierie, des technologies et des mathématiques, sur la base des valeurs et droits fondamentaux de l’Europe, tels que le socle européen des droits sociaux les a réinstaurés. Pour parvenir à affronter ces changements et à les assimiler, il convient d’intégrer, d’aider et de protéger la population en situation économiquement inactive, en faisant droit aux besoins spécifiques de ses différents sous-groupes. Le CESE recommande de créer un marché du travail qui soit réellement plus inclusif.

4.6.   Les barrières à l’emploi pour la population économiquement inactive

4.6.1.

Pour accéder à l’emploi, les personnes qui font partie de la population active, en âge de travailler (15-64 ans) mais dont le lien avec le marché du travail est inexistant ou ténu, se heurtent à diverses barrières qui les empêchent de s’intégrer totalement dans des activités professionnelles. Une appréhension exacte et approfondie de ces obstacles constitue un préalable obligé pour concevoir et mettre en œuvre les politiques d’intervention sur le marché du travail qui sont appropriées, de telle manière qu’elles soient correctement ciblées et bien adaptées aux spécificités de leurs différents destinataires. Nous recensons ci-après quelques-uns des défis qui se posent pour détecter les obstacles à l’emploi, car il est nécessaire de disposer d’informations et d’analyses précises et correctes pour saisir quelles sont ces entraves, même s’il est pratiquement impossible de le faire actuellement, et ce, pour les raisons suivantes:

a)

les actuels indicateurs agrégés du marché du travail contiennent peu d’informations pertinentes à ce propos et n’ont pas de lien clair avec la population économiquement inactive et les problématiques à traiter, et, par ailleurs, ils se situent dans la perspective des individus, sans les restituer dans leur contexte familial;

b)

l’attention se limite essentiellement aux chômeurs inscrits;

c)

les données disponibles sont très pauvres pour ce qui est des problèmes de santé, des responsabilités d’assistance à des membres de la famille ou des mesures incitatives.

4.6.2.

Les types d’obstacles les plus fréquents sont les suivants:

a)

l’absence d’une expérience professionnelle récente;

b)

le faible niveau d’éducation et de compétences;

c)

un acquis très limité ou inexistant en matière de travail;

d)

des limitations du point de vue de la santé;

e)

la charge de responsabilités pour assister des membres de la famille;

f)

la faiblesse des possibilités d’emploi;

g)

l’inexistence de tout antécédent pour ce qui est d’exercer une activité rémunérée;

h)

la présence de discrimination fondée sur l’âge, le sexe, le handicap ou d’autres facteurs, ainsi que les politiques suivies par certaines entreprises en matière de ressources humaines.

4.6.3.

Il est nécessaire d’adopter des instruments qui donnent aux demandeurs d’emploi davantage de visibilité et de motivation et facilitent leurs recherches. Ces dispositifs pourraient inclure:

a)

des conseils d’orientation de carrière;

b)

un portail sur l’internet, rassemblant des avis de vacance et des pistes d’emploi;

c)

des références et des indications adressées directement aux personnes intéressées;

d)

des dispositifs d’aide à la mobilité;

e)

des programmes de formation professionnelle;

f)

d’éventuelles subventions aux employeurs.

4.7.

Pour tâcher d’expliquer les situations individuelles et les difficultés sur le marché du travail, les États membres déploient souvent de puissants outils statistiques qui cernent le profil personnel des demandeurs d’emploi en utilisant les informations administratives. Ces instruments sont utiles pour personnaliser les programmes en faveur de l’emploi et les proposer aux personnes inscrites dans les centres de placement. Ils sont tributaires de la qualité desdites informations administratives, lesquelles présentent certains avantages, mais ont tendance à ne couvrir qu’un seul segment de la population au chômage, comme les demandeurs d’emploi inscrits. Il en résulte que généralement, les dispositifs sophistiqués qui dessinent des profils à partir de ces données ne se prêtent pas à être utilisés pour brosser un tableau plus vaste des obstacles auxquels se heurtent, pour accéder à l’emploi, les personnes qui n’ont aucun lien avec le marché du travail, ou seulement un rapport fort ténu.

4.8.

Appréhender les barrières qui s’opposent au travail n’est pas seulement primordial pour articuler entre eux les services fournis par les différentes institutions: cette démarche revêt également une importance capitale afin de déterminer quels sont les groupes qui peuvent bénéficier des programmes pour l’emploi ou les atouts en rapport avec ces catégories de personnes qui, en l’état actuel des choses, ne sont pas considérées comme des «clients» pour l’offre en matière de postes de travail ou pour les avantages fournis par les organismes qui assurent ces prestations. En conséquence, le CESE demande instamment que la Commission, travaillant ou non en coopération avec l’OCDE, élabore des modèles statistiques qui incluent les spécificités de la population économiquement inactive, afin qu’elle puisse intégrer avec succès les politiques actives d’emploi.

5.   Une stratégie européenne commune pour faire face aux changements technologiques et favoriser une société plus inclusive pour tous les Européens, dont les personnes économiquement inactives

5.1.

La Commission et les États membres doivent se concentrer sur toutes les mesures à mettre en œuvre pour parvenir à mieux intégrer sur le marché du travail chacun des sous-groupes de personnes économiquement inactives (17), sans se limiter à celles qui portent sur la formation ou les compétences. Ces dispositifs pourraient inclure:

a)

développer des services publics suffisants pour dispenser une assistance de qualité, qui réponde aux besoins d’aide, en particulier en faveur des enfants et des seniors, de manière à alléger la charge des personnes concernées qui sont à la recherche d’un emploi, des femmes principalement, et leur donner ainsi la possibilité de s’y consacrer sans inquiétude, alors qu’actuellement, elles ne sont pas en mesure de le faire, du fait de leurs obligations familiales (18);

b)

assurer un suivi et une évaluation d’impact effectifs des politiques publiques de réactivation de la population économiquement inactive, par exemple dans les domaines suivants:

1)

la collecte de données concrètes, s’agissant de recenser les obstacles et d’en dresser une cartographie en rapport avec les politiques existantes;

2)

la mise en œuvre, pour aborder les défis de l’exécution des mesures concernées ou faciliter la coordination et la coopération entre les parties intéressées;

3)

la politique de suivi et d’évaluation: mesurer les effets à court et long terme, analyser les résultats obtenus, en allant au-delà des simples perspectives de parvenir à obtenir un emploi pour prendre également en compte la qualité des postes concernés, ou encore relever quels sont les éléments qui fonctionnent bien et pour quels bénéficiaires;

c)

augmenter la croissance inclusive et le bien-être, en jouant, dans le développement du marché du travail, sur les dimensions suivantes: des emplois plus nombreux et de meilleur qualité, l’inclusion, la résilience et la capacité d’adaptation;

d)

adopter, en ce qui concerne la Commission comme les États membres, les principes d’action des «3P», à savoir:

1)

promouvoir un environnement dans lequel puisse prospérer un emploi de qualité;

2)

prévenir l’exclusion du marché du travail et protéger les individus contre les risques qu’il comporte;

3)

préparer aux dangers comme aux chances qu’il pourra offrir à l’avenir;

e)

créer dans les communes des emplois adaptés aux qualifications des travailleurs locaux qui sont économiquement inactifs, c’est-à-dire constituer des postes de travail qui correspondent aux compétences des personnes en situation d’inactivité économique et améliorer leurs performances grâce à des cours leur dispensant une formation appropriée;

f)

instaurer un climat propre à renforcer le dialogue social à tous les niveaux appropriés et en coopération avec les partenaires sociaux, en respectant leur autonomie, celle de la négociation collective, et à accroître la concertation avec d’autres organisations intéressées ressortissant à la société civile (19).

5.2.

On ne peut admettre que la stratégie bénéficie uniquement aux personnes qui ont déjà un emploi: une attention particulière doit être accordée aux jeunes qui ne travaillent pas ni ne suivent d’étude ou de formation (NEET), comme à toute personne qui est économiquement inactive, car ils constituent un sujet de préoccupation sous deux aspects, à savoir qu’ils posent un problème social et qu’ils aggravent le déficit de travailleurs qualifiés, dès lors que n’étant pas au travail, ils n’ont pas l’occasion d’accumuler une expérience concrète et que n’étant pas non plus aux études, ils ne sont pas en mesure d’acquérir des qualifications académiques plus adéquates, de sorte qu’ils risquent de se trouver totalement déconnectés du marché du travail. Il est paradoxal que les générations les plus qualifiées qui aient jamais existé ne se trouvent pas nécessairement être celles qui sont les mieux préparées à répondre aux besoins du marché de leur époque. L’Union européenne et ses États membres ne peuvent laisser sur le bord du chemin la génération qui possède les plus hautes qualifications de toute l’histoire.

5.3.

Les employeurs affirment éprouver des difficultés à trouver des travailleurs qualifiés, et ce problème représente un danger pour le potentiel de croissance et les nouveaux investissements dans l’industrie, ayant pour effet que les entreprises européennes continuent à subir des pertes de compétitivité et sont de plus en plus distancées (20): le manque de main-d’œuvre qualifiée pour répondre à la demande d’aujourd’hui peut aboutir à ce que demain, celle concernant les jeunes travailleurs qualifiés sera déficitaire.

5.4.

Il y a lieu de jeter des ponts pour mieux articuler l’éducation et l’acquisition de compétences (21) avec les réalités actuelles et futures des besoins du marché du travail, de manière à combler le fossé structurel que l’on constate aujourd’hui. Cette démarche implique:

a)

de miser sur des qualifications qui soient transférables;

b)

d’améliorer les liens entre les établissements d’enseignement et organismes de formation, les entrepreneurs et les syndicats;

c)

qu’ils soient jeunes ou non, de sensibiliser les chômeurs affectés par la pénurie de travail aux perspectives qui peuvent s’ouvrir pour eux sur le marché de l’emploi et aux exigences afférentes;

d)

de favoriser les partenariats entre les établissements d’enseignement et organismes de formation, les entreprises, les employeurs, le secteur public, les syndicats et les jeunes qui ne sont ni au travail, ni aux études ou en formation, ainsi que les autres groupes économiquement inactifs, y compris les migrants (22);

e)

de développer un programme d’action spécifique pour chacun des sous-groupes de la population économiquement inactive et d’en suivre et évaluer la mise en œuvre, en corrigeant les éventuelles dérives;

f)

de diminuer l’horaire hebdomadaire de travail, en commençant par les services publics, et de créer pour tous des possibilités de travailler.

5.5.

Pour l’Union européenne, la quatrième révolution industrielle et la numérisation représentent peut-être la dernière chance de rattraper, grâce à des investissements, stratégies et plans d’action adéquats, le retard qu’elle a accumulé par rapport à ses principaux concurrents, ainsi que d’effectuer sa conversion définitive vers une économie de la connaissance et du plein emploi, comme il était prévu dans la stratégie de Lisbonne, de l’an 2000. À défaut d’agir de la sorte, nous pourrons nous trouver confrontés à un phénomène de déclin, tant aux différents échelons de la société et de l’infrastructure productive de l’Europe que du point de vue des valeurs fondamentales que nous voulons assurément tous préserver.

5.6.

Pour atteindre cet objectif, il est nécessaire de nous engager, ou, en d’autres termes, de mener un genre de coopération qui fédère toutes les institutions de l’UE, les États membres, les pouvoirs publics du niveau national et local, les syndicats et les associations d’employeurs, ainsi que les entreprises et les autres organisations de la société civile, et dans lequel les intervenants assumeront chacun leurs responsabilités et deviendront autant de forces motrices tendant à ce que chaque citoyen ait sa chance de travailler et de contribuer à créer de la richesse et générer du bien-être économique, social et environnemental. En synthèse, le CESE presse les institutions, dans leur ensemble, qu’elles soient européennes ou nationales, publiques, gouvernementales, municipales ou privées, de mettre en œuvre des politiques publiques qui tendent à inclure, plutôt qu’à restreindre, comme elles l’ont fait ces vingt dernières années, avec pour résultat que des millions de personnes économiquement inactives se sont trouvées exclues, dans un mouvement qui a contribué à éloigner la société civile des instances européennes et mis en péril l’avenir de l’Europe.

Bruxelles, le 20 mars 2019.

Le président

du Comité économique et social européen

Luca JAHIER


(1)  Recommandation 2008/867/CE de la Commission du 3 octobre 2008 relative à l’inclusion active des personnes exclues du marché du travail (JO L 307 du 18.11.2008, p. 11).

(2)  Suivant les données d’Eurostat, consultées en janvier 2019, 26 % de la population (EU-28) de la classe des 15-64 ans était inactive au troisième trimestre de 2018.

(3)  Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail (2017), Réinsertion: possibilités d’emploi pour les personnes économiquement inactives, Office des publications de l’Union européenne, Luxembourg.

(4)  Voir la page web de la Commission européenne qui est consacrée à la stratégie européenne pour l’emploi.

(5)  JO C 271 du 19.9.2013, p. 101.

(6)  JO C 268 du 14.8.2015, p. 40.

(7)  COM(2018) 269 final, avis sur «Une nouvelle stratégie de l’Union européenne en faveur de la jeunesse»(JO C 62 du 15.2.2019, p. 142).

(8)  JO C 67 du 20.2.2016, p. 1.

(9)  Document de travail des services de la Commission — «Implementation of the 2008 Commission Recommendation on the active inclusion of people excluded from the labour market»(Mise en œuvre de la recommandation de la Commission de 2008 sur l’inclusion active des personnes exclues du marché du travail [SWD(2017) 257 final]).

(10)  Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail (2017), Réinsertion: possibilités d’emploi pour les personnes économiquement inactives, Office des publications de l’Union européenne, Luxembourg.

(11)  Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail (2017), Réinsertion: possibilités d’emploi pour les personnes économiquement inactives, Office des publications de l’Union européenne, Luxembourg.

(12)  Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail (2017), Réinsertion: possibilités d’emploi pour les personnes économiquement inactives, Office des publications de l’Union européenne, Luxembourg.

(13)  Projet de rapport conjoint sur l’emploi de la Commission et du Conseil accompagnant la communication de la Commission sur l'examen annuel de la croissance 2019 [COM(2018) 761 final].

(14)  Classe d’âge des 15 à 64 ans; données extraites du projet de rapport conjoint sur l’emploi de la Commission et du Conseil [COM(2018) 761 final]

(15)  Classe d’âge des 20 à 64 ans; données tirées d’Eurostat, février 2019.

(16)  Classe d’âge des 20 à 64 ans; données tirées d’Eurostat, février 2019.

(17)  JO C 237 du 6.7.2018, p. 1 ; JO C 125 du 21.4.2017, p. 10.

(18)  JO C 129 du 11.4.2018, p. 44; Égalité entre les hommes et les femmes sur les marchés européens du travail (JO C 110 du 22.3.2019, p. 26).

(19)  Avis SOC/577 sur «Le dialogue social pour l’innovation dans l’économie numérique», encore à paraître au Journal officiel (JO C 125 du 21.4.2017, p. 10).

(20)  Étude Skills Mismatches — «An Impediment to the Competitiveness of EU Businesses» (L’inadéquation des compétences: un obstacle à la compétitivité des entreprises de l’UE).

(21)  JO C 125 du 21.4.2017, p. 10; avis SOC/588 sur le «Train de mesures en faveur de l’éducation»(JO C 62 du 15.2.2019, p. 136), JO C 81 du 2.3.2018, p. 167 ; JO C 440 du 6.12.2018, p. 37; JO C 173 du 31.5.2017, p. 45; JO C 173 du 31.5.2017, p. 1.

(22)  Rapport d’information SOC/574 sur «Les coûts de la non-immigration et de la non-intégration» (JO C 264 du 20.7.2016, p. 19).


ANNEXE

Les propositions d’amendements suivantes, qui ont recueilli plus d’un quart des suffrages exprimés, ont été rejetées au cours des débats (conformément à l’article 59, paragraphe 3, du règlement intérieur):

Paragraphe 5.4

Supprimer le point f):

5.4

A Il y a lieu de jeter des ponts pour mieux articuler l’éducation et l’acquisition de compétences (1) avec les réalités actuelles et futures des besoins du marché du travail, de manière à combler le fossé structurel que l’on constate aujourd’hui. Cette démarche implique:

[…]

f) de diminuer l’horaire hebdomadaire de travail, en commençant par les services publics, et de créer pour tous des possibilités de travailler.

Exposé des motifs:

Réduire l’horaire hebdomadaire de travail ne constitue ni la bonne manière de résoudre la question des possibilités d’emploi, ni une démarche tournée vers l’avenir. En ce vingt et unième siècle, le monde du travail est en train de changer. Les mutations technologiques et les nouvelles formes d’activité ouvrent des perspectives et voies nouvelles pour insérer les personnes inactives dans le marché de l’emploi. En outre, le débat mené dans la section SOC a mis en lumière les expériences négatives qu’ont connues les États membres qui ont appliqué pareille mesure.

Résultat du vote:

Voix pour: 42

Voix contre: 63

Abstentions: 5

Paragraphe 1.4

Modifier comme suit:

1.4.

Le CESE recommande à la Commission européenne d’encourager les États membres à donner plus d’efficacité à leurs politiques du marché du travail et à garantir que leurs services publics de l’emploi soient en mesure de fournir une assistance plus ciblée aux personnes qui souhaitent intégrer le marché de l’emploi, en tenant compte de leurs capacités et de leurs ambitions, ainsi que de la demande actuelle sur ce marché.

Exposé des motifs:

Le rôle d’une assistance ciblée sera de s’entretenir avec les personnes concernées de leurs capacités et de leurs ambitions mais aussi de leur exposer la situation qui prévaut sur le marché de l’emploi et de les éclairer sur les meilleures possibilités qui s’offrent à elles pour se former ou se requalifier.

Résultat du vote:

Voix pour: 28

Voix contre: 66

Abstentions: 6


(1)  JO C 125 du 21.4.2017, p. 10; avis sur le «Train de mesures en faveur de l’éducation» (JO C 62 du 15.2.2019, p. 136); JO C 81 du 2.3.2018, p. 167; JO C 440 du 6.12.2018, p. 37; JO C 173 du 31.5.2017, p. 45; JO C 173 du 31.5.2017, p. 1.


5.7.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 228/16


Avis du Comité économique et social européen sur «Des systèmes éducatifs porteurs pour prévenir l’inadéquation des compétences — Quelle transition s’impose?»

(avis d’initiative)

(2019/C 228/03)

Rapporteure: Mme Milena ANGELOVA

Décision de l’assemblée plénière

15.2.2018

Base juridique

Article 29, paragraphe 2, du règlement intérieur

Avis d’initiative

Compétence

Section spécialisée «Emploi, affaires sociales et citoyenneté»

Adoption en section spécialisée

13.2.2019

Adoption en session plénière

21.3.2019

Session plénière no

542

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

130/0/2

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) se félicite qu’une plus grande attention soit portée dans l’Union européenne à l’éducation, à la formation ainsi qu’au développement et à l’utilisation des compétences, démarche que la Commission européenne a réitérée dans les initiatives qu’elle a présentées récemment (1). Tout en observant que l’éducation et la formation relèvent des compétences fondamentales des États membres, le Comité souligne l’importance stratégique de ces questions pour assurer l’avenir de l’Europe sur le plan de la prospérité économique, de l’amélioration de la cohésion et de la vie démocratique, et pour «répondre aux attentes des citoyens et à leurs inquiétudes sur l’avenir dans un monde en mutation rapide (2)».

1.2.

Le CESE s’inquiète des problèmes structurels considérables qui se posent sur les marchés du travail en raison de l’inadéquation des compétences, imputable pour partie à des facteurs technologiques et démographiques. Il demande par conséquent de concevoir et de mettre en œuvre des mesures bien ciblées sans plus attendre, et de les accompagner de dispositifs incitatifs et de recueils de bonnes pratiques à l’intention des États membres, afin de les aider à déployer, dans les secteurs où c’est nécessaire, les mesures d’adaptation qui appuieront efficacement leurs systèmes d’éducation et de formation, en vue de prévenir l’inadéquation des compétences et le gaspillage des talents.

1.3.

Le CESE estime que qu’il ne sera possible de remédier durablement et convenablement à l’inadéquation des compétences, aujourd’hui comme à l’avenir, qu’à condition que la Commission européenne et les États membres mettent au point des politiques ciblées et prennent des mesures concrètes pour améliorer et adapter de manière appropriée leurs systèmes d’éducation et de formation, dans le cadre d’un engagement en faveur de la gestion des talents et de systèmes globaux de gouvernance des compétences. Le Comité les invite dès lors à agir rapidement et efficacement en ce sens. Ces démarches devraient toutes avoir pour visée de faciliter l’adaptation inclusive et continue de la main-d’œuvre au nouvel environnement économique.

1.4.

Le CESE demande à la Commission européenne d’intensifier la diffusion des bonnes pratiques en matière de programmes de qualification ainsi que d’enseignement et de formation professionnels. Il convient aussi d’offrir la bonne combinaison de mesures incitatives à destination de tous les participants au processus d’éducation et de formation, afin de préserver le droit de tous à une formation appropriée (3). Le Comité insiste sur l’importance d’un espace européen de l’éducation, dans le droit fil de son avis antérieur sur cette question (4). Le CESE juge nécessaires une nouvelle entreprise de modernisation et le développement constant des aptitudes et des compétences des enseignants et des formateurs, à tous les niveaux d’éducation et de formation.

1.5.

Le CESE reconnaît que certains aspects de l’inadéquation des compétences subsisteront toujours et que les systèmes éducatifs ne pourront jamais préparer parfaitement les individus à toutes les situations. Les tendances actuelles sont néanmoins préoccupantes et opposent des blocages à la croissance économique et à la création d’emplois, empêchant les citoyens de donner libre cours à leur potentiel créatif, et les entreprises de bénéficier de la pleine capacité d’innovation offerte par les compétences de leurs ressources humaines. C’est pourquoi les pouvoirs publics, les partenaires sociaux et la société civile devraient joindre leurs forces pour surmonter ce problème et fournir aux citoyens les conseils et les orientations dont ils ont besoin pour effectuer les bons choix et développer constamment leurs connaissances et leurs compétences, dans l’intérêt de la société. Il y a lieu d’adopter des approches exhaustives et globales pour mieux anticiper et satisfaire les besoins en matière de compétences (5).

1.6.

Des projections fiables quant à l’offre et à la demande de compétences et quant à la structure du marché du travail dans l’Union à l’avenir sont à l’évidence essentielles pour réduire l’inadéquation des compétences. C’est la raison pour laquelle les universités, les centres de recherche scientifique et d’autres organismes de recherche devraient entamer des travaux sur cette question, en coopération étroite avec les partenaires sociaux et les administrations compétentes dans les États membres. Si l’expérience accumulée ces dernières années par le Centre européen pour le développement de la formation professionnelle (Cedefop) sera très utile à cet égard, elle doit être approfondie à l’échelle nationale en affinant le niveau de détail pour chacun des États membres.

1.7.

Les pouvoirs publics, les entreprises et les travailleurs doivent envisager l’éducation et la formation comme un investissement. L’application d’incitations fiscales à de tels investissements pourrait encourager les employeurs et les salariés à investir davantage. Les conventions collectives pourraient reconnaître certains droits et obligations des employeurs et des salariés en lien avec l’éducation et la formation. Il y a lieu de promouvoir les bonnes pratiques en matière de perfectionnement professionnel et de reconversion afin d’aider les individus à retrouver un emploi.

1.8.

Bon nombre d’apprentissages se déroulent dans des contextes non formels et informels, comme les organisations de jeunesse et l’apprentissage entre pairs, et de nombreuses compétences professionnelles ne peuvent être acquises au moyen de l’éducation formelle dans les écoles (6). Le CESE encourage donc les États membres à rechercher des dispositifs permettant la validation des qualifications pertinentes acquises dans ce type de situation. Un moyen d’y parvenir est de compléter et d’utiliser à bon escient leurs systèmes nationaux de qualification, notamment en recourant à des plateformes proposant une évaluation normalisée des niveaux de compétences, indépendamment de la manière dont ces dernières ont été acquises. Une telle approche ouvrirait un nouveau canal par lequel signaler aux entreprises le potentiel des individus, notamment à partir d’un certain âge, en mettant en avant des compétences qui peuvent être utiles même si elles n’apparaissent pas dans des documents attestant une qualification formelle.

1.9.

L’apprentissage tout au long de la vie, le perfectionnement professionnel et la reconversion sont une responsabilité partagée de l’État, des employeurs et des salariés. Il y aurait lieu de soutenir activement les individus pour qu’ils puissent réussir leur parcours professionnel, et de les guider, notamment par des méthodes d’orientation, du conseil, une assistance, un accompagnement et du mentorat, quant à la manière dont ils peuvent choisir en connaissance de cause des formations et des apprentissages qui les doteront des compétences et des qualifications recherchées sur le marché du travail. Les partenaires sociaux devraient jouer un rôle actif, en sensibilisant les acteurs aux problèmes afférents et en proposant des solutions possibles. Avant d’investir leur temps et leur argent dans une formation, les individus ont besoin de savoir quelles compétences sont utiles et de quelle manière les programmes d’éducation et de formation influeront sur leur carrière. Ils seront aussi disposés à obtenir une qualification ou une certification si celle-ci est reconnue par d’autres acteurs.

2.   L’inadéquation des compétences, aujourd’hui et demain

2.1.

Le futur commence aujourd’hui; la vitesse à laquelle il devient réalité dépasse notre capacité à le suivre et à prédire son évolution. Les défis qu’il lance sont considérables tant pour les entreprises, en imposant de nouveaux modèles commerciaux, que pour les travailleurs, en exigeant de nouvelles compétences et qualifications qui, pour la plupart, sont à l’heure actuelle fort difficiles à prévoir, ce qui pousse la société tout entière à devoir s’adapter suffisamment vite aux mutations rapides qui sont à l’œuvre. Si nous voulons que cette transition trouve une issue heureuse, nous devons rester unis, nous préparer à réagir immédiatement, joindre nos forces pour anticiper notre futur, et maîtriser par avance le changement révolutionnaire qui est à l’œuvre dans les interactions entre l’homme, les robots, l’intelligence artificielle et le passage au numérique, pour le plus grand bien de notre société.

2.2.

L’inadéquation des compétences constitue l’un des plus grands défis qui, aujourd’hui, mettent en péril la croissance et entravent la création d’emplois durables dans l’Union. Certaines études (7) estiment le coût de ce phénomène à 2 % du produit intérieur brut de l’Union. D’après la Commission, 70 millions d’européens ne disposent pas de compétences appropriées en lecture et en écriture, et ceux qui ont un faible niveau de compétences en calcul et en culture numérique sont encore plus nombreux. Une étude récente (8) montre que dans l’Union, la part des travailleurs dont les compétences sont en inadéquation demeure en moyenne de 40 % environ, ce qui correspond à l’évaluation globale du Cedefop. Avoir des salariés dotés des compétences requises constitue un facteur de compétitivité essentiel pour les entreprises. En conséquence, il est extrêmement important que la main-d’œuvre d’aujourd’hui, comme celle de demain, offre les qualifications et les compétences qui répondent aux besoins, en évolution, de l’économie moderne et du marché de l’emploi. Personne ne devrait être laissé pour compte (9) et il convient d’éviter le gaspillage des talents. Pour atteindre ces objectifs, des enseignants et des formateurs hautement qualifiés sont nécessaires, de même qu’un soutien approprié pour participer à l’apprentissage tout au long de la vie.

2.3.

Le CESE a mis en évidence dans des avis antérieurs (10) les effets du passage au numérique, de la robotisation, des nouveaux modèles économiques tels que l’industrie 4.0, de l’économie circulaire et de l’économie du partage sur les nouvelles exigences en matière de compétences. Il a également fait connaître son point de vue quant à la nécessité d’introduire des solutions plus innovantes dans les domaines de l’éducation et du développement des compétences, étant donné que l’Europe a besoin d’un changement radical dans les objectifs et le fonctionnement du secteur de l’enseignement, ainsi que d’une vision de sa place et de son rôle dans la société (11). Des estimations du Cedefop (12) montrent que les qualifications actuelles de la main-d’œuvre européenne sont inférieures d’un cinquième au niveau requis pour que les travailleurs puissent remplir leurs fonctions au plus haut degré de productivité. Cette situation appelle une action concertée afin de favoriser davantage l’apprentissage des adultes en Europe.

2.4.

L’effet combiné de la reprise de l’économie européenne et de l’évolution des besoins en matière de compétences a alimenté la demande de main-d’œuvre et le déficit de travailleurs qualifiés, les portant à leur plus haut niveau depuis dix ans. Si le taux de chômage recule dans l’Union (puisqu’il est passé de 10,11 % en 2014 à 7,3 % en 2018), le taux de vacance d’emploi a quant à lui doublé (passant de 1,1 % en 2009 à 2,2 % en 2018) (13).

2.4.1.

Tous les États membres sont confrontés à ce problème, certes à des intensités variables et pour des raisons différentes. Une enquête à l’échelle mondiale (14) révèle que dans de nombreux États membres, la proportion élevée d’employeurs éprouvant des difficultés à recruter du personnel est alarmante. Dix États membres se situent au-dessus de la moyenne mondiale de 45 %, ceux dont la situation est la plus défavorable étant la Roumanie (81 %), la Bulgarie (68 %) et la Grèce (61 %). À l’opposé du spectre, les États dans lesquels les difficultés rencontrées sont moindres, même si elles restent significatives, sont l’Irlande (18 %), le Royaume-Uni (19 %) et les Pays-Bas (24 %).

2.4.2.

Pour environ un tiers des employeurs, la principale raison de leur incapacité à pourvoir les postes vacants est le manque de candidatures. Parmi les autres, 20 % déclarent que les candidats ne disposent pas de l’expérience requise. À mesure que les entreprises se convertissent au numérique, qu’elles s’automatisent et qu’elles évoluent, il est plus important que jamais de trouver des candidats ayant le bon dosage de connaissances techniques et non techniques; or 27 % des employeurs affirment que les candidats ne disposent pas des compétences dont ils ont besoin. Au niveau mondial, plus de la moitié (56 %) des employeurs déclarent que les compétences en matière de communication, écrite comme verbale, sont les aptitudes personnelles auxquelles ils attachent le plus d’importance, suivies de la capacité à collaborer et à résoudre des problèmes.

2.5.

Les résultats du programme pour l’évaluation internationale des compétences des adultes (PEICA), aussi bien que ceux de l’enquête sur les compétences et les emplois en Europe ainsi que des travaux universitaires de recherche (15), montrent que l’inadéquation est due pour une large part à la surqualification et à la suréducation. Globalement, quatre salariés adultes sur dix estiment que leurs compétences sont sous-exploitées et près d’un tiers des diplômés de l’enseignement supérieur sont surqualifiés pour l’emploi qu’ils occupent. Cette situation découle à la fois d’une affectation inefficace des ressources (conduisant à la sous-utilisation du stock existant de compétences) et de déséquilibres généraux entre les qualifications de la main-d’œuvre et la demande du marché du travail (16).

2.6.

L’inadéquation des compétences a des effets négatifs sur les économies et sur la société dans son ensemble, puisque ce phénomène:

empêche les citoyens d’être satisfaits par leur emploi et leur carrière, abaisse leur niveau d’appréciation perçu et pourrait brider les salaires;

fait obstacle au développement personnel ainsi qu’à la progression et à l’exploitation des capacités et du potentiel des individus;

abaisse la productivité du travail; certaines estimations montrent que la perte de productivité (17) due à l’inadéquation des compétences dans l’Union est d’environ 0,8 EUR pour chaque heure de travail (18);

réduit la compétitivité des entreprises en rendant le processus de recrutement plus lent et plus coûteux, et en imposant des dépenses supplémentaires de formation.

2.7.

Du fait de la rapidité des changements, l’inadéquation des compétences touche aussi bien les travailleurs hautement qualifiés que ceux qui sont peu qualifiés, ainsi que les professions qui requièrent généralement un haut niveau d’études et de connaissances. Les électriciens, les mécaniciens, les soudeurs, les ingénieurs, les conducteurs, les informaticiens spécialisés, les spécialistes des services sociaux et les représentants commerciaux comptent actuellement parmi les professions les plus recherchées par les employeurs.

2.8.

Les compétences en sciences, technologies, ingénierie et mathématiques et les compétences numériques revêtent une importance toujours plus fondamentale pour assurer la compétitivité des entreprises et mettre à profit la productivité des travailleurs. L’importance des compétences en sciences, technologies, ingénierie et mathématiques dépasse par ailleurs le contenu même des programmes d’études de ces disciplines, puisque celles-ci permettent aux élèves et aux étudiants d’acquérir un éventail plus large de qualifications et de compétences, comme la réflexion systématique et l’esprit critique. Pour étayer ces palettes de compétences, il est essentiel également de disposer d’un solide bagage de compétences fondamentales et entrepreneuriales. Des compétences en sciences, technologies, ingénierie et mathématiques peuvent être acquises dans le cadre de l’enseignement et de la formation professionnels comme de l’enseignement général. Il faut en particulier encourager davantage de femmes à étudier ces matières, tout en réduisant de manière adéquate la fracture numérique entre les hommes et les femmes (19). Il convient de trouver différents moyens d’en accroître l’attractivité, notamment dans les régions puisque ces disciplines ont le plus souvent tendance à être concentrées dans les grandes villes (20). Le radar de compétences stratégiques dans le domaine du numérique est un outil utile pour confronter les jeunes à des modèles ou des mentors, afin de les instruire des compétences requises pour différents métiers (21).

2.9.

Des mesures bien conçues doivent être mises en place pour empêcher que le problème de l’inadéquation des compétences ne s’aggrave. Du fait des mutations radicales qui se produisent dans les technologies, des changements souvent inédits, échappant pour ainsi dire aux prévisions, se produisent au niveau des modèles d’entreprise, des attentes des clients et de la nature même du travail. Comme le CESE l’a déjà fait observer (22), près de la moitié des emplois existants sont susceptibles d’être automatisés; par conséquent, l’automatisation et les robots auront une incidence considérable sur l’avenir du travail. Il pourrait en résulter à l’avenir un fossé grandissant entre les besoins des entreprises et les qualifications, compétences et aptitudes des travailleurs, qui représente un défi pour les prestataires d’éducation et de formation. Cette situation met en lumière aussi l’importance croissante des compétences non techniques et transversales, ainsi que d’autres compétences souvent acquises au moyen d’un apprentissage informel, et elle soulève des questions quant à la reconnaissance et à la validation des parcours informels d’éducation et de formation.

2.10.

L’Union devrait encourager et aider les États membres à s’attaquer sans plus attendre à ce problème structurel du marché de l’emploi et à remédier à l’inadéquation des compétences qui oppose des blocages à la croissance, en mettant particulièrement l’accent sur les compétences en sciences, technologies, ingénierie et mathématiques et sur les compétences numériques. Les partenaires sociaux ont un rôle important à jouer pour ce qui est de recenser et, lorsque c’est possible, de prévoir les compétences, qualifications et aptitudes requises pour les métiers nouveaux et émergents (23), de sorte que les parcours d’éducation et de formation puissent mieux répondre aux besoins des entreprises et des travailleurs. Le passage au numérique offre des possibilités pour tous, mais uniquement à la condition qu’il soit effectué correctement et qu’émerge une nouvelle conception du travail et de la main-d’œuvre (24) . Il importe aussi que les partenaires sociaux soient associés à l’interprétation des données recueillies par les instituts de statistique et les organismes publics, car les employeurs et les syndicats peuvent apporter des éclairages essentiels qui sans leur participation risqueraient d’être négligés. Le Fonds social européen (FSE) a un rôle indispensable à jouer pour soutenir les initiatives engagées, notamment au moyen d’actions conjointes des partenaires sociaux

2.11.

Les travaux universitaires de recherche sur l’inadéquation des compétences ont révélé des variations considérables dans les causes, l’ampleur, les conséquences et les coûts économiques des nombreuses formes différentes que peut revêtir l’inadéquation des compétences. Par conséquent, des politiques indifférenciées ont peu de chances d’être efficaces dès lors que les États membres ont tendance à être confrontés à ce problème sous des aspects différents. Il apparaît toutefois clairement que la mise en place de mesures pertinentes visant à réduire l’inadéquation des compétences peut permettre de réaliser des gains d’efficacité substantiels. À cette fin, le CESE souligne l’importance d’un apprentissage à visée globale qui respecte et enrichisse la diversité culturelle et le sentiment d’appartenance (25).

2.12.

Le passeport européen des compétences peut jouer un rôle important pour présenter les qualifications, les compétences et les aptitudes d’un individu, d’une manière qui facilite une meilleure mise en correspondance de ses capacités avec un profil de poste donné.

3.   Les défis posés pour les systèmes d’éducation et de formation

3.1.   Observations générales

3.1.1.

Si l’Union veut donner à ses citoyens les meilleures chances de réussite et si elle veut préserver et améliorer sa compétitivité, elle doit encourager les États membres à favoriser un cadre de politiques qui permette d’inscrire l’éducation et la formation initiales dans une perspective de parcours professionnel et qui continue d’offrir des possibilités d’apprentissage tout au long de la vie active.

3.1.2.

Dans de nombreux États membres, les systèmes d’éducation et de formation sont axés sur une longue période d’apprentissage formel suivie d’une carrière professionnelle. Le lien entre formation et rémunération a eu tendance jusqu’à présent à suivre une correspondance simple, à savoir que plus le niveau d’apprentissage formel était élevé, plus la rétribution l’était en conséquence. Des études économiques suggèrent que chaque année d’études supplémentaire est associée en moyenne à une rémunération supérieure de 8 % à 13 %. Il est tout aussi vrai qu’un diplôme universitaire ne peut plus être considéré comme une garantie de trouver un emploi au terme du parcours d’études. Aujourd’hui, les employeurs ne considèrent plus uniquement le niveau de qualification des individus, mais aussi les compétences et aptitudes qu’ils ont acquises dans le cadre de leur éducation et la mesure dans laquelle celles-ci sont pertinentes sur le marché du travail. Toutefois, compte tenu des nouveaux défis en présence, il n’est plus possible de préconiser le modèle passé. Les systèmes éducatifs de demain devraient ouvrir de nouvelles passerelles entre l’éducation et l’emploi, à la fois en facilitant l’entrée sur le marché du travail et en permettant aux individus d’acquérir de manière flexible de nouvelles compétences tout au long de leur carrière.

3.1.3.

La bonne réponse ne consiste pas à réclamer davantage d’éducation et de formation: plus n’est pas nécessairement synonyme de mieux. Afin d’apporter des réponses appropriées, les systèmes d’éducation et de formation doivent être axés sur les besoins réels de la société et de l’économie, être en mesure d’éviter une mauvaise affectation des ressources et offrir la possibilité d’un apprentissage ciblé tout au long de la vie. Afin de promouvoir l’égalité des chances et l’ouverture à tous en matière d’emploi, il faut combler l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes au moyen de mesures appropriées.

3.1.4.

En ouvrant de manière instantanée un portail vers les connaissances, à portée d’un simple clic, l’internet a rendu caduc le besoin de connaître et de mémoriser des faits importants. Cette évolution transforme les principes fondamentaux des sciences humaines, de sorte qu’il n’est plus besoin pour les étudiants d’emmagasiner des informations; il suffit dorénavant de leur apprendre à acquérir une vision fondamentale des sujets concernés de sorte qu’ils puissent ensuite retrouver et traiter les informations afin de mener à bien une tâche donnée ou de trouver la solution à un problème.

3.1.5.

Les évolutions technologiques sont si rapides qu’elles rendent le contenu de certaines disciplines obsolète, et ce même au cours du laps de temps que dure le cycle d’enseignement supérieur d’un étudiant. Cette situation remet en question les programmes d’études traditionnels, en particulier leurs composantes dites «fondamentales», et accroît l’importance de l’éducation en sciences, technologies, ingénierie et mathématiques et du développement de compétences non techniques, telles que l’esprit critique, la résolution de problèmes ainsi que l’apprentissage et le travail collaboratifs. Il est tout aussi important de s’attaquer au défi posé par l’interaction entre les êtres humains et les machines.

3.1.6.

Le développement des nouvelles technologies remet sérieusement en question aussi la composante pratique de l’éducation et de la formation car, dans la plupart des États membres, l’élaboration et l’adoption officielle des programmes prennent beaucoup de temps, ce qui les rend peu flexibles et empêche de les adapter rapidement aux évolutions du monde réel. Pour remédier à cette situation, il convient de mettre plus étroitement en relation l’ensemble des niveaux d’études et les besoins du marché du travail. La mise à jour en temps utile des programmes d’études devient une problématique essentielle, qui souligne l’importance de filières réactives d’enseignement et de formation professionnels ainsi que de l’apprentissage.

3.1.7.

Dans tout emploi, il est nécessaire de disposer de certaines compétences techniques et spécifiques fondées sur des connaissances et une expérience propres à un secteur donné. Cependant, il est de plus en plus important de disposer également de compétences fondamentales, telles que la créativité et la résolution de problèmes, mais aussi de compétences sociales et d’une capacité d’empathie.

3.1.8.

L’accélération du rythme auquel les compétences acquises deviennent obsolètes rend indispensable le fait d’en acquérir plus rapidement de nouvelles et elle intensifie la demande de nouvelles palettes de compétences correspondant aux emplois dits «hybrides», qui combinent différents types de tâches. Par exemple, les compétences en programmation informatique sont désormais recherchées au-delà du secteur de la technologie, et il est avéré qu’entre un tiers et la moitié des demandes de recrutement pour les postes les plus rémunérateurs correspondent à des emplois pour lesquels il est nécessaire de disposer de compétences en programmation.

3.1.9.

Les mutations rapides qui se sont récemment produites dans la composition des nouveaux emplois exigent de mettre davantage l’accent sur l’apprentissage en tant que compétence à part entière. Le meilleur outil pour relever le défi d’une technologie dont les évolutions sont imprévisibles et de l’hybridation des emplois est la capacité d’acquérir rapidement de nouvelles compétences et de continuer d’apprendre. Cet aspect doit être géré avec toute la diligence requise afin de veiller à ce que les groupes défavorisés, comme les chômeurs de longue durée, les travailleurs très peu qualifiés, les personnes handicapées et les minorités, ne soient pas tenus à l’écart du marché du travail. À cet égard, il importe de renforcer la coopération entre les partenaires sociaux et les responsables de politiques actives à destination du marché de l’emploi.

3.1.10.

Afin d’atteindre cet objectif, il importe que les États membres trouvent les moyens de motiver les jeunes à ne pas quitter l’école précocement, puisque ceux qui décrochent prématurément rejoignent généralement les rangs des personnes peu qualifiées et mal rémunérées. Les mères de jeunes enfants doivent également recevoir une attention particulière sur le plan de la formation, afin de pouvoir maintenir leurs compétences à jour face à l’évolution rapide des métiers.

3.1.11.

Le CESE recommande vivement d’élargir la promotion et l’usage de l’apprentissage en ligne et modulaire, par exemple les ressources éducatives en libre accès et les cours en ligne ouverts et massifs (CLOM) (26).

3.2.   Enseignement secondaire

3.2.1.

Afin de pouvoir doter les étudiants des compétences fondamentales pour l’avenir — comme la curiosité, la recherche d’informations fiables, la capacité d’apprendre en permanence, la créativité, la résolution de problèmes, le travail en équipe — l’enseignement secondaire doit se détourner du modèle exigeant uniquement de la mémorisation et de la répétition pour embrasser une approche axée sur les projets et la résolution de problèmes.

3.2.2.

L’enseignement et la formation professionnels en alternance, où les étudiants passent une partie de leur temps en classe et l’autre en entreprise, en particulier dans le cadre d’apprentissages, constituent un puissant outil pour doter les étudiants de compétences (non techniques) transversales et spécifiques à un métier et pour favoriser des transitions réussies entre les études et le travail. Il convient par conséquent de promouvoir plus activement l’orientation vers ces filières dans les États membres, en s’inspirant des bonnes pratiques des pays qui sont les plus avancés en la matière, dans lesquels entre un tiers et la moitié des élèves de l’enseignement secondaire suivent ce type de cursus. Les stages jouent également un rôle important pour aider les jeunes à acquérir une expérience professionnelle pratique. Ils se déroulent avant tout dans le cadre du processus d’éducation et de formation, mais peuvent aussi prendre la forme de stages «sur le marché libre», après la fin des études ou de la formation. Les règles qui régissent les stages et les conditions dans lesquelles ils se déroulent sont déterminées au niveau national et tiennent compte de la réglementation, des relations professionnelles et des pratiques éducatives existantes. Ces règles pourraient s’inspirer de la recommandation du Conseil relative à un cadre de qualité pour les stages (27).

3.2.3.

Cependant, il y a lieu d’adapter l’enseignement et la formation professionnels aux nouvelles réalités, grâce notamment à la mise à jour en temps utile des programmes d’études, en créant un environnement propice aux apprentissages qui permette aux individus de développer et d’actualiser leurs compétences tout au long de leur vie professionnelle.

3.2.4.

Les aptitudes et compétences des enseignants sont indispensables à un enseignement et une formation professionnels en alternance de qualité, et revêtent une importance cruciale pour la combinaison d’une expérience pratique et théorique. Il est donc important que les États membres maintiennent un système de formation continue des enseignants et des formateurs, et qu’ils s’efforcent de trouver les moyens de les motiver, de concert avec les partenaires sociaux.

3.3.   Enseignement universitaire

3.3.1.

Le CESE considère que dans de nombreux États membres, le principal défi qui se pose pour l’enseignement universitaire est la nécessité de renforcer les composantes éducatives à vocation professionnelle dans les programmes d’études, afin de transmettre aux étudiants les compétences transversales et les compétences pratiques spécialisées que les employeurs recherchent. Par conséquent, il est nécessaire de mieux associer les partenaires sociaux à la conception et à la prestation de l’éducation et de la formation.

3.3.2.

Il faut toujours garder à l’esprit que l’enseignement universitaire n’est pas une fin en soi. Tous les emplois sont importants, puisque l’ensemble des métiers et professions permettent aux individus de contribuer au développement économique et social de la société, et l’enseignement universitaire doit rester une option, mais pas une obligation ni un gage de qualité des personnes.

3.3.3.

Posséder un diplôme universitaire au début de son parcours professionnel ne dispense pas de devoir en permanence acquérir de nouvelles compétences, compte tenu notamment de l’allongement des carrières. Les universités devraient se reconnaître une nouvelle finalité sociale en dispensant un apprentissage tout au long de la vie sous des formes flexibles (apprentissage à distance, cours du soir, etc.), et adapter leurs structures et leurs plans en conséquence.

3.3.4.

Les compétences sociales revêtent une importance croissante pour un large éventail d’emplois en raison du rôle qu’elles jouent pour les relations sur le lieu de travail, pour la division et la direction des tâches, ainsi que pour la création et le maintien d’un environnement efficace et productif. C’est pourquoi il serait souhaitable que les universités complètent leurs programmes d’études traditionnels dans des domaines de spécialisation par des cours supplémentaires en gestion, communication, etc. En outre, les universités doivent «décloisonner»les domaines d’étude et mettre l’accent sur les approches interdisciplinaires. L’avenir du travail pour les professions à haut niveau d’études sera inévitablement lié à la nécessité de disposer de compétences interdisciplinaires.

3.3.5.

Il serait possible également de personnaliser l’information sur des stratégies d’apprentissage efficaces. Il est plus facile d’encourager les individus à apprendre plus efficacement, avec à la clé de meilleurs résultats, dès lors qu’ils ont une meilleure connaissance de leurs propres processus de pensée. Dans le contexte de l’essor récent de l’apprentissage en ligne, la mécanique de l’apprentissage est désormais mieux comprise, ce qui pourrait permettre de mieux discerner les méthodes d’apprentissage les plus adaptées à chaque individu. En appliquant de telles approches, il y a davantage de chances que les étudiants puissent acquérir de nouvelles compétences plus tard dans leur vie, et des contenus personnalisés pourraient également leur être présentés dans des formats d’apprentissage à distance.

3.3.6.

Compte tenu des coûts élevés de l’enseignement supérieur et des faits attestant une affectation bien souvent inefficace des ressources dans ce domaine, il y a lieu d’encourager les États membres à mettre en place des systèmes de suivi qui pourraient fournir des informations sur la situation réelle du marché du travail, conformément à la recommandation du Conseil relative au suivi des diplômés (28).

3.4.   Le système d’enseignement et de formation professionnels

3.4.1.

Le CESE a accueilli favorablement l’objectif, présenté dans le cadre européen pour un apprentissage efficace et de qualité, selon lequel les apprentissages devraient se dérouler au moins pour moitié sur le lieu de travail. Compte tenu de la diversité des systèmes nationaux, l’objectif consiste à parvenir progressivement à ce que la majorité de l’apprentissage s’effectue en milieu professionnel (29).

3.4.2.

Le CESE accueille favorablement l’objectif de la Commission européenne consistant à faire de l’enseignement et de la formation professionnels une option de premier choix pour les apprenants. Il souligne l’importance de favoriser la perméabilité de la filière professionnelle et de l’enseignement supérieur, afin d’ouvrir des possibilités et de contribuer à mettre un terme à la stigmatisation de l’enseignement et de la formation professionnels (30).

3.4.3.

Dans le cadre de l’apprentissage, les employeurs ont clairement un rôle à jouer en apportant les composantes professionnelles de la formation, de telle sorte qu’ils puissent les adapter en fonction des tendances du marché de l’emploi et des besoins en matière de compétences.

3.4.4.

La formation professionnelle — tant initiale que continue — en dehors de l’enseignement secondaire et supérieur a elle aussi un rôle à jouer pour remédier à l’inadéquation des compétences. Dans un contexte de reconversion continue et de progression de l’emploi indépendant, il sera nécessaire d’aider les individus dans leurs transitions d’un poste de travail à l’autre (31). C’est pourquoi il y a lieu de développer l’organisation de l’orientation sous différentes formes, afin de fournir des informations sur les parcours professionnels, la rétribution moyenne correspondant à différents métiers et professions, la durée pendant laquelle des compétences données resteront utiles (32), etc.

3.4.5.

De nouvelles technologies telles que la réalité virtuelle ou augmentée facilitent l’apprentissage, le rendent plus efficace et pourraient radicalement améliorer la formation professionnelle, tandis que les techniques reposant sur les mégadonnées ouvrent des possibilités de formation personnalisée. Pour pouvoir exploiter ces possibilités, il est souhaitable de mettre sur pied des plateformes appropriées, d’accès peu onéreux et instantané, et de créer des bibliothèques de cours à la demande. Outre tous leurs autres avantages, des plateformes de ce type apportent aussi une solution au problème de l’éloignement pour les personnes qui vivent dans des régions reculées. Cet aspect de l’enseignement et de la formation professionnels est actuellement sous-développé par rapport à l’enseignement universitaire et doit être renforcé.

3.4.6.

La formation interne dans les entreprises représente un autre moyen d’améliorer les compétences et de contribuer à une productivité accrue des travailleurs ainsi qu’à leur évolution professionnelle, au rendement global des entreprises et au bien-être des salariés au travail. Elle permet aussi de motiver ces derniers et de les faire progresser sur le plan de leur carrière et de leur rémunération. La formation des travailleurs est donc un intérêt partagé, et les employeurs et les salariés assument la responsabilité commune de contribuer au perfectionnement professionnel et à la reconversion, qui permettent l’émergence d’entreprises plus performantes et d’une main-d’œuvre dotée des compétences appropriées.

3.4.7.

La législation, les règles et les approches nationales quant à l’organisation et à la prestation de la formation des travailleurs présentent une grande diversité. Certains États membres disposent dans leur arsenal législatif de politiques fortes au vaste champ d’application dans le domaine de la formation professionnelle, tandis que pour d’autres, les dispositions applicables à la formation sont fixées par convention collective, à différents niveaux, ou font directement l’objet d’un accord entre les employeurs et les salariés sur le lieu de travail. Les possibilités d’accès à la formation peuvent aussi dépendre de la taille de l’entreprise ou du lieu de travail. Il convient de faciliter l’accès des salariés à une formation efficace, tout en respectant la diversité et la flexibilité des systèmes, qui varient en fonction des différences rencontrées dans la pratique du dialogue social.

3.4.8.

Les États membres et les partenaires sociaux devraient travailler de concert, en exploitant pleinement les possibilités du dialogue social dans un format bipartite ou tripartite, afin de renforcer l’accès et la participation des salariés à la formation. Cette démarche devrait être développée de telle sorte qu’elle profite à l’ensemble des travailleurs et des entreprises ou lieux de travail, dans la perspective d’un apprentissage tout au long de la vie adapté aux besoins réels et potentiels d’une main-d’œuvre diverse, dans les secteurs public comme privé et dans des entreprises et des lieux de travail de petite, moyenne ou grande taille.

3.4.9.

Le mode d’organisation et le déroulement de la formation sur le lieu de travail doivent être mutuellement convenus par les employeurs et les salariés, grâce à une combinaison d’accords collectifs et individuels. Il est préférable à cet effet d’organiser les formations pendant les heures de travail, ou le cas échéant (en particulier lorsqu’elles ne présentent pas de lien avec l’entreprise) en dehors de celles-ci. Les employeurs devraient adopter une approche positive de la formation des salariés. Toutefois, lorsqu’un travailleur sollicite une formation ou qu’il y a droit, les employeurs devraient être habilités à examiner ce type de demande pour s’assurer qu’elle favorise l’employabilité du travailleur de telle façon qu’elle serve aussi les intérêts de l’entreprise.

3.4.10.

La formation professionnelle n’est pas destinée uniquement aux salariés. Les grandes entreprises dispensent généralement des formations spécialisées à leurs cadres dirigeants. Ce n’est toutefois pas le cas dans les PME, en particulier dans les petites entreprises traditionnelles et familiales. La prospérité de ces entreprises dépend presque entièrement de leurs propriétaires ou dirigeants. Des formations de courte durée et l’accès à des services de conseil et d’orientation et à des cours par vidéo, mettant l’accent sur les exigences juridiques, les réglementations, la protection des consommateurs, les normes techniques, etc., pourraient améliorer les résultats de ces entreprises.

3.4.11.

La Commission européenne devrait encourager les États membres à se pencher sur l’expérience positive qui ressort des pays disposant de systèmes d’enseignement et de formation professionnels bien développés, et envisager la possibilité de concevoir des programmes destinés à faciliter ce type d’échanges.

Bruxelles, le 21 mars 2019.

Le président

du Comité économique et social européen

Luca JAHIER


(1)  Nouvelle stratégie en matière de compétences pour l’Europe, 2016; espace européen de l’éducation, 2018. Le Comité salue également le projet de «plan de coopération sectorielle en matière de compétences»de la direction générale du marché intérieur, bien que le champ d’application en reste très limité, ainsi que divers projets relevant de l’agence EASME ou du programme COSME, par exemple ceux portant les références 2017/001, 004 et 007 et 2016/033 et 034.

(2)  COM(2018) 268 final.

(3)  JO C 237 du 6.7.2018, p. 8.

(4)  JO C 62 du 15.2.2019, p. 136.

(5)  La direction générale de l’emploi de la Commission européenne fait le même constat et, dans plusieurs États membres, la Commission a apporté un soutien, notamment financier, à des projets par pays menés sous l’impulsion de l’OCDE dans le cadre des stratégies nationales en matière de compétences, notamment au Portugal, en Italie, en Espagne, en Slovénie et dans la région de la Flandre en Belgique. Ces dernières années, le Cedefop a également mis en œuvre des programmes spécifiques pour aider les États membres (en Grèce, en Bulgarie, en Slovaquie, en Estonie et à Malte) à améliorer leurs projections en matière de compétences et à adapter leur infrastructure en conséquence: http://www.cedefop.europa.eu/fr/events-and-projects/projects/assisting-eu-countries-skills-matching (en anglais).

(6)  JO C 13 du 15.1.2016, p. 49.

(7)  https://www.eesc.europa.eu/fr/news-media/press-releases/inadequation-des-competences-les-entreprises-de-lue-perdent-des-millions-et-ce-nest-quun-debut

(8)  «Skills Mismatches — An Impediment to the Competitiveness of EU Businesses» (L’inadéquation des compétences: un obstacle à la compétitivité des entreprises de l’Union européenne), CESE.

(9)  JO C 62 du 15.2.2019, p. 136.

(10)  JO C 237 du 6.7.2018, p. 8; JO C 367 du 10.10.2018, p. 15.

(11)  JO C 173 du 31.5.2017, p. 45. Parmi les salariés adultes, 40 % ont le sentiment que leurs compétences ne sont pas pleinement exploitées: http://www.cedefop.europa.eu/fr/publications-and-resources/publications/3075

(12)  «Insights into skill shortages and skill mismatch — Learning from Cedefop’s European skills and jobs survey»(Éclairage sur les déficits de compétences et leur inadéquation – tirer les leçons de l’enquête du Cedefop sur les compétences et les emplois en Europe), Centre européen pour le développement de la formation professionnelle (Cedefop), 2018. Voir aussi le panorama des compétences et Europass.

(13)  Statistiques sur le chômage et le taux de vacance d’emploi, Eurostat.

(14)  «Solving the Talent Shortage»(Remédier au déficit de talents), enquête prospective sur l’emploi de ManpowerGroup, 2018. Certains auteurs remettent en question la fiabilité de cette étude; voir par exemple Cappelli (2014): https://www.nber.org/papers/w20382 (en anglais).

(15)  «Skills Mismatches — An Impediment to the Competitiveness of EU Businesses» (L’inadéquation des compétences: un obstacle à la compétitivité des entreprises de l’Union européenne), étude réalisée par l’IME à la demande du groupe des employeurs du CESE.

(16)  Ibid.

(17)  Toutes choses étant égales par ailleurs.

(18)  Ibid.

(19)  JO C 440 du 6.12.2018, p. 37.

(20)  JO C 440 du 6.12.2018, p. 37; l’on trouve aussi des exemples de bonnes pratiques en Allemagne, où la fondation «Maison des petits chercheurs»aide à renforcer les compétences en sciences, technologies, ingénierie et mathématiques: https://www.bertelsmann-stiftung.de/de/publikationen/publikation/did/leitfaden-berufsorientierung-1/ (en allemand).

(21)  Conclusions de la conférence européenne de la fondation BMW.

(22)  JO C 367 du 10.10.2018, p. 15.

(23)  http://www.cedefop.europa.eu/fr/events-and-projects/projects/big-data-analysis-online-vancancies. Voir aussi «Overview of the national strategies on work 4.0 — a coherent analysis of the role of social partners»(Aperçu des stratégies nationales sur le travail 4.0: une analyse cohérente du rôle des partenaires sociaux), https://www.eesc.europa.eu/fr/our-work/publications-other-work/publications/apercu-des-strategies-nationales-sur-le-travail-40-une-analyse-coherente-du-role-des-partenaires-sociaux-etude

(24)  https://twentythirty.com/how-digitization-will-affect-the-world-of-work (en anglais).

(25)  JO C 62 du 15.2.2019, p. 136.

(26)  Ces outils peuvent donner accès à tous les diplômes universitaires, à des cursus plus courts et à des spécialisations, ainsi qu’à des «nanodiplômes»; proposer une organisation flexible en subdivisant les diplômes en modules, et les modules en cours ou en unités plus petites encore; offrir aux travailleurs plus âgés des possibilités d’étudier à un stade avancé de leur carrière; réduire le coût et la durée des apprentissages et permettre un meilleur équilibre entre le travail, les études et la vie familiale; apporter une réponse plus rapide et plus flexible aux demandes croissantes du marché de l’emploi quant à l’acquisition des compétences et des qualifications recherchées; et établir des relations de confiance et aider les employeurs à obtenir des informations sur de potentielles recrues auprès d’établissements d’enseignement réputés.

(27)  https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52013PC0857&from=FR

(28)  https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=OJ:C:2017:423:FULL&from=FR

(29)  JO C 262 du 25.7.2018, p. 41.

(30)  https://www.ceemet.org/positionpaper/10-point-plan-competitive-industry (en anglais).

(31)  JO C 434 du 15.12.2017, p. 36.

(32)  https://www.bertelsmann-stiftung.de/en/publications/publication/did/leitfaden-berufsorientierung-1/ (en allemand).


5.7.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 228/24


Avis du Comité économique et social européen sur «Une démocratie résiliente grâce à une société civile forte et diverse»

(avis d’initiative)

(2019/C 228/04)

Rapporteur: Christian MOOS

Consultation

12.7.2018

Base juridique

Article 29, paragraphe 2, du règlement intérieur

Avis d’initiative

Compétence

Section spécialisée «Emploi, affaires sociales et citoyenneté»

Adoption en section spécialisée

6.3.2019

Adoption en session plénière

20.3.2019

Session plénière no

542

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

145/5/2

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

En Europe, des forces politiques considérables, qui se composent principalement, mais non exclusivement, de mouvements et partis extrémistes de droite, dont certains déjà parvenus au pouvoir, sapent la démocratie libérale et veulent détruire l’Union européenne.

1.2.

La société civile pluraliste qui constitue l’un des traits caractéristiques de la démocratie libérale repose sur les libertés civiles, lesquelles sont menacées par les tendances autoritaires. Elle a un rôle essentiel à jouer pour préserver la démocratie libérale en Europe.

1.3.

La démocratie libérale suppose, entre autres, la garantie des droits fondamentaux, une justice indépendante, un mécanisme opérationnel de contrôles et d’équilibres mutuels entre les pouvoirs, une administration exempte de corruption, qui fournisse des services bien gérés d’intérêt général, et une société civile dynamique.

1.4.

Une société civile indépendante constitue un rouage essentiel du contrôle démocratique et une école de la démocratie. Elle conforte la cohésion sociale. Elle ne peut assumer ces fonctions que si le cadre social, politique et juridique le lui permet. Les menées visant à faire barrage à son financement par des sources non étatiques fragilisent la liberté d’association et le bon fonctionnement de la démocratie.

1.5.

Aujourd’hui, la société civile et la démocratie sont contestées dans bien des domaines. Les populistes de droite remettent en cause les progrès réalisés dans l’émancipation de la femme.

1.6.

La polarisation de la société trouve également une traduction dans l’émergence d’une «société incivile». Au sein des institutions nationales et supranationales, certains intervenants bien établis tendent de plus en plus à offrir une caisse de résonance aux schémas de pensée populistes.

1.7.

Émanant notamment de pays tiers, des éléments autoritaires appuient cette évolution vers une «démocratie illibérale», qui aboutit à restreindre la liberté des médias et à accroître la corruption en Europe.

1.8.

À ce jour, l’Union européenne ne dispose toujours pas de l’arsenal approprié garantissant que ses États membres respectent effectivement la démocratie et l’état de droit.

1.9.

Le Comité économique et social européen (CESE) exhorte tous les États membres à s’abstenir de quelque manœuvre que ce soit visant à instaurer une «démocratie illibérale». Si certains d’entre eux devaient céder à la tentation de l’autoritarisme, l’Union européenne se doit d’exploiter à plein les dispositions du traité.

1.10.

Les partis qui s’en prennent à la démocratie libérale devraient être exclus de leurs formations politiques au niveau européen et des groupes politiques au Parlement européen.

1.11.

Le CESE réitère la revendication qu’il avait formulée concernant la mise en place d’un «semestre démocratique», assorti d’un mécanisme européen de contrôle du respect de l’état de droit et des droits fondamentaux, ainsi que d’un «tableau de bord de la démocratie».

1.12.

Le CESE est d’avis qu’il conviendrait d’envisager un dispositif grâce auquel il serait possible d’arrêter des mesures financières de correction en cas de non-respect de l’article 2 du traité sur l’Union européenne.

1.13.

Les mesures visant à protéger le budget de l’Union européenne face aux défaillances de l’état de droit ne doivent pas s’appliquer au détriment des bénéficiaires d’aide qui ressortissent à la société civile.

1.14.

Le CESE préconise que le nouveau cadre financier pluriannuel prévoie la flexibilité nécessaire pour accroître le soutien aux organisations de la société civile lorsque des gouvernements nationaux, pour des motifs politiques, réduisent ou suppriment les financements en leur faveur.

1.15.

Le CESE fait observer que les organisations de la société civile et leurs initiatives qui obtiendront un appui de l’Union européenne au titre du nouveau cadre financier pluriannuel devront se revendiquer clairement des valeurs européennes.

1.16.

Le CESE appelle les législateurs de l’Union européenne à réduire encore le poids des formalités administratives en ce qui concerne tout particulièrement les initiatives à faible échelle et les petites organisations.

1.17.

Le CESE invite la Commission à investir davantage pour développer les capacités de la société civile, à renforcer les réseaux de coopération transfrontière et à fournir de meilleures informations sur les instruments de soutien existants. Il conviendrait qu’elle présente des propositions de normes minimales à respecter pour que le bénévolat mené dans le cadre des initiatives de la société civile puisse se concilier avec l’exercice d’une activité professionnelle.

1.18.

Le CESE appuie le Parlement européen lorsqu’il réclame une proposition instituant un statut européen pour les mutuelles, les associations et les fondations ou qu’il propose, comme première étape de cette démarche, que soit créé un système parallèle interinstitutionnel d’accréditation.

1.19.

Le CESE trouve qu’il serait utile d’analyser pour quelles raisons ce dossier n’a pas abouti, ainsi que d’envisager en parallèle un agrément interinstitutionnel, une sorte de label, pour les organisations non gouvernementales (ONG). Le CESE devrait explorer cette possibilité.

1.20.

Le CESE invite les États membres à prévoir des mesures de soutien aux organisations de la société civile, sans porter préjudice aux services publics et à la justice fiscale.

1.21.

Le CESE appelle les institutions de l’Union européenne à renforcer encore la démocratie participative.

1.22.

Le CESE attend de tous les intervenants qu’ils œuvrent à des politiques européennes qui apportent des améliorations concrètes dans l’existence de la population au quotidien.

1.23.

Les décideurs politiques nationaux et européens se doivent de résoudre les problématiques sociales qui constituent des enjeux brûlants et s’assurer que leur politique soit socialement durable, en garantissant des systèmes éducatifs qui intègrent toute la population, une croissance inclusive, la compétitivité et la capacité d’innovation des industries, le bon fonctionnement des marchés de l’emploi, une fiscalité juste et équitable et l’efficacité des services publics et des régimes de sécurité sociale.

1.24.

Des partenaires sociaux forts et une société civile riche de toute sa diversité sont indispensables pour défendre les valeurs européennes fondamentales.

2.   Définitions

2.1.

Les «démocraties libérales»sont des systèmes de gouvernance dans lesquels la démocratie se conjugue avec un libéralisme constitutionnel fixant des limites au pouvoir de la majorité qui gouverne, en garantissant les prérogatives politiques et libertés des individus. Elles forment des démocraties représentatives, à régime multipartite et société civile pluraliste, qui possèdent des dispositifs de contrôles et d’équilibres des pouvoirs, notamment une justice indépendante, exerçant une surveillance sur les organes dirigeants, et qui garantissent la liberté des médias. L’état de droit y prévaut de manière égale pour toute personne physique ou morale. Les démocraties libérales respectent et protègent les minorités et elles garantissent les droits civiques, en particulier celui de voter et d’être candidat aux élections, ainsi que les libertés civiles, par exemple celle de s’associer, de même que les droits de l’homme et les libertés fondamentales.

2.2.

Une démocratie libérale fonctionnelle est un système politique dans lequel il est en permanence possible de demander des comptes aux pouvoirs publics et qui, dans tous les espaces civiques, favorise l’expression et la participation des citoyens et des corps intermédiaires dans lesquels ils s’engagent.

2.3.

La «démocratie représentative», qui complète la «démocratie participative», a besoin de corps intermédiaires tels que les syndicats, les ONG, les réseaux professionnels ou les associations se vouant à une thématique particulière, pour mobiliser les citoyens et encourager une appropriation populaire et citoyenne des questions européennes et la construction d’une Europe plus juste, qui ménage davantage de place à la solidarité et à l’inclusion.

2.4.

Les «démocraties illibérales»sont des systèmes politiques dans lesquels des élections ont lieu mais où le libéralisme constitutionnel n’est pas implanté. Des dirigeants démocratiquement élus y restreignent les droits civiques, les libertés civiles et la protection des minorités. Ces régimes minent le système des contrôles et équilibres mutuels entre les pouvoirs et l’indépendance de la justice et des médias, afin que la souveraineté absolue de la majorité qui gouverne soit affranchie de toute limitation ou tutelle constitutionnelle.

2.5.

Une «société civile»plurielle, respectueuse des principes de la démocratie et du libéralisme constitutionnel, forme une composante indispensable d’une démocratie libérale. Les citoyens qui s’engagent individuellement dans des organisations de la société civile ou dans des types de mobilisation informelle constituent la société civile, laquelle remplit une fonction d’intermédiaire entre l’État et la population. En plus de structurer les intérêts des citoyens, de fournir une expertise technique au cours des processus législatifs et de garantir que les décideurs aient à rendre des comptes, la société civile contribue à édifier la société et assure une mission d’intégration, en renforçant la cohésion sociale et en produisant de l’identité. En outre, tout un éventail d’organisations de la société civile, parmi lesquelles les partenaires sociaux tiennent une place éminente, se consacrent à une action non lucrative et servent des objectifs d’intérêt général, dont certains sous des formes de secours mutuel.

2.6.

Si une société civile dynamique constitue un rouage essentiel des démocraties libérales fonctionnelles, leurs opposants peuvent également s’engager politiquement dans des organisations constituées ou des schémas de participation informelle. Cette «société incivile»ne respecte pas les principes de la démocratie et du libéralisme constitutionnel mais fait la promotion du concept de «démocratie illibérale». Elle exploite les droits à la participation politique pour supprimer le système existant de contrôles et équilibres mutuels entre les pouvoirs, l’état de droit et l’indépendance de la justice et pour museler la liberté des médias. Elle vise à limiter les droits civiques, les libertés civiles et la protection des minorités. En lieu et place d’apporter de l’intégration dans le corps social et d’en renforcer la cohésion, la société incivile se fait le héraut d’une conception nationaliste et excluante de la société, qui en retranche un grand nombre de citoyens, notamment des minorités.

2.7.

Le «populisme»est une idéologie étriquée, proclamant l’existence d’un peuple homogène, qui affiche une volonté monolithique et dont les populistes se targuent d’être les représentants uniques et véritables. Tout en ne donnant pas de définition claire de la notion de «peuple», le populisme érige d’aucuns, par exemple l’«élite», en ennemis et adversaires dudit peuple, en assurant qu’ils font obstacle à la volonté populaire. Les populistes hystérisent le débat politique, afin de susciter des peurs.

3.   Le contexte

3.1.

La démocratie est aujourd’hui mise au défi par un populisme qui, pour l’instant, émane essentiellement de partis et mouvements d’extrême droite. Ils sapent la démocratie libérale, les droits fondamentaux et l’état de droit, notamment la protection des minorités, les contrôles et équilibres entre les pouvoirs et les limites claires qui ont été tracées à la puissance politique.

3.2.

Dans certains États membres, ces groupes participent à présent au gouvernement. Partout, ils se proclament représentants de la volonté «réelle»du «peuple»contre celle des «élites». Ils multiplient les promesses fallacieuses, nient les défis qui se posent à l’action politique, comme le changement climatique, et veulent détruire le projet européen et ses réalisations.

3.3.

Le CESE fait observer que c’est par désenchantement que certains citoyens se tournent vers les populistes et les extrémistes. Ils ne soutiennent pas nécessairement les programmes politiques du populisme dans leur intégralité. Les écarts grandissants de richesse et de revenus, ainsi que la pauvreté, offrent à des groupes de droite un terrain fertile pour promouvoir le nationalisme comme réponse à la mondialisation.

3.4.

En dépit des problèmes qui, tel celui des inégalités, se posent à elle dans le domaine de l’autorité et de l’économie, l’Europe reste toujours un des champions de la démocratie libérale dans le monde, suscitant l’admiration des populations qui vivent dans des régimes autocratiques.

3.5.

Une société civile pluraliste constitue l’un des traits caractéristiques de la démocratie libérale et fonde tout régime constitutionnel qui s’appuie sur les libertés civiles et l’état de droit. C’est pour défendre ces principes que le CESE a créé un groupe sur les droits fondamentaux et l’état de droit (DFED), car il considère que les tendances à l’autoritarisme font actuellement planer une menace sur les libertés citoyennes et la société civile ouverte, laquelle, à l’instar de la liberté, est incompatible avec la notion de démocratie «illibérale»ou «dirigée».

3.6.

Le CESE est d’avis que la société civile a un rôle essentiel à jouer pour préserver la démocratie libérale en Europe. Elle n’aura la capacité de défendre la démocratie et la liberté et de préserver l’Europe des sirènes de l’autoritarisme que si elle présente force et diversité.

3.7.

Dans toutes les démocraties, une société civile forte et pluraliste représente une valeur en soi. Les organisations de la société civile jouent un rôle essentiel pour promouvoir les valeurs européennes, en aidant les communautés à s’organiser et à mobiliser les citoyens au service du bien public.

3.8.

Le CESE observe qu’à travers tout le continent, la confiance envers l’Union européenne suit une courbe descendante et que cette baisse s’accompagne d’une aggravation des tensions avec les minorités, de la xénophobie, des niveaux de corruption, toujours plus élevés, du népotisme et une faiblesse des institutions démocratiques dans certains pays. En pareille situation, les ONG représentent souvent la dernière digue qui tienne pour préserver et promouvoir les valeurs fondamentales du projet européen, comme le respect des droits de l’homme, la liberté, la tolérance et la solidarité.

3.9.

L’article 11 du traité sur l’Union européenne invite les institutions européennes à entretenir un dialogue avec les acteurs de la société civile, dont, en particulier, les associations.

3.10.

Dans quelque pays que ce soit, la richesse du paysage associatif et la place qui lui est donnée dans le dialogue civil constituent des indicateurs de qualité de sa vie démocratique. Les missions sociales et civiques qu’assument les associations revêtent une portée essentielle pour le plein fonctionnement de la démocratie, y compris et surtout dans la période désabusée que nous vivons.

3.11.

Le CESE tient à faire observer que l’on ne peut rattacher à la société civile des formes d’engagements qui utilisent indûment les droits de participation à la vie politique dans l’intention d’abolir la démocratie, les garanties offertes par l’état de droit et l’indépendance de la justice.

4.   La contribution de la société civile à la démocratie

4.1.

Pour exercer la participation démocratique à laquelle ils ont droit, les citoyens de l’Union peuvent non seulement faire usage de leur droit de vote, actif et passif, mais également s’engager dans des activités relevant de la société civile. Leurs principaux forums représentatifs au niveau de l’Union européenne sont les organismes faîtiers présents au CESE et les réseaux européens d’organisations de la société civile, tels que «Société civile Europe»(«Civil Society Europe»).

4.2.

Une démocratie pluraliste et la participation de chacun au politique doivent nécessairement reposer sur la garantie des droits et libertés de la personne, en particulier celles d’expression, d’information, de réunion et d’association, et sur leur mise en œuvre.

4.3.

Une justice indépendante est garante de l’état de droit, des droits fondamentaux et droits de l’homme, ainsi que de ceux de la participation politique. Or, dans différentes parties de l’Europe, l’indépendance du judiciaire est mise en péril. Des procédures en justice ont été lancées à l’encontre de la Pologne et de la Hongrie, pour infraction à l’état de droit (1).

4.4.

Une justice indépendante fait partie intégrante des contrôles et des équilibres mutuels entre les pouvoirs, empêchant qu’une quelconque fraction de la société agissant par le truchement d’une force politique exerce durablement sa prédominance sur l’ensemble de la collectivité. En particulier, on ne peut accepter que les règles de la prise de décision politique soient modifiées de manière que certaines personnes, quelles qu’elles soient, se trouvent exclues en permanence des processus décisionnels.

4.5.

Au fondement de tout régime constitutionnel qui se revendique de la liberté et de l’état de droit, il est tout aussi essentiel de pouvoir disposer d’une administration qui soit exempte de corruption, qui offre des services bien gérés d’intérêt général, qui respecte les droits fondamentaux et veille sur eux et qui garantisse à ses fonctionnaires un droit de contester toute consigne illégale.

4.6.

Pour bien fonctionner, une démocratie libérale doit également pouvoir compter sur des citoyens qui, par leur engagement civique, concourent à créer une société placée sous le signe de la tolérance, de la non-discrimination, de la justice et de la solidarité. Pour ce faire, elle doit bénéficier d’une société civile dynamique, au sein de laquelle les citoyens se mobilisent de leur propre initiative dans l’espace public. L’action bénévole qu’ils mènent a pour base les droits inscrits dans la charte européenne des droits fondamentaux et, dans le même temps, ils sont eux-mêmes les garants des valeurs qui y sont exprimées.

4.7.

Dans les démocraties libérales, une société civile indépendante joue un rôle capital pour contrôler les institutions politiques et garantir qu’elles puissent avoir à rendre des comptes, ou encore pour vérifier que les acteurs du politique assoient leurs décisions sur des motivations suffisantes. En effectuant un suivi critique des processus décisionnels et en évaluant la mise en œuvre des résolutions politiques et de la politique publique en général, elle y introduit de la transparence et, par son expertise, apporte sa pierre à une meilleure gouvernance.

4.8.

La société civile constitue une école de la démocratie, permettant de participer à la politique et ouvrant la voie à l’éducation citoyenne, en complémentarité avec l’enseignement public.

4.9.

Dans le même temps, l’enseignement public a une mission fondamentale à jouer pour inculquer les valeurs démocratiques et assurer l’éducation civique, de manière que les jeunes citoyens soient en mesure de s’engager dans la société civile et de faire usage de leurs droits civiques et de leurs libertés civiles.

4.10.

La société civile a une fonction à assumer pour structurer la collectivité et assurer son intégration, en ce qu’elle renforce la cohésion sociale et produit de l’identité. Il s’impose en particulier qu’elle mette le citoyen en capacité de faire usage de ses droits et d’apporter ainsi son écot à la création d’une communauté citoyenne européenne.

4.11.

Le CESE souligne que les organisations et initiatives ressortissant à la société civile ne pourront remplir ces fonctions que si le cadre social, politique et juridique le permet.

5.   Les menaces actuelles

5.1.

Le CESE juge que dans bien des domaines, les formations politiques extrémistes lancent actuellement des défis à la société civile européenne. Dans pratiquement tous les États membres, et de manière frappante, les résultats électoraux témoignent de l’audience croissante qu’elles recueillent et montrent que les citoyens perdent confiance dans les institutions démocratiques.

5.2.

Dans les franges les plus droitières du spectre politique, les forces populistes et extrémistes se renforcent et tentent, avec un succès grandissant, de conférer un vernis de respectabilité au racisme et à la xénophobie en Europe et d’y détruire la cohésion sociale.

5.3.

Les populistes et les extrémistes de droite remettent en cause les avancées réalisées dans l’émancipation de la femme, en se faisant les chantres d’un modèle familial réactionnaire. Ils s’en prennent à l’égalité des droits entre les hommes et les femmes et répandent l’homophobie.

5.4.

La polarisation de la société trouve également une traduction dans l’émergence d’une «société incivile». On voit apparaître de plus en plus d’organisations non gouvernementales et formes d’engagement de citoyens qui militent pour l’exclusion de certains pans de la société. Elles ne partagent pas les valeurs européennes mentionnées par l’article 2 du traité sur l’Union européenne, dont, tout particulièrement, les droits de l’homme et l’état de droit, et prônent tout au contraire un modèle politique de substitution, non démocratique.

5.5.

À la faveur de l’anonymat qui règne sur Internet et les réseaux sociaux et encouragées encore par des campagnes de désinformation, des mutations sont en train d’affecter la culture du débat politique et sociétal, qui prend un tour de plus en plus grossier, brutal et clivant. Dans cet environnement, les efforts que les intervenants pro-européens ont déployés pour diffuser les valeurs de l’Europe à destination du grand public n’ont pas réussi, pour l’essentiel, à remédier à la crise de communication du projet européen.

5.6.

De plus en plus, les hommes politiques modérés adoptent les schémas de pensée du populisme, comme l’a montré le Brexit. Des représentants de la «démocratie illibérale»s’ouvrent un accès toujours plus large dans des institutions nationales et supranationales, et s’y ménagent une plate-forme d’où ils peuvent étendre encore l’audience de leurs idées.

5.7.

Des gouvernements autoritaires de pays tiers soutiennent l’essor des acteurs du populisme et de l’extrémisme en Europe et favorisent la métamorphose de la culture du débat, dans les médias traditionnels et sur Internet, en y déversant de l’argent et en y répandant une désinformation ciblée dans le but de miner la stabilité de l’Union européenne.

5.8.

Le CESE constate avec la plus extrême inquiétude qu’en Europe, divers régimes politiques ont commencé à se muer en «démocraties illibérales». Les réformes entreprises dans certains États membres sont de nature à poser des entraves à une participation effective des citoyens aux processus politiques de prise de décision et à vider de sa substance le cadre dans lequel fonctionne la société civile, tel que sanctionné par le droit.

5.9.

Pour pouvoir assumer sa fonction d’instance de contrôle des organes politiques, la société civile a besoin de ressources adéquates. Les menées visant à faire barrage à son financement par des sources non étatiques fragilisent la liberté d’association et le bon fonctionnement de la démocratie.

5.10.

Un développement particulièrement alarmant est la funeste tendance au recul de la liberté des médias qui a pu être relevée au cours des cinq dernières années. La fragilité des bases économiques sur lesquelles reposent les médias indépendants mettent le quatrième pouvoir en péril, dès lors que l’indépendance institutionnelle de l’audiovisuel public est battue en brèche ou que des organes médiatiques privés peuvent se retrouver en position de monopole, qui plus est s’ils sont contrôlés par les responsables politiques en place.

5.11.

L’imbrication des intérêts politiques et économiques, tout spécialement, accroît les risques auxquels la corruption expose la démocratie. Aussi s’impose-t-il de fustiger l’absence de progrès dans la lutte anticorruption en Europe. La situation est d’autant plus grave que des détériorations notables sont constatées dans certains États membres.

5.12.

Il est indéniable que l’Union européenne constitue un précieux atout pour la démocratie libérale. Dans l’Europe unifiée, la loi du plus fort a cédé la place à l’état de droit. À ce jour, l’Union européenne ne dispose toujours pas de l’arsenal approprié garantissant que ses États membres respectent effectivement la démocratie et l’état de droit. En dépit, sinon à cause précisément de toutes ces faiblesses, il reste que l’Union européenne se retrouve en première ligne pour défendre la démocratie libérale en Europe.

6.   Recommandations d’action pour renforcer une société civile résiliente en Europe

Le CESE exhorte tous les États membres à respecter les valeurs de l’Union européenne, telles que définies dans l’article 2 du traité sur l’Union européenne, et à s’abstenir de toute manœuvre visant à instaurer une démocratie illibérale. Une société civile pluraliste et résiliente ne peut exister et assumer son rôle de bouclier de la démocratie que si les citoyens ne courent pas de danger lorsqu’ils s’engagent politiquement. Toutefois, si certains États membres devaient céder à la tentation de l’autoritarisme, l’Union européenne se doit d’exploiter à plein les mécanismes juridiques existants, tels que les procédures d’infraction et le cadre pour l’état de droit, de 2014.

6.1.

Il y a lieu de signifier très clairement aux instances nationales que toute rupture avec la démocratie et l’état de droit est inacceptable dans l’Union européenne.

6.2.

Le CESE attire l’attention sur la procédure de l’article 7 du traité sur l’Union européenne, qui autorise le Conseil à priver du droit de vote en son sein un État membre qui viole gravement les valeurs énoncées dans l’article 2 de ce même traité.

6.3.

Le CESE réitère la revendication qu’il avait formulée à l’instar du Parlement européen, concernant la mise en place d’un «semestre démocratique», ainsi que d’un mécanisme européen de contrôle du respect de l’état de droit et des droits fondamentaux (2). Il propose de créer un «tableau de bord de la démocratie», qui jaugerait notamment les conditions générales encadrant l’engagement de la société civile et déboucherait sur la formulation de recommandations concrètes de réforme.

6.4.

Les partis qui s’en prennent à la démocratie libérale devraient être exclus de leurs formations politiques au niveau européen et des groupes politiques au Parlement européen.

6.5.

Le CESE est d’avis qu’il conviendrait d’envisager un mécanisme grâce auquel il serait possible d’enclencher des mesures financières de correction si les recommandations de réforme n’étaient pas mises en œuvre.

6.6.

Le CESE se félicite que la Commission propose de «renforcer la protection du budget de l’Union européenne contre les risques financiers liés à des défaillances généralisées de l’état de droit dans les États membres», car il considère qu’il s’agit d’un pas posé dans la bonne direction (3).

6.7.

Les retenues de fonds décidées au titre du nouveau mécanisme ne pourront s’effectuer au détriment des bénéficiaires d’aides ressortissant à la société civile, qui devraient recevoir une assistance directe de l’échelon européen.

6.8.

Le CESE déplore toutefois que ledit mécanisme soit exclusivement centré sur la bonne gestion budgétaire. Il réclame qu’une procédure analogue puisse s’appliquer aux défaillances touchant à la démocratie et à l’état de droit, lesquelles n’ont pas de lien direct avec cet impératif de bien gérer les budgets.

6.9.

Le CESE se félicite que la Commission européenne ait suggéré d’inscrire dans le prochain cadre financier pluriannuel un nouveau pôle, intitulé «Investir dans le capital humain, la cohésion sociale et les valeurs», l’idée étant de contribuer à renforcer la résilience de la société civile européenne. Il salue en particulier la création du nouvel instrument que constitue le «Fonds pour la justice, les droits et les valeurs», sur lequel le CESE a émis un avis (4).

6.10.

Le CESE préconise en outre que le nouveau cadre financier pluriannuel prévoie la flexibilité nécessaire pour que la Commission puisse accroître le soutien aux organisations de la société civile lorsque des gouvernements nationaux, pour des motifs politiques, réduisent ou suppriment les financements en leur faveur. Cette assistance à titre subsidiaire ne devrait pas se substituer aux ressources nationales consacrées à cet appui mais il conviendrait, si possible, qu’elle soit couplée avec la réduction, en compensation, de l’aide que le pays concerné reçoit dans d’autres domaines.

6.11.

Le CESE fait en outre observer que les organisations de la société civile et leurs initiatives qui obtiendront un appui de l’Union européenne au titre du nouveau cadre financier pluriannuel devront se revendiquer clairement des valeurs européennes, telles qu’énoncées dans l’article 2 du traité sur l’Union européenne. Les groupements qui militent pour faire disparaître la démocratie et l’état de droit et propagent le racisme et la xénophobie doivent être exclus du bénéfice de cette assistance.

6.12.

Considérant que le comportement des citoyens en matière de participation est en train de se modifier et que les initiatives informelles et spontanées se multiplient, le CESE presse le législateur européen de réduire encore le poids des formalités administratives liées au dépôt de projets aidés par l’Union européenne, à leur exécution et à la reddition de comptes les concernant, ainsi que de prévoir des instruments de soutien spécifiquement conçus pour des actions à faible échelle et de petites organisations.

6.13.

Le CESE adresse à la Commission européenne la demande de diffuser une meilleure information sur les instruments existants d’aide en faveur de la société civile. Dans cette démarche, il conviendrait de cibler tout particulièrement les intervenants implantés dans des régions des États membres qui sont reculées.

6.14.

Le CESE demande à la Commission européenne d’investir davantage aux fins de développer les capacités de la société civile, d’améliorer les performances de ses acteurs pour ce qui est de se conformer aux conditions régissant l’octroi d’une aide et de gérer sainement leur budget.

6.15.

Le CESE préconise de créer des instruments destinés à tisser des réseaux transfrontières entre les acteurs de la société civile ou à renforcer ceux qui existent déjà.

6.16.

Le CESE presse les États membres de prévoir des mesures de soutien aux organisations de la société civile, sans porter préjudice aux services publics et à la justice fiscale. Une de ces mesures pourrait consister à autoriser la déductibilité fiscale limitée des cotisations d’affiliation et des contributions de soutien, en tenant compte de la capacité contributive des ONG.

6.17.

Le CESE invite la Commission à élaborer des propositions pour améliorer la mise en œuvre de la directive sur l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et aidants (5), dans le but de valoriser le volontariat et l’engagement civique dans la vie professionnelle.

6.18.

Le CESE soutient l’appel du Parlement européen demandant à la Commission de soumettre une proposition qui crée un statut européen pour les associations, les mutuelles et les fondations (6). Une telle structure juridique européenne, de nature complémentaire, ou un système parallèle interinstitutionnel d’accréditation officielle, servant de première étape, aiderait les organisations de la société civile qui, dans leur État membre, ne disposent plus d’une protection suffisante en droit.

6.19.

Le CESE trouve qu’il serait utile d’analyser pour quelles raisons ce dossier n’a pas abouti, ainsi que d’envisager en parallèle un agrément interinstitutionnel, une sorte de label, pour les ONG. Le Comité devrait explorer cette possibilité.

6.20.

Le CESE appelle les institutions de l’Union européenne à mettre en œuvre les dispositions de l’article 11 du traité sur l’Union européenne et à renforcer encore la démocratie participative au niveau de l’Union, en associant au processus décisionnel les associations représentatives et la société civile, dans une démarche qui, au-delà de la simple consultation, se transforme en un véritable dialogue.

6.21.

Si l’on veut éviter que les citoyens perdent confiance dans les institutions européennes, il importe que la politique européenne s’attache à apporter des améliorations concrètes dans leur quotidien et que les populations en aient conscience.

6.22.

Une société civile résiliente nécessite un environnement social sain. Les décideurs politiques nationaux et européens se doivent d’y veiller et de s’assurer que leur politique soit socialement durable, en garantissant des systèmes éducatifs qui intègrent toute la population, une croissance inclusive, la compétitivité et la capacité d’innovation des industries et le bon fonctionnement des marchés de l’emploi, une fiscalité juste et équitable, ainsi que l’efficacité des services publics et des régimes de sécurité sociale. À défaut, les fondements de la démocratie libérale seront ébranlés par le malaise social et l’abstention aux élections, ou encore la montée de l’extrémisme. Les droits sociaux et économiques sont indissociables de ceux de nature civile et politique.

6.23.

Pour stabiliser les démocraties européennes, il est d’une importance capitale que les partenaires sociaux soient forts, étant donné qu’ils constituent les piliers fondateurs de la société civile. Toutefois, c’est l’intervention de la société civile, dans toute sa diversité, qui est nécessaire, s’agissant de défendre les valeurs européennes essentielles.

Bruxelles, le 20 mars 2019.

Le président

du Comité économique et social européen

Luca JAHIER


(1)  Par exemple, affaire C-619/18, Commission/Pologne; affaire en cours C-78/18, Commission/Hongrie.

(2)  JO C 34 du 2.2.2017, p. 8.

(3)  JO C 62 du 15.2.2019, p. 173.

(4)  JO C 62 du 15.2.2019, p. 178.

(5)  COM(2017) 253 final; JO C 129 du 11.4.2018, p. 44.

(6)  Déclaration du Parlement européen, 10 mars 2011.


5.7.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 228/31


Avis du Comité économique et social européen sur «Le “chemin de la colombe blanche” (WhiteDoveWay) — Proposition en faveur d’une stratégie de consolidation de la paix à l’échelle mondiale menée par l’Union européenne»

(Avis d’initiative)

(2019/C 228/05)

Rapporteure: Jane MORRICE

Décision de l’assemblée plénière

15.2.2018

Base juridique

Article 29, paragraphe 2, du règlement intérieur

Avis d’initiative

Compétence

Section «Relations extérieures»

Adoption en section

15.1.2019

Adoption en session plénière

20.3.2019

Session plénière no

542

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

160/3/2

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

L’Union européenne s’est construite autour d’une mission de paix. Si elle a remporté le prix Nobel de la paix, elle ne saurait se permettre pour autant de se reposer sur ses lauriers. Au contraire, le plus grand projet de paix de l’époque moderne doit assumer la place qui lui revient en tant que chef de file et modèle à suivre pour le reste du monde, œuvrant pour la paix en Europe comme ailleurs. Dans le contexte des défis existentiels aux implications majeures qui se posent aujourd’hui pour l’Europe, et d’un renouvellement complet des institutions de l’Union, un siècle après la fin de la Première Guerre mondiale, le moment n’a jamais été aussi propice, dans l’histoire de l’intégration européenne, pour que l’Union européenne montre la voie en fixant un nouveau cap pour la consolidation de la paix partout dans le monde.

1.2.

Le «chemin de la colombe blanche» (WhiteDoveWay) est un itinéraire physique et métaphorique traçant la voie à suivre. Il propose une nouvelle stratégie dynamique de consolidation de la paix à l’échelle mondiale menée par l’Union européenne, axée sur la prévention des conflits, la participation de la société civile et une communication efficace, par l’éducation et l’information, et il déploie un «chemin européen de la paix», depuis l’Irlande du Nord jusqu’à Nicosie, afin d’inviter les citoyens à participer physiquement au processus européen de paix et de leur donner les moyens d’en atteindre l’objectif.

1.3.

Pour y parvenir, le Comité économique et social européen (CESE) demande que la part consacrée à la prévention des conflits dans les ressources affectées par le nouveau budget de l’Union européenne aux programmes pour la paix dans le cadre des relations extérieures de l’Union soit sensiblement augmentée, et il préconise plus de cohérence et de cohésion dans les politiques en matière de commerce intérieur et extérieur, d’aide, de développement et de sécurité.

1.4.

Le CESE recommande vivement d’associer davantage la société civile au processus décisionnel, à l’image des initiatives de consolidation de la paix que l’Union européenne mène partout dans le monde, telles que son programme PEACE en Irlande du Nord, initiatives qui bénéficient de la contribution active d’entreprises, de syndicats et d’organismes de bénévoles.

1.5.

Dans le droit fil du succès rencontré par le programme Erasmus, le CESE réclame un sérieux effort de communication pour promouvoir le rôle de l’éducation et de l’information afin de faire passer le message de l’Union en matière de consolidation de la paix, de faciliter les apprentissages entre les organisations non gouvernementales (ONG) d’Europe et d’ailleurs, et de créer une marque «Colombe blanche» à apposer aux projets de paix de l’Union européenne, de manière à en accroître la visibilité en Europe et dans le reste du monde.

1.6.

Afin d’associer activement les citoyens, le CESE propose un itinéraire de la paix qui s’étendra de l’Irlande du Nord jusqu’à Nicosie, reliant ainsi deux îles divisées, d’un bout à l’autre de l’Europe. Comme en témoigne le succès des itinéraires culturels européens, tel que celui de Compostelle, les voyageurs envisagent ces circuits comme une forme de pèlerinage, ou comme un moyen d’en apprendre plus sur différentes cultures en échangeant avec d’autres personnes. En empruntant le chemin de la colombe blanche, ils apprendront aussi à connaître l’héritage de paix qui a donné naissance à l’Union européenne.

1.7.

Le nom «colombe blanche», white dove en anglais, fait référence à Colomban, le pèlerin irlandais décrit comme le saint patron de l’unité européenne. Il est aussi le saint patron des motards. Prolongeant l’itinéraire jadis emprunté par le pèlerin, depuis l’Irlande jusqu’en France, en Suisse, en Autriche et en Italie, le chemin de la colombe blanche traversera des territoires qui furent le théâtre de guerres et de conflits, comme le front de l’Ouest, le Tyrol du Sud et les Balkans. Il offrira aussi un circuit «virtuel», tel un manuel d’histoire retraçant, à l’aide des technologies les plus modernes, le chemin parcouru par l’Union, de la guerre à la paix, pour encourager un mode de vie et d’apprentissage reflétant les valeurs de l’Union européenne que sont le respect, la tolérance et la compréhension mutuelle.

1.8.

Le CESE invite instamment l’Union européenne à élaborer une nouvelle stratégie de consolidation de la paix à l’échelle mondiale, qui inclurait les trois volets ci-après:

Volet no 1 — Prévention des conflits, société civile, cohérence

Le doublement des financements consacrés à la consolidation de la paix dans toutes les politiques afférentes de l’Union européenne, en mettant l’accent sur la prévention des conflits, la réconciliation et le dialogue interculturel pour promouvoir la tolérance et le respect, en Europe comme ailleurs dans le monde;

la participation structurée de la société civile à tous les niveaux décisionnels dans les politiques et les programmes relevant des relations extérieures de l’Union et présentant un lien avec la consolidation de la paix;

une cohésion et une cohérence accrues des stratégies que l’Union européenne déploie, dans l’ensemble des pays du monde dans lesquels elle est présente, en matière de défense, d’aide, de commerce et de résolution des conflits;

l’inclusion, dans les programmes à destination de la jeunesse tels que le programme Erasmus et le corps européen de solidarité, de composantes relatives à la consolidation de la paix, à la citoyenneté européenne, au respect mutuel et à la tolérance;

une plus grande coordination entre organismes et entre États, et un échange d’expériences avec les organisations qui œuvrent pour la paix sur le terrain, qu’elles soient locales, nationales ou internationales, étatiques ou non gouvernementales.

Volet no 2 — Information, communication, éducation

La formation à la médiation, à la négociation et au dialogue entre les ONG locales, nationales et internationales qui œuvrent pour la paix;

des incitations pour encourager l’apprentissage et l’enseignement de l’intégration européenne, de la consolidation de la paix et de l’engagement civique dans les établissements d’enseignement primaire, secondaire et supérieur de toute l’Union européenne;

la création de centres européens pour la consolidation de la paix à Belfast et à Nicosie, et de «pôles» d’apprentissage pour relier des sites stratégiques le long du chemin de la colombe blanche;

la reconnaissance officielle par l’Union européenne du symbole de la colombe blanche comme la «marque» de tous les projets de paix de l’Union, et l’obligation accrue pour les projets d’assurer la publicité du soutien apporté par l’Union européenne;

un effort accru, de la part de la Commission européenne, pour porter à la connaissance du public les projets de paix de l’Union européenne en utilisant la «marque» de la colombe blanche.

Volet no 3 — Itinéraire européen de la paix

La création d’un groupe de travail «Colombe blanche» de l’Union européenne pour amorcer et soutenir:

la consultation des conseils locaux, des organes régionaux, des autres circuits établis, comme le sentier du front de l’Ouest, des musées et des sites culturels reliés par le chemin de la colombe blanche;

une collaboration plus étroite avec des organisations internationales telles que les Nations unies, l’Unesco, l’OSCE et le Conseil de l’Europe;

le travail en réseau avec des initiatives de citoyens proposant des marathons, des randonnées pédestres ainsi que des circuits à vélo, à moto ou d’autres activités;

un soutien à la demande de l’association Friends of Columbanus au Conseil de l’Europe en vue de sa reconnaissance officielle comme un itinéraire culturel européen, qui serait l’un des embranchements du chemin de la colombe blanche;

les préparatifs logistiques permettant d’établir un sentier reliant l’Irlande à Chypre en passant par d’anciennes zones de conflits, avec des «bifurcations» vers des lieux qui ont apporté une contribution significative à la paix, comme les pays scandinaves et l’Europe centrale et orientale;

un soutien financier et technique pour un chemin de la colombe blanche sous forme de «réalité virtuelle», qui serait utilisé par les écoles et les universités de toute l’Europe et servirait de manuel d’histoire du futur, utilisant les technologies les plus modernes;

un soutien à la version en ligne interactive du chemin de la colombe blanche, qui en relierait les différents sites à des pôles de consolidation de la paix, en proposant notamment des récits à destination des personnes qui ne peuvent pas emprunter l’itinéraire pédestre.

2.   Contexte

2.1.

Les défis majeurs auxquels l’Union européenne est confrontée aujourd’hui menacent l’essence même de l’idéal européen. L’afflux de réfugiés et d’immigrants, les séquelles de la crise financière, l’austérité, l’extrémisme, les menaces sur le plan de la sécurité, l’accentuation des clivages politiques et les conséquences du retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne ont ébranlé les fondements mêmes de l’Union. Si celle-ci entend préserver la plus longue période de paix que l’Europe ait connue, elle ne doit pas rester dans l’inaction face à ces menaces. L’Union européenne doit répondre à cette situation éminemment instable par des actions positives, ambitieuses, créatives et constructives, et par une vision qui reflète la mission fondamentale du projet européen, à savoir la promotion et le maintien de la paix.

2.2.

Le succès rencontré par le projet de paix de l’Union européenne a pour conséquence que les nouvelles générations d’européens sont très éloignées des réalités de la guerre. En rappelant aux citoyens ce que furent ses origines, l’Union européenne pourra restaurer un idéal qui rassemble et asseoir ainsi sa crédibilité et celle de sa mission. Pour y parvenir, elle doit intensifier ses efforts en matière de consolidation de la paix, pas seulement dans le reste du monde mais aussi au sein de l’Europe elle-même. En échangeant des récits illustrant la résolution de conflits et la recherche de compromis et de consensus sur le terrain entre des cultures, des communautés et des nations différentes, l’Union européenne pourrait conforter et promouvoir ses valeurs fondamentales que sont la liberté, la justice, l’égalité, la tolérance, la solidarité et la démocratie, en Europe comme dans d’autres pays.

2.3.

L’Union doit être perçue par le monde extérieur comme un champion mondial de la paix, de la démocratie et des droits de l’homme. Toutefois, les conflits en Syrie, en Afghanistan, au Yémen ou ailleurs nous forcent à porter un regard critique sur la réponse que l’Union européenne apporte aux crises humanitaires qui surviennent aux interventions militaires. Pour satisfaire aux objectifs et aux principes qu’elle s’est fixés, l’Union a le devoir moral, au-delà de toute considération économique ou géopolitique, de protéger la vie des victimes innocentes qui tombent en proie à des conflits, en particulier les enfants. Si les fonds de l’Union européenne peuvent contribuer de manière significative à améliorer l’existence des personnes présentes dans ces zones, les résultats en sont toutefois limités. En mettant l’accent sur la prévention des conflits dans les zones où la paix et la sécurité sont menacées, et en collaborant étroitement avec la société civile, l’Union peut assurer une participation accrue des acteurs du terrain et augmenter les chances d’obtenir une paix durable.

2.4.

Partant du principe que chaque euro investi dans la paix permet d’en économiser sept dans la défense, le CESE invite instamment l’Union européenne à donner la priorité à la consolidation de la paix dans ses propositions pour son nouveau budget (CFP pour la période 2021-2027). La nouvelle «facilité européenne pour la paix» dotée de 10 milliards d’EUR que propose la Commission européenne devrait prévoir un volet qui soit véritablement consacré à la consolidation de la paix et qui associe activement les parties prenantes de la société civile locale et internationale, des échanges réciproques entre acteurs de terrain, des pôles de transfert des connaissances ainsi qu’une stratégie pour communiquer son message partout dans le monde. Le CESE réclame aussi la pleine mise en œuvre de la stratégie globale pour la politique étrangère et de sécurité de 2016, visant à «prévenir les conflits, favoriser la sécurité humaine, endiguer les causes profondes de l’instabilité et œuvrer à l’avènement d’un monde plus sûr».

3.   La mise en contexte — Commémorer, célébrer, communiquer

3.1.

Durant l’année qui a marqué le centième anniversaire de la fin de la Première Guerre mondiale, les citoyens de l’Union européenne n’ont pas seulement commémoré les morts, mais ont aussi rappelé le coût de ce conflit. Comprendre le chemin qui a mené à la paix est une façon pour les responsables politiques de tirer de leçons de l’histoire et d’appréhender la manière dont les processus de paix se sont installés. La commémoration des temps forts de la paix évoque l’héritage de la guerre et l’esprit de solidarité qui a prévalu à son lendemain. Dans les années à venir, plusieurs événements marquants seront célébrés, comme les 30 ans depuis la chute du mur de Berlin et la paix au Liban, en 2019, et les 25 ans de l’accord de paix de Dayton, en 2020; l’année 2018 a aussi marqué les 20 ans de l’accord du Vendredi saint ou accord de Belfast, et le deuxième anniversaire de l’accord de paix en Colombie. En mettant en avant le soutien qu’elle a apporté à ces accords, l’Union européenne défend aux yeux du monde la valeur des efforts qu’elle déploie.

3.2.

Afin de tenir compte de l’Année européenne du patrimoine culturel, toutes les actions visant à exploiter les enseignements que l’Europe a tirés des conflits pour les mettre au service du bien commun devraient comporter une nouvelle composante culturelle, dont l’importance est fondamentale. La diplomatie culturelle a été mise en exergue par la haute représentante de l’Union européenne, Mme Federica Mogherini, en tant qu’outil essentiel pour les relations diplomatiques internationales de l’Union. L’on peut en citer des exemples, depuis la protection des sites du patrimoine jusqu’à la promotion des identités culturelles et des langues, qui contribuent à créer des structures politiques stables dans lesquelles différents groupes ethniques, nationaux, religieux ou linguistiques se sentent en sécurité et sont davantage disposés à interagir pacifiquement. Si les mérites de la diplomatie culturelle dans les relations extérieures sont reconnus, il est tout aussi envisageable, compte tenu de l’accentuation des clivages intra-européens, d’appliquer la même démarche pour éteindre les discordes qui règnent dans l’Union. Le pèlerin irlandais du VIe siècle Colomban (1), qui est décrit comme le «saint patron d’une Europe unie», incarne l’héritage, le récit et le lien culturel nécessaires à une nouvelle stratégie de l’Union européenne pour promouvoir à l’échelle mondiale une vision et une action communes fondées sur la paix. C’est à ce titre que l’initiative dont il est question ici fait référence, dans son intitulé, au symbole international de la paix qu’est la colombe blanche.

4.   Le «chemin de la colombe blanche» (WhiteDoveWay)

En combinant des méthodes modernes d’interaction sociale avec des formes ancestrales de transmission des récits, le «chemin de la colombe blanche» fixe un nouveau cap pour l’Union européenne, l’invitant à établir un lien entre son passé, son présent et son avenir.

4.1.    Tracer la voie — Donner à l’Union européenne un rôle moteur dans la consolidation de la paix au niveau mondial

En soutenant activement la création de sociétés stables, justes, équitables et prospères partout dans le monde, l’Union européenne fait bien plus que promouvoir la paix. Si les efforts qu’elle déploie ne sont peut-être pas toujours à la hauteur de ses attentes, le fait de promouvoir ses valeurs encourage les pays qui sont en proie à la guerre à dépasser le stade de la violence. Le programme PEACE que l’Union européenne a mis en place en Irlande du Nord et le soutien qu’elle a apporté au processus de paix en Colombie en offrent de précieux exemples. D’autres modèles d’action sont aussi offerts par la stratégie de l’Union européenne de 2015 en faveur de la jeunesse, dont l’objectif est de prévenir la marginalisation des jeunes dans ses États membres. En renforçant également la cohérence et la cohésion des stratégies en matière de culture, de défense, d’aide, de commerce et de résolution des conflits qu’elle déploie, aux côtés d’organisations internationales, l’Union européenne pourrait s’imposer comme le chef de file de la consolidation de la paix à l’échelle mondiale.

4.2.    Montrer la voie — Par l’information, la communication et l’éducation

En donnant l’exemple et en promouvant ses valeurs fondamentales, l’Union peut montrer la voie à suivre en s’impliquant de manière plus créative dans des stratégies d’information, de communication et d’éducation. Les échanges d’expériences avec les militants pour la paix sur le terrain, en Europe mais aussi au-delà, revêtent une importance fondamentale. La création de centres européen pour la paix proposant des formations à la médiation, à la négociation, au dialogue et à la recherche de consensus, comme le Comité l’a suggéré dans des avis antérieurs (2), et le travail en partenariat avec les militants pour la paix issus de la société civile sont essentiels. En faisant connaître son action grâce à des programmes d’éducation et d’information bien ciblés et adossés à des moyens suffisants, l’Union européenne assure une meilleure compréhension du rôle qui est le sien et justifie ses efforts auprès de ses citoyens, en leur montrant la valeur d’un engagement multiculturel et en contribuant à les réconcilier avec l’idée de départ du projet européen.

4.3.    Emprunter la voie — Un itinéraire culturel accessible à tous

4.3.1.

Ce sentier permanent de la paix, reliant l’Irlande du Nord à Nicosie, rassemblera des personnes de tous horizons autour d’un effort physique et mental en vue de forger de nouvelles amitiés et d’aller à la rencontre d’autres individus désireux de partager leur expérience des conflits. Dans le sillage de Colomban, cet itinéraire culturel s’étendra sur 5 000 kilomètres à travers l’Europe, prolongeant ainsi la route jadis empruntée par le pèlerin, depuis l’Irlande jusqu’en Italie, en traversant des territoires profondément marqués par les guerres et les conflits, comme le front de l’Ouest, le Tyrol du Sud et les Balkans, et en reliant entre eux les peuples et les territoires tout au long de son tracé. Les promeneurs pourront entendre des récits sur l’héritage durable des conflits, mais aussi et surtout sur les mécanismes qui rendent possible l’émergence de la paix. Le chemin de la colombe blanche mettra également en place des pôles didactiques ainsi que des bifurcations vers l’Europe du Nord, de l’Est, du Centre et du Sud, qui permettront aux promeneurs de choisir leur itinéraire et le nombre de sites qu’ils souhaitent visiter. Le chemin de la colombe blanche encouragerait une extension de ces «bifurcations» aussi bien à l’intérieur de l’Union qu’au-delà de ses frontières, en reconnaissant non pas seulement des sentiers physiques, mais aussi des liens culturels, par exemple avec l’Écosse et en particulier avec l’île d’Iona, et des liens en matière de consolidation de la paix qui le rattachent à des territoires comme l’Ukraine et le Moyen Orient. Il pourrait aussi trouver des moyens de relier d’autres itinéraires bien établis, comme le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle.

4.3.2.

Il s’accompagnera aussi d’un portail en ligne qui compilera, dans le cadre d’une expérience virtuelle et interactive, des extraits sonores et visuels tirés de chacun des sites, et les mêmes récits historiques oraux que ceux qui pourront être entendus le long du trajet, à destination des personnes qui, pour des raisons de mobilité, ne peuvent emprunter physiquement le chemin. Le sentier virtuel servirait d’outil éducatif pour enseigner la consolidation de la paix dans les écoles et pour aménager plus de moments de créativité et d’entente en puisant dans les chapitres pertinents de l’histoire locale et en établissant de possibles liens avec l’itinéraire, afin d’encourager une large appropriation de ses enjeux dans toute l’Union européenne et au-delà. Inspiré des techniques utilisées pour former les élèves officiers à la protection civile et à la prévention des conflits, il offrira une expérience des conflits et de la consolidation de la paix sous forme de réalité virtuelle. Cet outil technologique servirait de manuel pédagogique répondant aux exigences éducatives qui sont celles de l’ère du numérique, en complément des méthodes d’enseignement traditionnelles, qui mettent davantage l’accent sur les personnes qui déclenchent les guerres que sur celles qui œuvrent pour la paix.

5.   Le nouveau budget de l’Union européenne (CFP) doit accorder un maximum de ressources à la consolidation de la paix et à l’inclusion de la société civile

5.1.

Bien qu’il n’existe pas de réponse simple lorsqu’il s’agit de trouver des solutions pour consolider la paix, différents moyens permettent de modifier les stratégies et les priorités pour atténuer les conséquences les plus graves des conflits. Le renouvellement du budget de l’Union européenne offre une précieuse occasion à cet effet en assurant «la cohérence, la coordination et la complémentarité» entre les politiques de consolidation de la paix de l’Union européenne et au sein de la Commission européenne, où la complexité des structures rend la coordination entre le Service européen pour l’action extérieure (SEAE) et d’autres instances difficile dans la pratique. De même, les politiques de l’Union européenne dans les domaines du commerce, de l’aide, de la sécurité et du développement doivent être cohérentes et il convient de reconnaître la nécessité de «faire le lien» entre les politiques et les pratiques des institutions de l’Union européenne, des États membres et des autres grands bailleurs de fonds.

5.2.    Mettre l’accent sur la prévention des conflits

Les propositions relatives au nouveau budget de l’Union européenne pour la période 2021-2027 relatives à l’action extérieure doivent accorder une plus grande priorité à la consolidation de la paix. Ces mesures incluent notamment une augmentation de 40 % de l’enveloppe consacrée à la sécurité, pour la porter à 4,8 milliards d’EUR, un nouveau Fonds de la défense doté de 13 milliards d’EUR, un budget de 6,5 milliards d’EUR affecté à la «mobilité militaire» dans le cadre du mécanisme pour l’interconnexion en Europe, ainsi qu’une hausse de 26 % du financement de l’action extérieure, qui s’élèverait à 120 milliards d’EUR. Surtout, la Commission propose une «facilité européenne pour la paix» dotée d’une enveloppe extrabudgétaire de 10,5 milliards d’EUR aux fins d’un engagement commun dans les pays tiers, qui constitue le levier idéal pour veiller à ce que l’action de l’Union soit véritablement orientée vers la prévention des conflits. En 2017, l’Union européenne a adopté un règlement établissant un nouveau soutien dans le cadre de l’instrument contribuant à la stabilité et à la paix (IcSP), afin de favoriser le renforcement des capacités des acteurs militaires (renforcement des capacités à l’appui de la sécurité et du développement — RCSD). Le Bureau européen de liaison pour la construction de la paix (EPLO) fait régulièrement état d’inquiétudes dans ce domaine et signale la nécessité d’une plus large contribution de la société civile.

5.3.    L’inclusion de la société civile — Mettre l’accent sur les femmes et les jeunes

Il est de plus en plus communément admis que la société civile joue un rôle crucial pour assurer l’efficacité et la pérennité de toute stratégie de consolidation de la paix. En contribuant à favoriser une consolidation de la paix et un renforcement positif qui tiennent davantage compte des situations de conflit, la coopération avec les acteurs de terrain est non seulement utile pour améliorer la compréhension des conflits du point de vue de la base, mais aussi pour que les acteurs locaux s’«approprient» le processus. La résolution 2419 des Nations unies souligne le rôle joué par les jeunes dans la négociation et la mise en œuvre d’accords de paix, tout comme la résolution 1325 met en avant celui des femmes. L’action des syndicats et les entreprises, petites et grandes, ont également une importance cruciale pour mobiliser la société civile. Les groupes vulnérables, en particulier les victimes, doivent bénéficier d’une attention éclairée, et il importe également d’appréhender les relations dans le tissu local et sur le lieu de travail dans le cadre d’une approche «de bon voisinage». Le «dialogue structuré» entre l’Union européenne et la société civile permet aussi d’établir des relations novatrices et durables, comme l’ont montré les travaux du CESE dans le cadre de ses relations avec les pays voisins de l’Union européenne, en Afrique, en Asie et ailleurs.

5.4.    La sensibilisation au niveau de l’Union européenne

Puisque que les citoyens n’ont que peu connaissance des travaux de l’Union européenne en matière de consolidation de la paix, le nouveau budget doit accorder une plus grande importance aux stratégies d’information, de communication et d’éducation, et en particulier à l’utilisation tout aussi bien des médias traditionnels que des médias sociaux. Si les préoccupations concernant les dangers des médias sociaux et la menace qu’ils pourraient représenter pour les démocraties sont bien réelles, la capacité des médias à amener des changements positifs est sous-exploitée. Le journalisme de paix, la diplomatie culturelle et le dialogue interculturel devraient bénéficier de dotations accrues dans le nouveau budget de l’Union européenne. L’éducation joue elle aussi un rôle important en apprenant aux jeunes et aux enfants non seulement à «tolérer», mais aussi à respecter les différences. L’organe des programmes particuliers de l’Union européenne et le mouvement pour une éducation intégrée en Irlande du Nord en offrent de bons exemples.

5.5.    Le partage des bonnes pratiques

L’Union européenne est riche de nombreuses expériences acquises dans des régions telles que l’Asie du Sud-est, le Moyen-Orient, l’Amérique centrale, les Balkans et l’Afrique subsaharienne. Certaines de ces actions y ont été largement couronnées de succès, d’autres moins. L’Union européenne se doit de tirer les leçons de l’histoire et de respecter et promouvoir une approche éthique de l’intervention, comme l’illustre l’initiative pour la transparence dans les industries extractives (3) qui, en encourageant des processus pleinement participatifs auxquels la société civile participe, contribue à lutter contre l’exploitation et la corruption et à promouvoir la bonne gouvernance. Ces leçons, qu’elles soient positives ou négatives, doivent étayer les politiques menées. S’il n’existe pas de panacée en la matière, un certain nombre de principes fondamentaux communs aux zones de conflit ne peuvent être ignorés. Le partage des expériences devrait être mieux institué, en particulier pour ce qui concerne le lien entre action interne et externe de l’Union européenne, qui n’a donné lieu à aucune approche systématique de partage des enseignements jusqu’à présent. Il s’agit d’une occasion manquée et d’un échec politique majeur sur lequel il convient de se pencher.

5.6.    La voie à suivre

La commémoration des cent ans depuis la fin de la guerre et la célébration de la paix et du patrimoine culturel offrent à l’Union européenne une occasion idéale pour redorer son blason aux yeux du monde, pas seulement en tant que puissance économique mais aussi comme acteur mondial de premier plan dans la construction, le maintien et la promotion de la paix. En faisant de la paix une priorité face aux menaces terroristes, sur son territoire comme dans d’autres pays, l’Union peut s’inspirer de sa propre expérience, comme d’un exemple de ce qu’il est possible de réaliser, mais qu’il faut en permanence entretenir, pour encourager le dialogue interculturel, la tolérance, la solidarité et le respect mutuel.

En établissant une feuille de route pour une stratégie de consolidation de la paix à l’échelle mondiale menée par l’Union européenne, et en proposant aux voyageurs un itinéraire à la fois physique et virtuel sur le thème de la paix, le chemin de la colombe blanche servirait de phare pour leur indiquer comment vivre, apprendre et interagir dans un monde sans cesse plus mondialisé. Venues de toute l’Union européenne comme d’ailleurs, jeunes et vieux confondus, de tous horizons sociaux, économiques, générationnels, confessionnels, culturels et géographiques, des personnes se rassembleront pour découvrir des cultures et des traditions différentes et pour nouer des liens nouveaux, sur la base d’une meilleure compréhension de ce que sont les valeurs de l’Union européenne.

En utilisant le symbole de la colombe blanche pour indiquer la voie à suivre, ce chemin rendrait hommage aux efforts de consolidation de la paix entrepris par l’Union européenne partout dans le monde, mais serait également porteur d’une nouvelle vision pour l’Union européenne, ainsi que d’un message d’espoir en ces temps de plus en plus difficiles.

Lorsqu’il s’agit d’asseoir politiquement la paix, les personnes de bonne volonté peuvent toujours emprunter la voie de la colombe.

Bruxelles, le 20 mars 2019.

Le président

du Comité économique et social européen

Luca JAHIER


(1)  Pèlerin irlandais du VIe siècle, que Robert Schuman, l’un des pères fondateurs de l’Union européenne, décrivait comme le «saint patron de tous ceux qui aujourd’hui cherchent à construire une Europe unie».

(2)  Avis du CESE sur «Le rôle de l’Union européenne dans le processus de paix en Irlande du Nord», 23.10.2008 (JO C 100 du 30.4.2009, p. 100).

Avis du CESE sur «Le rôle de l’Union européenne dans la consolidation de la paix dans les relations extérieures: meilleures pratiques et perspectives», 19.1.2012 (JO C 68 du 6.3.2012, p. 21).

(3)  Comme indiqué dans l’avis du CESE sur le thème «Garantir les importations essentielles pour l’Union européenne par la politique commerciale actuelle de l’Union européenne et ses autres politiques connexes», 16.10.2013 (JO C 67 du 6.3.2014, p. 47).


5.7.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 228/37


Avis du Comité économique et social européen sur «Être à l’écoute des citoyens de l’Europe pour un avenir durable (Sibiu et au-delà)»

(2019/C 228/06)

Rapporteurs: Vladimíra DRBALOVÁ

Peter SCHMIDT

Yves SOMVILLE

Décision du bureau

16.10.2018

Base juridique

Article 29, paragraphe 2, du règlement intérieur

Adoption en session plénière

20.3.2019

Session plénière no

542

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

217/6/8

Être à l’écoute des citoyens de l’Europe pour un avenir durable

1.   Introduction

1.1.

Le CESE, grâce à la diversité de sa composition, jette des ponts entre les institutions de l’UE et ses citoyens, et c’est à ce titre qu’il souhaite exposer sa vision ambitieuse de l’avenir d’une Europe qui se place au premier rang dans le monde en matière de développement durable.

1.2.

La création de l’Union européenne constitue l’un des projets pacifiques, sociaux et économiques les plus réussis de l’histoire de l’Europe. Notre Europe a été fondée sur les valeurs que sont le respect de la dignité humaine, la liberté, la non-discrimination, la tolérance, la justice, la solidarité, l’égalité entre les femmes et les hommes, la démocratie, l’état de droit et le respect des droits humains, y compris celui des droits des personnes appartenant à des minorités (1). Ces valeurs doivent continuer d’être au cœur du développement de l’UE et de ses politiques futures.

1.3.

Sept décennies de paix et de stabilité en Europe constituent une réussite historique et exceptionnelle. C’est ce qu’ont rendu possible le projet européen et la construction de l’Union européenne, qui ont suscité une union entre les peuples d’Europe et ont progressivement rassemblé les États européens autour d’un dessein commun. Ceci explique que l’UE demeure un projet qui conserve tout son attrait pour les pays candidats et les pays qui participent à la politique européenne de voisinage. L’Europe doit toutefois être parée à affronter de nouvelles évolutions géopolitiques. Le CESE devrait jouer un rôle pour sensibiliser à l’idée que la paix n’est pas un acquis définitif.

1.4.

Le marché unique, dans toutes ses dimensions économiques, sociales et environnementales, occupe une place centrale dans l’intégration européenne. Il devrait par conséquent être en mesure de susciter une croissance et une innovation durables, d’attirer les investissements et de renforcer la compétitivité durable de ses entreprises sur des marchés mondialisés. Toutefois, il importe aussi de reconnaître que les effets positifs du marché unique n’ont pas été uniformément répartis et que les citoyens ne sont pas tous en mesure de bénéficier des richesses qu’il crée.

1.5.

La croissance durable signifie que la croissance ne doit pas seulement se fonder sur la quantité, mais aussi, et de fait davantage encore, sur la qualité, ce qui veut dire: i) ne pas exploiter l’environnement ou la main d’œuvre; ii) assurer des conditions de vie équitables; iii) mesurer la croissance économique non pas seulement sous la forme d’un flux annuel, mais aussi sous celle d’un stock de richesses et de leur distribution; iv) répondre aux besoins de tous dans les limites posées par les possibilités de la planète; v) développer des économies qui nous permettent de prospérer, qu’elles croissent ou non; et vi) établir un circuit fermé de circulation des revenus entre les ménages, les entreprises, les banques, les gouvernements et les échanges commerciaux, œuvrant de manière sociale et écologique. Les énergies, les matériaux, le monde naturel, la société humaine, le pouvoir et la richesse que nous détenons en commun, tous ces éléments font défaut dans le modèle actuel. Le travail non rémunéré des aidants, des femmes pour l’essentiel, n’est pas pris en compte, alors que sans eux, aucune économie ne pourrait fonctionner (2).

1.6.

La compétitivité durable est quant à elle un modèle qui établit un équilibre entre la prospérité économique, les questions environnementales et l’inclusivité sociale. Dans ce contexte, l’indice de compétitivité mondiale ajusté au développement durable doit prendre en compte deux nouvelles dimensions, d’ordre environnemental et social (3).

1.7.

Les quatre libertés, à savoir celle de la circulation des marchandises, des citoyens, des services et des capitaux, qui, une fois réunies, rendent possible le commerce et le développement économique, l’emploi, la créativité et l’innovation, les échanges de compétences et le développement des infrastructures dans les régions périphériques, constituent l’essence de l’Europe. Le bon fonctionnement des libertés économiques et des règles de la concurrence va de pair avec le respect des droits sociaux fondamentaux, mais ne devrait pas leur porter atteinte.

1.8.

Quoi qu’il en soit, l’UE continue d’affronter des défis exceptionnels, aussi bien intérieurs qu’extérieurs, sur le plan économique, social, environnemental et politique (4), qui mettent en péril son existence, tels que le protectionnisme au sein du marché unique, les inégalités sociales, le populisme, le nationalisme et l’extrémisme (5), ainsi que des changements cruciaux dans l’arène géopolitique et de profondes mutations technologiques.

1.9.

L’accélération des changements climatiques, l’effondrement de la diversité biologique, d’autres menaces environnementales et l’incapacité collective à concrétiser des politiques efficaces constituent également des menaces fondamentales pour la population, l’économie et les écosystèmes de l’Europe. C’est pourquoi il est besoin d’une stratégie solide de l’UE pour mettre en œuvre le programme des Nations unies à l’horizon 2030. Des sociétés plus égalitaires obtiennent de meilleurs résultats en matière environnementale et elles sont mieux à mêmes de devenir toujours plus durables.

1.10.

Il est manifestement besoin de traiter de la demande d’emplois de qualité que formulent les citoyens dans toute l’Europe, notamment dans les régions qui connaissent un chômage élevé, et tout particulièrement le chômage des jeunes, ou qui sont confrontées à des mutations structurelles. Cette situation place tous les acteurs — institutions, gouvernements, partenaires sociaux et autres organisations de la société civile — dans l’obligation de redéfinir une Europe durable pour favoriser la création d’emplois de qualité.

1.11.

Il est urgent et nécessaire d’accroître l’accès aux marchés du travail en faisant coïncider autant que possible la création d’emplois de qualité avec un système éducatif renforcé afin de créer des jeux pertinents de compétences, au moyen par exemple d’un système dual.

1.12.

Les dimensions sociale et environnementale sont intrinsèquement liées et l’économie doit être le facteur déclenchant d’un renouveau social, économique et culturel, avant tout en promouvant et en développant les compétences essentielles et une diversification accrue. Le programme des Nations unies à l’horizon 2030 doit encourager le secteur privé à contribuer à la réalisation des objectifs économiques, sociaux et environnementaux durables, favorisant ainsi une croissance équitable et durable du bien-être pour tous et la protection des droits sociaux, humains et du travail (6).

1.13.

La dimension culturelle, dans toute sa diversité, du projet européen doit également être pleinement prise en compte dans toutes les politiques de l’UE. Il s’agit de comprendre et de promouvoir le patrimoine culturel, d’intégrer une dimension culturelle et créative dans l’éducation et de soutenir la création contemporaine en ce qu’elle constitue un moteur de cohésion et de développement.

1.14.

La durabilité est un processus prospectif qui doit être guidé par une forte volonté politique et la détermination à créer une Union européenne durable en faisant basculer nos économies vers un avenir résilient et coopératif, efficace dans l’utilisation des ressources, sobre en carbone et inclusif sur le plan social (7), où les comportements, les actions et les décisions des gouvernements, des entreprises, des travailleurs, des citoyens et des consommateurs sont guidés par la réalisation de manière responsable de leurs impacts économiques, environnementaux et sociaux.

Le CESE demande en premier lieu une stratégie globale en faveur du développement durable afin de mettre en œuvre le programme à l’horizon 2030, assurée au moyen d’un budget ambitieux de l’UE.

La compétitivité et le développement durable ne sont pas contradictoires, pour autant que les aspects sociaux et environnementaux s’inscrivent pleinement dans la définition de la compétitivité et l’enrichissent. L’on ne saurait définir la compétitivité uniquement par des quantités et des prix; il serait préférable de tenir également comptes des valeurs européennes, de la qualité et du développement durable en tant qu’éléments d’un marché unique pleinement développé et performant.

L’Europe a besoin d’un nouveau modèle de croissance, qui diffère d’un point de vue qualitatif de ce dont nous avons disposé jusqu’à présent, c’est-à-dire qui soit plus inclusif sur le plan social et plus durable sur le plan environnemental, et qui soit à même de favoriser et d’accompagner la convergence des transitions numérique et écologique dans nos pays et nos sociétés.

Les investissements durables constituent un instrument déterminant pour guider et favoriser le processus de consolidation de la première place qu’occupe l’Europe sur le chemin vers une société durable. Ils doivent stimuler la création d’emplois de haute qualité, les énergies renouvelables, les systèmes éducatifs, des transports publics écologiques qui soient abordables et accessibles, des technologies numériques écoconçues, la recherche et l’innovation.

Les entreprises européennes doivent accomplir leur rôle et prendre leurs responsabilités et agir comme les pionniers aux yeux du reste du monde lorsque la compétitivité et le développement économique durable de notre système européen sont redéfinis en respectant les limites qu’impose la seule et unique planète dont nous disposons.

2.   L’Europe des citoyens

2.1.

Les citoyens européens perçoivent de moins en moins l’Europe comme une solution mais de plus en plus comme un problème. Le nationalisme et le protectionnisme sont des menaces d’actualité. Confrontée à la perte d’identité et de valeurs, ayant négligé la dimension culturelle du projet européen, l’Europe ne parvient pas à trouver les réponses à la hauteur des enjeux des problèmes locaux et mondiaux.

2.2.

Il importe grandement de prendre conscience des préoccupations légitimes des citoyens, et en particulier de celles des jeunes, et d’accroître leur participation démocratique. Il est primordial d’améliorer et de réformer les mécanismes de participation et les procédures de consultation de l’UE existants. Les questions touchant à la jeunesse s’inscrivent, entre autres, dans le socle européen des droits sociaux, le programme des Nations unies de développement durable à l’horizon 2030 et les objectifs de développement durable que ce dernier prévoit.

Un dialogue citoyen structuré doit devenir un véritable instrument de participation démocratique, tel que le prévoit l’article 11, paragraphes 1 et 2, du traité sur l’Union européenne (TUE) (8).

Le CESE, en tant que représentant institutionnel de l’UE de la société civile organisée, continuera à jouer un rôle actif dans le processus d’élaboration des politiques.

Il est également nécessaire de continuer à soutenir et à améliorer l’initiative citoyenne européenne, prévue par l’article 11, paragraphe 4, du TUE, qui constitue aussi le premier instrument transnational de participation dans le monde. Pour sa part, le CESE a milité en faveur d’un ensemble plus simple et plus compréhensible des règles qui régissent sa mise en œuvre (9), et il joue également le rôle de facilitateur entre la Commission et les citoyens, notamment en organisant la conférence annuelle de la Journée de l’initiative citoyenne européenne et en apportant aide et soutien aux organisateurs d’initiatives.

Il faut engager et faire participer les jeunes au processus politique européen (10) en favorisant un engagement citoyen plus large, notamment par le vote, le volontariat, l’adhésion à des organisations de la jeunesse et par la participation à la démocratie sur le lieu de travail et au dialogue social (11). Le CESE encouragera la participation des jeunes à ses activités et développera des manifestations destinées à la jeunesse, telles que «Votre Europe, votre avis» et son prix pour les jeunes entrepreneurs.

Il convient de prendre des mesures afin d’assurer une responsabilisation et une transparence accrues dans le cadre du processus de prise de décision par les institutions de l’UE et les gouvernements nationaux, y compris l’échelon régional et local, pour gagner le soutien des citoyens; il peut s’agir de réformer les méthodes de travail du Conseil afin d’en améliorer la transparence et de résoudre les problèmes de responsabilité démocratique et de transparence liés au très large recours aux «trilogues» avant d’adopter des actes lors de la première et de la seconde lecture de la procédure législative ordinaire (12) (13).

Il convient de mettre en place des mécanismes institutionnels afin d’accroître l’impact des avis du CESE dans le cadre des processus d’élaboration des politiques et de prise de décision de l’UE, au moyen par exemple d’un monitorage renforcé du suivi donné aux avis du Comité et de la conclusion d’un accord de coopération avec le Conseil de l’UE afin de faire en sorte, entre autres, que les groupes de travail du Conseil soient systématiquement informés des avis du Comité.

Il est primordial de mobiliser le soutien du public à la mise en œuvre du programme des Nations unies à l’horizon 2030 en faveur d’une «nouvelle donne» sociale.

3.   L’Europe sociale

3.1.

Le modèle social européen devrait fournir une protection solide et équitable à tous les citoyens, tout en réduisant la pauvreté et en offrant à chacun des possibilités de prospérer. Des revenus décents devraient réduire le fossé entre les riches et les défavorisés et garantir une vie de qualité. Chacun devrait bénéficier des normes de travail décent, d’une amélioration du bien-être et d’une réduction des disparités en matière de santé au sein des pays et entre ceux-ci, ainsi qu’entre les générations. L’inclusion et la protection sociales, des emplois de haute qualité, l’égalité entre les genres, une qualité élevée; des soins de santé et une santé publique abordables et accessibles, l’accès au logement abordable et de qualité, la justice environnementale, une éducation publique de grande qualité et un accès égal à la culture, tels doivent être les grands principes qui guident les priorités politiques d’action à l’échelon national et européen.

L’on ne peut faire l’économie d’une nouvelle «donne sociale» qui offre à tous les citoyens une société plus juste et plus égale. C’est pourquoi le CESE réclame un programme d’action sociale afin de décliner à tous les niveaux le programme des Nations unies à l’horizon 2030.

Le CESE demande une amélioration générale et des investissements accrus dans les systèmes d’éducation et il soutient un droit universel à l’apprentissage tout au long de la vie qui permette aux personnes d’acquérir les compétences et de se reconvertir et d’accroître leurs compétences; accroître sensiblement les investissements dans les institutions, les politiques et les stratégies qui soutiendront les personnes dans les transitions qu’entraînera l’avenir du travail et mettre en œuvre un plan d’action de transformation qui soit mesurable pour l’égalité des genres, tous ces éléments devraient bénéficier d’un large soutien (14).

Les politiques publiques et les mesures législatives doivent garantir que tous les citoyens et résidents européens bénéficient du même niveau de protection et puissent faire valoir leurs droits et libertés fondamentaux. L’UE doit améliorer ses politiques et actions afin d’assurer l’égalité des genres, en sus de garantir que toutes les personnes confrontées à des formes multiples de discrimination bénéficient de l’égalité des chances dans la société.

Dans le contexte de préoccupations croissantes quant à la divergence des progrès accomplis par les États membres, des mesures pour garantir un salaire minimum et un revenu minimum, dans le cadre d’un processus de convergence sociale au sein de l’UE, pourraient constituer un élément important de la protection sociale. Cela contribuerait à atteindre un niveau de vie décent dans tous les pays, tout en aidant également à soutenir la croissance et à renforcer la convergence, ou à éviter la divergence, au sein de l’UE (15).

Une transition durable requiert des investissements dans des systèmes de protection sociale efficaces et intégrés et qui offrent des services de qualité (16).

Le dialogue social et des systèmes solides de négociation collective entre les partenaires sociaux devraient prévaloir en tant qu’instruments essentiels afin d’anticiper et de gérer les transitions et les mutations.

Les mesures précitées devraient contribuer à créer des conditions de concurrence équitables afin de faciliter la pleine mise en œuvre du marché unique.

4.   Un environnement durable

4.1.

Les risques environnementaux continuent de prédominer dans le cadre des résultats de l’enquête annuelle sur la perception des risques dans le monde («Global Risks Perception Survey»). Cette année, ils constituaient trois des cinq risques les plus élevés du point de vue de leur probabilité, et quatre d’entre eux du point de vue de leur incidence. Les conditions météorologiques extrêmes constituaient le risque qui suscite le plus d’inquiétude, mais les participants à l’enquête se préoccupent de plus en plus de l’échec des politiques environnementales: après avoir reculé dans le classement après l’accord de Paris, «l’échec de l’atténuation du changement climatique et de l’adaptation à ce dernier» est remonté cette année en deuxième position du point de vue de son incidence (17).

4.2.

Il n’y aura ni vie, ni emploi, ni entrepreneuriat sur une planète morte. L’effondrement de la diversité biologique et le changement climatique signifient par conséquent que pour l’Union, il est absolument indispensable au préalable de créer des emplois de haute qualité (18) et de fournir une solution bénéfique pour les employeurs, les travailleurs et d’autres représentants de la société civile. Retarder l’adaptation, ou ne pas agir du tout, pourrait augmenter substantiellement le coût total du changement climatique (19) et de ses effets délétères sur la diversité biologique, y compris sur l’humanité.

4.3.

Le projet de pacte européen «finance-climat» fait l’objet depuis plusieurs années de discussions, qui se poursuivent jusqu’à présent. Ce pacte permettrait à l’UE de maintenir son rôle de premier plan en matière de développement durable et dans la lutte contre le changement climatique (20).

La stratégie doit garantir qu’au moins l’accord de Paris soit pleinement et immédiatement mis en œuvre et soit pris en compte en faisant coïncider les objectifs de l’UE en matière de réduction de ses émissions aux horizons 2030 et 2050 avec l’engagement de limiter la hausse des températures à tout au plus 1o C, ainsi qu’au moyen de politiques ambitieuses de l’UE en matière de climat, y compris une élimination rapide de tous les combustibles fossiles et le passage de l’efficacité énergétique à une réduction absolue de l’utilisation des énergies. L’UE devrait accélérer la transition juste et durable vers une offre composée de la proportion la plus élevée possible d’énergies renouvelables (21), qui soit propre, abordable, qui favorise l’appropriation par les communautés et qui ne conduise pas à la pauvreté énergétique ou à saper la compétitivité durables des entreprises européennes à l’échelle mondiale.

Le pacte «finance-climat» devra embrasser tous les aspects d’une politique en matière de changement climatique, tels qu’une transition juste pour atténuer les effets du changement, pour compenser les dommages et pertes, ainsi que de réelles politiques d’adaptation au changement climatique.

Le CESE réitère son appel en faveur de l’élaboration d’une politique alimentaire globale (22) au sein de l’UE afin d’assurer une alimentation saine à partir de systèmes alimentaires durables; cette politique établirait un lien entre l’agriculture d’une part et la nutrition et les services écosystémiques d’autre part, et veillerait à ce que les chaînes d’approvisionnement préservent la santé publique dans tous les segments de la société européenne. Une répartition équitable de la valeur ajoutée tout au long de la chaîne d’approvisionnement alimentaire revêt un caractère essentiel.

L’agriculture pourrait être un élément de la solution pour atténuer le changement climatique (économie circulaire, stockage du CO2, etc.), car elle couvre une part très importante du territoire européen. De surcroît, l’agriculture durable joue un rôle important pour préserver le tissu socio-économique des zones rurales.

L’UE doit transformer une économie linéaire en une économie circulaire sans carbone. Les politiques relatives à l’économie circulaire devraient garantir la longue durée de vie, la petite échelle, l’ancrage local et la propreté des circuits. Dans certaines activités industrielles bien spécifiques, ceux-ci ont parfois tendance à être longs (23).

Il convient de mettre en place des normes communes et de les appliquer pour fournir un air pur et une eau propre et pour protéger nos océans. Il convient d’appliquer des mesures ambitieuses pour stopper la déforestation et la perte de diversité biologique en Europe et dans le monde, et pour mettre fin à l’exploitation non durable des ressources naturelles, y compris dans l’hémisphère sud. Il convient de prendre des mesures pour faire coïncider les niveaux de consommation européens avec la capacité de production de la planète, y compris en mettant en œuvre des stratégies de suffisance (24).

5.   Consolider la position de leader au plan mondial des entreprises européennes en matière de développement durable

5.1.

L’entreprise est un facteur déclenchant du développement social et environnemental, et pour les entreprises, la compétitivité durable constitue une condition préalable et nécessaire pour jouer leur rôle au sein de la société. Les entreprises œuvrent de manière sans cesse plus durable, en partant de leur situation et de leurs ressources spécifiques et en collaboration avec leurs parties prenantes, à suivre, à évaluer et à élaborer des rapports sur les incidences de leurs activités commerciales sur la société, l’environnement, la protection des consommateurs et les droits humains. Par conséquent, l’Europe doit adopter dans le cadre de ses politiques une approche cohérente avec son ambition de devenir le leader mondial en matière de développement durable. Il se trouve déjà des pionniers parmi les entreprises en Europe, mais ils doivent avoir davantage d’ambition et diffuser cet état d’esprit durable tout au long des chaînes de valeur, en encourageant tout particulièrement les PME.

5.2.

Une multitude de nouveaux modèles transforment les relations entre les producteurs, les distributeurs et les consommateurs. Certains de ces nouveaux modèles (tels que l’économie de la fonctionnalité, l’économie du partage et la finance responsable) tentent de relever d’autres défis importants pour les personnes et pour la planète, qui sont déterminants pour le développement durable, tels que la justice sociale, la gouvernance participative et la préservation des ressources et du capital naturel.

La quatrième révolution industrielle qui se déploie actuellement modifie de fond en comble l’économie mondiale, et tout spécialement l’industrie manufacturière et les services liés à l’industrie. L’Europe a besoin d’une véritable transformation numérique pour regagner en compétitivité durable mondiale et pour créer de la croissance et des emplois durables. L’Europe a besoin d’un basculement d’ensemble pour devenir la région du monde la plus dynamique dans le domaine numérique, en tenant compte de la nature mondiale de l’économie numérique et de l’intégration des entreprises au sein de chaînes de valeurs mondiales.

Pour l’Union européenne, soutenir de tels modèles innovants est l’occasion de devenir le leader de modèles économiques durables innovants qui rendent indissociables les notions de prospérité économique, de protection sociale de qualité et de durabilité environnementale, et qui définissent une «marque européenne».

Les compagnies européennes doivent demeurer à la pointe en matière d’innovation et de créativité et respecter des normes élevés dans les domaines du travail, des consommateurs et de l’environnement dans toute l’Europe. Alors qu’un processus intelligent d’élaboration des politiques et une bonne gouvernance ont un rôle important à jouer pour déterminer le cadre adéquat, ce sont les entreprises, avec leurs travailleurs et en étroite collaboration avec les scientifiques et les chercheurs, qui innovent et fournissent des solutions en réponse aux besoins de la société.

Un environnement entrepreneurial contribuant à préparer l’avenir repose sur des marchés ouverts et une concurrence loyale, dès lors que sa définition en recouvre les aspects sociaux et environnementaux, et fournissant des conditions favorables et propices à l’activité des entreprises.

Il convient de mettre des conseils et des soutiens à la disposition de toutes les entreprises et des PME en particulier, pour qu’elles adoptent la numérisation, qu’elles renversent les tendances défavorables en matière d’investissements dans les technologies et l’innovation, grâce à une sensibilisation, un encouragement aux financements, au soutien à la recherche et au développement et à des investissements dans les compétences pertinentes.

6.   Un commerce libre et équitable

6.1.

La politique commerciale de l’UE est un facteur crucial qui concerne l’UE dans son ensemble et qui unit dans les faits l’ensemble de ses États membres. La politique commerciale a aidé l’UE à accroître sa prospérité grâce à des échanges commerciaux avec un large éventail de partenaires. À l’heure actuelle, l’UE est une force motrice du commerce mondial, sachant que plus de 30 millions de ses emplois sont liés au commerce international (25), et qu’elle joue un rôle essentiel dans le commerce des services et qu’elle dégage des excédents commerciaux importants pour les marchandises, par exemple à l’égard des États-Unis d’Amérique (plus de 107,9 milliards d’EUR au cours des onze premiers mois de 2018). Dans le même temps, l’UE incarne et promeut, au moyen du commerce, les valeurs d’inclusion sociale et de protection de l’environnement qui sont essentielles pour créer une mondialisation durable; en d’autres termes, une forme de mondialisation qui ne profitera pas uniquement aux grandes entreprises et aux investisseurs mais aussi aux citoyens ordinaires, aux travailleurs, aux agriculteurs, aux consommateurs et aux PME.

6.2.

L’UE vise à promouvoir, sur le plan multilatéral, bilatéral et unilatéral, une vision de la politique commerciale qui associe l’approche mercantiliste traditionnelle de l’accès aux marchés (barrières tarifaires et non tarifaires) et les objectifs de développement durable dans le contexte de la lutte contre le changement climatique.

6.3.

La politique commerciale de l’UE a renforcé le rôle de la société civile aussi bien au cours de la phase de négociation que de celle de la mise en œuvre, grâce aux contributions des groupes consultatifs internes. Le CESE soutient la professionnalisation de toutes organisations qui permettent aux citoyens d’avoir davantage voix au chapitre sur la teneur des accords commerciaux et de mieux contrôler le respect par les partenaires commerciaux de leurs engagements et de leurs normes «qualitatifs» (26).

Tout comme sa diplomatie et sa politique de voisinage, la politique commerciale de l’UE doit prendre en compte les valeurs qui lui sont propres et qu’elle s’applique, et être cohérente avec elles, en tant que leader mondial en matière de développement durable. L’UE doit être à même de maintenir sa compétitivité et de gérer ses alliances avec ses principaux partenaires tout en préservant, en renforçant et en améliorant son modèle de normes élevées dans les domaines social et environnemental.

Le CESE réclame tout spécialement une action ambitieuse en matière de politique commerciale aux trois niveaux unilatéral, bilatéral et multilatéral, à savoir une politique qui crée de la croissance et des emplois dans l’UE tout en promouvant à l’échelle mondiale une politique commerciale fondée sur des règles.

Du point de vue unilatéral, l’UE devrait moderniser et améliorer son système de préférences généralisées et son dispositif «Tout sauf les armes» afin d’encourager le développement des pays les moins développés et des pays en développement.

Du point de vue bilatéral, l’UE devrait continuer à ouvrir de nouveaux marchés et à accroître les débouchés commerciaux et la satisfaction des consommateurs avec davantage de partenaires tout en garantissant des normes sociales et environnementales élevées dans l’agriculture, l’industrie et les services.

Du point de vue multilatéral, l’UE devrait jouer un rôle de chef de file dans la réforme de l’OMC afin d’empêcher le blocage de l’organe d’appel de l’organe de règlement des différends. Le CESE a récemment adopté un ensemble à la fois ambitieux et prospectif de propositions aux fins de cette réforme à court et moyen termes (27). Celles-ci visent à garantir que l’OMC, l’unique gardien du commerce international, fournisse une contribution fondamentale à la réalisation des ODD, préserve la cohérence des règles commerciales avec les normes internationales du travail et facilite la réalisation des engagements pris en vertu de l’accord de Paris.

L’ouverture aux échanges commerciaux suppose des instruments efficaces de défense commerciale et un mécanisme opérationnel de filtrage des investissements directs étrangers dans les secteurs stratégiques de l’UE. Il s’agit bien évidemment de protéger l’UE et ses consommateurs, ses travailleurs et ses entreprises contre des pratiques commerciales déloyales et prédatrices.

Il est essentiel d’approfondir la coopération à l’échelle internationale avec toutes les organisations concernées (OCDE, CEE-ONU, OIT, OMC, etc.) afin de résoudre efficacement les problèmes mondiaux que sont notamment le changement climatique, la pauvreté, la fraude, l’évasion fiscale et les cyberattaques.

7.   Les biens et services publics

7.1.

Selon le 20e principe du socle européen des droits sociaux, «toute personne a le droit d’accéder à des services essentiels de qualité, y compris l’eau, les services d’assainissement, l’énergie, les transports, les services financiers et les communications numériques» (28). Ces services ne peuvent fonctionner uniquement selon les règles communes de concurrence et de marché; il est essentiel de disposer de règles spécifiques pour garantir que chaque citoyen dispose d’un accès abordable à ces services, qui sont tenus pour essentiels et qui sont reconnus comme des valeurs communes de l’Union (29).

Les pouvoirs publics doivent pouvoir poursuivre des objectifs de développement durable au moyen de leurs contrats de marchés publics en appliquant de manière volontariste les critères d’achat sociaux et environnementaux tels que les définit la nouvelle législation européenne en matière de passation des marchés publics.

Les services publics de base (30), tels que l’éducation, la santé, la garde d’enfants et les transports publics, et les biens publics tels qu’une eau propre et potable, un air pur et des sols non pollués, etc. doivent être accessibles à tous à des coûts raisonnables.

8.   Fiscalité juste

8.1.

La politique fiscale dans l’UE a deux composantes: la fiscalité directe, qui relève de la compétence exclusive des États membres, et la fiscalité indirecte qui influe sur la libre circulation des marchandises et sur la libre prestation de services au sein du marché unique. Pour ce qui est de la fiscalité directe, l’UE a néanmoins établi quelques normes harmonisées pour l’imposition des sociétés et des personnes, tandis que des États membres ont pris des mesures communes pour éviter l’évasion fiscale et la double imposition. Toutefois, l’UE doit continuer à promouvoir un système fiscal juste qui exige des personnes physiques et morales de payer de manière proportionnée un impôt sur leurs revenus et sur leurs bénéfices. Pour ce qui est de la fiscalité indirecte, l’UE coordonne et harmonise la législation sur la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et sur les droits d’accise. Elle fait en sorte que la concurrence au sein du marché unique ne subisse pas de distorsions du fait des variations des taux d’imposition indirecte et de systèmes qui procurent à des entreprises des avantages injustes par rapport à d’autres.

8.2.

L’absence de transparence, la discrimination, la distorsion de la concurrence et des pratiques fiscales préjudiciables accroissent les inégalités économiques et réduisent les investissements et l’emploi et aboutissent au mécontentement social, à la défiance et à un déficit démocratique. C’est pourquoi il convient d’appliquer une politique fiscale juste de l’Union qui respecte, et qui ne contredise pas, la stratégie globale en matière de développement durable afin de promouvoir la convergence économique et sociale, la cohésion sociale et les investissements dans le développement durable.

La nécessaire réforme de l’Union économique et monétaire devrait prévoir notamment une coordination fiscale accrue entre ses membres et une représentation unifiée de l’euro au sein des organisations internationales.

Le CESE soutient une fiscalité juste et la lutte contre la fraude, l’évasion fiscale, le blanchiment des capitaux et les pratiques financières des paradis fiscaux; les institutions de l’UE, les gouvernements et les entreprises doivent se donner pour objectif commun d’œuvrer de conserve afin de mettre sur pied des mécanismes efficaces à cette fin, tels que les deux directives relatives à la lutte contre l’évasion fiscale (31).

La coordination dans la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales devrait recouvrir des mesures contre l’érosion de la base de l’assiette de l’impôt sur les sociétés et contre le transfert de bénéfices; la Commission européenne a estimé que ces phénomènes représentaient quelque 50 à 70 milliards d’EUR par an avant que des mesures n’aient commencé à être mises en œuvre. L’on estime que le montant TVA non perçue se situe autour de 150 milliards d’EUR par an.

L’UE doit coopérer avec les autres grandes zones économiques pour lutter efficacement contre la corruption et l’évasion fiscale dans le monde entier et pour faire en sorte que les règles internationales en matière d’imposition des sociétés soient claires, transparentes, objectives et prévisibles.

Le grand public demande avec une insistance croissante de recourir à l’imposition pour assurer la cohésion sociale, pour lutter contre le réchauffement climatique et promouvoir la croissance durable.

Le CESE réclame des mesures fiscales efficaces et coordonnées pour s’assurer que toutes les entreprises s’acquittent de leur juste part de l’impôt et qu’elles contribuent aux budgets publics nationaux et européen afin de permettre aux gouvernements de mettre en œuvre leurs droits sociaux (32). Le CESE approuve la proposition de la Commission relative à l’établissement d’une assiette commune consolidée pour l’impôt sur les sociétés (ACCIS) (33).

Les nouveaux modèles commerciaux utilisant les plates-formes en ligne et d’autres outils numériques ont eu pour conséquence que les entreprises s’appuient moins sur leur présence physique dans un État donné. Le CESE estime qu’il est très important d’élaborer de nouveaux principes quant à la manière d’affecter les bénéfices des entreprises à un pays de l’Union européenne et de les taxer, et ce dans le cadre d’un dialogue avec les partenaires commerciaux, et de prendre activement part aux discussions en cours au niveau de l’OCDE et du G20 sur un accord mondial sur l’économie numérique, afin d’éviter toute escalade des tensions commerciales et fiscales entre les principaux acteurs économiques dans le monde (34).

9.   Gouvernance

9.1.

Guider la transformation vers un développement durable exige une nouvelle approche de gouvernance et des règles et instruments nouveaux en la matière lorsque l’on définit et met en œuvre les politiques de l’UE. Le développement durable requiert une approche globale et transsectorielle des politiques pour veiller à une prise en compte collective des défis économiques, sociaux et environnementaux.

L’UE doit s’assurer que toutes ses politiques intérieures et extérieures soient cohérentes avec les ODD et y soient conformes, de manière à tenir dûment compte des principes d’efficacité, de proportionnalité et de durabilité.

Le recours aux outils de la Commission européenne destinés à améliorer la réglementation est un autre moyen de renforcer l’intégration du développement durable dans les politiques européennes. Toutes les analyses d’impact de la Commission doivent évaluer les incidences environnementales, climatiques, sociales et économiques, de manière à tenir dûment compte du développement durable et de l’intégrer. Des évaluations ex post doivent également analyser toutes les trois dimensions dans le cadre d’une approche intégrée solide. Les consultations des partenaires sociaux sont également nécessaires, en respectant les dispositions du traité qui prévoient une consultation spécifique des travailleurs et de l’encadrement dans le contexte de la législation sur les questions sociales (article 154, paragraphe 2); des consultations du Comité économique et social européen, du Comité européen des régions et des parlements nationaux constituent une autre composante de la boîte à outils pour une meilleure réglementation pour satisfaire les exigences d’inclusivité qui se trouvent au centre du programme à l’horizon 2030.

En tenant compte des objectifs de développement durable, la plateforme REFIT et les évaluations et les analyses d’impact doivent contribuer à s’assurer que la législation est favorable aux entreprises et aux entreprises et aux citoyens. À l’avenir, ces instruments devraient continuer à tirer parti de toutes les sources disponibles, dont la société civile, afin d’étudier la manière d’améliorer l’efficacité et l’efficience de la législation de l’UE au regard de ses objectifs. Ces instruments devraient contribuer à améliorer sensiblement la règlementation en matière de développement durable dans toutes ses dimensions, et viser non seulement à simplifier et à réduire les charges inutiles et à faire en sorte de réaliser efficacement les objectifs de la législation sans pour autant les réduire, mais également à aider à réexaminer, à valider, à modifier, à renforcer ou à mieux appliquer la législation en vigueur.

En tant que cadre de gouvernance économique de l’UE, le Semestre européen prête quelque peu attention à l’emploi et aux performances sociales, mais il présente des faiblesses quant aux dangers que représente le changement climatique et quant aux progrès qu’accomplit l’UE sur la voie de la réalisation des objectifs de l’accord de Paris, tels que présentés dans le rapport dont ils font l’objet dans le cadre de l’examen annuel de la croissance 2019 (35). Le CESE réclame une stratégie prospective de développement durable intégrée dans un cycle de développement durable et fondée sur des indicateurs et des objectifs complémentaires de nature sociale, économique et environnementale.

Il y a lieu de reconnaître le dialogue social comme un instrument de mise en œuvre du programme pour le développement. Le dialogue social exige un environnement favorable et un cadre institutionnel efficace, conditions qui passent d’abord par le respect de la liberté d’association et le droit à la négociation collective. L’UE devrait œuvrer avec les partenaires sociaux pour promouvoir des pratiques saines en matière de relations du travail et un bon fonctionnement des administrations du travail.

L’Union européenne devrait renforcer ses liens avec les États membres et regagner la confiance de ses citoyens grâce à une approche correctement mise en œuvre de développement local mené par les acteurs locaux (DLAL) qui permet un développement local intégré et la participation des citoyens et de leurs organisations au niveau local. Le CESE a la conviction que le DLAL pourrait offrir de multiples avantages en tant qu’outil européen performant de développement local (36).

10.   Une approche globale de la politique migratoire

10.1.

Le débat sur l’avenir d’une Europe durable ne saurait faire l’économie de l’approche de l’Europe en matière de migration. Les évolutions démographiques montrent que l’Europe aura besoin de migrants, de leurs talents, de leurs compétences et de leur potentiel entrepreneurial. Il est aussi urgent que nécessaire de changer les discours et les politiques en matière de migration fondées sur une coopération plus étroite avec les pays tiers, afin de s’assurer du caractère rationnel et factuel du débat. Les réfugiés et les migrants doivent être perçus non pas comme une menace, mais bien comme une chance pour le modèle économique et social européen (37). À cette fin, il nous faut une approche et une stratégie d’ensemble de la migration.

L’UE devrait adopter des politiques et des mesures qui visent une migration sûre, structurée et régulière et qui renforcent l’inclusion et la cohésion sociale. L’UE devrait œuvrer en coordination plus étroite avec l’OIT pour ce qui touche à la migration de main d’œuvre et aux programmes d’intégration.

Le CESE demande des voies sûres et légales pour les réfugiés lorsqu’ils se rendent vers l’UE. Il convient d’adopter une approche coordonnée entre tous les États membres et les parties prenantes, européennes et nationales, et fondée sur une responsabilité partagée, une répartition équitable, la convergence et le respect des droits fondamentaux, afin d’inclure davantage de possibilités de regroupement familial, de relocalisation et de réinstallation.

La non-intégration implique des risques et des coûts économiques, socioculturels et politiques. Par conséquent, la meilleure garantie contre d’éventuels coûts, problèmes et tensions à l’avenir consiste à investir dans l’intégration des migrants.

L’intégration est un processus qui joue dans les deux sens et la communauté d’accueil comme les migrants ont des droits et des devoirs. Il convient dès lors que la responsabilité en matière d’intégration soit partagée. Il n’est ni juste ni soutenable d’escompter que les nouveaux venus puissent s’intégrer sans aide du fait des obstacles considérables qu’ils rencontrent sur le plan social, culturel et économique. Pour faciliter ce processus, les politiques publiques doivent lutter contre les peurs, les craintes et les préoccupations de différentes composantes de la population dans les sociétés européennes afin d’éviter les discours xénophobes et anti-européens. À cet effet, les politiques devraient prévoir un catalogue clair, cohérent et motivé d’obligations tout comme une dénonciation cohérente de toute rhétorique et de tout comportement hostile aux migrants.

La guerre, les changements climatiques et le manque de perspectives dans les pays tiers sont de nature à provoquer un afflux continu, voire croissant, de réfugiés et de migrants. Limiter les facteurs d’incitation à l’émigration est un enjeu mondial. Il se produira une migration accrue (y compris de réfugiés climatiques) de tous types en raison du phénomène croissant des personnes déplacées. À cet égard, l’Europe doit être mieux préparée à coordonner leur répartition entre les États membres. Le CESE a déjà souligné comment des processus économiques déséquilibrés pouvaient accroître la déstabilisation dans ce contexte. Par conséquent, le CESE approuve la position selon laquelle le traité de Lisbonne prévoit un mandat suffisamment large pour revoir la politique d’immigration afin de règlementer le statut des «déplacés environnementaux».

11.   Le budget de l’UE

11.1.

Le CESE reconnaît la forte valeur ajoutée européenne des programmes sur lesquels sont concentrées les principales augmentations de dépenses (Recherche, développement et innovation, Erasmus+) dans les propositions de la Commission relative au cadre financier pluriannuel (CFP) 2021-2027. Le Comité s’interroge cependant sur le fait que ces augmentations se font au prix de coupes importantes dans le Fonds européen de développement régional (FEDER), la politique de cohésion et la politique agricole commune (PAC), en raison des efforts déployés pour réduire le budget de l’UE, qui s’élève actuellement à 1,16 % du revenu national brut (RNB) de l’UE-27 et sera ramené à seulement 1,11 % dans le CFP après 2020.

11.2.

Le CESE s’interroge sur les réductions proposées dans les engagements prévus pour la politique agricole commune. Ces réductions rendront impossible la mise en œuvre d’un modèle de développement rural durable, l’un des objectifs globaux de la nouvelle réforme de la PAC, ainsi que d’autres objectifs définis dans la récente communication de la Commission sur l’avenir de l’alimentation et de l’agriculture.

11.3.

Malheureusement, la proposition de la Commission semble excessivement axée sur le maintien du statu quo, et le CESE déplore le décalage entre, d’une part, l’ampleur et la teneur des nouveaux défis posés à l’UE et ses ambitions en la matière, et, d’autre part, les ressources disponibles pour les réaliser.

11.4.

La méfiance des peuples à l’égard des institutions démocratiques nationales et européennes entraîne une montée des mouvements politiques qui remettent en question les valeurs et les principes démocratiques ainsi que l’Union elle-même. Certains de ces mouvements politiques sont désormais présents au sein de certains gouvernements des États membres de l’UE.

Pour faire face aux priorités économiques, sociales et environnementales, qu’elles soient nouvelles ou existantes, l’UE a besoin, dans ce moment critique sur le plan politique, de disposer pour elle-même d’un budget fort. La proposition de la Commission relative au cadre financier pluriannuel (CFP) pour la période 2021-2027 se caractérise par sa modestie et son manque d’ambition. Tout comme le Parlement européen et le Comité européen des régions, le CESE demande de porter les ressources à 1,3 % du RNB et que les recettes soient principalement le produit de ressources propres de l’UE, en posant les données d’imposition proposées par le groupe de haut niveau sur les ressources propres présidé par M. Mario Monti (38).

De l’avis du CESE, des ressources doivent être transférées des États membres conformément à des critères de justice distributive pour reprendre la route de la convergence économique et sociale un temps barrée par la crise (39).

Le CESE tient pour nécessaire que le prochain CFP prévoie d’augmenter les financements afin: i) que les États membres mettent en œuvre la déclaration de Göteborg sur le socle européen des droits sociaux pour stimuler la création d’emplois de qualité dans le cadre du développement durable; ii) de réaliser le programme des Nations unies à l’horizon 2030; et iii) de mettre en œuvre l’accord de Paris en promouvant des transitions justes vers des sociétés vertes et numérisées.

L’UE a besoin de budgets ambitieux, qui soient les instruments de politiques visant à développer une stratégie claire pour le renforcement de l’Union, avec davantage d’intégration et de démocratie, un soutien accru aux organisations de la société civile, à l’intérieur comme à l’extérieur de l’UE, une augmentation de l’aide accordée aux entreprises pour relever les défis environnementaux et numériques, une dimension sociale plus forte et un soutien accru à la vie rurale. Ce n’est qu’ainsi que l’UE pourra contenir et vaincre les forces centrifuges internes et affronter les risques géopolitiques externes.

Le CESE soutient la proposition qui prévoit de conditionner l’octroi de fonds de l’UE aux États membres au respect du principe de l’état de droit, l’un des piliers fondamentaux des valeurs de l’Union en vertu de l’article 2 du TUE.

12.   Communication

12.1.

Même les plus ambitieux des idées et des programmes de l’échelon de l’UE n’aideront pas à combler le fossé qui existe entre l’Union et ses citoyens s’ils ne sont pas communiqués de manière adéquate.

12.2.

Cette inadéquation entre les initiatives, les activités et les décisions à l’échelon de l’UE et la perception qu’en ont ses citoyens alimente une situation malsaine où les citoyens ne sont pas informés ou mal informés, dont l’une des conséquences est l’essor du populisme dans la plupart des États membres. Dans le même temps, l’on peut observer l’apparition de sentiments hostiles à l’Europe auprès de certains pans de la population, ce qui sape l’œuvre continuelle de construction du projet européen.

12.3.

Il est par conséquent urgent et nécessaire que toutes les institutions de l’UE, à tous les niveaux, y compris l’ensemble des acteurs de la société civile, disposent d’une stratégie commune de communication pour lutter contre ce manque d’information, ainsi que contre les informations trompeuses diffusées délibérément.

12.4.

Une politique efficace de communication doit prendre la forme d’un véritable dialogue entre ceux qui fournissent l’information et ceux qui la reçoivent, afin d’éviter une approche hiérarchisante.

12.5.

Des informations substantielles, crédibles et vivantes sur les questions européennes contribuent à susciter une sensibilisation et un intérêt pour celles-ci.

12.6.

Le CESE, en ce qu’il jette des ponts entre l’UE et ses citoyens, et par l’intermédiaire de ses 350 membres, devrait servir de facilitateur pour de telles mesures coordonnées. La diversité de la composition du CESE constitue un avantage essentiel lorsqu’il s’agit de toucher un nombre maximal de citoyens partout en Europe. En particulier, il y a lieu d’accorder davantage d’attention à la jeunesse.

L’Union devrait mieux reconnaître et soutenir la mission capitale assumée par le CESE pour combler le fossé avec les citoyens européens.

L’Union doit également décentraliser ses dialogues avec les citoyens pour que les communes et les régions puissent commencer à bâtir une identité et une vision européennes communes.

Il importe d’inscrire davantage les politiques européennes en réaction aux propositions formulées par les citoyens, les communautés et les organisations de la société civile, ce qui leur donnerait une raison de s’engager.

Le CESE devrait évaluer chaque année, au regard des objectifs politiques posés dans le présent avis, la mise en œuvre des politiques de l’Union dans les États membres afin de fournir aux citoyens des réponses concrètes quant à l’incidence de l’appartenance à l’UE sur leur vie quotidienne.

Bruxelles, le 20 mars 2019.

Le président

du Comité économique et social européen

Luca JAHIER


(1)  Article 2 du traité sur l’Union européenne.

(2)  Cette définition de la croissance durable se fonde sur les travaux de Mme Kate Raworth, de l’Institut des changements environnementaux (Environmental Change Institute) de l’Université d’Oxford et sur sa théorie de l’«économie du donut», qui constitue une innovation radicale en matière d’économie de la croissance et le nouveau modèle économique durable pour le 21e siècle, qui est susceptible de contribuer à mettre fin aux inégalités — voir: https://www.kateraworth.com/doughnut/ (en anglais).

(3)  Cette définition se fonde sur les travaux de M. Sten Thore et de Mme Ruzanna Tarverdyan sur la compétitivité durable — voir: https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0040162516000664?via%3Dihub

(4)  Avis du CESE du 18 octobre 2017 sur «La transition vers un avenir plus durable pour l’Europe — Une stratégie pour 2050» (JO C 81 du 2.3.2018, p. 44).

(5)  Résolution du Parlement européen du 25 octobre 2018 sur «La montée des violences néofascistes en Europe».

(6)  Avis du CESE du 7 décembre 2017 sur «Le rôle clé du commerce et des investissements dans la réalisation et la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD)» (JO C 129 du 11.4.2018, p. 27).

(7)  Avis du CESE du 21 septembre 2016 sur «Le développement durable — Recensement des politiques intérieures et extérieures de l’Union européenne» (JO C 487 du 28.12.2016, p. 41).

(8)  Avis du 14 novembre 2012 sur les «Principes, procédures et actions pour la mise en œuvre de l’article 11, paragraphes 1 et 2, du traité de Lisbonne» (JO C 11 du 15.1.2013, p. 8).

(9)  Avis du CESE du 13 juillet 2016 sur «L’initiative citoyenne européenne (réexamen)» (JO C 389 du 21.10.2016, p. 35).

(10)  Résolution du Conseil et des représentants des gouvernements des États-membres, réunis au sein du Conseil, sur un plan de travail de l’Union européenne en faveur de la jeunesse pour 2016-2018.

Eurochild Child Participation Strategy («Stratégie d’Eurochild pour la participation des enfants») du 5 avril 2017 (en anglais).

Programme des Nations unies pour la jeunesse — «Youth Participation in Development — Summary Guidelines for Development Partners» («Participation des jeunes au développement: lignes directrices succinctes à l’intention des partenaires du développement», pour l’heure en anglais uniquement).

(11)  Avis du CESE du 18 octobre 2018 sur la «Communication de la Commission — Mobiliser, connecter et autonomiser les jeunes: une nouvelle stratégie de l’Union européenne en faveur de la jeunesse» (JO C 62 du 15.2.2019, p. 142).

(12)  Avis du CESE du 17 septembre 2015 sur le thème «Améliorer le fonctionnement de l’Union européenne en mettant à profit le potentiel du traité de Lisbonne» (JO C 13 du 15.1.2016, p. 183).

(13)  Résolution du CESE du 5 juillet 2017 sur le «Livre blanc de la Commission sur l’avenir de l’Europe et au-delà» (JO C 345 du 13.10.2017, p. 11).

(14)  Commission mondiale de l’OIT sur l’avenir du travail, rapport publié le 22 janvier 2019 sur le thème «Travailler pour bâtir un avenir meilleur».

(15)  Avis du CESE du 20 février 2019 sur la communication de la Commission «Examen annuel de la croissance 2019 — Pour une Europe plus forte dans un contexte d’incertitude à l’échelle mondiale» (JO C 190 du 5.6.2019, p. 24).

(16)  Document de réflexion de la Commission européenne «Vers une Europe durable d’ici 2030», publié le 30 janvier 2019.

(17)  The Global Risk Report 2019 («Rapport sur les risques mondiaux 2019») du Forum économique mondial, résumé synthétique (disponible pour l’heure uniquement en anglais).

(18)  Avis du CESE du 25 janvier 2017 sur le «Socle européen des droits sociaux» (JO C 125 du 21.4.2017, p. 10).

(19)  OCDE, rapport sur «Les conséquences économiques du changement climatique», publié le 2 septembre 2016.

(20)  Avis du CESE du 17 octobre 2018 sur le pacte européen «finance-climat» ( JO C 62 du 15.2.2019, p. 8 ).

(21)  Avis du CESE du 2 juillet 2015 sur le thème «Protocole de Paris — Programme de lutte contre le changement climatique planétaire après 2020» (JO C 383 du 17.11.2015, p. 74).

(22)  Avis du CESE du 6 décembre 2017 sur «La contribution de la société civile au développement d’une politique alimentaire globale dans l’Union européenne» (JO C 129 du 11.4.2018, p. 18).

(23)  Avis CESE du 27 avril 2016 sur le Paquet «Économie circulaire» (JO C 264 du 20.7.2016, p. 98).

(24)  Manifesto for a Sustainable Europe for its Citizens («Manifeste pour une Europe durable au service de ses citoyens», en anglais uniquement) du 28 septembre 2018.

(25)  Communication de la Commission du 14 octobre 2015 sur Le commerce pour tous.

(26)  Avis du CESE du 23 janvier 2019 sur «Le rôle des groupes consultatifs internes dans le suivi de la mise en œuvre des accords de libre-échange» (JO C 159 du 10.5.2019, p. 28).

(27)  Avis du CESE du 23 janvier 2019 sur le thème «Réformer l’OMC pour s’adapter aux évolutions du commerce mondial» (JO C 159 du 10.5.2019, p. 15).

(28)  Ces services que la Commission qualifie de «services essentiels», et dont le 20e principe ne dresse pas une liste exhaustive, relèvent des «services d’intérêt général», soumis à des obligations de service public. La notion de «services essentiels» n’existe pas dans le droit de l’Union qui ne traite que de services publics (transports) et de services d’intérêt général (économiques, non économiques).

(29)  Le CESE élabore actuellement un avis d’initiative sur le thème «Pour une meilleure mise en œuvre du socle des droits sociaux et la promotion des services essentiels» dans le cadre de la contribution du CESE au sommet de Sibiu et au-delà.

(30)  Avis du CESE du 17 octobre 2018 sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au Fonds social européen plus (FSE+)» (JO C 62 du 15.2.2019, p. 165).

(31)  Avis du CESE du 20 septembre 2017 sur «Un système fiscal favorable à une concurrence équitable et à la croissance économique» (JO C 434 du 15.12.2017, p. 18).

(32)  Voir la note de bas de page no 31.

(33)  Avis du CESE du 20 septembre 2017 sur «Une assiette commune (consolidée) pour l’impôt sur les sociétés» (JO C 434 du 15.12.2017, p. 58).

(34)  Avis du CESE du 12 juillet 2018 sur «L’imposition des bénéfices des multinationales dans l’économie numérique» (JO C 367 du 10.10.2018, p. 73).

(35)  Voir la note de bas de page no 22.

(36)  Avis du CESE du 7 décembre 2017 sur «Les avantages de l’approche de développement local mené par les acteurs locaux (DLAL) pour un développement local et rural intégré» (JO C 129 du 11.4.2018, p. 36).

(37)  Avis du CESE du 12 décembre 2018 sur «Les coûts de la non-immigration et de la non-intégration» (JO C 110 du 22.3.2019, p. 1).

(38)  Rapport final et recommandations du groupe de haut niveau sur les ressources propres, décembre 2016 (disponible pour l’heure uniquement en anglais).

(39)  Avis du CESE du 19 septembre 2018 sur le «Cadre financier pluriannuel 2021-2027» (JO C 440 du 6.12.2018, p. 106).


ANNEXE

Les propositions d’amendements suivantes, qui ont recueilli plus d’un quart des suffrages exprimés, ont été rejetées au cours des débats (conformément à l’article 59, paragraphe 4, du règlement intérieur):

a)   Paragraphe 1.5

Modifier comme suit:

La croissance durable signifie que la croissance ne doit pas seulement se fonder sur la quantité, mais aussi, et de fait davantage encore, sur la qualité, ce qui veut dire: i) ne pas exploiter l’environnement ou la main d’œuvre; ii) assurer des conditions de vie équitables; iii) mesurer la croissance économique non pas seulement sous la forme d’un flux annuel, mais aussi sous celle d’un stock de richesses et de leur distribution; iv) répondre aux besoins de tous dans les limites posées par les possibilités de la planète; v) développer des économies qui nous permettent de prospérer, qu’elles croissent ou non; et vi) établir un circuit fermé de circulation des revenus entre les ménages, les entreprises, les banques, les gouvernements et les échanges commerciaux, œuvrant de manière sociale et écologique. Les énergies, les matériaux, le monde naturel, la société humaine, le pouvoir et la richesse que nous détenons en commun, tous ces éléments font défaut dans le modèle actuel. Le travail non rémunéré des aidants, des femmes pour l’essentiel, n’est pas pris en compte, alors que sans eux, aucune économie ne pourrait fonctionner. La notion de croissance durable désigne une croissance qui prend en compte des considérations non seulement économiques mais aussi sociales et environnementales. Différents types de modèles économiques ont été présentés ces dernières années, par exemple celui de l’«économie du donut», qui vise à répondre aux besoins essentiels de tout un chacun (sur la base d’un «plancher social» constitué de 9 éléments) sans surexploiter les ressources de la planète (les 9 «limites planétaires»). En conséquence, des propositions ont été avancées pour mesurer la croissance au moyen d’indicateurs allant «au-delà du PIB».

Exposé des motifs

Il convient de supprimer le texte actuel, qui ne contient pas une définition communément admise de la croissance durable, mais renvoie au modèle économique proposé par Kate Raworth mentionné dans la note de bas de page. En fait, le texte ne décrit pas non plus l’idée centrale de ce modèle du «donut»: il mélange les conditions préalables, les caractéristiques, les implications et les aspects de mesure qui y sont liés.

Résultat du vote:

Pour

:

75

Contre

:

132

Abstentions

:

11

b)   Paragraphe 1.6

Modifier comme suit:

La notion de compétitivité durable est désigne quant à elle un modèle qui établit un équilibre entre la prospérité économique, les questions environnementales et l’inclusivité sociale. Dans ce contexte, ce qui se reflète notamment dans l’indice de compétitivité mondiale ajusté au développement durable proposé par le Forum économique mondial doit prendre en compte deux nouvelles dimensions, d’ordre environnemental et social.

Exposé des motifs

L’indice de compétitivité mondiale ajusté au développement durable prend spécifiquement en considération les dimensions environnementale et sociale.

Résultat du vote:

Pour

:

64

Contre

:

147

Abstentions

:

13

c)   Premier encadré (après le paragraphe 1.14), 2e tiret

Modifier comme suit:

La compétitivité et le développement durable ne sont pas contradictoires, pour autant que les aspects sociaux et environnementaux s’inscrivent pleinement dans la définition de la valeur des produits et des services sur les marchés compétitivité et l’enrichissent. L’on ne saurait définir la compétitivité uniquement par des quantités et des prix; il serait préférable de tenir également comptes des valeurs européennes, de la qualité et du développement durable.

Exposé des motifs

Ce ne sont pas des définitions en soi qui déterminent la compétitivité sur les marchés.

Résultat du vote:

Pour

:

66

Contre

:

148

Abstentions

:

9

d)   Premier encadré (après le paragraphe 1.14), 5e tiret

Modifier comme suit:

Les entreprises européennes, les travailleurs, les consommateurs et la société civile dans son ensemble doivent accomplir leur rôle et prendre leurs responsabilités et agir comme les pionniers aux yeux du reste du monde lorsque la compétitivité et le en matière de développement économique durable de notre système européen sont redéfinis en respectant les limites qu’impose la seule et unique planète dont nous disposons.

Exposé des motifs

Ce sont tous les acteurs de la société civile qui doivent accomplir leur rôle et prendre leurs responsabilités. Ceci vaut quelles que soient les définitions.

Résultat du vote:

Pour

:

56

Contre

:

138

Abstentions

:

9


5.7.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 228/50


Avis du Comité économique et social européen sur «L’avenir de la politique de cohésion pour la période d’après 2020»

(avis exploratoire)

(2019/C 228/07)

Rapporteur: Stefano MALLIA

Corapporteur: Ioannis VARDAKASTANIS

Consultation

Conseil — présidence roumaine, 20.9.2018

Lettre de Victor NEGRESCU, ministre roumain chargé des affaires européennes

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Union économique et monétaire et cohésion économique et sociale»

Adoption en section spécialisée

8.3.2019

Adoption en session plénière

20.3.2019

Session plénière no

542

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

71/0/1

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE considère que la politique de cohésion constitue un pilier fondamental permettant de rapprocher l’Union européenne de ses citoyens et de réduire les disparités entre les régions de l’Union européenne et les inégalités entre les personnes. Le CESE a la ferme conviction que la proposition visant à réduire le volume du budget de la politique de cohésion pour la période 2021-2027 est inacceptable.

1.2.

Le CESE estime qu’il est nécessaire de mettre en place une nouvelle stratégie européenne claire et ambitieuse, qui soit alignée sur le programme des Nations unies à l’horizon 2030 et ses objectifs de développement durable, et qui comporte un solide mécanisme de coordination à même de garantir une continuité stable entre les différents cycles politiques. La politique de cohésion doit faire partie intégrante de cette stratégie ambitieuse et, partant, être elle-même élaborée de manière à disposer des outils nécessaires pour relever les défis de l’avenir, tels que le changement climatique, l’adoption de nouvelles technologies, la réalisation d’un niveau élevé de compétitivité et la gestion de la transition vers un développement durable tout en créant des emplois de qualité.

1.3.

À côté des efforts indispensables pour que la politique de cohésion résiste à l’épreuve du temps, il importe de ne pas oublier les défis d’aujourd’hui qui continuent de peser lourdement sur la société. Dans ce contexte, nous pointons en particulier les défis sociaux tels que la marginalisation et la discrimination des minorités et de certains groupes ethniques, ou la violence domestique, les défis économiques tels que l’accès au financement et au renforcement des compétences, et les défis environnementaux tels que la réduction de la pollution atmosphérique et la gestion des déchets.

1.4.

La politique de cohésion de l’Union européenne doit adopter une approche territoriale forte, qui vise à donner à chaque région les outils nécessaires pour renforcer sa compétitivité de manière durable. Le CESE est d’avis que toutes les régions doivent être éligibles à un financement. Par ailleurs, le CESE tient à exprimer sans ambiguïté sa déception face à l’affaiblissement de la dynamique transfrontalière au sein de la politique de cohésion.

1.5.

Si l’on veut que l’Europe passe au niveau supérieur de développement économique, la politique de cohésion doit de plus en plus adopter une approche différenciée selon les régions en ce qui concerne les investissements et les mesures politiques à prendre. Le CESE estime que l’on aboutirait ainsi à une approche plus adaptée au niveau territorial, qui soutiendrait dans leur développement à la fois les zones les plus isolées et les moins peuplées (très faible densité de population, îles, montagnes, etc.), et les zones urbaines fonctionnelles «populaires»qui sont pourtant confrontées à des défis dans leur développement.

1.6.

Le CESE se félicite du renforcement du lien avec le semestre européen et demande également une coordination avec les recommandations par pays en vue de favoriser les réformes structurelles. Le CESE souhaite également un lien plus solide entre les stratégies d’investissement européenne et nationales. Il importe que les fonds ne se substituent pas aux efforts des États membres, mais qu’ils en constituent le complément. Il est également essentiel que les États membres s’emploient à poursuivre des projets dont la réussite est avérée.

1.7.

Le CESE estime que le paquet réglementaire devrait être beaucoup plus simple et éviter la microgestion des fonds. Il conviendrait d’établir une distinction, sous l’angle des procédures administratives, entre les programmes opérationnels considérés d’une taille relativement petite et les programmes beaucoup plus vastes. Alors que le CESE demande aux États membres de promouvoir la possibilité d’une procédure simplifiée d’accès aux fonds pour les projets de petite taille qu’offrent les cadres législatifs actuels, il encourage également la Commission à explorer d’autres possibilités qui pourraient faciliter la participation des acteurs de petite taille.

1.8.

Le CESE est favorable à l’utilisation des instruments financiers, mais appelle la Commission à veiller à ce que, lors de l’élaboration de ces instruments, un examen approfondi atteste qu’ils conviennent à tous les États membres et qu’ils peuvent être utilisés par les PME et les ONG.

1.9.

L’un des principaux problèmes concernant la politique de cohésion est le manque d’efficacité de la communication. Le CESE invite la Commission à poursuivre son examen des obligations actuelles en matière de publicité et à les améliorer considérablement en prenant en compte les moyens modernes de communication numérique.

1.10.

Il est grand temps que la Commission et les États membres cessent de manifester un intérêt purement formel pour cet aspect du partenariat et s’attellent à garantir une participation forte et significative de la société civile à toutes les étapes de la conception et de la mise en œuvre de la politique de cohésion. Cela devrait se faire en s’appuyant sur les expériences de partenariat réussies que nous avons engrangées au niveau local.

1.11.

Le CESE fait observer qu’il n’existe à l’échelon de l’Union européenne aucune participation structurée des organisations de la société civile au processus de suivi de la mise en œuvre de la politique de cohésion. Par conséquent, il recommande vivement à la Commission de mettre sur pied un forum européen de la société civile pour la cohésion auquel participeraient les partenaires sociaux, les organisations de la société civile et d’autres parties prenantes. Grâce à ce forum, la Commission pourrait consulter chaque année les partenaires sociaux et les organisations de la société civile sur l’état de la mise en œuvre de la politique de cohésion tout au long des différents cycles de programmation.

2.   Observations générales

2.1.

L’objectif de la politique de cohésion de l’Union européenne, tel qu’énoncé à l’article 174 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) (1), est de renforcer la cohésion économique et sociale en réduisant l’écart entre les niveaux de développement des diverses régions. Cette déclaration de mission doit rester au cœur de toutes les actions entreprises dans le cadre de la politique de cohésion et doit être renforcée par la Commission en collaboration avec les autorités des États membres chargées de la mise en œuvre de la politique de cohésion.

2.2.

Les changements à venir et que la société commence déjà à ressentir, en raison de la mondialisation et des technologies nouvelles ou futures, exigent un processus d’adaptation dans lequel peu de pays se sont engagés en profondeur. Il est important que nous gérions la transition vers les nouveaux modèles économiques basés sur ces nouvelles et futures technologies. Le CESE pense que la politique de cohésion est en mesure de contribuer à relever les nouveaux défis qui apparaissent, et considère qu’elle constitue l’un des piliers fondamentaux permettant de rapprocher l’Union européenne de ses citoyens et de réduire les disparités entre les régions de l’Union européenne et les inégalités entre les citoyens.

2.3.

Le budget de l’Union européenne représente une petite partie des dépenses publiques totales dans l’Union européenne, équivalant à moins de 1 % des revenus et environ 2 % seulement des dépenses publiques des 28 États membres de l’Union européenne. Au cours de la période 2014-2020, le budget de l’Union européenne représentait 0,98 % de son revenu national brut. La part de la politique de cohésion dans le budget total de l’Union européenne avoisinait les 35 % au cours de cette période (2).

2.4.

Le CESE a la ferme conviction que la proposition visant à réduire le volume du budget de la politique de cohésion pour la période 2021-2027 est inacceptable. La politique de cohésion est l’une des politiques les plus concrètes de l’Union européenne. Elle peut avoir une incidence directe et forte sur la vie des citoyens. Nous ne pouvons pas demander aux citoyens d’avoir plus confiance en l’Europe, tout en réduisant le budget d’une politique aussi importante. Il est cependant tout à fait essentiel que les fonds ne se substituent pas aux efforts des États membres mais qu’ils en constituent le complément tant au niveau national que régional.

2.5.

À l’instar de demandes similaires émanant du Parlement européen, le CESE invite la Commission à présenter un calendrier d’action pour une politique de cohésion forte et efficace après 2020 (3) et à le faire avancer.

2.6.

Dans le même temps, le CESE invite les États membres à œuvrer à l’adoption d’un système plus large de ressources propres de l’Union européenne afin de s’assurer que le budget de l’Union européenne soit doté de moyens suffisants pour pouvoir relever les plus grands défis qui se poseront à l’avenir.

2.7.

Bien que la politique de cohésion dispose d’un budget relativement modeste dans l’ensemble, elle a clairement démontré sa valeur ajoutée. Au cours de la période 2014-2020, elle a mobilisé plus de 480 milliards d’EUR d’investissements, ce qui représente par exemple un soutien pour plus d’un million d’entreprises, de meilleurs services de santé pour 42 millions de citoyens, une prévention des inondations et des incendies pour 25 millions de citoyens, un raccordement aux installations de traitement des eaux usées pour près de 17 millions de citoyens de l’Union européenne supplémentaires, l’accès à l’internet à haut débit pour 15 millions de ménages supplémentaires et plus de 420 000 nouveaux emplois. En outre, 5 millions d’européens pourront bénéficier de programmes de formation et d’apprentissage tout au long de la vie, et 6,6 millions d’enfants auront accès à de nouvelles écoles et structures d’accueil modernes. Le CESE estime que la politique de cohésion doit s’appuyer sur ces exemples locaux où la participation des citoyens a été considérée comme une réussite.

2.8.

De plus, dans un certain nombre d’États membres, la politique de cohésion s’est révélée être la principale source d’investissements publics (4). Les européens ont également tiré avantage de ses effets indirects, à savoir les améliorations induites par le respect des exigences imposées par cette politique (en matière, par exemple, de transparence, de responsabilité ou d’égalité des chances).

2.9.

Néanmoins, bien que l’Europe ait accompli de nombreux progrès s’agissant de développer et de poursuivre son action tendant au renforcement de sa cohésion économique, sociale et territoriale, comme prévu par le TFUE, il reste encore un long chemin à parcourir pour parvenir à un développement harmonieux de l’ensemble de l’Union.

2.10.

Après la crise économique, l’Europe a pu renouer avec la croissance économique, en particulier dans les pays à faible revenu, et les disparités régionales se réduisent enfin en termes de PIB par habitant (5). Toutefois, les différences entre les régions restent importantes, voire augmentent dans certains cas. La productivité est plus élevée dans les pays les plus développés, et leur résilience ainsi que leur capacité d’entrer en concurrence dans un contexte de mondialisation dépassent largement celles des États membres les moins développés. Cette situation se traduit par des disparités concernant les conditions de vie de la population, comme le niveau de pauvreté, le nombre et la situation des personnes exposées à un risque d’exclusion, ou l’accès à l’éducation ainsi que la qualité de la protection sociale et de l’éducation, entre autres.

2.10.1.

Par conséquent, afin de réduire encore les disparités économiques et sociales, le CESE estime que la politique de cohésion doit continuer à investir dans l’innovation, l’emploi, l’inclusion sociale, l’environnement, l’éducation inclusive, les programmes de santé et les infrastructures sanitaires, les technologies de pointe et accessibles, les réseaux et infrastructures de transport efficaces. Ces investissements doivent être faits pour améliorer l’accès universel au marché du travail et créer un marché unique qui stimule la croissance, la productivité et la spécialisation dans des domaines présentant un avantage comparatif dans toutes les régions.

2.10.2.

À l’heure de la mondialisation, les entreprises sont en concurrence avec des entreprises situées dans des zones à faible coût, ainsi qu’avec des entreprises très innovantes. L’Union européenne doit soutenir les réformes qui favorisent un environnement propice aux investissements dans lequel les entreprises peuvent prospérer, tandis que les citoyens bénéficient de meilleures conditions de travail. Les fonds de cohésion devraient servir à améliorer l’encadrement des jeunes pousses, des entrepreneurs et des PME innovantes et à soutenir plus efficacement les entreprises familiales (6), ainsi qu’à promouvoir la diversité (hommes et femmes, personnes handicapées, minorités ethniques, etc.) afin qu’elles deviennent plus compétitives et s’engagent davantage en faveur de la responsabilité sociale.

2.11.

Une plus grande cohésion serait également bénéfique pour de nombreux autres domaines liés aux objectifs environnementaux (utilisation d’une énergie plus propre et en moindre quantité, développement d’infrastructures plus efficaces, réduction de la pollution, etc.), aux questions de sécurité transfrontière, à l’éducation, à l’inclusion sociale, à l’accessibilité pour les personnes handicapées, aux transports, aux services publics, et pour lever d’autres obstacles à la libre circulation des marchandises, des services, des personnes et des capitaux.

2.11.1.

C’est pourquoi le CESE estime que toutes les régions doivent être éligibles au bénéfice du Fonds. La politique de cohésion de l’Union européenne doit faire partie intégrante d’une stratégie européenne d’investissement caractérisée par une approche territoriale forte, visant à doter chaque région des outils nécessaires pour renforcer sa compétitivité. Elle doit conduire à une transformation économique et structurelle, assurant dans chaque région une base résiliente fondée sur ses propres atouts (7).

2.12.

En raison de sa position centrale dans la construction d’un espace européen commun, la coopération territoriale européenne (Interreg), sous toutes ses formes — transfrontalière, transnationale, interrégionale et d’ouverture aux pays voisins — est la pierre angulaire de l’intégration européenne. Elle permet d’éviter que les frontières de l’Europe ne se transforment en obstacles, rapproche les européens, contribue à résoudre certains problèmes communs, facilite le partage des idées et des richesses, et encourage les initiatives stratégiques visant des objectifs communs (8). Le CESE estime dès lors essentiel que les États membres continuent de mettre en œuvre des mesures communes et échangent leurs pratiques et stratégies d’intervention.

2.12.1.

Le CESE regrette (9) toutefois que la politique de cohésion ne propose toujours pas de solutions globales pour les difficultés auxquelles sont confrontées des régions spécifiques présentant des handicaps structurels et permanents (très faible densité de population, îles, régions de montagne, etc.) mentionnées à l’article 174 du TFUE. Le CESE estime qu’il convient de mettre au point un nouveau mécanisme qui permette à ces régions de relever efficacement leurs défis spécifiques et complexes. Cette question ne saurait rester de la seule compétence des autorités nationales. Par conséquent, le CESE considère que la politique de cohésion doit encourager la coopération entre la Commission et les États membres et leurs parties prenantes régionales et locales en ce qui concerne la manière dont sont traités les problèmes de leurs différents territoires.

2.13.

La priorité de l’Union européenne vis-à-vis des régions à faible densité de population et des régions ultrapériphériques (RUP) doit être de renforcer les liens qui les unissent avec le continent européen et le sentiment d’appartenance au projet européen parmi leurs citoyens. Malgré un contexte extrêmement contraint sur le plan budgétaire, le soutien spécifique aux régions peu peuplées ou aux RUP ne doit pas diminuer. Ces régions doivent avoir accès à des ressources financières appropriées leur permettant d’atteindre les objectifs européens communs et de compenser leurs handicaps, notamment ceux liés à leur éloignement (10) ou à leur très faible densité de population. Il est donc nécessaire d’inclure les facteurs démographiques et géographiques lors de la phase d’évaluation et de décision concernant la répartition des fonds («méthode de Berlin»), les exigences en matière de concentration thématique ainsi que les taux de cofinancement [selon les catégories de régions (1) les plus développées, (2) en transition et (3) les moins développées]. L’inclusion de ces facteurs pourrait compenser les régions défavorisées à faible densité de population et les régions ultrapériphériques disposant d’un volume de financement adéquat et l’orientation souple des investissements.

2.14.

Plus de la moitié de la population mondiale vit aujourd’hui dans des zones urbaines et ce chiffre devrait atteindre 70 % d’ici 2050 (11). Si l’activité économique de ces régions est très élevée, il est essentiel qu’elles offrent un cadre de vie durable et de qualité à leurs citoyens. Le CESE estime dès lors qu’elles devraient continuer à bénéficier de l’attention accordée au titre de la politique de cohésion, mais il encourage également leur développement en symbiose avec leur cadre physique (développement polycentrique, relations entre zones urbaines et rurales, etc.).

3.   Une vision plus ferme dans un cadre plus clair, plus souple et plus efficace

3.1.

Le CESE estime qu’il est nécessaire de mettre en place une nouvelle stratégie européenne claire et ambitieuse, qui soit alignée sur le programme des Nations unies à l’horizon 2030 et ses objectifs de développement durable, ainsi qu’avec les autres engagements internationaux de l’Union européenne, tels que les accords internationaux (par exemple, les accords de Paris), de même que avec les conventions des Nations unies (par exemple, la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées), et qui soit assortie d’un mécanisme de coordination solide pouvant garantir une continuité sans failles entre les différents cycles politiques. À cet égard, le CESE accueille très favorablement le nouveau document de réflexion de la Commission sur une Europe plus durable d’ici 2030, qui ouvre la discussion pour aller dans ce sens.

3.2.

La politique de cohésion doit faire partie intégrante de cette stratégie ambitieuse et, partant, être elle-même élaborée de manière à disposer des outils nécessaires pour résister à l’épreuve du temps, c’est-à-dire pouvoir relever les défis du futur, tels que le changement climatique, l’adoption de nouvelles technologies, l’avènement d’un développement durable et la création d’emplois de qualité.

3.3.

Dans le droit fil des efforts déployés pour assurer la pérennité de la politique de cohésion, le CESE invite le Conseil et le Parlement européen à poursuivre la révision du système d’allocation des fonds au titre de la politique de cohésion, en tenant compte en particulier d’autres critères (au-delà du PIB). Ces critères devraient porter sur des questions telles que les inégalités, les migrations, le chômage, le chômage des jeunes, la compétitivité, le changement climatique, les conditions de travail et la démographie.

3.4.

À côté des efforts indispensables pour que la politique de cohésion résiste à l’épreuve du temps, il importe de ne pas oublier les défis d’aujourd’hui qui continuent de peser lourdement sur la société. Dans ce contexte, nous évoquons en particulier les défis sociaux tels que la marginalisation et la discrimination des minorités et des groupes ethniques spécifiques, ou la violence domestique, les défis économiques tels que l’accès au financement et au renforcement des compétences, et les défis environnementaux tels que la réduction de la pollution atmosphérique et la gestion des déchets.

3.5.

Afin de renforcer la planification et la gestion stratégiques de l’Union, dans le cadre de l’élaboration de la stratégie susmentionnée, le CESE invite également la Commission à intégrer les différents éléments stratégiques abordés par l’Agenda territorial (12) et la Charte de Leipzig (13) actuellement en cours de renouvellement coordonné par la future présidence allemande du Conseil de l’Union européenne.

4.   Mise en œuvre intégrée et coordonnée

4.1.

Le CESE est d’avis que l’Europe (non seulement au niveau de l’Union, mais aussi avec et dans les États membres) doit œuvrer à la clarification et à la simplification de ses compétences administratives, car c’est ainsi que les responsabilités peuvent être définies et contrôlées de manière plus efficace. Ensuite, les administrations européennes devront renforcer leur coopération et leurs capacités.

4.1.1.

À cet égard, le CESE se félicite du renforcement du lien avec le semestre européen (14) et demande également une coordination avec les recommandations par pays en tant que moyen pour favoriser les réformes structurelles. Le CESE convient qu’il est également important d’assurer une complémentarité et une coordination totales avec le nouveau programme renforcé d’appui aux réformes. Le CESE insiste sur la nécessité d’un mécanisme de gouvernance amélioré qui associe également le niveau régional.

4.2.

L’Europe doit travailler à la mise en place d’un cadre plus simple, plus souple et plus efficace pour la mise en œuvre de sa politique de cohésion. L’un des prochains objectifs de l’Europe doit être de doter ses différents fonds relevant de la politique de cohésion (agricole, social, régional, etc.) d’un ensemble unique de règles qui encourage fortement les investissements intégrés en proposant des solutions simples. Par ailleurs, le CESE plaide pour une plus grande synergie avec et entre les autres programmes et instruments de financement tels que le programme Horizon 2020, le mécanisme pour l’interconnexion en Europe, etc.).

4.3.

Traiter de manière intégrée les différents aspects de certains des principaux défis (sociaux, environnementaux, économiques, etc.) permet de répondre de manière plus précise aux besoins réels. Le CESE encourage les États membres à élaborer et à mettre en œuvre des programmes multifonds.

4.4.

Le CESE estime qu’il est essentiel d’adopter une approche territorialisée. Le CESE souligne également qu’il faut encourager et amplifier la démarche consistant à associer les partenaires locaux à la détermination du potentiel et des besoins au niveau local, ainsi qu’au lancement d’actions permettant d’y répondre en partenariat avec tous les acteurs locaux. Comme la Commission l’a souligné à juste titre: «le passage au niveau supérieur du développement économique ne peut se réaliser par une politique unique et uniforme, mais nécessitera des investissements et des réponses politiques différenciés au niveau régional» (15).

4.5.

Le CESE appelle à tenir compte des facteurs sociaux (tels que les niveaux d’inégalité, la pauvreté, les migrations, les niveaux d’éducation, etc.) lors de l’estimation des taux de cofinancement et des besoins de concentration thématique pour ce qui est des régions les plus développées et des régions en transition. La prise en compte de ces facteurs au niveau des projets permettrait d’investir dans des actions destinées aux personnes les plus vulnérables (telles que les personnes handicapées, les migrants ou les mineurs non accompagnés) qui sont présentes de manière disproportionnée dans les villes et régions les plus développées de l’Union européenne, alors que celles-ci ne sont pas éligibles ou dépendent de taux de cofinancement excessivement élevés.

4.6.

Le CESE juge essentiel d’améliorer les liens entre les différentes initiatives (stratégies et programmes) liées à la politique de cohésion des différents niveaux territoriaux, de manière horizontale (par exemple, stratégies macrorégionales avec des programmes transnationaux) et de manière verticale (entre les différents niveaux territoriaux).

4.7.

Si nous voulons continuer à mettre en œuvre la politique de cohésion principalement grâce à différents projets, nous devons également simplifier l’élaboration du cadre juridique dans lequel ils sont mis en œuvre. Conformément aux conclusions du groupe de haut niveau sur la simplification pour l’après-2020 (16), le CESE estime que le paquet réglementaire devrait être beaucoup moins complexe et éviter la microgestion des fonds. Le CESE reconnaît qu’il peut être tentant de gagner en efficacité grâce à une gestion plus centralisée, mais il demande à la Commission d’y résister et de fournir les outils nécessaires pour que davantage de fonds soient gérés de manière décentralisée.

4.8.

Il convient de noter que les capacités administratives des États membres et des régions de plus petite taille en particulier pourraient être mises à rude épreuve au cours des premières phases de la période de programmation. Le CESE estime qu’il est crucial de réduire sensiblement les formalités administratives superflues pour les bénéficiaires (depuis la candidature pour un projet jusqu’à sa phase finale) tout en maintenant un niveau élevé d’assurance de la légalité et de la régularité.

4.9.

L’expérience a montré que, très souvent, des petits projets (moins de 100 000 EUR) pouvaient avoir un impact important pour les groupes les plus vulnérables de la société. Toutefois, il est également fréquent que ces mêmes groupes rencontrent de grandes difficultés pour accéder à ces fonds. Dans cette perspective, alors que le CESE demande aux États membres de promouvoir la possibilité offerte par les cadres législatifs actuels d’une procédure simplifiée d’accès aux fonds pour les projets de petite taille, il encourage la Commission à explorer d’autres possibilités qui pourraient faciliter la participation de plus petits acteurs.

4.10.

Le CESE fait référence à l’utilisation croissante des instruments financiers pour mettre en œuvre la politique de cohésion. Le CESE y est favorable, mais appelle la Commission à veiller à ce que, lors de l’élaboration de ces instruments, un examen approfondi soit réalisé pour s’assurer 1) que ces instruments conviennent à tous les États membres et 2) qu’ils peuvent être utilisés par les PME et les ONG. Lorsqu’ils s’avèrent inadaptés, des mesures alternatives/compensatoires doivent être mises en place pour garantir qu’aucun État membre ou aucune entité ne soit désavantagé.

4.11.

Afin d’améliorer la qualité de certains aspects de la mise en œuvre (tels que la commercialisation, les possibilités techniques pour les événements, etc.), le CESE estime que le secteur public doit consulter la société civile et le secteur privé afin de bénéficier de leur expérience de la concurrence lors de la préparation. L’on ne doit pas s’attendre à ce que les membres du personnel généralistes des administrations publiques comprennent tous les aspects permettant de rendre un «produit»à la fois populaire et utile.

4.12.

Le CESE estime que des mesures supplémentaires doivent être prises pour harmoniser les indicateurs en Europe. Il est indispensable de mettre en place un système de suivi à même de présenter des résultats complexes de manière aisément accessible, tant pour les décideurs que pour la société au sens large.

4.13.

L’avenir de la politique de cohésion devrait également soutenir de nouveaux moyens d’intégrer l’entrepreneuriat commercial et les effets positifs sur le plan social et environnemental. À cet égard, il est essentiel pour l’Union européenne de renforcer le soutien au développement de l’économie sociale.

5.   Une communication globale plus efficace

5.1.

L’un des principaux problèmes rencontrés par la politique de cohésion est le manque d’efficacité de la communication, qui touche trop souvent les projets qu’elle finance. S’il faut prendre acte des diverses lignes directrices appliquées par la Commission en matière de communication, il est évident qu’elles sont loin d’être suffisantes. Il arrive souvent que l’existence de certains projets et le fait qu’ils sont en réalité financés par l’Union européenne ne soient pas connus ou très peu. La politique de cohésion n’est par conséquent pas ou peu comprise. Le CESE invite la Commission à poursuivre ses efforts en vue de la révision des obligations actuelles en matière de publicité et à les améliorer considérablement en prenant en compte les moyens modernes de communication numérique. Un recours accru aux projets faisant appel aux meilleures pratiques devrait servir à fournir des exemples concrets pour encourager une utilisation plus forte et plus efficace des fonds.

5.2.

Il est nécessaire d’améliorer la manière dont les effets de la politique de cohésion sont mesurés dans certains domaines, tels que l’inclusion sociale, la qualité de vie des citoyens, leurs conditions de travail, l’accroissement de la compétitivité des entreprises ou la modernisation des services de l’administration publique. Il faut informer les citoyens de l’Union européenne de ces effets afin qu’ils puissent prendre conscience des réussites et des échecs de la politique.

5.3.

Le CESE appelle la Commission à élaborer un plan stratégique de communication en collaboration avec tous les partenaires concernés, y compris les organisations représentant les personnes handicapées. Le CESE estime également que la communication des meilleures pratiques devrait être facilement accessible.

6.   Veiller à un partenariat avec les organisations de la société civile et les autres parties prenantes

6.1.

Le CESE réitère l’importance de la gouvernance à plusieurs niveaux en renforçant la participation structurelle des organisations de la société civile et des autres parties prenantes au processus de programmation, de mise en œuvre, d’évaluation et de suivi de l’utilisation des fonds. Il est grand temps que la Commission et les États membres cessent de manifester un intérêt purement formel pour cet aspect et s’attellent à garantir une participation forte et significative de la société civile à toutes les étapes de la conception et de la mise en œuvre de la politique de cohésion. Cette participation responsabilisera davantage les autorités nationales et permettra un déploiement des fonds plus efficace et plus pertinent.

6.2.

En ce qui concerne le code de conduite en matière de partenariat (CCEP), le CESE demande qu’il soit révisé et mis à jour en consultation directe avec les organisations de la société civile et les autres parties prenantes. Le Comité demande également que le code de conduite soit rendu contraignant. Le CESE considère que le CCEP doit être pleinement respecté à tous les niveaux et renforcé au moyen de garanties solides et de mesures qui en autorisent l’application complète.

6.3.

Le CESE a la conviction que l’approche de développement local mené par les acteurs locaux pourrait offrir de multiples avantages et rencontrer un grand succès comme outil européen de développement local intégré et de participation des citoyens et de leurs organisations au niveau local (17).

6.4.

Afin de renforcer les compétences et l’efficacité du partenariat, le CESE demande des mesures de renforcement des capacités et d’assistance technique pour les autorités urbaines et les autres autorités publiques, les partenaires économiques et sociaux, la société civile, les organisations et les organismes pertinents qui les représentent, les partenaires environnementaux et les organismes chargés de promouvoir l’inclusion sociale, les droits fondamentaux, les droits des personnes handicapées, les droits des personnes souffrant de maladies chroniques, l’égalité entre les femmes et les hommes et la non-discrimination. Le CESE souhaite également qu’un mécanisme de consultation annuel soit mis en place avec les partenaires concernés.

6.5.

Compte tenu du fait que les petites entreprises, les microentreprises et les organisations de la société civile sont susceptibles de manière générale d’éprouver des difficultés à tirer profit des possibilités offertes par les fonds européens, le CESE demande à nouveau que les actions permettant de renforcer leur accès à l’information, de leur fournir des services de guidance et de mentorat et d’accroître leurs capacités d’intervention reçoivent un soutien cohérent et substantiel. Dans ce cadre, il convient également de tenir compte des besoins spécifiques des personnes les plus vulnérables.

Bruxelles, le 20 mars 2019.

Le président

du Comité économique et social européen

Luca JAHIER


(1)  Article 174 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

(2)  COM(2017) 358 final — Document de réflexion sur l’avenir des finances de l’UE.

(3)  Voir le rapport du Parlement européen.

(4)  COM(2017) 358 final — Document de réflexion sur l’avenir des finances de l’UE.

(5)  Ma région, mon Europe, notre futur: Septième rapport sur la cohésion économique, sociale et territoriale.

(6)  JO C 81 du 2.3.2018, p. 1.

(7)  https://www.businesseurope.eu/sites/buseur/files/media/position_papers/ecofin/2017-06-09_eu_cohesion_policy.pdf

(8)  JO C 440 du 6.12.2018, p. 116.

(9)  JO C 209 du 30.6.2017, p. 9.

(10)  JO C 161 du 6.6.2013, p. 52.

(11)  http://www.un.org/en/development/desa/news/population/world-urbanization-prospects-2014.html

(12)  https://ec.europa.eu/regional_policy/en/information/publications/communications/2011/territorial-agenda-of-the-european-union-2020

(13)  https://ec.europa.eu/regional_policy/archive/themes/urban/leipzig_charter.pdf

(14)  Https://www.eesc.europa.eu/sites/default/files/resources/docs/qe-02-17-362-fr-n.pdf et https://www.eesc.europa.eu/sites/default/files/resources/docs/qe-01-14-110-fr-c.pdf

(15)  Commission européenne (2017), Competitiveness in low-income and low-growth regions — The lagging regions report (La compétitivité dans les régions à faibles revenus et faible croissance: rapport sur les régions en retard de développement), Bruxelles, SWD(2017) 132 final du 10.4.2017.

(16)  http://ec.europa.eu/regional_policy/sources/newsroom/pdf/simplification_proposals.pdf

(17)  https://www.eesc.europa.eu/fr/our-work/opinions-information-reports/opinions/avantages-du-developpement-local-mene-par-les-acteurs-locaux


5.7.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 228/57


Avis du Comité économique et social européen sur «L’avenir de l’UE: avantages pour les citoyens et respect des valeurs européennes»

(avis exploratoire à la demande de la présidence roumaine du Conseil de l’Union européenne)

(2019/C 228/08)

Rapporteur: Mihai IVAȘCU

Corapporteur: Stéphane BUFFETAUT

Consultation

Présidence roumaine du Conseil, 20.9.2018

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Sous-comité «L’avenir de l’UE: avantages pour les citoyens et respect des valeurs européennes»

Adoption en session plénière

20.3.2019

Session plénière no

542

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

147/6/9

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Plus de 60 ans après la signature du traité de Rome, les États membres devraient adopter une position politique sur l’avenir de l’UE à Sibiu, en mai 2019.

1.2.

La dignité humaine et les droits de l’homme, la démocratie, la liberté, la justice sociale, l’égalité, la séparation des pouvoirs et l’état de droit sont les valeurs qui ont toujours sous-tendu la construction européenne. Elles doivent rester non négociables et constituer la base sur laquelle l’UE sera réformée et la décision politique sera prise à Sibiu.

1.3.

L’un des documents clés garantissant les droits de nos citoyens est la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Les grandes décisions politiques, telles que celles destinées à améliorer les traités, doivent tenir compte de ce document et l’intégrer dans le nouveau texte.

1.4.

Le projet européen a permis à tout un continent de connaître la période de paix la plus longue de son histoire, a donné lieu à une prospérité et un développement social sans précédent, a facilité la libre circulation des personnes, des biens et des services et a mis en place le plus grand marché unique au monde. Tous ces aspects garantissent aux citoyens européens un niveau de vie nettement plus élevé, une protection sociale et des possibilités accrues par rapport à la plupart des régions du globe.

1.5.

Ces avantages ainsi que d’autres sont parfois considérés comme des acquis ou minimisés par les mouvements populistes et eurosceptiques. Il ne faut jamais oublier qu’en raison de l’Union européenne, nous bénéficions:

de la libre circulation des personnes, des biens, des capitaux et des services,

du plus grand marché unique au monde,

d’une interconnectivité économique accrue et d’échanges commerciaux libres et fluides,

d’accords commerciaux communs négociés à partir d’une position de force pour tous les États membres,

d’une protection sociale de qualité et améliorée, fondée sur le socle européen des droits sociaux,

du modèle social européen,

d’une coopération accrue dans les domaines du renseignement, des questions militaires et des services de maintien de l’ordre,

de normes environnementales et d’une qualité de l’air et de l’eau améliorées,

d’une protection du droit fondamental des citoyens à la vie privée dans l’environnement numérique,

de normes de santé et de sécurité renforcées,

de la réciprocité des systèmes de santé dans l’ensemble de l’Union,

de règles et de politiques de lutte contre la discrimination, notamment en ce qui concerne les minorités et les femmes,

de possibilités d’éducation extraordinaires, fondées sur des programmes d’échange tels qu’Erasmus+,

etc.

1.6.

L’Union doit agir pour renforcer la convergence entre régions et/ou États membres. La convergence vers le haut des conditions de vie et de travail, fondée sur une croissance durable, revêt une importance cruciale pour améliorer le fonctionnement du marché unique et réduire les inégalités, la pauvreté et l’exclusion sociale.

1.7.

Il convient de faire renaître chez les citoyens la conviction qu’agir au niveau européen ne signifie pas renoncer aux politiques nationales, mais plutôt reconnaître que certains projets seront davantage porteurs si les décisions sont prises ensemble. L’égalité des règles et l’égalité des chances pour tous les États membres et tous les citoyens ne devraient jamais être négociables et la méthode européenne doit garantir la liberté et la souveraineté à l’ère de la mondialisation.

1.8.

L’adoption de l’euro doit être une priorité de la construction européenne, car la zone euro ne pourra atteindre son plein potentiel que lorsque tous les États membres l’auront rejointe. Associé à une Union économique et monétaire forte, le mécanisme européen de stabilité (MES) amélioré peut jouer un rôle plus important en termes de responsabilité politique et de responsabilité budgétaire renforcée. En outre, les États membres doivent prendre des mesures immédiates et courageuses pour rendre l’UE plus résiliente en cas de nouvelle crise économique et financière.

1.9.

Dans un monde en constante mutation, le CESE estime qu’il est nécessaire d’investir massivement dans la R & D, l’offre de compétences et les infrastructures pour que l’UE puisse tirer parti de ses avantages concurrentiels. L’Europe doit relever le défi du déclin et du vieillissement de sa population car ce phénomène a une incidence sur l’offre de main-d’œuvre. Néanmoins, les politiques migratoires doivent s’accompagner de politiques d’aide à l’accueil et à l’intégration solides afin d’éviter d’énormes difficultés sociales et sociétales. Si elle veut rester concurrentielle, l’UE doit remédier à la pénurie de main-d’œuvre et au déficit de compétences. L’Europe a besoin d’une politique migratoire bien gérée afin de préparer la main-d’œuvre aux compétences requises par les nouvelles technologies, tout en soutenant la croissance et le développement des entreprises. Les travailleurs européens doivent pouvoir bénéficier de programmes de formation, de reconversion, de perfectionnement et d’apprentissage tout au long de la vie de manière à profiter pleinement de l’évolution technologique.

1.10.

Ces dernières années, des courants protectionnistes ont vu le jour et les guerres commerciales couvent. Le CESE estime que l’UE doit continuer à promouvoir un commerce libre, équitable et durable dans un système multilatéral et des accords commerciaux qui respectent les droits sociaux, les droits des consommateurs et les droits environnementaux, tout en soutenant la croissance et l’évolution des entreprises. Le protectionnisme ne profiterait pas aux citoyens. En outre, l’UE a un rôle majeur à jouer dans la réforme de l’Organisation mondiale du commerce.

1.11.

Il convient de parvenir à une croissance économique saine, assortie d’une dimension sociale stable, sans oublier que le socle européen des droits sociaux représente l’un des principaux moteurs de la cohésion sociale. Il y a lieu d’en accélérer la mise en œuvre au niveau national et d’y associer toutes les organisations de la société civile concernées. Les partenaires sociaux et les autres organisations de la société civile sont des acteurs clés du projet démocratique européen.

1.12.

Le CESE estime que tous les citoyens de l’UE devraient bénéficier d’une égalité des chances et de traitement sur le marché du travail. Tout en favorisant une mobilité équitable, il conviendrait de garantir également l’accès des citoyens à des emplois de qualité et à des conditions de vie décentes à l’endroit où ils vivent afin d’éviter la fuite des cerveaux et le dumping social.

1.13.

Les citoyens de l’UE sont de plus en plus préoccupés par le changement climatique et les questions environnementales. Plusieurs avis du CESE ont montré que l’Europe peut et doit parvenir à mettre en œuvre les objectifs de durabilité. De même, il est essentiel de respecter les engagements pris dans le cadre des différents accords sur le climat, la biodiversité et l’eau. L’UE est en mesure de stimuler la transition écologique tout en préservant la cohésion sociale et l’inclusion de tous, dans le cadre d’une transition juste.

1.14.

Le CESE estime que les programmes actifs qui facilitent l’éducation et l’inclusion des jeunes dans la population active jouent un rôle important pour l’avenir de l’Union européenne. Les programmes tels qu’Erasmus+ doivent être encouragés afin de doter les jeunes de connaissances, d’aptitudes et de compétences. Le CESE estime que, parallèlement à ces programmes, il convient d’en mettre en place dès à présent d’autres, similaires, destinés à soutenir les personnes disposant de ressources économiques plus limitées. Il est essentiel de sensibiliser les citoyens à ces programmes tout en soulignant systématiquement l’avantage direct que représente l’appartenance à l’UE. En outre, Erasmus+, entre autres, peut et doit être utilisé pour assurer la garantie de la qualité dans l’enseignement supérieur en Afrique afin de doter les jeunes des deux continents de connaissances, d’aptitudes et de compétences.

1.15.

Les défis en matière de sécurité extérieure sont nettement plus nombreux, mais sont perçus différemment par les États membres, dont la contribution financière et les points de vue sur l’usage de la capacité militaire varient. Le CESE estime que l’UE doit apporter une réponse collective et coordonnée afin de prouver à tous les citoyens que la sécurité est effectivement assurée. Tout aussi importantes pour la sécurité des citoyens sont les mesures visant à prévenir la cybercriminalité dans le nouvel environnement numérique.

1.16.

Le sort de milliers de migrants qui fuient les conflits et la pauvreté en mettant leur vie en péril pour traverser la Méditerranée est choquant. Les retombées politiques ont créé l’impression que l’UE ne sait pas comment gérer une telle crise. Le CESE accueille favorablement le projet de la Commission visant à mettre en place une politique migratoire équilibrée, globale et commune, qui aidera l’UE à saisir les opportunités offertes par les migrations tout en s’attaquant aux défis qui se posent.

1.17.

Les citoyens européens considèrent souvent les effets positifs de l’adhésion à l’Union européenne comme allant de soi ou les associent aux gouvernements nationaux, tandis qu’ils imputent nombre des difficultés qu’ils rencontrent aux institutions européennes. Le CESE estime qu’en raison des insuffisances de la communication sur ce que l’appartenance à l’Union européenne procure à ses citoyens, l’UE et les États membres doivent faire beaucoup plus d’efforts pour mieux communiquer sur les politiques, les objectifs et les objectifs européens.

1.18.

Il convient d’affecter davantage de fonds à la communication et d’exploiter tous les canaux disponibles: les niveaux européen et national, mais également les partenaires sociaux et les autres organismes représentant la société civile organisée. L’UE doit systématiquement informer ses citoyens des avantages qu’elle leur apporte, et leur rappeler ce qu’était la vie avant sa création: la guerre, les troubles et les difficultés économiques.

1.19.

Pour se rapprocher de ses citoyens, l’UE doit en permanence être à leur écoute, cerner leurs attentes fondamentales et tenter d’agir en conséquence. C’est pourquoi le CESE estime qu’il y a lieu de promouvoir et d’utiliser la communication, les plateformes de coopération et les consultations publiques aussi souvent que possible, en associant tous les États membres.

1.20.

La lutte contre les fausses informations représente un autre défi majeur dans un monde où l’information erronée et la désinformation constituent une tendance croissante. Le CESE appelle dès lors de ses vœux une action commune et ferme afin de renforcer les capacités d’analyse des citoyens tout en préservant la liberté d’expression, de prévenir la diffusion de fausses informations et d’élaborer des outils de contrôle et de vérification des faits.

2.   Introduction

2.1.

L'article 3 du traité sur l’Union européenne précise que «l’Union a pour but de promouvoir la paix, ses valeurs et le bien-être de ses peuples». L’Union européenne, qui a commencé comme un projet visant à garantir la paix, est devenue le plus grand marché unique au monde qui permet la libre circulation des capitaux, des produits et des services et, surtout, de ses citoyens. Ce rêve a pris forme sur les cendres de deux guerres mondiales et a assuré le développement de l’ensemble du continent, marquant le début de la plus longue période de paix de son histoire.

2.2.

Aujourd’hui, en 2019, année d’élections européennes et de changements fondamentaux pour l’Union, tous les acteurs européens doivent faire la preuve de leur détermination à assurer l’unité, la prospérité et le bien-être de ses citoyens en protégeant la démocratie, les droits humains, la séparation des pouvoirs, l’état de droit et le modèle social européen (1).

2.3.

La charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (2) garantit certains droits politiques, sociaux et économiques aux citoyens de l’ensemble de l’Union européenne. Ratifié en 2000, ce texte a ajouté un aspect fondamental ignoré jusque-là par les traités, à savoir l’obligation pour l’UE d’agir et de légiférer en respectant les droits et les valeurs de la charte tels que décrits dans les sept chapitres qu’elle comporte: la dignité, les libertés, l’égalité, la solidarité, la citoyenneté, la justice et les dispositions générales.

2.4.

Bien que les avantages pour les citoyens européens soient évidents, certains semblent malheureusement ne pas en avoir conscience, voire les remettent en question et l'on a pu observer ces dernières années des tensions croissantes au sein de certains États membres ainsi que des divergences de vue quant à la voie à suivre. Cela a naturellement suscité des interrogations: quel avenir pour l’Union européenne? Doit-on faire plus ou, au contraire, moins ensemble? Où se situe le juste équilibre entre les différents projets de coopération que les États membres sont disposés à accepter? Diverses forces politiques, en particulier dans les États membres fondateurs de l’Union, remettent en question la direction, la gouvernance et même le principe de l’intégration européenne.

2.5.

Ce tournant politique coïncide avec un regain de confiance en l’UE (3) après une longue période de méfiance à l’égard des modalités de l’action des institutions européennes. Les difficultés récentes, qu’il s’agisse de la crise financière ou de la crise de la zone euro, de la situation migratoire ou du Brexit, ont montré à quel point il est facile de rejeter la responsabilité sur les institutions de l’Union. Les mouvements eurosceptiques ont en effet exploité plusieurs événements récents pour promouvoir leurs idées, que l’Union européenne soit ou non responsable de la situation. Les partis politiques populistes arrivés au pouvoir dans plusieurs États membres ont remis en question les avantages de l’UE ou propagé de fausses informations sur l’Union.

3.   Avantages pour les citoyens européens

3.1.

L’interconnexion économique, le resserrement de la coopération sociale et politique et la libre circulation ont éloigné le spectre de la guerre; le continent connaît aujourd'hui la plus longue période de paix de son histoire.

3.2.

Le marché unique européen garantit aux États membres la liberté et la fluidité des échanges commerciaux au sein de l’Union, contribue à la richesse et à la prospérité économiques et à des niveaux de vie qui sont parmi les plus élevés au monde. Cela étant, les inégalités sociales et territoriales n’ont pas été éliminées.

3.3.

En tant que négociateur économique unique, l’UE est devenue un acteur très influent sur la scène internationale, capable de négocier des accords commerciaux stratégiques et d’influencer la politique économique au niveau mondial. L’accroissement de la connectivité et la réduction des coûts de fonctionnement dont bénéficient les entreprises favorisent la création d’emplois.

3.4.

La libre circulation des citoyens dans l’Union a contribué à faire disparaître la méfiance entre les nations et ouvert d’innombrables possibilités éducatives et professionnelles. Un citoyen européen peut travailler, vivre et prendre sa retraite dans n’importe quel État membre de l’Union. Il est très courant de voir, par exemple, un Roumain étudier au Royaume-Uni, puis travailler en Belgique tout en résidant aux Pays-Bas.

3.5.

Les citoyens bénéficient également de la création d’un espace de liberté, de sécurité et de justice, dans la mesure où les nations européennes jouissent d’une forme de protection mutuelle. L’UE offre un niveau de sécurité qui permet aux services de renseignement et aux autorités chargées du maintien de l’ordre de chaque pays de bénéficier de possibilités accrues en matière d’échange d’informations et de ressources.

3.6.

Depuis sa création, l’UE œuvre à tous niveaux à l’amélioration de l’environnement. Ainsi, la qualité de l’air et de l’eau s’est considérablement améliorée sur l’ensemble du continent depuis les années 1950 grâce à la coordination des efforts et de la réglementation à l’échelle européenne.

3.7.

À l’ère du numérique, la vie privée fait l’objet d’une protection importante dans l’UE depuis la récente adoption du règlement général sur la protection des données (RGPD). Ce texte représente l’une des législations les plus strictes au monde en matière de protection des données à caractère personnel et protège le droit fondamental des citoyens à la vie privée.

3.8.

L’UE possède en outre l’un des régimes de sécurité des produits et des denrées alimentaires les plus stricts au monde. Les autorités nationales communiquent au système d’alerte rapide pour les produits non alimentaires dangereux (RAPEX) les informations sur les produits dangereux présents sur le marché. L’Union s’est également engagée à détecter ce type de produits avant qu’ils ne soient vendus aux consommateurs. Dans l’UE, les employeurs sont tenus de garantir la santé et la sécurité des travailleurs dans tous les aspects de leur travail.

3.9.

Les citoyens de l’Union bénéficient de la réciprocité des soins de santé dans n’importe quel État membre de l’UE. Ces droits s’appliquent qu’ils séjournent temporairement dans un pays pour leurs vacances ou étudient à l’étranger, qu’ils résident à titre permanent dans un autre pays de l’UE ou qu’ils se rendent dans un autre État membre spécifiquement pour y recevoir un traitement médical.

3.10.

Tout citoyen de l’UE a le droit de voter et de participer en tant que candidat aux élections au Parlement européen et/ou aux élections municipales dans le pays de l’UE dans lequel il réside, dans les mêmes conditions que les ressortissants de ce pays. De plus, les citoyens de l’Union européenne ont le droit d’être recrutés dans les mêmes conditions que les ressortissants du pays dans lequel ils recherchent un emploi et il est interdit de leur imposer des exigences supplémentaires.

3.11.

Tout citoyen européen peut immatriculer une entreprise ou créer une succursale d’une entreprise existante établie dans l’UE dans n’importe quel pays de l’Union ainsi qu’en Islande, en Norvège ou au Liechtenstein, et ce rapidement et facilement. De nombreux fonds et initiatives de l’UE sont disponibles pour soutenir les jeunes pousses et les PME.

3.12.

Le modèle social européen contribue à améliorer les conditions de vie et de travail d’une grande partie de la population de l’UE. La récente adoption du socle européen des droits sociaux vise à améliorer encore cette situation.

3.13.

L’UE est à la pointe de la promotion de l’égalité entre femmes et hommes en matière d'indépendance économique. Elle s’efforce en permanence de progresser sur la voie de l’égalité entre hommes et femmes, de lutter contre les écarts de rémunération et de mettre en place des règles et des politiques efficaces de lutte contre la discrimination.

3.14.

Le processus d’adhésion à l’Union européenne et la perspective de rejoindre cette dernière ont encouragé la mise en place d’économies de marché viables, l’amélioration des normes sociales et la création d’institutions démocratiques stables en Europe.

3.15.

Les citoyens de l’UE bénéficient de la protection des autorités diplomatiques et consulaires de tout autre État membre lorsqu’ils se trouvent sur le territoire d'un pays tiers où leur propre État n'est pas représenté. Ce droit est consacré par l'article 46 de la Charte des droits fondamentaux. Il n’y a que trois pays — les États-Unis, la Chine et la Russie — dans lesquels tous les États membres sont représentés diplomatiquement. Dans les situations d’urgence, les États membres de l’UE doivent aider à évacuer les citoyens européens comme s’il s'agissait de leurs propres ressortissants. La protection couvre également les situations de la vie quotidienne, comme le vol d’un passeport, un accident grave ou une maladie.

3.16.

L’éducation est résolument soutenue au sein de l’Union européenne. Le programme d’échange mondialement connu Erasmus+ offre aux étudiants et aux universitaires la possibilité de renforcer leurs compétences et leurs perspectives d’emploi en faisant l’expérience de la vie universitaire dans un autre pays. Plus de 3 millions de personnes en ont profité depuis 2014. En outre, les échanges d’idées et de cultures ont permis de rapprocher les citoyens et de contribuer à façonner l’identité européenne.

4.   Valeurs européennes et droits fondamentaux

4.1.

Le CESE estime qu’afin de protéger au mieux les intérêts des citoyens, toute réforme des traités doit intégrer le texte de la Charte des droits fondamentaux et aucun État membre ne devrait avoir la possibilité de refuser de l’appliquer. À l’heure actuelle, le traité de Lisbonne évoque la charte comme un document indépendant, et le Royaume-Uni et la Pologne n’y souscrivent pas.

4.2.

Bien que l’Europe soit confrontée à de nombreux défis et que la prise de décisions communes soit toujours nécessaire, les valeurs sur lesquelles repose l’UE, qui sont consacrées dans les traités, ne sont pas négociables et doivent constituer le point de départ de toute nouvelle architecture européenne: respect de la dignité humaine et des droits de l’homme, démocratie, liberté, égalité, séparation des pouvoirs et état de droit.

4.3.

L’égalité de traitement et des règles identiques pour tous les citoyens de l’UE ne devraient jamais être négociables; or, à cet égard, l’Union a consenti à des compromis importants et inutiles: nécessité d’un visa pour les États-Unis pour certains États membres uniquement, double niveau des normes de qualité des denrées alimentaires, etc. L’UE doit s’efforcer de protéger de manière égale les intérêts de tous ses citoyens, quelle que soit leur nationalité.

4.4.

Le CESE estime qu’agir au niveau européen ne signifie pas que l’on renonce aux intérêts nationaux, ni que les intérêts européens et nationaux sont conflictuels, mais simplement que certains objectifs sont mieux réalisés conjointement. Quelle que soit la direction que prendra l’Union, il conviendra d’envisager des réformes importantes et des règles claires pour sa gouvernance afin de faire face aux tensions politiques actuelles et à une diversité croissante. C’est la méthode européenne qui garantit la liberté et la souveraineté dans un monde globalisé. Les citoyens bénéficient de l’adhésion à l’UE car elle leur offre un espace juridique, des horizons et des règles qui sont les mêmes pour tous, tout en interdisant strictement toute discrimination fondée sur la nationalité.

4.5.

Le sort de milliers de migrants qui fuient les conflits et la pauvreté en mettant leur vie en péril pour traverser la Méditerranée est choquant. Les retombées politiques ont créé à tort l’impression que l’UE ne sait pas comment gérer une telle crise. Le CESE accueille favorablement le projet de la Commission visant à mettre en place une politique migratoire équilibrée, globale et commune, qui aidera l’UE à saisir les opportunités offertes par les migrations tout en s’attaquant aux défis qui se posent. Le Comité soutient tout particulièrement la nouvelle politique de la Commission visant à faire en sorte que l’Europe demeure une destination attrayante pour les migrants dans une période de déclin démographique et à réduire les incitations à la migration irrégulière. Cela implique également de solides politiques d’aide à l’accueil et à l’intégration.

4.6.

Le plus grand défi pour l’UE est de demeurer une Union qui défend et protège ses citoyens et leur donne les moyens d’agir. Par conséquent, elle doit proposer des solutions qui répondent aux préoccupations réelles des citoyens: «Le Comité reste convaincu qu’un avenir meilleur est possible et qu’une Union plus forte peut contribuer à donner une meilleure orientation à la mondialisation et à la numérisation, et partant, à offrir des perspectives favorables à tous les citoyens» (4).

4.7.

Les fondateurs du projet européen ont reconnu qu’il reste encore à ce dernier un long chemin à parcourir pour jouir du même niveau de légitimité que les démocraties établies dans ses États membres. Nous avons parcouru un long chemin, mais un nouveau traité, quel qu’il soit, doit garantir davantage de transparence et un contrôle démocratique accru afin de rendre l’Union le plus légitime possible aux yeux de l’opinion. Il convient en outre d’assurer un plus grand respect du droit de l’Union par les États membres.

5.   Développement économique durable

5.1.

L’Europe possède le plus grand marché unique au monde et la deuxième monnaie la plus utilisée. Principale puissance commerciale, elle représente 16,5 % des importations et des exportations à l’échelle mondiale (5) et est le plus important donateur d’aide au développement et d’aide humanitaire. Grâce notamment à «Horizon 2020», le plus grand programme de recherche multinational au monde, l’Europe est à la pointe de l’innovation. Toutefois, la concurrence des États-Unis et de l’Asie semble plus intense que jamais. Soyons clairs: aucun État membre n’est en mesure de jouer seul un rôle de premier plan sur la scène mondiale.

5.2.

L’euro, qui fêtera bientôt son vingtième anniversaire, ne pourra atteindre son plein potentiel que lorsque tous les États membres l’auront adopté et que l’Union économique et monétaire sera achevée. Il faudrait pour cela des règles claires, acceptées par tous et applicables à tous, donner au MES un rôle plus important, comparable à celui du FMI sur la scène internationale, ainsi que la responsabilité politique et des conseils budgétaires renforcés (6). L’adoption de l’euro doit être une priorité de la construction de l’UE.

5.3.

Le CESE a souligné par le passé combien l’Union était lente à réagir à la crise financière et que des réformes étaient nécessaires dans l’Union économique et monétaire (7). Depuis lors, on a pu observer un effort continu en faveur des réformes et d’un parachèvement de l’union bancaire et de l’union des marchés des capitaux. Comme par le passé (8), le CESE est favorable à la poursuite de la consolidation du marché, mais met en garde contre la création de positions caractérisées par une concentration trop forte du pouvoir décisionnel dans les mains d’un petit nombre d’acteurs. L'achèvement de l'UEM devrait permettre aux entreprises et aux citoyens de l’Union européenne d’entrer dans une nouvelle ère de la monnaie unique en ce qu’elle réduira sensiblement les coûts de transaction, éliminera les risques de change et améliorera la transparence des prix dans le commerce tout en diminuant les risques d’investissement.

5.4.

Dans un monde en constante mutation, si l’Europe veut tirer parti de ses avantages concurrentiels, elle doit se concentrer sur des domaines tels que la R & D, l’offre de compétences et les infrastructures. L’Europe doit relever le défi du déclin et du vieillissement de sa population car ce phénomène a une incidence sur l’offre de main-d’œuvre. Si elle veut rester concurrentielle, l’UE doit remédier à la pénurie de main-d’œuvre et au déficit de compétences. L’Europe a besoin d’une politique de migration bien gérée et d’une perspective à long terme pour préparer la main-d’œuvre aux défis futurs tout en aidant les entreprises à se développer et à évoluer. Cela étant dit, les politiques migratoires doivent s’accompagner de politiques solides afin d’éviter les difficultés sociales et sociétales.

5.5.

Par ailleurs, le CESE a demandé dans plusieurs de ses avis que l’on investisse davantage dans les infrastructures et les services publics, projets générateurs de croissance et de bien-être pour les citoyens. Le Comité a également fait savoir qu’il est favorable à «une assiette commune consolidée pour l’impôt sur les sociétés (ACCIS) et sur les transactions financières, les carburants et les émissions de dioxyde de carbone qui, si elle est appliquée au niveau européen, permettrait à la fois de définir une assiette fiscale transnationale et de lutter contre les effets sur l’environnement au niveau mondial» (9). Cela contribuerait à réduire l’évasion fiscale et à assurer l’uniformité de la politique budgétaire. De même, le Comité a fait remarquer que «l’Europe semble disposer d’une position forte pour ce qui est des entreprises innovantes de haute technologie en croissance, mais lorsque ces entreprises ont besoin d’investissements solides en capital, elles font généralement faillite» (10).

5.6.

L’UE a signé des accords commerciaux globaux visant à intensifier les échanges de biens et de services tout en protégeant et renforçant les droits des travailleurs et en tenant compte des défis environnementaux. Toutefois, des courants protectionnistes ont vu le jour ces dernières années et les guerres commerciales couvent. L’UE doit continuer à promouvoir un commerce libre, équitable et durable dans un système multilatéral et des accords commerciaux qui respectent les droits sociaux, les droits des consommateurs et les droits environnementaux, tout en soutenant la croissance et l’évolution des entreprises. Le protectionnisme ne profite pas aux citoyens. L’Organisation mondiale du commerce aura un rôle important à jouer à cet égard, et il est essentiel que l’UE ait son mot à dire dans sa réforme (11). Fermer les frontières et entraver les échanges commerciaux ne peut en aucun cas être la voie à suivre.

5.7.

Dans un monde affecté par les changements climatiques, le CESE a formulé à plusieurs reprises des recommandations en vue d’améliorer la protection de la biodiversité et des ressources vitales indispensables à notre existence. Le Comité souligne que la protection de la biodiversité est tout aussi importante que la lutte contre le changement climatique. Il plaide en faveur d’une volonté politique et d’une cohérence législative accrues dans ce domaine, et recommande dès lors de mobiliser toutes les ressources nécessaires.

5.8.

Le Comité est d’avis qu’une politique de lutte contre le changement climatique doit reposer sur une transition équitable, ce qui requiert des mesures visant à atténuer les effets du changement climatique et à compenser également les dommages et les pertes. Le modèle de l’économie circulaire doit être privilégié le plus possible, et son cadre réglementaire amélioré. Il y a lieu de promouvoir des chaînes d’approvisionnement courtes, en particulier dans le secteur alimentaire, et de mener à terme une redéfinition des politiques de mobilité de manière à les rendre plus efficaces et plus durables. Dans le cadre de la conférence de Paris sur le changement climatique de 2015, l’UE s’est engagée à atteindre des objectifs visant à limiter le réchauffement de la planète. L’UE a déjà réalisé des progrès considérables et est en mesure de renforcer les efforts collectifs pour respecter les engagements pris lors de la COP 21 et répondre aux besoins actuels. Néanmoins, le CESE a pris note des mouvements des étudiants et des jeunes dans plusieurs États membres, qui demandent davantage de mesures de protection de l’environnement.

6.   Progrès social et éducation

6.1.

«En comparaison avec le reste du monde, les sociétés européennes sont prospères et offrent à leurs populations une certaine abondance. Elles disposent des niveaux de protection sociale les plus élevés au monde et figurent en très bonne place pour ce qui est du bien-être, du développement humain et de la qualité de la vie» (12). Des inégalités croissantes et d’énormes écarts de cohésion sociale existent toutefois dans l’ensemble de l’Union et nous devons nous efforcer de réduire les différences entre États membres. La convergence vers le haut des conditions de vie et de travail, fondée sur une croissance durable, permettra d’améliorer les conditions sociales et de réduire les inégalités et devrait être un objectif essentiel pour l’avenir de l’Europe.

6.2.

Un moteur important du progrès social doit être le socle européen des droits sociaux, une initiative résolument soutenue par le CESE, dans le cadre d’une stratégie complète et globale visant à réaliser le programme de développement durable à l’horizon 2030. Afin de garantir un avenir prospère aux citoyens européens, le CESE réaffirme son ferme engagement en faveur de tout effort susceptible de parvenir à «un marché du travail équitable et véritablement paneuropéen»et de réaliser une «Europe sociale triple A», et qui doit servir de boussole pour assurer une convergence rénovée (13). La mise en œuvre au niveau national doit être accélérée et s’accompagner d’une prise de conscience du fait qu’une croissance économique saine ne peut faire l’économie d’une dimension sociale stable. L’ensemble des organisations de la société civile a un rôle de premier plan à jouer, en collaboration avec l’Union et ses États membres. Le CESE estime qu’il est important pour le bien-être des citoyens de l’UE que cette dernière continue de suivre les progrès réalisés dans la mise en œuvre du socle européen des droits sociaux dans le cadre du processus du semestre européen, en associant pleinement les partenaires sociaux et les autres organisations de la société civile.

6.3.

Le CESE réaffirme en outre que «L’Union européenne gagnerait à tirer pleinement parti de l’expérience et des capacités des partenaires sociaux et des autres organisations de la société civile (OSC) opérant au niveau local, national et européen, en les associant, ainsi que les utilisateurs des services et en fonction de leurs différents rôles, aux missions de programmation, de mise en œuvre, de suivi et d’évaluation des financements de l’UE. Les partenaires sociaux et les autres organisations de la société civile sont des acteurs clés du projet démocratique européen» (14). L’Union devrait favoriser la négociation collective, tout en respectant l’autonomie des partenaires sociaux.

6.4.

La numérisation, l’automatisation, l’intelligence artificielle notamment requièrent une réaction rapide et durable. Outre les besoins énormes et urgents d’investissements dans l’éducation de qualité et la recherche et le développement du fait du retard de l’UE par rapport à d’autres puissances économiques sur le plan des dépenses exprimées en pourcentage de PIB (15), l’économie de l’UE a besoin d’une main-d’œuvre disposant des compétences qui lui permettront de relever les défis d’un environnement concurrentiel en mutation. Cela signifie qu’au-delà des efforts déployés par l’UE, les États membres, les partenaires sociaux et d’autres organisations pertinentes de la société civile, il existe une responsabilité et un intérêt partagés des employeurs et des travailleurs s’agissant de contribuer à la formation, à la requalification, au perfectionnement et à l’apprentissage tout au long de la vie pour les jeunes et les adultes, ce qui favorisera la prospérité des entreprises et la disponibilité d’une main-d’œuvre adéquatement qualifiée. Il convient d’accroître la numérisation de l’économie de l’UE dans un cadre assurant une transition équitable vers une évolution technologique, en veillant à ce que cette démarche contribue à améliorer les conditions de vie et de travail, et notamment à créer des emplois de qualité et des sociétés plus égalitaires.

6.5.

Il convient d’adopter, sur la base des principes du socle européen des droits sociaux, des mesures qui permettront de faire face aux défis à venir pour le marché du travail. Saisir les possibilités offertes par le progrès technologique devrait dès lors aller de pair avec des efforts visant à relever les défis posés par les mutations industrielles et la transformation du marché du travail. Faute de relever ces défis, soit nous serons confrontés à une très forte résistance au changement, soit une proportion importante de la population ne bénéficiera pas du développement des nouvelles technologies.

6.6.

Le CESE a déjà demandé que les inégalités croissantes, la pauvreté et l’exclusion sociale soient combattues à tous les niveaux et par l’ensemble des parties prenantes. À cet égard, il estime que des efforts supplémentaires visant à définir des principes, des normes, des politiques et des stratégies communs aux niveaux appropriés sont nécessaires afin de parvenir à une plus grande convergence des salaires et d’établir des salaires minimaux ou de les augmenter jusqu’à un montant adéquat, et ce dans le plein respect de l’autonomie des partenaires sociaux. En outre, il importe de veiller à ce que tous les citoyens soient couverts par un revenu minimum. Le Comité attire l’attention sur la nécessité d’augmenter les moyens budgétaires destinés à la cohésion sociale et à l’investissement social pour relever les défis de demain (16).

6.7.

Le CESE estime que tous les citoyens de l’UE devraient bénéficier d’une égalité des chances et de traitement sur le marché du travail. Tout en favorisant une mobilité équitable, il conviendrait de garantir également l’accès des citoyens à des emplois de qualité et à des conditions de vie décentes à l’endroit où ils vivent afin d’éviter la fuite des cerveaux et le dumping social.

6.8.

L’avenir de l’Union européenne dépend de programmes actifs favorisant l’éducation et l’intégration des jeunes dans la population active. Des programmes tels qu’Erasmus+ et son prédécesseur Erasmus ont eu un impact incroyable en faisant naître chez les citoyens un sentiment d’identité européenne, tout en dotant les jeunes de connaissances, d’aptitudes et de compétences. L’intention de la Commission de doubler son financement constitue une avancée incontestable mais le CESE a demandé, en octobre 2018 (17), que soient alloués encore plus de fonds. Ce type de programme doit être maintenu et étendu aux jeunes qui, sans cela, éprouveraient des difficultés à accéder à un enseignement de qualité et à une connectivité interculturelle en raison de conditions économiques défavorables.

6.9.

Comme il l’a déclaré dans un avis antérieur, le CESE croit que «la stratégie en faveur de la jeunesse devrait être davantage liée aux programmes européens existants, tels que Erasmus+, la garantie pour la jeunesse et le corps européen de solidarité»et qu’elle devrait également «encourager un engagement civique plus large, et notamment le vote, le volontariat, les ONG dirigées par des jeunes ainsi que la démocratie sur le lieu de travail et le dialogue social» (18). Il est primordial de faire connaître ces programmes tout en soulignant en permanence qu’ils constituent un avantage direct de l’appartenance à l’UE.

6.10.

Le CESE souligne l’importance de la subsidiarité et de la gouvernance régionale dans la mise en œuvre des politiques de cohésion. Compte tenu des écarts de bien-être et de développement considérables entre les différentes régions ainsi qu’au sein des différents États membres, il est absolument crucial que les politiques soient mises en œuvre par ceux qui comprennent le mieux les problèmes de fond et sont donc les mieux à même d’agir. Les institutions de l’UE doivent continuer à lutter contre toute forme de discrimination, le racisme, la xénophobie et l’antisémitisme.

6.11.

Le modèle social européen est unique au monde et demeure l’un des principaux avantages dont bénéficient les citoyens européens. L’UE et ses États membres doivent développer des politiques qui le préservent, le défendent et le promeuvent, tout en favorisant davantage le progrès économique et la cohésion sociale et en gardant à l’esprit que les droits fondamentaux doivent aller de pair avec les droits sociaux.

7.   Sécurité et défense

7.1.

L’Europe est un espace d’une liberté et d’une stabilité remarquables dans un monde en proie à la discorde et aux divisions. Quinze États membres de l’UE figurent parmi les 25 pays les plus paisibles du monde. Cependant, les attentats terroristes, les zones dépourvues de gouvernement et instables de l’autre côté de la Méditerranée et en Afrique subsaharienne, ainsi que la résurgence de puissances hostiles à l’Est, ont démontré que nous devons agir avec détermination pour préserver notre paix et notre sécurité.

7.2.

Cela étant dit, si les défis liés à la sécurité intérieure et extérieure ont en effet augmenté de manière significative, ils sont considérés différemment par les États membres, qui n’ont pas tous la même perception des menaces extérieures, ne consacrent pas la même part de leur budget à la sécurité et à la défense et ont des points de vue différents concernant le recours à la force militaire. Étant donné qu’un grand nombre des menaces auxquelles nous sommes confrontés ont des caractéristiques transnationales, le CESE estime que les États membres et l’Union doivent collaborer le plus étroitement possible et s’efforcer de formuler une réponse collective et coordonnée, démontrant ainsi aux yeux de nos alliés que nous sommes un pourvoyeur de sécurité efficace.

7.3.

Un effort de défense coordonné doterait non seulement nos États membres d’un pouvoir coercitif crédible, mais contribuerait également à créer des emplois dans les secteurs de haute technologie ainsi qu’à encourager l’innovation et le développement technologique. Le CESE demande instamment aux États membres et à la Commission européenne de soutenir une action commune dans ce domaine, tout en reconnaissant que des mesures ont déjà été prises (19).

7.4.

Selon les estimations, les cyberattaques coûteraient 400 milliards d’EUR par an à l’économie mondiale (20) et constituent une réelle menace pour la vie privée et la sécurité des citoyens. Le CESE estime que l’UE devrait s’efforcer de renforcer la lutte contre le cyberespionnage, le cyberterrorisme et toute autre forme de cybercriminalité ciblant tant les citoyens que les entreprises européennes.

8.   Communication avec les citoyens

8.1.

Les citoyens européens prennent souvent pour acquis les effets positifs de l’adhésion à l’Union ou les associent aux gouvernements nationaux, tandis qu’ils imputent nombre des difficultés qu’ils rencontrent à la bureaucratie européenne et à ses ingérences excessives. Cette situation est principalement due à une mauvaise communication ainsi qu’à une déconnexion des préoccupations du citoyen moyen. Par conséquent, l’UE et les États membres doivent redoubler d’efforts pour mieux communiquer sur les politiques, les objectifs et les objectifs européens.

8.2.

L’UE devrait prévoir plus de fonds pour la communication et exploiter tous les canaux disponibles, en ne s’appuyant plus uniquement sur les États membres, mais également sur les partenaires sociaux et les autres organismes représentant la société civile organisée. L’UE doit s’efforcer davantage de rassurer tant les dirigeants que les citoyens sur son rôle s’agissant d’assurer la paix, la stabilité, le développement économique et social, et ce en s’exprimant dans toutes les langues officielles de l’Union européenne.

8.3.

En 2012, le CESE a souligné que «la nécessité d'exécuter pleinement l'article 11 constitue un enjeu capital si l'on veut que l'UE renforce sa légitimité démocratique vis-à-vis de ses citoyens. Enfin, accroître la transparence, le sentiment d’appropriation et la participation des citoyens et de la société civile organisée, tant au niveau national qu’au niveau européen, sera la seule manière, pour l’Europe, d’être en mesure d’éviter l’extrémisme, de défendre ses valeurs démocratiques et de fonder une «communauté de destin» (21).

8.4.

Si l’UE souhaite se rapprocher de ses citoyens (et, si elle n’y parvient pas, c’est le projet européen dans son ensemble qui sera un échec), elle n’a d’autre choix que de les écouter, de comprendre ce qu’ils veulent réellement et d’agir en conséquence. Les citoyens veulent être protégés, ils réclament des règles équitables pour les travailleurs et les entreprises, des conditions de vie et de travail saines et une réponse claire aux défis extérieurs. Pour atteindre cet objectif, l’Europe doit rester un catalyseur du développement économique et social et de la stabilité démocratique et faire en sorte que tout le monde soit conscient de son engagement.

8.5.

L’information erronée et la désinformation sont de plus en plus utilisées par de nombreux acteurs, parmi lesquels des États, des groupes de pression, des médias et des particuliers. Ces techniques sont anciennes, mais le développement des médias sociaux et les possibilités qu’ils offrent ont permis à ce phénomène de toucher un large public. La meilleure façon de contrer les fausses informations est de présenter des faits et de contribuer au développement des facultés critiques des citoyens. Toutefois, la liberté d’opinion et d’expression doit être respectée à tout moment, de même qu’il faut veiller à ne pas relâcher l’effort de lutte contre les mensonges.

8.6.

Il y a lieu de promouvoir la mise en place de plateformes de communication et de coopération auxquelles tous les États membres participeraient. Ce qui a fait ses preuves dans un État membre peut aussi fonctionner dans un autre, de même que le fruit des recherches d’un État membre peut être utilisé ou valorisé par un autre.

Bruxelles, le 20 mars 2019.

Le président

du Comité économique et social européen

Luca JAHIER


(1)  JO C 110 du 22.3.2019, p. 1.

(2)  JO C 326 du 26.10.2012, p. 391.

(3)  Communiqué de presse du Parlement européen du 23.5.2018.

(4)  JO C 81 du 2.3.2018, p. 145.

(5)  L’UE par thème — Commerce.

(6)  Des institution budgétaires indépendantes.

(7)  JO C 227 du 28.6.2018, p. 1.

(8)  JO C 262 du 25.7.2018, p. 28.

(9)  JO C 81 du 2.3.2018, p. 131.

(10)  JO C 440 du 6.12.2018, p. 79.

(11)  JO C 159 du 10.5.2019, p. 15.

(12)  Document de réflexion sur la dimension sociale de l’Europe.

(13)  JO C 125 du 21.4.2017, p. 10.

(14)  JO C 62 du 15.2.2019, p. 165.

(15)  Données de l’OCDE, Dépenses intérieures brutes de R-D.

(16)  JO C 81 du 2.3.2018, p. 145.

(17)  JO C 62 du 15.2.2019, p. 194.

(18)  JO C 62 du 15.2.2019, p. 142.

(19)  JO C 129 du 11.4.2018, p. 58.

(20)  Réforme de la cybersécurité en Europe.

(21)  JO C 11 du 15.1.2013, p. 8.


ANNEXE

Les amendements suivants, bien qu’ayant obtenu plus d’un quart des votes, ont été rejetés au cours des débats.

Amendement 12

Paragraphe 5.5

Modifier comme suit:

5.5

Par ailleurs, le CESE a demandé dans plusieurs de ses avis que l’on investisse davantage dans les infrastructures et les services publics, des projets générateurs de croissance et de bien-être pour les citoyens. Le CESE a également fait savoir qu’il est favorable à l’application de mesures globales pour lutter contre l’érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices (EBITB) par les entreprises multinationales, notamment par l’introduction d’«une assiette commune consolidée pour l’impôt sur les sociétés (ACCIS), et pour lutter contre la fraude à la TVA, grâce à une coopération quotidienne plus étroite entre les États membres et sur les transactions financières, les carburants et les émissions de dioxyde de carbone qui, si elle est appliquée au niveau européen, permettrait à la fois de définir une assiette fiscale transnationale et de lutter contre les effets sur l’environnement au niveau mondial» (1). Cela contribuerait à réduire l’évasion fiscale et à assurer l’uniformité de la politique budgétaire. De même, le Comité a fait remarquer que «l’Europe semble disposer d’une position forte pour ce qui est des entreprises innovantes de haute technologie en croissance, mais lorsque ces entreprises ont besoin d’investissements solides en capital, elles font généralement faillite» (2).

Exposé des motifs

Pour éviter tout malentendu, il convient de se limiter à une déclaration générale. Ni l’imposition des multinationales en tant que composante des ressources propres de l’UE, ni l’établissement d’une assiette fiscale européenne commune pour les carburants et les émissions de dioxyde de carbone ou leur taxation n’ont jusqu’ici été abordés par le Comité. La taxe sur les transactions financières réduirait les pensions des travailleurs, et les travaux du Conseil à ce sujet, qui durent depuis de nombreuses années dans le cadre d’une coopération renforcée, sont totalement au point mort. Cet amendement formule des remarques similaires à celles figurant dans l’avis du Comité économique et social européen sur le «Document de réflexion sur l’avenir des finances de l’Union européenne»[COM(2017) 358 final] (3).

L'amendement est rejeté par 76 voix pour, 98 contre et 16 abstentions.

Amendement 11

Paragraphe 5.6

Ajouter du texte comme suit:

5.6

L’UE a signé des accords commerciaux globaux, tels que celui conclu avec le Japon, visant à intensifier les échanges de biens et de services tout en protégeant et renforçant les droits des travailleurs et en tenant compte des défis environnementaux. Toutefois, des courants protectionnistes ont vu le jour ces dernières années et les guerres commerciales couvent. L’UE doit continuer à promouvoir un commerce libre, équitable et durable dans un système multilatéral et des accords commerciaux qui respectent les droits sociaux, les droits des consommateurs et les droits environnementaux, tout en soutenant la croissance et l’évolution des entreprises. Le protectionnisme ne profite pas aux citoyens. L’Organisation mondiale du commerce aura un rôle important à jouer à cet égard, et il est essentiel que le CESE ait son mot à dire dans sa réforme (4). Fermer les frontières et entraver les échanges commerciaux ne peut en aucun cas être la voie à suivre.

Exposé des motifs

Il est proposé d’améliorer la lisibilité en donnant un exemple précis d’accord de libre-échange conclu par l’UE — en l’occurrence, l’accord de partenariat économique UE-Japon.

Comme on le sait, l’accord de partenariat économique UE-Japon est entré en vigueur le 1er février 2019 et il s’agit du plus important accord commercial conclu par les deux parties.

En effet, il concerne les 640 millions de citoyens de l’Union et du Japon, près d’un tiers du PIB mondial, et 37 % des échanges commerciaux de la planète.

Quelque 74 000 entreprises de l’Union européenne exportent vers le Japon, et 600 000 de ses emplois dépendent de ces exportations. Par ailleurs, cet accord est bon pour les consommateurs, puisqu’il ouvre la porte à davantage de choix à des prix moins élevés. En outre, il envoie ce signal clair que deux des plus grandes économies mondiales soutiennent résolument les échanges commerciaux libres, équitables et fondés sur des règles.

L'amendement est rejeté par 73 voix pour, 111 contre et 11 abstentions.


(1)   JO C 81 du 2.3.2018, p. 131 .

(2)  JO C 440 du 6.12.2018, p. 79.

(3)  JO C 81 du 2.3.2018, p. 131.

(4)  JO C 159 du 10.5.2019, p. 15.


5.7.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 228/68


Avis du Comité économique et social européen sur l’«Éducation à l’Union européenne»

(Avis exploratoire à la demande de la présidence roumaine)

(2019/C 228/09)

Rapporteure: Tatjana BABRAUSKIENĖ

Corapporteur: Pavel TRANTINA

Demande de la présidence roumaine du Conseil

Lettre du 20.9.2018

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Avis exploratoire

Décision du Bureau

16.10.2018

Compétence

Section spécialisée «Emploi, affaires sociales et citoyenneté»

Adoption en section spécialisée

6.3.2019

Adoption en session plénière

21.3.2019

Session plénière no

542

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

164/2/1

1.   Conclusions et recommandations

Le Comité économique et social européen (CESE):

1.1.

estime que la vitalité de l’Union européenne dépend dans une large mesure d’une identité européenne forte et d’un sentiment d’identification des citoyens à l’Union, parallèlement à la préservation des identités nationales, et que la réussite du projet européen repose sur ses valeurs, sa tolérance et son engagement en faveur de la diversité des cultures, des religions et du patrimoine. Il importe par conséquent de renforcer les connaissances des citoyens et leur compréhension de l’histoire et de la culture, des valeurs, droits, décisions et principes fondamentaux, ainsi que des processus décisionnels au niveau de l’Union européenne. Il est également essentiel de défendre la citoyenneté mondiale et le rôle que joue l’Union sur la scène internationale;

1.2.

souligne qu’une approche globale de l’éducation, de la formation et de l’apprentissage tout au long de la vie est déterminante pour renforcer l’identité européenne, un sentiment d’appartenance à une communauté, et la responsabilité des citoyens européens, en encourageant leur participation active au processus décisionnel de l’Union; insiste sur le fait qu’elle contribue à la paix, à la sécurité, à la liberté, à la démocratie, à l’égalité, à l’état de droit, à la solidarité et au respect mutuel, à une croissance économique durable, ainsi qu’à l’insertion et à la justice sociales, dans le respect et l’enrichissement de la diversité culturelle. Les objectifs de l’intégration européenne, ses avantages et ses inconvénients doivent être abordés avec audace et en toute confiance tant au niveau des États membres qu’à l’échelon de l’Union européenne;

1.3.

souligne que l’apprentissage a lieu partout et de façon continue, activement ou passivement. Par conséquent, l’éducation à l’Union européenne n’est pas seulement une tâche incombant à l’éducation formelle et ne concerne pas uniquement les jeunes. Il convient de soutenir à la fois l’éducation tout au long de la vie et l’éducation embrassant tous les aspects de celle-ci, et d’accorder une attention particulière aux générations plus âgées, en veillant à leur fournir des informations adaptées à leurs modes d’apprentissage.

Concernant les institutions et les politiques de l’Union, le CESE:

1.4.

insiste sur la nécessité de mettre en œuvre le premier principe du socle européen des droits sociaux pour que l’éducation, la formation et l’apprentissage tout au long de la vie inclusifs et de qualité deviennent un droit pour tous en Europe;

1.5.

suggère d’accorder une plus grande importance à l’éducation à l’Union et à l’identité européenne dans toute sa diversité, dans le cadre de l’enseignement d’aptitudes de base et de compétences clés, en particulier la connaissance de l’Union, et de définir ainsi un ensemble d’acquis d’apprentissage communs dans ce domaine (connaissances, aptitudes et attitudes minimales concernant l’Union européenne). À cet égard, il est nécessaire de disposer de meilleures données sur l’état d’avancement des travaux dans les États membres; le CESE invite la Commission européenne à mettre à jour son étude sur ce sujet;

1.6.

demande que l’apprentissage de l’Union soit promu dans les mesures stratégiques prises au niveau national et européen en vue de renforcer le sentiment d’identité et d’appartenance à l’Union européenne et de démontrer les avantages tangibles que comporte le fait d’être membre de l’Union européenne pour ses citoyens. Il est également primordial que les États membres mettent correctement en œuvre la recommandation du Conseil relative à la promotion de valeurs communes (1) ainsi que la déclaration de Paris datant de 2015 (2);

1.7.

recommande que le prochain programme Erasmus+ (2021-2027), doté d’un budget accru, renforce le sentiment d’appartenance à l’Union en assurant la mobilité à des fins d’apprentissage pour tous, en veillant notamment à la diversité de l’origine socio-économique des candidats, et plaide pour que tous les projets à venir mettent l’accent sur l’apprentissage de l’Union, la construction d’une identité européenne et le soutien à l’apprentissage intergénérationnel concernant l’Union européenne, ainsi que sur l’apprentissage des langues pour toutes les tranches d’âge et le dialogue civil pour les adultes;

1.8.

se félicite que les activités Jean Monnet du programme Erasmus+, destinées à promouvoir à l’échelle internationale l’excellence dans l’enseignement et la recherche dans le domaine des études sur l’Union européenne, fêtent leur 30e anniversaire, et appelle de ses vœux une augmentation du budget du programme et une extension de sa portée à tous les secteurs éducatifs, afin d’améliorer l’éducation à l’Union européenne et de renforcer la citoyenneté démocratique;

1.9.

préconise un meilleur partage des informations au sujet de l’Union européenne avec ses citoyens, soutenu par des stratégies de l’Union européenne et de ses États membres en matière d’information, de communication et d’éducation, et attire l’attention sur la nécessité de nommer un commissaire chargé de la communication;

1.10.

suggère que les médias de service public européens et nationaux, y compris la chaîne Euronews, devraient jouer un rôle stratégique s’agissant d’informer les citoyens sur les réalisations de l’Union européenne. Les bureaux d’information de l’Union établis dans les États membres, de même que les membres et autres représentants du Parlement européen, les membres du CESE et d’autres responsables politiques actifs dans le domaine européen, devraient aussi soutenir activement les processus de construction de l’identité européenne au niveau national;

1.11.

recommande de mettre en place une stratégie politique au niveau de l’Union, dans le respect des compétences nationales en matière d’éducation, en vue de proposer des recommandations sur la coopération entre les États membres [par exemple selon la méthode ouverte de coordination (MOC) ou par l’intermédiaire d’un groupe de haut niveau] afin d’encourager les initiatives dans les systèmes éducatifs et les actions aux niveaux national et local relatives à l’éducation à l’Union et à la construction de l’identité européenne, en étroite coopération avec les partenaires sociaux et toutes les parties prenantes concernées. Cette stratégie devrait être étayée par des études actualisées sur la situation de l’enseignement au sujet de l’Union européenne;

1.12.

recommande d’inclure l’éducation à l’Union européenne et la construction de l’identité européenne au sein de la stratégie Europe 2030 et du cadre stratégique «Éducation et formation 2030», ainsi que du processus du Semestre européen (parmi les recommandations par pays pertinentes), pour autant que des données précises et systématiques soient disponibles;

1.13.

demande la mise à disposition et la promotion d’une plateforme centralisée accessible contenant du matériel pédagogique, qui relierait divers initiatives et portails existants, dans différentes langues de l’Union, à destination des établissements d’enseignement et des apprenants individuels, portant sur l’Union et la construction de l’identité européenne, et axée spécifiquement sur les valeurs fondamentales de l’Union européenne, la démocratie, la participation au processus décisionnel démocratique, la tolérance et une compréhension commune.

Concernant les initiatives prises au niveau des États membres, le CESE:

1.14.

recommande la mise en place de stratégies nationales visant à inclure l’enseignement des valeurs, de l’histoire, des réalisations et des évolutions actuelles de l’Union dans les programmes scolaires de tous les secteurs de l’éducation, en reconnaissant le rôle important de l’apprentissage informel et non formel à cet égard;

1.15.

propose que l’apprentissage de l’Union européenne soit un enseignement transversal de l’éducation scolaire faisant partie intégrante de toutes les matières, et que les cours d’éducation à la citoyenneté, d’histoire, de géographie et d’économie accordent une attention particulière à la citoyenneté européenne et à ses avantages;

1.16.

demande que l’éducation à l’Union européenne soit inscrite au programme de la formation professionnelle initiale et continue de tous les acteurs éducatifs et invite les États membres à soutenir le perfectionnement professionnel continu de haut niveau (PPC) des enseignants à ce sujet. Cette formation devrait aborder les compétences en matière de culture démocratique définies par le Conseil de l’Europe (3);

1.17.

propose de développer des initiatives visant à promouvoir et à renforcer la mobilité internationale et l’apprentissage des langues étrangères pour tous les acteurs éducatifs, et de créer un prix et/ou un label européen de l’enseignement de l’Union et de la construction d’une identité européenne, qui serait décerné aussi bien à des écoles qu’à des individus;

1.18.

recommande d’encourager et de soutenir efficacement les parties prenantes, notamment les syndicats, les organisations d’employeurs et les entreprises, ainsi que d’autres organisations de la société civile actives dans les domaines de l’éducation, de la formation, de la jeunesse et des adultes, telles que les scouts et d’autres organisations de jeunesse et organisations étudiantes, les associations et les syndicats d’enseignants et les organisations de parents, afin d’appuyer leurs activités consacrées à l’apprentissage et à l’enseignement de l’Union européenne;

1.19.

invite les États membres à favoriser les partenariats entre les prestataires d’éducation formelle et non formelle, à savoir les écoles et les organisations de jeunes et/ou les universités et les organisations communautaires, en vue d’assurer l’apprentissage au sujet de l’Union et l’éducation à la citoyenneté de manière générale. À cet égard, le CESE recommande de veiller à ce que les organismes de jeunes soient associés au processus de définition des programmes d’études et au choix des moyens de fournir une éducation à la citoyenneté;

1.20.

prend acte de l’ambition de la déclaration Schuman, prononcée le 9 mai 1950 par Robert Schuman, selon laquelle «L’Europe ne se fera pas d’un coup, ni dans une construction d’ensemble: elle se fera par des réalisations concrètes créant d’abord une solidarité […]» (4). Le CESE suggère de célébrer la Journée de l’Europe (le 9 mai), voire une journée de l’éducation européenne distincte, dans les États membres et d’en faire un point de départ pour la planification d’activités éducatives relatives à l’Union européenne au sein des écoles et des communautés.

2.   Contexte

2.1.

La responsabilité des politiques culturelles et d’éducation incombe en premier lieu aux États membres. Au fil des ans, toutefois, l’Union européenne a endossé un rôle complémentaire important en la matière, et il est dans l’intérêt commun de tous les États membres d’exploiter pleinement le potentiel de l’éducation et de la culture comme moteurs de la création d’emplois, de la croissance économique et de la justice sociale, et comme un moyen de vivre l’identité européenne dans toute sa diversité.

2.2.

Le CESE considère essentiel de rapprocher le projet européen des citoyens, en améliorant leurs connaissances de l’histoire, des réalisations et de l’importance de l’Union européenne à la lumière de l’histoire de notre continent et des effets positifs que l’Union européenne a sur la vie quotidienne des européens. Le Comité insiste sur l’importance de comprendre et de promouvoir les valeurs fondamentales de l’Union européenne, car cette démarche est essentielle pour la compréhension mutuelle, la coexistence pacifique, la tolérance et la solidarité, ainsi que pour la compréhension des principes fondamentaux de l’Union européenne.

2.3.

Soixante années après la signature du traité de Rome, les citoyens de l’Union n’ont toujours pas pleinement établi leur identité européenne. À l’heure actuelle, 93 % des citoyens de l’Union se sentent attachés à leur pays, voire très attachés pour 57 % d’entre eux, et 89 % à leur «ville/village». Toutefois, seuls 56 % expriment un attachement à l’Union européenne, et seulement 14 % se déclarent «très attachés»à celle-ci (5). Ces chiffres sont importants dans le contexte des prochaines élections au Parlement européen et du débat sur l’avenir de l’Europe.

2.4.

Lors des dernières élections européennes, en 2014, c’est à nouveau parmi les électeurs de plus de 55 ans que le taux de participation a été le plus élevé (51 %), tandis que seuls 28 % des électeurs de la tranche d’âge des 18-24 ans ont pris part au suffrage. Le taux de participation est étroitement lié au statut socio-économique (6). Le manque d’éducation critique aux médias et la propagation de la désinformation renforcent la méfiance à l’égard des institutions démocratiques et de l’Union européenne. Par conséquent, une meilleure connaissance de l’Union européenne et de la citoyenneté démocratique pourrait être utile à cet égard. Il ne s’agit pas seulement d’un défi pour l’éducation formelle initiale.

2.5.

Le CESE rappelle que des études (7) et des recherches (8) ont mis en évidence un écart considérable entre la politique et la pratique en matière d’éducation à la citoyenneté et que près de la moitié des États membres n’ont toujours adopté ni règles ni recommandations relatives à l’éducation à la citoyenneté au cours de la formation initiale des enseignants. Si la citoyenneté figure au programme du perfectionnement professionnel continu des enseignants, les chefs d’établissement scolaire ne bénéficient quant à eux d’aucun perfectionnement professionnel continu en la matière.

2.6.

Les disparités présentes dans l’enseignement de l’éducation à la citoyenneté dans les différents secteurs éducatifs constituent une autre source de préoccupation. Par exemple, il y a moins d’éducation à la citoyenneté dans l’enseignement et la formation professionnels initiaux prodigués à l’école, comparé à l’enseignement général. Cela prend notamment la forme d’un nombre moins important de programmes d’éducation à la citoyenneté, de documents d’orientation à l’intention des enseignants, et de recommandations concernant la participation des élèves aux conseils scolaires ou la représentation des parents dans les conseils de direction des établissements scolaires.

2.7.

L’apprentissage de l’Union devrait également être axé sur l’enseignement de la démocratie (notamment la participation, un système politique démocratique et une société démocratique) et de la tolérance (en particulier les relations interpersonnelles, la tolérance envers des groupes sociaux et culturels différents et une société inclusive).

2.8.

L’éducation à la citoyenneté européenne devrait d’une manière générale être un processus d’apprentissage dynamique (9), adapté au contexte et à chaque apprenant; il doit être mû par des valeurs et doter les apprenants, principalement des jeunes, des connaissances, de la compréhension, des compétences et des aptitudes dont ils ont besoin non seulement pour exercer leurs droits, mais aussi pour contribuer à leur communauté et à la société, et agir avec empathie, attention et le souci des futures générations. La compréhension contemporaine de l’éducation civique s’est lentement mais sûrement éloignée de la vision classique de la communication exclusive de «savoirs et compréhension d’institutions formelles et de processus de la vie civique (comme le fait de voter aux élections)»pour évoluer vers une compréhension plus vaste qui comprend la participation et l’engagement tant dans la société civique que civile, et l’éventail plus large de moyens pour les citoyens d’interagir au sein de leurs communautés (y compris les écoles) et de la société, et pour les façonner.

2.9.

Si la citoyenneté de l’Union européenne doit dépasser son étroite conception légale actuelle, pour s’inspirer de l’idée de ce que signifie être européen à travers l’Europe et la développer, alors notre approche de l’éducation à la citoyenneté requiert une dimension européenne précise. Cela peut contribuer à échafauder une conception plus riche et plus politique de la citoyenneté de l’Union européenne, qui sera cruciale si celle-ci souhaite augmenter l’engagement des citoyens et renforcer le soutien à l’Union européenne, qui sera dès lors perçue comme une Union sociale et politique et pas uniquement économique.

3.   Observations générales

3.1.

Il est de la plus haute importance que les citoyens soient conscients de leur rôle et de leurs possibilités de participation aux processus démocratiques de prise de décision au niveau local, national et européen, et qu’ils soient en mesure de comprendre la conduite des institutions. Une approche globale de l’enseignement, de la formation et de l’apprentissage tout au long de la vie, qui porterait une attention particulière à la citoyenneté en démocratie ainsi qu’aux valeurs européennes communes et à l’identité européenne, contribuerait considérablement à la paix, à la sécurité, à la liberté, à la démocratie, à l’égalité, à l’état de droit, à la solidarité, au respect mutuel, à une croissance durable, ainsi qu’à l’insertion et à la justice sociales, dans le respect et l’enrichissement de la diversité culturelle et d’un sentiment d’appartenance à l’Union européenne.

3.2.

Dans son avis consacré à l’espace européen de l’éducation (10) (2018), le CESE se félicite que l’initiative promeuve des systèmes éducatifs plus ouverts à l’avenir et insiste sur le fait que l’apprentissage de l’Union, des valeurs démocratiques, de la tolérance et de la citoyenneté devrait être considéré comme un droit pour tous, également dans le cadre de la mise en œuvre du socle européen des droits sociaux. Il devrait être accessible à tous, et notamment aux groupes défavorisés (11), afin que tous les citoyens puissent comprendre leur rôle participatif dans la démocratie. Il est primordial que les États membres appliquent la recommandation du Conseil relative à la promotion de valeurs communes (12).

3.3.

La mise en œuvre intégrale de la nouvelle recommandation du Conseil relative aux compétences clés pour l’éducation et la formation tout au long de la vie (2018) (13) fait encore défaut dans le programme politique de nombreux États membres et il est essentiel d’améliorer l’apprentissage de l’Union, des avantages concrets qu’elle apporte, des valeurs démocratiques, de la tolérance et de la citoyenneté active dans le cadre de l’apprentissage des compétences en lecture, en écriture et en multilinguisme, des compétences personnelles et sociales, des compétences citoyennes ainsi que de la sensibilité culturelle et de l’expression personnelle.

3.4.

Dans son avis (14) sur le futur Programme Erasmus+ 2021-27 , le CESE reconnaît que le programme Erasmus+ précédent (2014-2021) a largement contribué à soutenir l’éducation et la formation au niveau européen, national, régional et local, à développer un sentiment d’appartenance à l’Union européenne (l’«identité européenne» dans toute sa diversité) et à encourager la compréhension mutuelle, la citoyenneté démocratique et l’intégration européenne. Le prochain programme Erasmus+ est primordial pour renforcer les processus suivants: soutenir la participation de tous et les valeurs européennes communes, favoriser l’intégration sociale, améliorer la compréhension interculturelle et prévenir la radicalisation grâce à la participation des citoyens de tous âges aux processus démocratiques, soutenue par la mobilité à des fins d’apprentissage et la coopération entre les citoyens, les établissements d’enseignement et de formation, les organisations, les parties prenantes et les États membres de l’Union européenne. Toutes ces mesures sont d’une importance capitale pour l’avenir de l’Union.

3.5.

Le CESE salue les efforts déployés dans le cadre des activités Jean Monnet du programme Erasmus+ pour promouvoir, à l’échelle internationale, l’excellence dans l’enseignement et la recherche dans le domaine des études sur l’Union européenne. Le Comité regrette que le budget proposé pour ce programme soit encore insuffisant. Alors que le programme s’est jusqu’à présent focalisé sur les seules universités, le CESE estime nécessaire de revoir à la hausse le budget de celui-ci et d’en élargir la portée à tous les secteurs éducatifs et toutes les catégories d’âge, afin d’améliorer l’éducation à l’Union européenne et de renforcer la citoyenneté démocratique.

3.6.

Le CESE insiste sur la nécessité de mettre en œuvre la déclaration de Paris, signée par les dirigeants de l’Union européenne en mars 2015 (15), et rappelle que l’esprit critique et l’éducation aux médias, les compétences sociales et civiques, la compréhension interculturelle et les efforts visant à la lutte contre les discriminations à travers toutes les formes d’apprentissage devraient devenir une réalité.

4.   Observations particulières au sujet de l’éducation formelle

4.1.

Le CESE réaffirme l’importance de consolider les possibilités offertes à tous les citoyens en matière d’apprentissage tout au long de la vie par l’intermédiaire de leurs écoles et de leurs communautés, afin qu’ils puissent devenir des citoyens engagés démocratiquement. Les politiques d’éducation inclusive peuvent devenir une réalité si les médias nationaux et européens et les tendances politiques au niveau national y sont favorables et donnent l’exemple en matière de démocratie et de tolérance. Elles devraient inclure le droit de participation, soutenir les partenariats sociaux et le dialogue de la société civile, promouvoir la liberté d’expression, lutter contre les fausses informations et favoriser l’insertion tout en respectant la diversité culturelle tant à l’intérieur qu’au-delà des frontières, défendre l’égalité pour tous, et soutenir les migrants, les réfugiés et les minorités pour qu’ils soient des citoyens actifs de l’Union européenne et des États membres tout en préservant leur identité culturelle.

4.2.

L’apprentissage de l’Union européenne, des valeurs démocratiques, de la tolérance et de la citoyenneté, mais aussi du rôle de l’Union dans le monde, devrait devenir un thème transversal dans les écoles, qui serait abordé dans toutes les matières et tous les projets et non seulement dans le cadre des cours d’histoire ou de citoyenneté. Il convient de présenter aux apprenants des exemples de participation active à des activités sociales ou de bénévolat, en invitant des représentants de la société civile, et des syndicats et des entreprises à présenter leurs activités. Il conviendrait d’encourager les élèves à prendre part à des processus décisionnels démocratiques aux niveaux local, national et européen. En outre, les chefs d’établissements scolaires et les enseignants devraient mettre en place une culture scolaire démocratique et collaborative en associant les conseils scolaires, les parents et les élèves à leur prise de décision, et garantir une gouvernance collégiale.

4.3.

Le CESE souligne la nécessité de disposer de règlements et de recommandations concernant le développement des compétences des enseignants en matière d’éducation à la citoyenneté au cours de leur formation initiale dans tous les États membres, et notamment de veiller à cet égard au perfectionnement professionnel continu (PPC) du personnel enseignant et des chefs d’établissements scolaires (16).

4.4.

Il demande la mise à disposition et la promotion d’une plateforme centralisée accessible contenant du matériel pédagogique , qui relierait divers initiatives et portails existants (17), dans différentes langues de l’Union, à destination des établissements d’enseignement et des apprenants individuels, portant sur l’Union et la construction de l’identité européenne, et axée spécifiquement sur les valeurs fondamentales de l’Union européenne, la démocratie, la participation au processus décisionnel démocratique, la tolérance et une compréhension commune. Le matériel d’enseignement et de formation (18) résultant de divers projets financés par l’Union européenne devrait être accessible à tous, bénéficier d’une meilleure promotion et être davantage utilisé par les écoles ainsi que dans le cadre d’autres activités en faveur de l’éducation à l’Union européenne.

5.   Observations particulières au sujet de l’éducation non formelle

5.1.

Le CESE conçoit l’éducation à la citoyenneté comme s’inscrivant dans un apprentissage tout au long de la vie embrassant tous les aspects de celle-ci et se déroulant dans un cadre pratique. Une approche globale de l’éducation à la citoyenneté requiert la participation des prestataires de l’enseignement formel comme non formel, qui se complètent mutuellement sur le plan du contenu et de l’objet principal de leurs programmes éducatifs, de l’approche pédagogique et des possibilités de nature à favoriser l’expérience de la participation.

5.2.

L’éducation à la citoyenneté européenne constitue l’élément central d’un vaste éventail de programmes d’apprentissage mis en œuvre dans des environnements d’apprentissage non formel. C’est par exemple le cas dans les organisations de jeunesse, où le travail éducatif s’articule autour d’un processus participatif qui encourage la citoyenneté active et élargit l’horizon des jeunes. Les organisations de jeunesse jouent un rôle fondamental en tant que prestataires d’éducation à la citoyenneté, en mettant à la disposition de leurs membres et de ceux avec qui ils travaillent un espace de socialisation, d’interaction et d’action politique et sociale.

5.3.

Les organisations de jeunesse organisent un large éventail de programmes, de projets et d’activités liés à l’éducation à la citoyenneté et incluant souvent une dimension européenne. Ils sont sélectionnés sur la base du mandat et du groupe cible de l’organisation concernée et peuvent prendre notamment la forme d’un volontariat et d’échanges et/ou d’événements internationaux, de réunions et/ou d’activités régulières de groupe au niveau local, de programmes d’échange en milieu scolaire avec familles d’accueil, de simulations de délibérations des institutions de l’Union européenne ou d’élections fictives.

5.4.

Compte tenu de la nature complémentaire de l’éducation formelle et non formelle, il est crucial d’encourager les partenariats entre les prestataires de ces deux types d’enseignement, ce qui permettra de développer une approche plus concrète et d’acquérir une expérience de l’exercice de la démocratie. Les organisations d’étudiants et de jeunes devraient être au centre de la prise de décision et se voir octroyer les moyens de soutenir directement les mécanismes de retour d’information et de suivi. À cet égard, le CESE recommande d’inclure les jeunes dans les organismes chargés de définir les programmes et de déterminer les modalités de l’éducation à la citoyenneté.

6.   Observations particulières au sujet de l’apprentissage informel

6.1.

Le CESE est conscient que l’apprentissage informel, par l’intermédiaire des médias, des discussions entre pairs, etc., permet d’obtenir de nombreuses informations concernant l’Union européenne. Il conviendrait de consentir des efforts coordonnés et d’adopter des mesures concrètes visant à fournir à tous les citoyens quel que soit leur âge une «éducation à l’Union européenne»qui soit complète, de manière à ce qu’ils puissent acquérir un niveau minimal de connaissances nécessaires sur l’Union. Cette éducation devrait, entre autres, sensibiliser à l’interdépendance sociale et économique des États membres de l’Union européenne et, partant, à la nécessité de bâtir une société européenne résiliente, capable d’améliorer la compétitivité économique commune.

6.2.

Le CESE appelle à un meilleur échange d’informations sur l’Union européenne avec les citoyens européens, soutenu par les stratégies de l’Union européenne et des États membres en matière d’information, de communication et d’éducation (ICE), et rappelle combien il importe que la Commission européenne promeuve ce programme, notamment en envisageant la possibilité de nommer à nouveau un commissaire chargé de la communication.

6.3.

Les médias de service public européens et nationaux pro-européens, y compris la chaîne Euronews, devraient jouer un rôle stratégique en fournissant des informations correctes sur l’Union européenne. Les bureaux d’information de l’Union établis dans les États membres devraient jouer un rôle actif dans le renforcement de l’identité européenne, avec le soutien de membres et d’autres représentants du Parlement européen, et la participation active de membres du CESE et d’autres responsables politiques actifs dans le domaine européen.

6.4.

Dans le droit fil du succès rencontré par le programme Erasmus+, le CESE réclame un sérieux effort de communication pour promouvoir le rôle de l’éducation et de l’information afin de poursuivre les efforts de l’Union en matière de consolidation de la paix, de faciliter l’apprentissage entre organisations non gouvernementales tant à l’intérieur de l’Union européenne qu’au-delà de ses frontières, et d’estampiller les projets européens de paix d’une «Colombe blanche», de manière à en accroître la visibilité en Europe et dans le reste du monde.

6.5.

Les étudiants Erasmus+ actuels devraient être encouragés à tirer profit de leur expérience à l’étranger pour jouer le rôle d’ambassadeurs de l’Union européenne parmi leurs pairs et fournir des informations aux jeunes concernant l’Europe, l’apprentissage interculturel et la manière d’appréhender une culture différente.

6.6.

Le CESE attire l’attention sur ses propres projets, tels que «Votre Europe, votre avis!» (19), la manifestation annuelle participative du CESE destinée à la jeunesse. Chaque année, grâce à cette manifestation, des élèves âgés de 16 à 18 ans issus de tous les États membres et pays candidats se réunissent à Bruxelles pendant deux jours, en apprennent davantage sur l’Union européenne et ensemble formulent des idées et élaborent des résolutions qui sont ensuite transmises aux institutions de l’Union européenne.

Bruxelles, le 21 mars 2019.

Le président

du Comité économique et social européen

Luca JAHIER


(1)  Recommandation du Conseil (2018/C 195/01) (JO C 195 du 7.6.2018, p. 1).

(2)  Déclaration de Paris, 17 mars 2015.

(3)  CDE (2016) «Compétences pour une culture de la démocratie».

(4)  Déclaration Schuman.

(5)  Commission européenne, Eurobaromètre Standard 89, Printemps 2018 — Rapport.

(6)  Sur la base d’entretiens individuels réalisés auprès de 27 331 personnes âgées de 18 ans et plus, dans les 28 États membres de l’Union européenne.

(7)  Rapport du Parlement européen intitulé «Apprendre l’Union européenne à l’école»[2015/2138(INI)].

(8)  Eurydice, L’éducation à la citoyenneté à l’école en Europe — 2017.

(9)  Forum européen de la jeunesse, Inspiring! La contribution des organisations de jeunesse à l’éducation à la citoyenneté, 2016

(10)  JO C 62 du 15.2.2019, p. 136.

(11)  Définition des «groupes défavorisés»fournie par l’EIGE.

(12)  Recommandation du Conseil (2018/C 195/01).

(13)  Recommandation du Conseil (2018/C 189/01) (JO C 189 du 4.6.2018, p. 1).

(14)  JO C 62 du 15.2.2019, p. 194.

(15)  Déclaration de Paris, 17 mars 2015.

(16)  Déclaration conjointe sur l’éducation à la citoyenneté et aux valeurs communes de l’UE.

(17)  Comme eTwinning, Open Education Europe, etc.

(18)  Par exemple: https://euhrou.cz/

(19)  https://www.eesc.europa.eu/fr/our-work/civil-society-citizens-participation/your-europe-your-say


III Actes préparatoires

COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN

Comité économique et social européen

5.7.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 228/74


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Programme de travail annuel de l’Union en matière de normalisation européenne pour 2019»

[COM(2018) 686 final]

(2019/C 228/10)

Rapporteure: Mme Elżbieta SZADZIŃSKA

Consultation

Commission européenne, 14.12.2018

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Marché unique, production et consommation»

Adoption en section spécialisée

7.3.2019

Adoption en session plénière

20.3.2019

Session plénière no

542

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

122/0/1

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen accueille favorablement le programme de travail annuel de l’Union en matière de normalisation européenne pour 2019, qui constitue une amélioration du train de mesures sur la normalisation publié en 2011. Bien que les travaux engagés dans le cadre de cette initiative s’achèveront en 2019, c’est le programme annuel qui propose les domaines sur lesquels devra se concentrer la Commission en place au cours de la dernière année d’exécution.

1.2.

Par la voie d’un avis, le Comité présente chaque année ses observations et ses recommandations relatives aux plans de travail annuels de la Commission, sachant qu’il apprécie l’importance des normes pour renforcer la compétitivité sur le marché unique et pour développer des produits et services novateurs, ainsi que pour en accroître la qualité et la sécurité au profit des consommateurs, des entreprises et de l’environnement (1). Le présent avis est lié à celui relatif aux «normes harmonisées» (2).

1.3.

Le Comité observe des progrès s’agissant d’assurer l’inclusivité et la transparence du système européen de normalisation en faisant activement participer audit système les organisations visées à l’annexe III au règlement (UE) no 1025/2012. La participation des représentants de la société civile au système de normalisation ne saurait se cantonner à l’échelon européen et national. Il convient également de soutenir, d’élargir et de promouvoir leur participation à la normalisation internationale.

1.3.1.

Le Comité apprécie les mesures de la Commission visant à soutenir la participation des parties intéressées aux travaux de normalisation, notamment grâce au programme «Horizon 2020». Le Comité recommande toutefois de renforcer le mécanisme existant et de mieux informer des possibilités ainsi offertes. Ceci permettra aux petites et moyennes entreprises de participer non seulement à l’élaboration des normes mais aussi à leur application.

1.3.2.

La cohérence entre les normes européennes et les normes internationales contribuera à renforcer la position concurrentielle de l’industrie de l’Union européenne dans la chaîne de valeur mondiale. C’est pourquoi le Comité soutient le dialogue de la Commission avec les organismes internationaux de normalisation, ainsi qu’avec l’Organisation mondiale du commerce et d’autres forums internationaux. Dans ce cadre, le Comité soutient tout effort et toute initiative de la Commission qui permet d’accélérer le processus de normalisation et d’en accroître l’efficacité, afin de protéger et de promouvoir à l’échelle internationale de meilleures normes européennes (3).

1.4.

Le système européen de normalisation s’appuie sur un partenariat public-privé. Le programme de travail annuel de la Commission définit les orientations clés de son développement futur. Le Comité fait part de son espoir que ce partenariat soit le plus inclusif possible.

1.5.

Le programme de travail pour la présente année a bénéficié de la contribution issue du dialogue interinstitutionnel; de l’avis du Comité, la poursuite de ce dialogue à l’avenir contribuera à renforcer le système européen de normalisation. Dans ses avis antérieurs relatifs à la normalisation, le Comité avait déjà fait savoir qu’il est disposé à créer un forum ad hoc, qui permettrait la participation d’un large éventail de parties intéressées (4).

1.6.

Le programme recense des domaines pertinents du point de vue de la normalisation, à savoir: l’énergie, l’économie circulaire, la défense, la sécurité, le marché intérieur et le marché unique numérique, ainsi que la coopération internationale. Le Comité convient de la pertinence du choix de ces domaines.

1.7.

Le Comité attend avec intérêt les résultats de l’étude sur les incidences économiques et sociétales de la normalisation. Il est d’avis que cette étude doit également prendre en considération les effets indirects de la normalisation, tels que ceux sur l’emploi (5). En outre, aux fins de l’élaboration de la stratégie et des programmes en matière de normalisation, il importe de prévoir une évaluation ex post.

1.8.

Le CESE demande derechef que soit effectué un suivi approfondi des efforts menés par les acteurs principaux de la normalisation et destinés à renforcer le plus possible la dimension d’inclusivité du SEN. Le CESE pourrait créer, en priorité, un forum ad hoc sur l’inclusivité du SEN. Cet organisme serait chargé d’organiser chaque année une audition publique qui évaluerait les progrès accomplis dans ce domaine (6).

2.   Propositions de la Commission européenne

2.1.

Conformément au règlement (UE) no 1025/2012, la Commission a présenté, dans sa communication, le programme de travail annuel de l’Union en matière de normalisation européenne pour 2019.

2.2.

Priorités stratégiques de la normalisation européenne à l’appui de la législation et des politiques de l’Union:

actions à l’appui de la stratégie relative au marché unique numérique;

actions à l’appui de l’union de l’énergie et du climat;

mesures à l’appui du plan d’action en faveur de l’économie circulaire;

actions à l’appui d’un marché intérieur plus approfondi et plus équitable, doté d’une base industrielle renforcée;

mesures à l’appui du plan d’action européen de la défense;

actions à l’appui de la stratégie spatiale pour l’Europe;

actions à l’appui du programme européen en matière de sécurité.

2.3.

De surcroît, la Commission:

poursuivra sa coopération avec les organismes internationaux de normalisation;

développera le partenariat public-privé, en incluant un large éventail d’acteurs;

étudiera l’incidence de la normalisation sur l’économie et la société.

2.4.

Conformément à l’article 24, paragraphe 3, du règlement (UE) no 1025/2012 prévoyant la présentation d’un rapport sur la mise en œuvre dudit règlement, la Commission lancera une évaluation du système européen de normalisation afin d’en évaluer les performances.

2.5.

Il est prévu d’achever en 2019 les travaux de l’initiative commune sur la normalisation (ICN). La Commission analysera les réalisations de l’ICN qui s’inscrivent dans trois catégories:

sensibilisation et formation pour une meilleure compréhension du système européen de normalisation;

coordination, coopération, transparence et inclusivité;

compétitivité et dimension internationale.

3.   Observations générales

3.1.

Le programme de travail annuel pour 2019 précise et complète les priorités qui ont déjà été mises en œuvre. Le but d’une telle démarche est d’adapter le système de normalisation européenne aux évolutions de la situation sur la scène internationale et aux défis qui se présentent sur le marché mondial.

3.2.

Le Comité souscrit à l’avis de la Commission selon lequel la normalisation soutiendra la stratégie relative au marché unique numérique en se concentrant sur l’internet des objets, les mégadonnées, la chaîne de blocs, les systèmes de transport intelligents et les véhicules autonomes, les villes intelligentes, l’accessibilité, l’administration en ligne, la santé en ligne et l’intelligence artificielle. En outre, conformément aux règles relatives à la protection des données personnelles [règlement général sur la protection des données (RGPD)] (7), la nouvelle normalisation doit être compatible et interopérable.

3.2.1.

Le Comité espère que conformément audit RGPD, tous les participants au marché unique numérique bénéficieront d’un degré élevé de protection et de sécurité de leurs données personnelles.

3.3.

Le Comité est d’avis qu’il convient de mettre à jour les normes de sécurité et les règles juridiques existantes en la matière, au vu notamment des risques nouveaux qu’elles recèlent. Il y a lieu de penser que les nouvelles normes limiteront l’incidence négative des robots et de l’intelligence artificielle sur la vie humaine (8).

3.4.

Les exigences en matière de cybersécurité doivent garantir que les nouveaux équipements liés à l’intelligence artificielle ne recèlent pas de dangers pour leurs utilisateurs, tels que ceux de cyberattaques à grande échelle, de pistage des consommateurs et de piratage. En vue de réaliser cet objectif, il doit incomber un rôle essentiel à l’Agence européenne chargée de la sécurité des réseaux et de l’information (ENISA) qui dispose d’un mandat permanent, en mettant tout particulièrement l’accent sur la normalisation en matière de cybersécurité (9).

3.5.

Le Comité approuve la proposition de réduire les émissions de CO2 qui proviennent du secteur des transports. Une utilisation plus efficace des carburants et de l’énergie par les voitures doit entre autres contribuer à la réalisation de cette visée et aura également une incidence sur la réduction des coûts pour les utilisateurs. Dans le même temps, l’augmentation du nombre de voitures autonomes requerra une réglementation harmonisée, sachant que ce mode de locomotion comporte un risque élevé (cyberattaques, protection des données, responsabilité en cas d’accident) (10).

3.5.1.

Dans un avis antérieur, le Comité a approuvé le troisième train de mesures relatives à la mobilité, dont il estimait qu’il constituait une avancée sur la voie d’une mobilité durable pour l’Europe (11).

3.6.

De l’avis du Comité, tous les éléments que constituent la proposition relative à l’étiquetage des pneumatiques (12), l’écologisation du transport maritime grâce à l’utilisation de carburants de substitution, ou encore l’extension des exigences d’écoconception (13) à de nouvelles catégories de produits, peuvent contribuer à lutter contre le changement climatique.

3.7.

Le Comité soutient l’élaboration de normes dans le domaine de l’économie circulaire, qui contribueront au caractère durable de la production et, partant, à la préservation des ressources naturelles (14).

3.8.

Les normes techniques facilitent la mise en œuvre de solutions novatrices dans l’industrie.

3.9.

Le Comité souscrit à l’avis de la Commission selon lequel l’élaboration d’un plan d’action pour la normalisation dans le domaine de la défense par l’Agence européenne de défense et par les organisations européennes de normalisation devrait contribuer à garantir un marché unique ouvert et concurrentiel dans l’Union européenne pour les équipements de défense (15). Des travaux similaires seront lancés dans le domaine de l’espace (16).

3.10.

Il s’impose d’assurer la cohérence entre les normes européennes et les normes internationales, ainsi que de favoriser l’application des normes européennes en dehors des frontières de l’Union. À cette fin, la Commission doit renforcer le dialogue stratégique avec les organismes internationaux de normalisation, tout comme des négociations bilatérales avec les pays tiers.

3.11.

Le Comité appuie le dessein de la Commission, qu’il tient pour extrêmement judicieux, de démontrer l’incidence favorable de l’inclusivité sur la qualité de la normalisation. La participation des organisations visées à l’annexe III aux travaux de normalisation crée une valeur ajoutée en renforçant la compétitivité et profite à l’ensemble de la société.

3.12.

Le CESE demande derechef que soit effectué un suivi approfondi des efforts menés par les acteurs principaux de la normalisation et destinés à renforcer le plus possible la dimension d’inclusivité du SEN. Le CESE pourrait créer, en priorité, un forum ad hoc sur l’inclusivité du SEN. Cet organisme serait chargé d’organiser chaque année une audition publique qui évaluerait les progrès accomplis dans ce domaine.

Bruxelles, le 20 mars 2019.

Le président

du Comité économique et social européen

Luca JAHIER


(1)  JO C 197 du 8.6.2018, p. 17; JO C 75 du 10.3.2017, p. 40; JO C 34 du 2.2.2017, p. 86; JO C 303 du 19.8.2016, p. 81.

(2)  INT/879 — Normes harmonisées, rapporteur: M. Larghi, 2019 (voir page 78 du présent Journal officiel).

(3)  INT/879 — Normes harmonisées, rapporteur: M. Larghi, 2019 (voir page 78 du présent Journal officiel).

(4)  JO C 303 du 19.8.2016, p. 81; JO C 75 du 10.3.2017, p. 40; JO C 197 du 8.6.2018, p. 17.

(5)  JO C 197 du 8.6.2018, p. 17.

(6)  JO C 197 du 8.6.2018, p. 17.

(7)  JO C 81 du 2.3.2018, p. 102.

(8)  JO C 288 du 31.8.2017, p. 1.

(9)  JO C 227 du 28.6.2018, p. 86.

(10)  JO C 62 du 15.2.2019, p. 254; JO C 62 du 15.2.2019, p. 274.

(11)  JO C 62 du 15.2.2019, p. 254.

(12)  JO C 62 du 15.2.2019, p. 280.

(13)  JO C 345 du 13.10.2017, p. 97.

(14)  JO C 264 du 20.7.2016, p. 98; JO C 367 du 10.10.2018, p. 97; JO C 283 du 10.8.2018, p. 61; JO C 62 du 15.2.2019, p. 207.

(15)  JO C 288 du 31.8.2017, p. 62.

(16)  JO C 62 du 15.2.2019, p. 1.


5.7.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 228/78


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen — Normes harmonisées: renforcer la transparence et la sécurité juridique pour un marché unique pleinement opérationnel»

[COM(2018) 764 final]

(2019/C 228/11)

Rapporteur: Gerardo LARGHI

Consultation

Commission européenne, 18.2.2019

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Marché unique, production et consommation»

Adoption en section spécialisée

7.3.2019

Adoption en session plénière

20.3.2019

Session plénière no

542

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

125/0/2

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) soutient la communication de la Commission sur les normes harmonisées, qui entend améliorer la transparence et la sécurité juridique du marché unique, en veillant à ce qu’il fonctionne avec efficacité. En particulier, le Comité réaffirme qu’il apporte son appui au principe de la normalisation harmonisée en tant qu’instrument primordial pour parachever le marché unique, dans la mesure où elle ouvre des perspectives de croissance au profit des entreprises et des travailleurs, renforce la confiance des consommateurs en ce qui concerne la qualité et la sécurité des produits et donne la possibilité de mieux protéger l’environnement.

1.2.

Le CESE estime qu’une stratégie efficace en matière de normalisation harmonisée doit avoir pour base une rapidité accrue dans l’élaboration des normes et dans leur publication au Journal officiel de l’Union européenne, mais également le renforcement d’une gouvernance fondée sur la transparence et l’inclusion de tous les intervenants dans le processus, ainsi qu’une stratégie qui défende à l’échelle mondiale les normes européennes, lesquelles conditionnent non seulement notre système de production et nos perspectives de croissance et d’emploi mais aussi la qualité et la sécurité des produits.

1.3.

Le CESE juge que s’agissant de produire des normes harmonisées dans des délais plus courts, les mesures proposées par la Commission semblent aller dans la bonne direction et que globalement, il est possible d’y adhérer. Pour ce qui est de la transparence et de l’inclusivité, en revanche, il serait possible d’en faire davantage, étant donné qu’à l’heure actuelle, on trouve encore de très nombreux intervenants qui, bien que susceptibles d’être intéressés par une intégration au processus, s’avèrent ne pas y être associés. Cette défaillance a des effets évidents concernant la difficulté qu’éprouve l’Union européenne à procéder à une défense systématique de ses normes au niveau international, dans le cadre des négociations menées au sein de l’Organisation internationale de normalisation (ISO).

1.4.

En conséquence, le Comité demande à nouveau que l’on s’attelle à soutenir davantage la participation des acteurs intéressés, notamment en renforçant les instruments existants (Horizon 2020) et en les faisant mieux connaître. Dans cette optique, il conviendrait que le prochain cadre financier pluriannuel 2021-2027 maintienne, voire augmente, les ressources afférentes. La même recommandation s’applique aux financements destinés aux parties prenantes qui sont recensées dans l’annexe III du règlement (UE) no 1025/2012 du Parlement européen et du Conseil (1). En outre, dans un souci de renforcer le caractère inclusif du processus de normalisation, le CESE confirme qu’il est disposé à accueillir un forum annuel qui, rassemblant des partenaires multiples, évaluera les progrès réalisés en la matière et favorisera par ailleurs l’échange des bonnes pratiques entre les différents secteurs de production.

1.5.

Le CESE juge positifs les signaux qu’envoient les initiatives mises en œuvre par la Commission pour rattraper le retard pris dans la production de normes. On relève cependant que dans certains secteurs stratégiques, comme celui du numérique, certains signes révèlent encore un sérieux retard pour des questions sensibles, comme la chaîne de blocs, qui produisent des effets, de manière transversale, sur la vie de l’ensemble des citoyens, des entreprises et des travailleurs. Aussi le CESE invite-t-il la Commission à mettre au point des programmes de travail toujours plus concrets et assortis d’échéances claires et précises. Par ailleurs, il attend avec intérêt les résultats de l’évaluation d’impact socio-économique concernant la normalisation, en souhaitant qu’elle prenne également en compte, comme il se doit, les répercussions indirectes, telles que les niveaux d’emploi et la sécurité des employeurs.

2.   Introduction

2.1.

Formant une catégorie spécifique au sein des normes européennes, les normes harmonisées sont élaborées par une organisation européenne de normalisation (2) (OEN) répondant à une demande, dite «mandat», émise par la Commission européenne dans le cadre d’un partenariat public-privé. Sur l’ensemble des normes européennes, environ 20 % sont établies à la suite d’une demande de normalisation émanant de la Commission européenne. Il est possible d’appliquer ces normes harmonisées aux fins de démontrer que tel ou tel produit ou service mis sur le marché est conforme aux prescriptions techniques prévues par la législation de l’Union européenne qui s’y rapporte.

2.2.

Alors que les exigences techniques mentionnées dans la législation de l’Union européenne revêtent un caractère obligatoire, l’utilisation de normes harmonisées s’effectue généralement sur une base volontaire. Cependant, les entreprises, surtout si elles sont de taille modeste ou moyenne, éprouvent de telles difficultés à faire certifier des normes substitutives qui leur sont propres qu’en pratique, elles respectent et reconnaissent pratiquement toutes les normes harmonisées.

2.3.

Par conséquent, bien que leur utilisation soit théoriquement facultative, les normes harmonisées représentent en fait un outil essentiel pour le bon fonctionnement et le développement du marché unique, car elles établissent une présomption de conformité, qui assure une sécurité juridique et donne la possibilité de mettre de nouveaux produits sur le marché sans avoir à supporter des coûts supplémentaires. Le développement d’un dispositif adéquat de normes harmonisées devrait donc produire des avantages pour toutes les parties prenantes, puisqu’il offre des relais de croissance au bénéfice des entreprises et des travailleurs, qu’il préserve la santé du consommateur et assure sa sécurité et qu’il contribue à la protection de l’environnement, dans l’optique d’une économie circulaire.

2.4.

En mars 2018, le Conseil européen a demandé à la Commission de faire le point sur l’état d’avancement du marché unique, ainsi que sur les obstacles qu’il est encore nécessaire de lever pour le parachever. La communication COM(2018) 772 apporte une réponse à cette demande (3). L’évaluation qu’elle contient insiste fortement sur la normalisation, en tant qu’elle représente un facteur clé pour l’élimination des barrières techniques qui s’opposent aux échanges, étant donné qu’elle assure l’interopérabilité des produits et des services complémentaires, facilite l’introduction de biens novateurs sur le marché et renforce la confiance du consommateur.

2.5.

Toutefois, face à la rapidité des évolutions technologiques, à la numérisation et au développement de l’économie collaborative, il devient nécessaire que le système de normalisation devienne toujours plus rapide, moderne, efficace et souple. Dans un tel contexte, les normes harmonisées constituent un facteur essentiel. En outre, dans un arrêt récemment rendu, la Cour de justice de l’Union européenne (4) a précisé que même si elles sont élaborées par des organismes privés indépendants et que leur application reste facultative, les normes harmonisées font pleinement partie de la législation de l’Union européenne, de sorte que la Commission est tenue de suivre le processus de leur élaboration, de garantir qu’elle s’effectue rapidement et d’assurer l’efficacité de leur mise en œuvre.

2.6.

C’est pour cette raison que la Commission a publié la communication à l’examen, afin de dresser un bilan des actions déjà entreprises dans le domaine de la normalisation harmonisée et de mesurer le chemin qui reste à parcourir pour mettre pleinement en œuvre le règlement (UE) no 1025/2012 sur la normalisation.

3.   Synthèse de la proposition de la Commission

3.1.

La proposition de la Commission repose sur quatre mesures qu’il y a lieu de lancer incessamment pour réaliser des progrès supplémentaires en ce qui concerne l’inclusivité, la sécurité juridique, la prévisibilité et l’obtention rapide des avantages que les normes harmonisées induisent pour le marché unique.

3.2.   Première mesure. Éliminer le plus rapidement possible l’arriéré subsistant en matière de normes harmonisées

3.2.1.

En 2017, la plate-forme REFIT avait diagnostiqué un net retard («arriéré») dans le processus de normalisation, ainsi que plusieurs autres acteurs intéressés en avaient déjà exprimé le constat (5). Il concerne avant tout les secteurs qui sont soumis à la numérisation de l’économie. En conséquence, une stratégie a été élaborée, en accord avec les organisations européennes de normalisation, pour résorber ce passif.

3.3.   Deuxième mesure. Rationaliser les procédures pour la publication au Journal officiel des références aux normes harmonisées

3.3.1.

Cette action repose sur un réexamen général du mode de fonctionnement de la Commission. La volonté ainsi exprimée a amené à créer une réserve d’experts consultants qui sont appelés à recenser au plus tôt d’éventuelles questions émergentes dans le processus d’élaboration des normes harmonisées. Par ailleurs, un dialogue structurel a été lancé dans le cadre du partenariat public-privé, de même qu’un autre, interinstitutionnel, auquel ont pris part les principales institutions européennes, dont le CESE, et les acteurs intéressés et qui a abouti à arrêter qu’à dater du 1er décembre 2018, la Commission adoptera les décisions relatives aux normes harmonisées par la voie de la procédure écrite accélérée.

3.4.

Troisième mesure. Élaborer un document d’orientation sur les aspects pratiques de la mise en œuvre du règlement sur la normalisation

3.4.1.

Ce texte servira à clarifier les rôles et les responsabilités des différents acteurs, dans toutes les phases de l’élaboration des normes harmonisées. En particulier, il détaillera les aspects de fond et de procédure du nouveau format des demandes de normalisation que la Commission met actuellement au point, afin de garantir davantage de transparence et de prévisibilité dans l’élaboration des normes. En outre, il permettra une clarification concernant le rôle de la Commission et de ses consultants spécialisés. Enfin, il fournira des orientations supplémentaires pour améliorer la cohérence et la rapidité de la procédure d’évaluation des normes harmonisées dans tous les secteurs concernés.

3.5.   Quatrième mesure. Renforcer le système de consultants pour obtenir une évaluation rapide et rigoureuse des normes harmonisées de façon à permettre leur citation rapide au Journal officiel de l’Union européenne

3.5.1.

Pour assurer une meilleure coordination en amont dans le processus d’évaluation des normes harmonisées que les organisations européennes de normalisation sont en train de mettre en place, la Commission continuera de s’appuyer sur la contribution scientifique du Centre commun de recherche et, dans le même temps, renforcera sa coopération avec les comités techniques chargés d’élaborer les normes, grâce au système d’experts consultants mis en place récemment. L’objectif poursuivi est de maximiser la rapidité, la qualité et la précision des évaluations afin d’améliorer qualitativement l’ensemble du processus et de veiller à ce que les références aux normes harmonisées soient publiées dans les meilleurs délais au Journal officiel.

4.   Observations générales

4.1.

Le CESE soutient la communication de la Commission sur les normes harmonisées, qui entend améliorer la transparence et la sécurité juridique du marché unique, en veillant à ce qu’il fonctionne avec efficacité. Pour des raisons évidentes de proximité de contenu et dans le souci de fournir une réponse structurée, coordonnée et cohérente, l’analyse générale de la proposition à l’examen est élaborée en parallèle avec l’avis CESE INT/878 (6), qui a pour objet le programme annuel en matière de normalisation européenne pour 2019 (7).

4.2.

Le CESE réaffirme qu’il soutient pleinement le principe de la normalisation harmonisée en tant qu’instrument primordial pour parachever le marché unique, dans la mesure où elle ouvre des perspectives de croissance au profit des entreprises et des travailleurs, renforce la confiance des consommateurs en ce qui concerne la qualité et la sécurité des produits et donne la possibilité de mieux protéger l’environnement (8). Il estime, par ailleurs, qu’une stratégie relative à la normalisation harmonisée ne peut être déconnectée des processus à l’œuvre à l’échelle mondiale, avec lesquels il y a lieu de chercher une articulation adéquate, pour ce qui est de défendre les normes définies au niveau européen. En effet, si le processus de normalisation européenne accuse d’éventuels retards ou que nous ne parvenons pas à défendre les normes de l’Europe lors des négociations menées au sein de l’ISO, il pourrait en résulter qu’elles se trouvent supplantées, ou qu’elles soient incompatibles avec celles qui seront adoptées à l’échelon international, pour le plus grand dommage, bien évidemment, des entreprises et des consommateurs.

4.3.

Le CESE exprime son approbation pour l’initiative de la Commission grâce à laquelle il a été possible de résorber une partie du retard accumulé au fil des ans (9) en matière de normalisation harmonisée. Dans certains segments stratégiques du numérique, comme la chaîne de blocs, on constate toutefois que le lancement d’un groupe de travail ad hoc sur la thématique concernée n’a eu lieu que tout récemment et témoigne donc d’un retard sensible. Si l’on considère que l’innovation est extrêmement difficile à normaliser en temps voulu, il serait opportun d’élaborer un programme de travail qui soit clair et prévoie des délais et modalités précis de mise en œuvre.

4.4.

Le CESE estime qu’il est assurément bienvenu que la Commission rationalise ses procédures internes, afin de raccourcir les circuits de la décision et d’accélérer les publications au Journal officiel, étant donné qu’il s’agit là d’une des causes du retard qui s’est accumulé d’année en année dans le domaine de la normalisation harmonisée. Il est essentiel, en particulier, que le système de normalisation harmonisée soit à la hauteur des nouveaux défis du marché, afin d’éviter que certains États membres ne se lancent dans une fuite en avant qui pourrait déboucher sur des antagonismes entre les différentes normes nationales.

4.5.

Dans le processus de simplification envisagé par la Commission, un élément capital sera de garantir que les mécanismes de la gouvernance soient transparents et, en particulier, inclusifs. Cet impératif suppose que le Comité économique et social européen, comme il l’a déjà été dans le cas du dialogue interinstitutionnel lancé en juin 2018, continue obligatoirement à être un acteur pleinement associé à la démarche, tout comme les autres parties intéressées, à l’échelle tant européenne que nationale (10).

4.6.

Le CESE souligne que la participation active des acteurs intéressés, au niveau national, européen et international, constitue un facteur propre à conférer plus de force aux normes et à en augmenter la qualité et qu’il convient de favoriser et de soutenir cet engagement, car aujourd’hui encore, ces intervenants butent sur bien des obstacles pour avoir accès aux processus de définition des normes harmonisées. On relève, en particulier, des problèmes concernant l’information et la sensibilisation à l’importance que revêt cet instrument, ainsi qu’à la marche à suivre pour s’y impliquer, ou encore des critères qui restreignent la participation, de même que des coûts d’un montant excessif pour les organisations ou entreprises de petite taille.

4.7.

Sur ce point, le Comité souligne que les fonds mis à disposition par le truchement du programme Horizon 2020 aux fins de financer la participation des acteurs intéressés aux processus de normalisation ne bénéficient que d’une faible notoriété et qu’il conviendrait d’en faciliter l’accès et d’améliorer la communication les concernant (11). Par ailleurs, il importe que tous les financements actuellement prévus soient maintenus et, le cas échéant, augmentés dans le prochain cadre financier pluriannuel 2021-2027. La même recommandation s’applique aux financements destinés aux parties prenantes qui sont recensées dans l’annexe III du règlement (UE) no 1025/2012.

4.8.

Pour que les actions de soutien à la normalisation gagnent en efficacité, le CESE recommande que les projets financés au titre d’Horizon Europe prévoient également que les acteurs intéressés soient associés à des actions de normalisation des innovations qui sont menées dans le domaine des initiatives de diffusion.

4.9.

Dans le fil de ses avis antérieurs (12), le CESE demande qu’il soit procédé à un suivi approfondi des efforts déployés par les grands acteurs de la normalisation, afin de renforcer la dimension inclusive du système européen de normalisation (SEN). Sur ce point, le CESE pourrait créer un forum ad hoc sur cette inclusivité du SEN. Cette instance serait chargée de l’organisation annuelle d’une audition publique qui évaluerait les progrès réalisés en la matière, tout en favorisant les échanges de bonnes pratiques entre les différents secteurs productifs.

5.   Observations particulières

5.1.

Le Comité constate que les initiatives proposées par la Commission pour accélérer les procédures internes et augmenter le nombre de consultants pourraient concerner plusieurs niveaux opérationnels en son sein et avoir ainsi une incidence tant pour son personnel que pour le fonctionnement de son organisation interne. Ces efforts d’amélioration sont assurément nécessaires mais doivent recevoir un financement adéquat. En conséquence, le CESE invite la Commission à faire davantage la lumière sur cet aspect de la question, en insistant sur la nécessité de lui consacrer des fonds qui soient en adéquation avec les défis à relever dans le secteur et en concordance avec les objectifs du règlement (UE) no 1025/2012 (13).

5.2.

Le CESE réaffirme qu’il est nécessaire de conforter une culture européenne de la normalisation, grâce à des campagnes spécifiques de sensibilisation auxquelles soient associés des acteurs allant du simple citoyen, dès qu’il est en âge scolaire, aux décideurs politiques, et qui trouvent également un relais dans le cadre des accords internationaux (14). En outre, il serait judicieux de développer des campagnes de sensibilisation ciblant spécifiquement les PME et les entreprises en phase de démarrage.

5.3.

Le CESE souhaite que l’évaluation d’impact socio-économique du système de normalisation, figurant dans le programme de travail en matière de normalisation européenne pour 2019, prévoie également un espace spécialement consacré aux normes harmonisées et un examen réaliste des inconvénients et avantages éventuels qui ne soit pas circonscrit au seul cadre du marché intérieur mais se place également dans une perspective générale. Cette préconisation implique que ladite évaluation se penche également sur les effets indirects induits par la normalisation, s’agissant, par exemple, des niveaux d’emploi ou de la sécurité des travailleurs (15).

Bruxelles, le 20 mars 2019.

Le président

du Comité économique et social européen

Luca JAHIER


(1)  JO L 316 du 14.11.2012, p. 12.

(2)  Le Comité européen de normalisation (CEN), le Comité européen de normalisation électrotechnique (Cenelec), l’Institut européen des normes de télécommunications (ETSI).

(3)  COM(2018) 772 final, «Le marché unique dans un monde qui change. Un atout sans égal nécessitant une volonté politique renouvelée.»

(4)  Arrêt rendu dans l’affaire C-613/14 «James Elliot Construction/Irish Asphalt Limited».

(5)  Plate-forme REFIT, avis XXII.2.b.

(6)  INT/878, Normalisation européenne pour 2019 (voir page 74 du présent Journal officiel).

(7)  COM(2018) 686 final.

(8)  JO C 75 du 10.3.2017, p. 40.

(9)  Donnée de la Commission européenne.

(10)  JO C 34 du 2.2.2017, p. 86; JO C 75 du 10.3.2017, p. 40.

(11)  Le programme de travail LEIT (Leadership in Enabling and Industrial Technologies, «Primauté dans le domaine des technologies génériques et industrielles») d’Horizon 2020 finance des projets destinés à soutenir la participation des acteurs intéressés au processus de normalisation, l’une de ces initiatives étant «Standict.eu (www.standict.eu), d’une durée de deux ans, qui vise à normaliser les innovations dans le secteur des technologies de l’information et de la communication et est doté d’un budget de 2 millions d’euros, avec un vivier de bénéficiaires potentiels de quelque 300 intervenants, sélectionnés grâce à des appels publiés à intervalles réguliers. Sous l’intitulé «ICT-45-2020: Renforcer la présence européenne dans la normalisation des technologies de l’information et d e la communication: observatoire et dispositif de soutien de la normalisation», le programme de travail LEIT pour 2019-2020 prévoit un volet analogue mais doté, quant à lui, d’une enveloppe dont le montant a été doublé, passant de 2 à 4 millions d’euros, tandis que sa durée a été portée à trois années, au lieu de deux.

(12)  JO C 303 du 19.8.2016, p. 81; JO C 197 du 8.6.2018, p. 17.

(13)  JO C 197 du 8.6.2018, p. 17.

(14)  Voir note 10.

(15)  Voir note 8.


5.7.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 228/83


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Vers un cadre complet de l’Union européenne en matière de perturbateurs endocriniens»

[COM(2018) 734 final]

(2019/C 228/12)

Rapporteur: Brian CURTIS (UK/II)

Consultation

Commission européenne, 14.12.2018

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Décision du Bureau

10.7.2018

Compétence

Section spécialisée «Agriculture, développement rural et environnement»

Adoption en section spécialisée

27.2.2019

Adoption en session plénière

21.3.2019

Session plénière no

542

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

173/0/1

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) salue la communication de la Commission sur les perturbateurs endocriniens, qui vise à mieux protéger la santé des personnes et des animaux. Le CESE estime, en particulier, qu’il est nécessaire de réaliser un bilan de qualité complet de la législation en vigueur, y compris de son incidence sur le plan social et économique, afin d’établir le véritable état de la situation. Une approche globale est essentielle pour appuyer une stratégie à long terme qui permette d’aborder la question des perturbateurs endocriniens de manière cohérente, uniforme et scientifique. Néanmoins, le Comité estime que cette stratégie devrait être renforcée par un plan d’action réaliste, qui fixe des objectifs et des échéances.

1.2.

Le Comité soutient la proposition qui vise à définir un cadre législatif plus cohérent. Il importera dans ce cadre de respecter le principe une substance, une toxicologie et de faire reposer la nouvelle stratégie sur une application harmonisée du principe de précaution, conformément aux dispositions efficaces déjà adoptées sur les biocides et les pesticides (1). La nouvelle stratégie pourrait être intégrée dans le «cadre intersectoriel»constitué par REACH.

1.3.

Le système de gestion doit être fondé sur des données scientifiques afin de garantir toute transparence aux citoyens et aux parties prenantes. Il convient, par conséquent, de prévoir un budget adéquat pour soutenir les recherches publiques et indépendantes. Ces dernières en particulier pourraient livrer des critères et/ou des méthodes scientifiques bien établis pour étudier, soutenir et stimuler l’activité et la production européennes en matière de R&I industrielle. Le CESE recommande que ce budget ne soit pas inférieur à celui actuellement alloué au titre d’Horizon 2020. Le Comité préconise en particulier l’établissement d’une ligne budgétaire spécifique pour l’identification précoce des perturbateurs endocriniens et la détermination des risques pour la santé animale et humaine, l’identification de substances sûres pour les remplacer et l’assainissement de l’environnement.

1.4.

Les interdictions ou restrictions imposées à certaines substances ou certains produits, dès lors qu’il est établi de manière plausible qu’ils sont des perturbateurs endocriniens, pourrait avoir une incidence importante sur les entreprises et les lieux de travail. Par conséquent, le CESE recommande à la Commission de prévoir un mécanisme financier spécifique pour soutenir la transition vers une production plus durable, permettant d’améliorer les techniques et systèmes de production des entreprises et d’actualiser les compétences des travailleurs.

1.5.

Le CESE soutient la proposition de réunion annuelle des parties prenantes. Le Comité considère toutefois nécessaire, pour rendre le dialogue entre les parties prenantes et la Commission européenne réellement efficace, que celui-ci comprenne un système permanent structuré d’échange d’informations et de consultation.

1.6.

Le Comité demande que la vaste campagne de sensibilisation sur les polluants organiques persistants (POP) qui sera organisée par la Commission dans toute l’Union soit étendue suivant une approche similaire centrée sur les perturbateurs endocriniens. Le CESE réitère également sa recommandation concernant la création d’une banque de données ouverte pour les POP et les perturbateurs endocriniens afin de fournir un instrument utile pour les entreprises et les consommateurs.

1.7.

Le Comité est fermement convaincu que la stratégie européenne relative aux perturbateurs endocriniens doit revêtir une dimension internationale afin de protéger efficacement la santé des citoyens contre les produits potentiellement dangereux provenant de pays tiers. Partant, le CESE rejoint la Commission lorsqu’elle propose que l’Union joue un rôle plus volontariste sur la scène mondiale, notamment en aidant l’OCDE à améliorer ses essais. Le CESE considère, en outre, que l’Union devrait promouvoir la durabilité et le respect des dispositions relatives aux perturbateurs endocriniens dans les accords commerciaux bilatéraux et multilatéraux. Dans ce contexte, l’Union européenne pourrait œuvrer en coopération avec l’OMS et le PNUE en faveur de la signature d’une convention mondiale sur les perturbateurs endocriniens, comme elle l’a déjà fait pour les POP (convention de Stockholm), reposant sur la liste actuelle des Nations unies recensant les substances reconnues comme étant des perturbateurs endocriniens ou susceptibles de l’être. Ces initiatives seront également utiles pour créer des conditions de concurrence équitables et protéger le modèle de production européen de la concurrence déloyale.

1.8.

Le CESE soutient la stratégie ouverte adoptée par la Commission et estime que la société civile organisée pourrait jouer un rôle essentiel dans l’élaboration de campagnes nationales de sensibilisation afin d’informer davantage de citoyens sur les mesures prises par l’Union européenne pour protéger leur santé. Ces initiatives doivent être mises en place dès l’école dans le but de réduire les risques d’exposition aux perturbateurs endocriniens et de favoriser un comportement prudent. Le CESE recommande en particulier que les initiatives en matière d’éducation et de formation soient harmonisées et considérées comme faisant partie de la même stratégie selon une approche de l’apprentissage tout au long de la vie. Des formations spécifiques devraient être obligatoires et accessibles pour tous les travailleurs européens dont l’activité est directement ou indirectement liée aux perturbateurs endocriniens.

2.   Introduction

2.1.

Les perturbateurs endocriniens sont des substances chimiques d’origine synthétique ou naturelle qui altèrent le fonctionnement du système endocrinien et, en conséquence, nuisent à la santé des personnes et des animaux, notamment au niveau du métabolisme, de la croissance, du sommeil et de l’humeur. L’exposition aux perturbateurs endocriniens peut se produire de différentes manières, par exemple par les résidus de pesticides, de métaux et d’additifs, ou de produits contaminants contenus dans les denrées alimentaires et les cosmétiques. Certains perturbateurs endocriniens sont des substances naturellement présentes dans l’environnement. Les êtres humains et les animaux peuvent être exposés aux perturbateurs endocriniens par l’alimentation, la poussière ou l’eau, par inhalation de gaz et de particules dans l’air, ou simplement par contact cutané (produits d’hygiène personnelle). Parfois, les effets causés par une substance perturbant le système endocrinien ne sont visibles que longtemps après l’exposition (2). Il convient de noter que parmi les produits ayant des propriétés de perturbation endocrinienne peuvent figurer des substances présentes dans des denrées alimentaires spécifiques (par exemple des légumes), dans certaines vitamines et d’autres compléments alimentaires, ainsi que dans des médicaments essentiels (par exemple pour le traitement du cancer ou notamment la contraception féminine): les citoyens de l’Union européenne sont susceptibles d’être exposés à de grandes quantités de perturbateurs endocriniens par l’intermédiaire de ces produits.

2.2.

Les préoccupations concernant les perturbateurs endocriniens ne cessent de croître depuis les années 1990. La Commission a adopté, en décembre 1999, la stratégie communautaire concernant les perturbateurs endocriniens (3), approfondie depuis lors au moyen d’actions dans les domaines de la recherche, de la réglementation et de la coopération internationale. Une vaste étude menée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a soulevé le problème de l’incidence considérable des perturbateurs endocriniens sur un grand nombre d’êtres humains et d’animaux, en particulier sur les fœtus et les femmes enceintes (naissances prématurées et petits poids à la naissance, malformations et troubles du développement neurologique), sur les enfants et les adolescents (modification du développement normal et du fonctionnement du système reproductif, comme le développement précoce de la poitrine chez les jeunes filles), mais aussi sur les adultes (perte de fertilité, obésité, cancer) (4).

2.3.

On sait qu’un grand nombre de substances chimiques artificielles et naturelles perturbent la synthèse et l’activité hormonales ou encore le métabolisme des hormones, mais seules une partie d’entre elles a fait l’objet d’études approfondies quant à leur capacité à induire des effets néfastes par des mécanismes endocriniens, comme le souligne également un récent rapport des Nations unies. La rapidité à laquelle la fréquence de certaines maladies a augmenté au cours des dernières décennies exclut que les facteurs génétiques soient la seule source d’explication plausible. Des facteurs environnementaux et d’autres facteurs non génétiques, notamment l’alimentation, l’âge de la mère, les maladies virales et les expositions aux substances chimiques interviennent également, mais ne sont pas toujours faciles à déterminer (5).

2.4.

Des progrès significatifs ont été accomplis dans la compréhension des perturbateurs endocriniens et leur réglementation, et l’Union européenne est aujourd’hui reconnue dans le monde comme un chef de file en ce qui concerne l’attitude à adopter à l’égard de ces substances chimiques, tandis que sa législation est l’une des plus protectrices du monde. Des dispositions spécifiques figurent désormais dans la législation sur les pesticides et les biocides, les produits chimiques en général (règlement «REACH»), les dispositifs médicaux et l’eau (6). D’autres volets législatifs, tels que ceux relatifs aux matériaux destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires, aux produits cosmétiques, aux jouets ou à la protection des travailleurs sur le lieu de travail (7), ne contiennent pas de disposition spécifique concernant les perturbateurs endocriniens. Toutefois, les substances ayant des propriétés de perturbation endocrinienne font l’objet de mesures réglementaires au cas par cas sur la base des prescriptions générales de la législation. Le manque de coordination a cependant rendu la législation actuelle fragmentée et parfois incohérente (par exemple, le bisphénol A est une matière première largement utilisée dans plusieurs secteurs manufacturiers. Il est interdit dans les cosmétiques et les biberons, mais toujours autorisé dans les autres matériaux destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires et des aliments pour animaux, ainsi que dans le papier thermique).

3.   Contenu essentiel de la proposition

3.1.

Près de vingt ans après l’adoption de la stratégie communautaire, la communication à l’examen indique que la Commission entend réaliser un bilan de qualité de la législation en vigueur en vue de dresser un état des lieux. Ce bilan devrait constituer la première étape vers une mise à jour de la législation, il s’agit notamment de la rendre cohérente et de la coordonner sur trois points essentiels: la définition, l’identification et les effets réglementaires (en particulier sur les mesures de protection).

3.2.

Une définition commune des perturbateurs endocriniens sert de point de départ à l’approche horizontale et constitue un élément clé de cette nouvelle voie. Elle sera fondée sur la définition des perturbateurs endocriniens adoptée par l’OMS (8). Une définition commune est nécessaire pour établir une méthode harmonisée destinée à l’identification des perturbateurs endocriniens.

3.3.

En ce qui concerne l’identification, la Commission vise à renforcer trois axes d’intervention:

un mécanisme horizontal d’identification des perturbateurs endocriniens,

la mise à jour des exigences en matière de données dans la législation afin d’identifier avec plus de précision les nouveaux perturbateurs endocriniens,

améliorer la communication tout au long de la chaîne d’approvisionnement en ce qui concerne les perturbateurs endocriniens dans le cadre du règlement REACH (fiches de données de sécurité).

3.4.

Le troisième aspect consiste à mettre en œuvre les mêmes mesures et dispositions, conformément au principe de précaution, afin de protéger le public contre l’exposition à un risque, lorsqu’une étude scientifique a constaté l’existence d’un risque plausible. Cela devrait permettre d’interdire la production de ces substances, avec des possibilités de dérogation très limitées. C’est pourquoi une attention particulière sera accordée dans le bilan de qualité à la cohérence et à l’intensité des mesures destinées à protéger tous les citoyens, en privilégiant les groupes de population vulnérables qui sont particulièrement sensibles aux perturbateurs endocriniens lorsque le système endocrinien est en phase de changement, tels que les fœtus, les adolescents et les femmes enceintes.

3.5.

La recherche aura une place déterminante dans le futur cadre législatif, car il subsiste des lacunes dans les connaissances, notamment sur:

l’incidence précise de l’exposition à des perturbateurs endocriniens sur l’apparition de maladies,

la possibilité d’établir un «seuil sans risque»pour les perturbateurs endocriniens en deçà duquel aucun effet néfaste ne se produit,

le type de mélange susceptible de produire un «effet cocktail»et la manière dont les «mélanges»fonctionnent en général,

le moyen de rendre nos méthodes d’essai plus efficaces.

3.6.

Depuis 1999, plus de 50 projets relatifs aux perturbateurs endocriniens ont été financés au titre des programmes-cadres de l’Union européenne pour la recherche et le développement (plus de 150 millions d’EUR de financement (9)). Une enveloppe supplémentaire de 52 millions d’EUR a été allouée au titre d’Horizon 2020. De nouveaux projets seront financés dans le cadre du programme Horizon Europe (10). En particulier, la Commission propose les volets de recherche suivants:

le développement de l’évaluation des dangers, l’évaluation des risques et la gestion des substances chimiques, y compris au sujet des effets cocktails, ainsi que la collecte, le partage et la combinaison des données nécessaires,

l’élimination des substances préoccupantes dans les phases de production et de fin de vie; le soutien au développement de produits de remplacement sûrs et de technologies de production sûres et rentables,

l’éco-innovation pour la prévention et l’élimination de la pollution de l’environnement par des substances dangereuses et des substances chimiques considérées actuellement comme préoccupantes; en étudiant également l’interaction entre les substances chimiques, les produits et les déchets.

3.7.

En vue d’accroître l’efficacité de la nouvelle stratégie, la Commission envisage pour l’Union européenne un rôle plus volontariste sur la scène mondiale ainsi que la mise en place d’un dialogue ouvert avec les parties prenantes et le grand public. Ces activités s’articuleront autour de quatre initiatives:

l’organisation d’un forum annuel sur les perturbateurs endocriniens. Ce forum permettra aux scientifiques et aux parties prenantes publiques et privées d’échanger des informations et des bonnes pratiques, de recenser les défis à relever et de mettre en place des synergies, afin de soutenir les travaux de la Commission,

un soutien renforcé aux travaux des organisations internationales compétentes, en insistant tout particulièrement sur la fourniture à l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) de l’appui nécessaire pour obtenir des avancées dans l’élaboration de lignes directrices pour les essais approuvées au niveau international,

l’examen des possibilités pour inclure les perturbateurs endocriniens dans le système international existant de classification des produits chimiques. Cette intégration apporterait une solution mondiale au problème de l’identification des perturbateurs endocriniens (par analogie à ce qui existe déjà pour d’autres classes de danger comme les substances mutagènes, cancérigènes et toxiques pour la reproduction),

la mise en place d’un guichet web unique pour informer les citoyens, les entreprises et les parties prenantes sur ce sujet. En raison de différents niveaux d’information et de sensibilisation en Europe, les États membres seront encouragés à mettre au point des campagnes spécifiques surtout à l’intention des groupes vulnérables.

4.   Observations générales

4.1.

Le CESE accueille favorablement la communication de la Commission sur les perturbateurs endocriniens. Le Comité estime notamment qu’il est nécessaire de réaliser un bilan de qualité complet de la législation en vigueur, y compris de son incidence sur le plan social et économique, afin d’établir le véritable état de la situation. Une approche globale est essentielle pour appuyer une stratégie (11) à long terme qui permette d’aborder la question des perturbateurs endocriniens de manière cohérente, uniforme et scientifique.

4.2.

Le Comité partage l’avis de la Commission selon lequel les perturbateurs endocriniens sont des substances particulièrement préoccupantes. Pour ce motif, le Comité soutient la proposition de créer un cadre législatif cohérent et de préconiser un recours harmonisé au principe de précaution, conformément aux dispositions efficaces déjà adoptées sur les biocides et les pesticides (12).

4.3.

En particulier, le CESE estime que la cohérence du nouveau cadre législatif constituera le principal défi pour l’Union européenne, car plusieurs substances, telles que le bisphénol A, largement utilisées comme additifs dans divers secteurs, sont traitées de manière très différente. Il importe dès lors de respecter le principe scientifique une substance, une toxicologie (13). Cela signifie que les critères appliqués pour reconnaître une substance comme étant un perturbateur endocrinien doivent être uniformes et cohérents dans tous les domaines d’action réglementaire de l’Union européenne. Ensuite, même si des exceptions sont possibles, les décisions réglementaires doivent de manière générale être cohérentes et coordonnées. Enfin, la nouvelle stratégie pourrait être intégrée dans le «cadre intersectoriel»constitué par REACH afin de garantir une certaine cohérence.

4.4.

Dans le nouveau contexte, le système de gestion doit être fondé sur des données scientifiques afin de garantir toute transparence aux citoyens et aux parties prenantes. C’est pourquoi il est important d’établir un budget adéquat pour soutenir la recherche publique et indépendante. Le CESE considère que les critères et/ou méthodes scientifiques bien établis, fondés sur des données issues de la recherche indépendante, pourraient permettre d’étudier, de soutenir et de stimuler l’activité et la production européennes en matière de R&I industrielle.

4.5.

Le Comité estime que l’interdiction ou les restrictions imposées à certaines substances ou certains produits, dès lors qu’il est établi qu’ils sont des perturbateurs endocriniens, pourrait avoir une incidence significative sur les entreprises et les lieux de travail. Par conséquent, la Commission devrait prévoir un mécanisme financier spécifique pour soutenir la transition vers une production plus durable, permettant à la fois aux entreprises de rendre leurs techniques et systèmes de production plus innovants, et aux travailleurs d’actualiser leurs compétences (14).

4.6.

La recherche indépendante est essentielle pour améliorer et compléter nos connaissances sur les perturbateurs endocriniens. Le Comité remarque que la proposition de la Commission ne précise pas le budget exact consacré à la recherche et l’innovation sur les perturbateurs endocriniens dans le programme Horizon Europe. Le CESE recommande que ce budget ne soit pas inférieur à celui actuellement alloué au titre d’Horizon 2020.

4.7.

Le CESE approuve la proposition de la Commission relative aux investissements dans la recherche et l’innovation, mais estime que d’autres domaines revêtiront un intérêt fondamental dans les années à venir et devraient dès lors être financés:

a)

l’identification précoce des perturbateurs endocriniens. Selon l’OMS, plus de 800 substances sont potentiellement des perturbateurs endocriniens (15). Leur usage étant très répandu, il est important d’investir pour accélérer les techniques et les mécanismes d’individuation scientifiques pour l’analyse des données (afin de parvenir à une meilleure interprétation des données existantes);

b)

l’identification de produits et de méthodes de remplacement sûrs. La nouvelle approche adoptée par la Commission pourrait conduire à la découverte d’un grand nombre de nouveaux perturbateurs endocriniens. Certaines de ces substances sont particulièrement utiles dans de nombreux secteurs de production, il est donc important d’investir dans la recherche de produits de remplacement sûrs et de méthodes de production sûres. L’absence de données ne signifie pas qu’une substance est sûre, il est dès lors nécessaire d’accroître l’investigation scientifique. Il convient de s’efforcer d’élargir la liste des substances évaluées, et non de se concentrer uniquement sur les substances déjà largement testées;

c)

l’assainissement de l’environnement. Dès qu’une nouvelle substance est identifiée de manière plausible comme perturbateur endocrinien, il convient d’appliquer une procédure spécifique d’évaluation et de gestion des risques qu’elle présente pour l’environnement afin de prévoir, le cas échéant (notamment en raison de sa persistance), une stratégie spécifique pour l’assainissement de l’environnement.

4.8.

Le CESE soutient la proposition de réunion annuelle des parties prenantes. Le Comité considère toutefois nécessaire, pour rendre le dialogue entre les parties prenantes et la Commission européenne réellement efficace, que celui-ci comprenne un système permanent structuré d’échange d’informations et de consultation. Le CESE souhaite participer et contribuer à la réunion annuelle.

4.9.

Les perturbateurs endocriniens et les polluants organiques persistants (POP) sont des substances différentes et produisent des effets différents sur les êtres humains et l’environnement, mais ils s’équivalent en termes de danger pour la santé et de méconnaissance des citoyens. Étant donné que la stratégie de l’Union européenne sur les POP présente plusieurs similitudes avec la communication de la Commission sur les perturbateurs endocriniens, le Comité propose d’élaborer ces stratégies en adoptant une approche similaire afin de renforcer le processus politique et scientifique. Conformément à l’avis NAT/719 du CESE sur la refonte du règlement sur les polluants organiques persistants (POP), le Comité demande notamment qu’une attention particulière soit accordée aux perturbateurs endocriniens dans la vaste campagne de sensibilisation sur les POP qui sera organisée par la Commission au niveau de l’Union européenne. Le CESE réitère également sa recommandation concernant la création d’une banque de données ouverte sur les POP et les perturbateurs endocriniens afin de fournir un instrument utile pour les entreprises et les consommateurs.

5.   Observations particulières

5.1.

Le CESE considère que la communication de la Commission constitue une étape importante vers une meilleure protection de la santé des citoyens grâce à la définition d’un système de production plus durable. Néanmoins, le Comité estime que cette stratégie devrait être renforcée par un plan d’action réaliste, qui fixe des objectifs et des échéances.

5.2.

Une économie circulaire bien conçue, portant une attention particulière aux matières premières secondaires (16), pourrait devenir un vecteur de réduction de l’exposition des citoyens de l’Union européenne aux perturbateurs endocriniens. Le Comité estime que la proposition de la Commission doit être clairement et strictement liée à la législation en vigueur élaborée dans le cadre du 7e programme d’action pour l’environnement (17) et aux autres initiatives stratégiques essentielles en faveur de la durabilité, telles que le plan d’action en faveur de l’économie circulaire et la stratégie sur les matières plastiques visant à exclure la production de produits toxiques. Il s’agit d’une question très sensible, notamment en ce qui concerne les effets cocktail qui causent des maladies chez les êtres humains et des dommages à l’environnement.

5.3.

Le CESE invite la Commission à décrire plus précisément la proposition d’organiser une consultation publique sur les perturbateurs endocriniens. Le Comité est convaincu que la société civile organisée pourrait, davantage que les particuliers, jouer un rôle important, principalement parce que des connaissances et une expérience spécifiques sont nécessaires pour pouvoir donner des conseils utiles, fiables et scientifiquement fondés (18).

5.4.

Le Comité est fermement convaincu que toute stratégie européenne relative aux perturbateurs endocriniens doit revêtir une dimension internationale et être élaborée à ce niveau afin de protéger efficacement la santé des citoyens contre les produits potentiellement dangereux provenant de pays tiers. Partant, le CESE rejoint la Commission lorsqu’elle propose que l’Union joue un rôle plus volontariste sur la scène mondiale, notamment en aidant l’OCDE à améliorer ses essais. Le CESE considère, en outre, que l’Union devrait promouvoir la durabilité et le respect des dispositions relatives aux perturbateurs endocriniens dans les accords commerciaux bilatéraux et multilatéraux. Ainsi, l’Union européenne pourrait œuvrer en coopération avec l’OMS et le PNUE en faveur de la signature d’une convention mondiale sur les perturbateurs endocriniens, comme elle l’a déjà fait pour les POP (convention de Stockholm), reposant sur la liste actuelle des Nations unies recensant les substances reconnues comme étant des perturbateurs endocriniens ou susceptibles de l’être (19). Ces initiatives seront également utiles pour créer des conditions de concurrence équitables et protéger le modèle de production européen contre la concurrence déloyale (20).

5.5.

Le CESE soutient la stratégie ouverte adoptée par la Commission et estime que la société civile organisée pourrait jouer un rôle essentiel dans l’élaboration de campagnes nationales de sensibilisation afin d’informer davantage les citoyens sur les mesures prises par l’Union européenne pour protéger leur santé. Une campagne de sensibilisation efficace doit être mise en place dès l’école dans le but de réduire les risques d’exposition aux perturbateurs endocriniens et de favoriser un comportement prudent (21). Le CESE recommande en particulier que les initiatives en matière d’éducation et de formation soient harmonisées et considérées comme faisant partie de la même stratégie selon une approche de l’apprentissage tout au long de la vie. En outre, le Comité considère que des formations spécifiques devraient être obligatoires et accessibles pour tous les travailleurs européens dont l’activité est directement ou indirectement liée aux perturbateurs endocriniens (22).

Bruxelles, le 21 mars 2019.

Le président

du Comité économique et social européen

Luca JAHIER


(1)  Règlement (UE) no 528/2012 du Parlement européen et du Conseil (JO L 167 du 27.6.2012, p. 1); règlement (CE) no 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil (JO L 309 du 24.11.2009, p. 1).

(2)  Site internet de l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA): https://chemicalsinourlife.echa.europa.eu/fr/endocrine-disrupters-and-our-health. Selon la définition communément admise adoptée par l’OMS en 2002 (OMS/PISSC — Organisation mondiale de la santé/Programme international sur la sécurité des substances chimiques), un perturbateur endocrinien est une substance ou un mélange exogène altérant les fonctions du système endocrinien et induisant donc des effets nocifs sur la santé d’un organisme intact, de ses descendants ou (sous-)populations

(3)  COM(1999) 706.

(4)  Organisation mondiale de la santé, State of the Science of Endocrine Disrupting Chemicals, 2012, p. VII-XII.

(5)  https://www.unenvironment.org/explore-topics/chemicals-waste/what-we-do/emerging-issues/scientific-knowledge-endocrine-disrupting

(6)  Règlement (CE) no 1107/2009; règlement (UE) no 528/2012; règlement (CE) no 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil (JO L 396 du 30.12.2006, p. 1); règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil (JO L 117 du 5.5.2017, p. 1); directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil (JO L 327 du 22.12.2000, p. 1).

(7)  Règlement (CE) no 1935/2004 du Parlement européen et du Conseil (JO L 338 du 13.11.2004, p. 4); règlement (CE) no 1223/2009 du Parlement européen et du Conseil (JO L 342 du 22.12.2009, p. 59); directive 2009/48/CE du Parlement européen et du Conseil (JO L 170 du 30.6.2009, p. 1); directive 98/24/CE du Conseil (JO L 131 du 5.5.1998, p. 11); directive 2004/37/CE du Parlement européen et du Conseil (JO L 158 du 30.4.2004, p. 50).

(8)  Un perturbateur endocrinien est une substance ou un mélange exogène altérant les fonctions du système endocrinien et induisant donc des effets nocifs sur la santé d’un organisme intact, de ses descendants ou (sous-)populations.

(9)  Données de la Commission.

(10)  COM(2018) 435 et COM(2018) 436 — voir, en particulier, sous le deuxième pilier, consacré aux problématiques mondiales et à la compétitivité industrielle, le pôle «Santé»(avec un budget proposé de 7,7 milliards d’EUR) et le pôle «Actions directes non nucléaires du Centre commun de recherche»(avec un budget proposé de 2,2 milliards d’EUR).

(11)  Avis du CESE sur la directive sur l’eau potable (JO C 367 du 10.10.2018, p. 107); avis du CESE sur les Actions de l’Union européenne destinées à améliorer le respect de la législation environnementale et la gouvernance environnementale (JO C 283 du 10.8.2018, p. 83); avis du CESE les Faiblesses du système actuel destiné à garantir la sécurité alimentaire des européens (JO C 268 du 14.8.2015, p. 1); avis du CESE sur la Sécurité des jouets (JO C 77 du 31.3.2009, p. 8); avis du CESE sur La contribution de la société civile au développement d’une politique alimentaire globale dans l’Union européenne (JO C 129 du 11.4.2018, p. 18).

(12)  Règlement (UE) no 528/2012; règlement (CE) no 1107/2009; avis du CESE sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la mise sur le marché et l’utilisation des produits biocides (JO C 347 du 18.12.2010, p. 62).

(13)  Scientific principles for the identification of endocrine-disrupting chemicals: a consensus statement (Principes scientifiques pour l’identification des substances chimiques perturbant le système endocrinien: une déclaration de consensus), Solecki, 2017. https://link.springer.com/article/10.1007/s00204-016-1866-9

(14)  Avis du CESE sur la Protection des travailleurs contre les risques liés à l’exposition à des agents cancérigènes ou mutagènes au travail (JO C 288 du 31.8.2017, p. 56); avis du CESE sur la Refonte du règlement sur les polluants organiques persistants (POP) (JO C 367 du 10.10.2018, p. 93).

(15)  Selon TEDX (Institut de recherche et d’échange de données sur les perturbateurs endocriniens), cette liste comprend plus de 1 000 substances.

(16)  Avis du CESE sur le thème Interface entre les textes législatifs relatifs aux substances chimiques, aux produits et aux déchets (JO C 283 du 10.8.2018, p. 56).

Avis du CESE sur la Stratégie sur les matières plastiques dans une économie circulaire (y compris les actions contre les déchets marins) (JO C 283 du 10.8.2018, p. 61).

(17)  Décision no 1386/2013/UE du Parlement européen et du Conseil (JO L 354 du 28.12.2013, p. 171).

(18)  Avis du CESE sur la Refonte du règlement sur les polluants organiques persistants (POP) (JO C 367 du 10.10.2018, p. 93).

(19)  En août 2018, les Nations unies ont publié une liste de 45 substances chimiques, ou groupes de substances chimiques, qui ont été reconnus comme étant des perturbateurs endocriniens ou pouvant potentiellement l’être à la suite d’une étude scientifique approfondie fondée sur la définition établie par l’OMS/PISSC en 2002 concernant les perturbateurs endocriniens et les perturbateurs endocriniens potentiels. Malheureusement, l’absence de convention international sur les perturbateurs endocriniens empêche la mise en place d’une procédure qui serait unanimement acceptée à ce niveau-là pour protéger la santé des humains et des animaux de l’exposition à ces substances. https://www.unenvironment.org/explore-topics/chemicals-waste/what-we-do/emerging-issues/scientific-knowledge-endocrine-disrupting

(20)  Avis du CESE sur La transition vers un avenir plus durable pour l’Europe (JO C 81 du 2.3.2018, p. 44).

(21)  Par exemple, le décalogue pour les citoyens sur les perturbateurs endocriniens. http://old.iss.it/inte/index.php?lang=2&id=289&tipo=29

(22)  Avis du CESE sur la Refonte du règlement sur les polluants organiques persistants (POP) (JO C 367 du 10.10.2018, p. 93).


5.7.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 228/89


Avis du Comité économique et social européen relatif à la communication conjointe au Parlement européen, au Conseil européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Plan d’action contre la désinformation

[JOIN(2018) 36 final]

(2019/C 228/13)

Rapporteur: Ulrich SAMM

Corapporteure: Giulia BARBUCCI

Consultation

Commission européenne, 12.3.2019

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information»

Adoption en section spécialisée

5.3.2019

Adoption en session plénière

20.3.2019

Session plénière no

542

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

142/2/1

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le CESE prend bonne note de la définition de la désinformation contenue dans l’initiative, à savoir des informations dont on peut vérifier qu’elles sont fausses ou trompeuses, qui constituent une menace pour la démocratie et causent un préjudice public. La diffusion de la désinformation relève aujourd’hui d’une guerre hybride et s’inscrit dans un objectif politique clair. Le Comité tient toutefois à souligner également qu’outre les fausses informations, les informations hautement sélectives, la diffamation, les propos alarmistes et l’incitation à la haine s’attaquent aux droits (et libertés) fondamentaux des citoyens et aux droits des minorités.

1.2.

La désinformation la plus efficace contient toujours une part de vérité. Des actions multiples de la part de tous les acteurs concernés sont donc nécessaires pour fournir des informations de qualité et sensibiliser la population. À cet égard, le CESE se félicite de l’initiative au service d’une action coordonnée visant à protéger l’Union européenne, ses institutions et ses citoyens contre la désinformation. S’il insiste sur l’urgence de telles mesures, il craint également que ce plan d’action n’ait qu’une incidence limitée étant donné l’imminence des élections européennes de mai 2019.

1.3.

Le CESE reconnaît que la désinformation découle principalement de trois sources: la Fédération de Russie (ce qui a été parfaitement démontré par le Service européen pour l’action extérieure), d’acteurs économiques et de médias d’autres pays tiers (notamment la Chine et les États-Unis), et, enfin, de sources internes, à savoir divers médias d’information présents dans des pays de l’Union européenne elle-même, ainsi que des mouvements et organisations politiquement extrémistes. Le CESE appelle la Commission à étendre en conséquence ses activités de surveillance et à prendre des contre-mesures.

1.4.

Le CESE souligne qu’il est urgent que les États membres prennent les mesures nécessaires pour préserver l’intégrité de leurs systèmes et infrastructures électoraux, et qu’ils testent ces mesures à toutes les étapes des élections européennes.

1.5.

Le CESE partage le point de vue de la Commission selon lequel une riposte globale ne pourra être opposée à la désinformation que si les organisations de la société civile contribuent activement à la combattre. Le CESE soutient de manière proactive les efforts conjoints de lutte contre la désinformation, par l’intermédiaire notamment de ses avis, de ses auditions, de ses manifestations «Going local»(Investir l’échelon local) et des nombreuses activités de presse menées par les professionnels de son groupe Communication.

1.6.

Le renforcement de la résilience implique d’associer tous les secteurs de la société, et notamment d’améliorer l’éducation des citoyens aux médias. Les actions de sensibilisation et d’éveil à la pensée critique commencent dès l’école et doivent se répéter régulièrement, tout au long de la vie. Elles nécessitent un financement approprié, dès maintenant et dans le nouveau cadre financier pluriannuel.

1.7.

Les efforts conjoints doivent être soutenus par un maximum d’acteurs au niveau de l’Union européenne, des États membres et des partenaires du Sud et de l’Est, en veillant à ce que des organisations tant publiques que privées y soient associées. Les vérificateurs de faits indépendants et le journalisme de qualité jouent un rôle prépondérant et doivent bénéficier d’un financement approprié pour pouvoir agir quasiment en temps réel.

1.8.

Le CESE se félicite en particulier des fonds affectés à la recherche dans le cadre des programmes Horizon 2020 et Horizon Europe, qui permettront de mieux comprendre les sources de la désinformation et les intentions, outils et objectifs sur lesquels elle repose.

1.9.

Le renforcement des task-forces sur la communication stratégique aurait dû intervenir depuis longtemps. Le CESE se félicite dès lors du plan consistant à augmenter leurs effectifs et à les doter de nouveaux outils. Compte tenu des ressources considérables consacrées dans certains pays à la production de désinformation, l’Union européenne doit apporter une réponse adéquate. La hausse prévue des ressources affectées à ces task-forces ne peut donc être considérée que comme une première étape sur la voie d’une augmentation plus grande encore dans les années à venir.

1.10.

Le CESE convient que le mandat des deux autres task-forces sur la communication stratégique (Balkans occidentaux et Sud) devrait être réévalué et invite instamment les États membres à contribuer aux travaux des task-forces en la matière en y détachant des experts nationaux.

1.11.

Le CESE accueille favorablement le code de bonnes pratiques, qui est un engagement volontaire des plateformes de médias sociaux et des annonceurs à lutter contre la désinformation, tout en émettant des doutes quant à l’efficacité de telles actions volontaires. La Commission est instamment invitée à proposer de nouvelles actions, y compris de nature réglementaire, telles que des sanctions, si la mise en œuvre du code de bonnes pratiques est toujours insatisfaisante.

1.12.

Le CESE lance un appel pressant aux entreprises privées pour qu’elles commencent à considérer comme irresponsable et contraire à l’éthique le placement de publicités sur des plateformes en ligne qui contribuent à diffuser la désinformation, et les invite avec insistance à prendre des mesures pour empêcher un tel comportement.

2.   Introduction – La désinformation, une menace pour les systèmes démocratiques de l’Union

2.1.

Dans le contexte de la présente initiative, on entend par désinformation les informations dont on peut vérifier qu’elles sont fausses ou trompeuses, qui sont créées, présentées et diffusées dans un but lucratif ou dans l’intention délibérée de tromper le public, causant un préjudice public et constituant une menace pour la démocratie. Souvent, les droits sont attaqués par la diffamation, les propos alarmistes et l’incitation à la haine.

2.2.

Ceux qui diffusent la désinformation se retranchent parfois derrière la liberté d’expression. Le droit à l’information et la liberté de la presse sont certes des droits fondamentaux reconnus par l’Union européenne, mais nous devons lutter contre les abus en la matière, lorsque la désinformation est utilisée dans l’intention délibérée de nuire à la société.

2.3.

Les techniques numériques facilitent la production et la diffusion de la désinformation. Elles comprennent notamment:

les attaques de trolls sur des profils de médias sociaux;

l’utilisation de systèmes logiciels automatisés en ligne (bots);

la falsification de documents;

la manipulation de vidéos (trucages vidéo ou «deep fakes»);

les faux profils de médias sociaux.

2.4.

Les médias sociaux sont devenus des vecteurs importants de propagation de la désinformation, qui sont également utilisés, dans certains cas comme Cambridge Analytica, pour cibler des contenus sur des utilisateurs spécifiques identifiés grâce à un accès non autorisé à leurs données à caractère personnel et à l’exploitation de ces données, l’objectif ultime étant d’influencer les résultats d’élections et, partant, de menacer la démocratie.

Outre les médias sociaux, les moyens plus classiques tels que la télévision, les journaux, les sites internet ou les chaînes de courriels et de messages conservent un rôle important dans bon nombre de régions. Les outils et techniques utilisés évoluent rapidement.

2.5.

Les acteurs à l’origine de la désinformation peuvent être internes aux États membres ou externes, qu’ils soient de nature étatique (ou soutenus par des pouvoirs publics) ou non étatique. Selon les informations disponibles, plus de 30 pays recourent à des activités de désinformation et d’influence sous diverses formes, y compris sur leur propre territoire.

2.6.

Selon la cellule de fusion de l’Union européenne contre les menaces hybrides, créée en 2016 au sein du Service européen pour l’action extérieure, les activités de désinformation menées par la Fédération de Russie constituent la plus grande menace extérieure pour l’Union européenne. Des contenus de désinformation élaborés et/ou propagés par des sources russes ont été signalés dans le contexte de plusieurs élections et référendums organisés dans l’Union européenne. Des campagnes de désinformation portant sur la guerre en Syrie, la destruction de l’appareil du vol MH17 dans l’est de l’Ukraine et l’utilisation d’armes chimiques dans l’attaque de Salisbury ont été amplement démontrées. D’autres pays tiers jouent toutefois également un rôle important dans la désinformation, et de nombreux acteurs au sein de l’Union fournissent également de fausses informations.

2.7.

En 2018, l’Union européenne a présenté un certain nombre d’initiatives contre la désinformation et les contenus illicites et en faveur de la protection des données:

Communication conjointe intitulée «Accroître la résilience et renforcer la capacité à répondre aux menaces hybrides»[JOIN(2018) 16];

Recommandation sur les mesures destinées à lutter, de manière efficace, contre les contenus illicites en ligne [C(2018) 1177];

Règlement relatif à la prévention de la diffusion de contenus à caractère terroriste en ligne [COM(2018) 640];

Règlement concernant une procédure de vérification relative aux infractions aux règles en matière de protection des données à caractère personnel dans le contexte des élections au Parlement européen [COM(2018) 636] (1);

Directive «Services de médias audiovisuels»révisée [directive (UE) 2018/1808];

Communication intitulée «Lutter contre le contenu illicite en ligne – Pour une responsabilité accrue des plateformes en ligne»[COM(2017) 555] (2);

Règlement établissant le Centre européen de compétences industrielles, technologiques et de recherche en matière de cybersécurité et le Réseau de centres nationaux de coordination [COM(2018) 630] (3);

Communication intitulée «Lutter contre la désinformation en ligne: une approche européenne»[COM(2018) 236] (4) et rapport sur sa mise en œuvre [COM(2018) 794];

Communication intitulée «Garantir des élections européennes libres et équitables»[COM(2018) 637], présentée les 19 et 20 septembre 2018 lors de la réunion des dirigeants de l’Union européenne tenue à Salzbourg-.

2.8.

Dans la perspective des élections du Parlement européen de 2019 et des plus de 50 élections présidentielles, nationales ou locales et régionales qui auront lieu dans les États membres d’ici 2020, la situation appelle une action coordonnée urgente et immédiate visant à protéger l’Union, ses institutions et ses citoyens contre la désinformation.

3.   Contenu essentiel du plan d’action contre la désinformation

3.1.

Le plan d’action JOIN(2018) 36 de la Commission et de la haute représentante de l’Union répond à l’appel du Conseil européen en faveur de mesures visant à «protéger les systèmes démocratiques de l’Union et lutter contre la désinformation». La réponse coordonnée à la désinformation repose sur quatre piliers:

3.2.

Améliorer les capacités des institutions de l’Union à détecter, analyser et mettre en lumière les cas de désinformation

Les task-forces sur la communication stratégique et les délégations de l’Union seront renforcées en augmentant leurs effectifs et en les dotant de nouveaux outils.

Les mandats des task-forces sur la communication stratégique pour les Balkans occidentaux et le Sud seront réévalués.

3.3.

Mieux répondre de manière coordonnée et conjointe à la désinformation

Un système d’alerte rapide sera mis en place d’ici le mois de mars 2019 pour réagir aux campagnes de désinformation, en étroite collaboration avec les réseaux existants, le Parlement européen, ainsi que l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord et le mécanisme d’intervention rapide du G7.

Les efforts de communication sur les valeurs et l’action de l’Union seront intensifiés.

Les communications stratégiques dans le voisinage de l’Union seront renforcées.

3.4.

Mobiliser le secteur privé pour combattre la désinformation

Un code de bonnes pratiques contre la désinformation a été publié le 26 septembre 2018 à l’intention des plateformes en ligne, des annonceurs et du secteur de la publicité. La Commission surveillera étroitement et continuellement sa mise en œuvre.

3.5.

Sensibiliser la population et améliorer la résilience de la société

Des campagnes ciblées destinées à la population et des formations destinées aux médias et aux faiseurs d’opinion dans l’Union et dans son voisinage seront organisées afin de sensibiliser davantage aux effets négatifs de la désinformation.

Les efforts visant à soutenir les médias indépendants et un journalisme de qualité ainsi que la recherche sur la désinformation seront poursuivis.

Les États membres devraient, en coopération avec la Commission, apporter leur soutien à la création d’équipes multidisciplinaires de vérificateurs de faits et de chercheurs indépendants ayant une connaissance spécialisée des environnements d’information locaux afin de détecter et de dénoncer les campagnes de désinformation dans divers réseaux sociaux et médias numériques.

Dans le cadre de la Semaine de l’éducation aux médias qui aura lieu en mars 2019, la Commission soutiendra, en partenariat avec les États membres, une coopération transfrontière entre des praticiens de l’éducation aux médias.

Les États membres devraient mettre en œuvre sans tarder les dispositions de la directive «Services de médias audiovisuels»relatives à l’éducation aux médias.

La Commission surveillera de près les modalités de mise en œuvre du «paquet électoral»et fournira, selon les besoins, un soutien et des conseils.

4.   Observations générales

4.1.

Le CESE prend bonne note de la définition de la désinformation contenue dans l’initiative, à savoir des informations dont on peut vérifier qu’elles sont fausses ou trompeuses, qui constituent une menace pour la démocratie et causent un préjudice public. Il tient toutefois à souligner qu’outre les fausses informations, les informations hautement sélectives, la diffamation, les propos alarmistes et l’incitation à la haine s’attaquent aux droits (et libertés) fondamentaux des citoyens et aux droits des minorités. La désinformation la plus efficace contient toujours une part de vérité. Des actions multiples de la part de tous les acteurs concernés sont donc nécessaires pour fournir des informations de qualité et sensibiliser la population.

4.2.

La diffusion de la désinformation relève aujourd’hui d’une guerre hybride et s’inscrit dans un objectif politique clair. Le CESE se félicite dès lors de cette initiative au service d’une action coordonnée visant à protéger l’Union, ses institutions et ses citoyens contre la désinformation. S’il insiste sur l’urgence de telles mesures, il craint également que ce plan d’action n’ait qu’une incidence limitée étant donné l’imminence des élections européennes de mai 2019. Il ne fait cependant aucun doute qu’à long terme, ces efforts communs de lutte contre la désinformation joueront un rôle majeur dans la protection des systèmes démocratiques de l’Union.

4.3.

Le CESE reconnaît que la désinformation découle principalement de trois sources: la Fédération de Russie (ce qui a été parfaitement démontré par le Service européen pour l’action extérieure), d’acteurs économiques et de médias d’autres pays tiers (notamment la Chine et les États-Unis), et, enfin, de sources internes, à savoir divers médias d’information présents dans des pays de l’Union européenne elle-même, ainsi que des mouvements et organisations politiquement extrémistes. Le CESE appelle la Commission à étendre en conséquence ses activités de surveillance et à prendre des contre-mesures.

4.4.

Le CESE souligne qu’il est urgent que les États membres prennent les mesures nécessaires pour préserver l’intégrité de leurs systèmes et infrastructures électoraux, et qu’ils testent ces mesures avant les élections européennes, mais aussi durant et après le processus électoral. Il est essentiel que la Commission européenne les soutienne dans cette tâche. L’échange de bonnes pratiques, telles que l’exemple suédois de 2018, devrait servir de modèle à cet effet.

4.5.

Le CESE accueille favorablement le point de vue de la Commission selon lequel une riposte globale ne pourra être opposée à la désinformation que si les organisations de la société civile contribuent activement à la combattre. Le renforcement de la résilience nécessite d’associer tous les secteurs de la société, et notamment d’améliorer l’éducation aux médias afin que les citoyens sachent comment repérer la désinformation et s’en défendre. Les actions de sensibilisation et d’éveil à la pensée critique commencent dès l’école et doivent se répéter régulièrement, tout au long de la vie. Elles nécessitent cependant un financement approprié, à la fois dès maintenant et dans le nouveau cadre financier pluriannuel.

4.6.

Le CESE soutient de manière proactive les efforts conjoints de lutte contre la désinformation, par l’intermédiaire notamment de ses avis, de ses auditions, de ses manifestations «Going local»(Investir l’échelon local) et des nombreuses activités de presse menées par les professionnels de son groupe Communication.

4.7.

Les efforts conjoints doivent être soutenus par un maximum d’acteurs au niveau de l’Union européenne, des États membres et des partenaires du Sud et de l’Est, en veillant à ce que des organisations tant publiques que privées y soient associées. Les vérificateurs de faits indépendants et le journalisme de qualité jouent un rôle prépondérant et doivent bénéficier d’un financement approprié pour pouvoir agir quasiment en temps réel.

4.8.

À long terme, l’avenir de la démocratie en Europe repose avant tout sur une éducation appropriée aux médias. Le CESE soutient les efforts visant à parvenir à une meilleure compréhension des sources de la désinformation ainsi que des intentions, outils et objectifs sur lesquels elle s’appuie, et à mieux cerner comment et pourquoi des citoyens, et parfois des communautés toutes entières, sont sensibles à des discours de désinformation et deviennent parties intégrantes des mécanismes de diffusion des fausses informations. Le CESE se félicite en particulier des fonds affectés à cet objectif dans le cadre des programmes Horizon 2020 et Horizon Europe.

5.   Observations particulières et recommandations

5.1.

Le renforcement des task-forces sur la communication stratégique aurait dû intervenir depuis longtemps, comme le CESE l’a souligné dans de précédents avis (5). Le Comité accueille dès lors favorablement le projet visant à les doter de personnel supplémentaire et de nouveaux outils, et souscrit à l’invitation faite aux États membres de renforcer s’il y a lieu leurs capacités nationales dans ce domaine également. Compte tenu des ressources considérables consacrées dans certains pays à la production de contenus de désinformation, l’Union européenne se doit d’apporter une réponse appropriée; la hausse prévue des ressources affectées aux task-forces sur la communication stratégique ne peut donc être considérée que comme une première étape sur la voie d’une augmentation plus grande encore dans les années à venir.

5.2.

Le CESE convient que le mandat de la task-force East Stratcom devrait être maintenu et que celui des deux autres task-forces sur la communication stratégique (Balkans occidentaux et Sud) devrait être réévalué à la lumière de l’ampleur et de l’importance croissantes des activités de désinformation menées dans ces régions. Il invite instamment les États membres à contribuer aux travaux de ces task-forces en y détachant des experts nationaux. Cette démarche est indispensable pour garantir véritablement l’efficacité du système d’alerte rapide.

5.3.

Le CESE se félicite également des mesures visant à garantir des élections européennes libres et équitables, qui s’imposent de toute urgence, et de l’adoption recommandée de sanctions s’il y a lieu, y compris en cas d’utilisation illicite de données à caractère personnel en vue d’influencer l’issue des élections. Il se félicite par ailleurs de la bonne coopération avec les États-Unis, l’OTAN et la Norvège et demande que le rôle majeur du Royaume-Uni soit préservé, qu’il reste ou non membre de l’Union européenne. La lutte contre la désinformation doit être menée de manière solidaire par les États membres.

5.4.

Le plan d’action est accompagné d’un rapport sur les progrès accomplis (6) pour chacune des mesures adoptées, notamment en ce qui concerne le code de bonnes pratiques en tant qu’engagement volontaire contracté par les plateformes de médias sociaux et les annonceurs. Au titre du code de bonnes pratiques, les entreprises de l’internet sont tenues de réduire les recettes des comptes et sites web qui présentent l’information de manière fallacieuse, de lutter contre les faux comptes et les bots, de donner la priorité aux sources d’information fiables et d’accroître la transparence du financement de la publicité politique.

5.5.

S’il accueille favorablement le code de bonnes pratiques, le CESE émet des doutes quant à l’efficacité de telles actions volontaires, doutes qu’a également exprimés récemment la Commission lors de la présentation du premier rapport livré par Google, Facebook, Twitter et Mozilla le 29 janvier. La Commission est instamment invitée à proposer de nouvelles actions, y compris de nature réglementaire, comme l’imposition de sanctions si les contre-mesures ne sont pas déployées assez rapidement contre les faux comptes ou si la mise en œuvre d’autres éléments du code de bonnes pratiques reste insatisfaisante.

5.6.

Le CESE lance un appel pressant aux entreprises privées pour qu’elles commencent à considérer comme irresponsable et contraire à l’éthique le placement de publicités sur des plateformes en ligne qui contribuent à diffuser la désinformation, et les invite avec insistance à prendre des mesures pour empêcher un tel comportement.

Bruxelles, le 20 mars 2019.

Le président

du Comité économique et social européen

Luca JAHIER


(1)  Avis du CESE sur la «Protection des données à caractère personnel dans le contexte des élections européennes»(non encore paru au Journal officiel).

(2)  JO C 237 du 6.7.2018, p. 19.

(3)  Avis du CESE relatif au «Centre européen de compétences industrielles, technologiques et de recherche en matière de cybersécurité et réseau de centres nationaux de coordination»(non encore paru au Journal officiel).

(4)  JO C 440 du 6.12.2018, p. 183.

(5)  JO C 440 du 6.12.2018, p. 183.

(6)  COM(2018) 794.


5.7.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 228/95


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication conjointe au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen, au Comité des régions et à la Banque européenne d’investissement —“ Relier l’Europe à l’Asie — Éléments fondamentaux d’une stratégie de l’Union européenne”»

[JOIN(2018) 31 final]

(2019/C 228/14)

Rapporteur: Jonathan PEEL

Consultation

Commission européenne, 14.12.2018

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Relations extérieures»

Adoption en section spécialisée

26.2.2019

Adoption en session plénière

20.3.2019

Session plénière no

542

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

133/2/1

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) se félicite de la publication le 19 septembre 2018 de la communication conjointe de la Commission et de la Haute représentante de l’Union européenne intitulée «Relier l’Europe à l’Asie — Éléments fondamentaux d’une stratégie de l’Union européenne» (1).

1.1.1.

Cette initiative intervient à point nommé. L’ordre mondial est en train de changer à un rythme inédit depuis presque trente ans, l’ordre commercial mondial issu de la seconde guerre mondiale affronte des défis considérables, le centre de gravité de la puissance économique dans le monde se déplace vers l’orient et le pouvoir d’achat d’ensemble de l’Asie croît à un rythme exponentiel.

1.2.

Le CESE estime toutefois que la communication passe réellement à côté de l’occasion qui se présente, et s’inquiète vivement du nombre de lacunes stratégiques importantes qu’elle contient. Le document ne prend pas en compte les grandes réalités économiques et géopolitiques. Il ne s’y manifeste que très peu de pensée prospective qui soit originale. L’occasion n’a pas été saisie d’approfondir réellement la vision du développement futur des relations de l’Union européenne avec l’Asie et de leur connectivité, et l’on ne constate que peu de reconnaissance manifeste de la grande diversité et de la complexité de cette relation.

1.2.1.

La communication ne comporte aucune feuille de route ni aucune mention claire des objectifs stratégiques de l’Union européenne, qu’ils soient complémentaires ou concurrentiels.

1.2.2.

Le CESE se demande pourquoi il est si peu fait mention, pour autant que ce soit même le cas, d’évolutions récentes d’une importance capitale qui touchent aussi bien l’Union européenne que l’Asie, dont notamment:

l’absence de toute tentative de définir ou d’examiner ne fût-ce qu’un seul des grands défis stratégiques auxquels l’Europe devra faire face dans ses futures relations avec l’Asie;

l’absence d’encouragement ou d’étude de la connectivité menée par l’Asie ou des questions d’investissement dirigées, dans l’ensemble ou en partie, vers l’Europe;

l’absence de référence aux accords essentiels de partenariat dans le domaine commercial ou économique conclus entre l’Union européenne et des pays d’Asie de première importance, qu’ils soient déjà en vigueur ou encore en cours d’élaboration: nous nous étonnons particulièrement de l’absence de référence au récent APE UE-Japon, l’accord le plus significatif en la matière (qui est désormais en vigueur);

l’absence de référence, dans le contexte de la «connectivité entre les personnes», aux dialogues existants de la société civile entre l’Union européenne et l’Asie, notamment aux organismes phares de suivi par la société civile mis en place dans le cadre de ces accords commerciaux;

l’absence de toute tentative de définir le rôle que pourrait jouer la société civile, en dépit de ce rôle actif qu’elle endosse déjà au niveau du suivi, notamment dans le contexte de la faiblesse de la tradition qui prévaut en Asie en la matière;

l’absence de toute tentative d’étudier les questions sociales, bien que celles-ci soient souvent essentielles pour de tels organes — notamment la mise en œuvre des principales conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT), la promotion de l’égalité des sexes (objectif de développement durable 5) ou même les droits de l’homme;

l’absence de mention de l’initiative chinoise «Une ceinture, une route» — bien qu’elle ne soit pas seulement dirigée vers l’Europe, mais qu’elle affecte également tous les autres pays asiatiques, et qu’elle propose un réel soutien commercial, financier et infrastructurel;

l’absence de prise en compte du fait que l’initiative «Une ceinture, une route» puisse impliquer de lourdes dettes sans pour autant créer un grand nombre de nouveaux emplois, et l’absence d’étude des chances ou des défis stratégiques qu’elle peut présenter pour l’Europe;

l’absence, si ce n’est une simple mention en passant, d’étude de la stratégie de l’Union européenne pour l’Asie centrale, et des conséquences pour cette région du monde du jeu de pouvoir stratégique qui se noue entre la Chine, la Fédération de Russie et de nombreux autres acteurs dont la Turquie, l’Iran et l’Inde;

l’absence de mention et d’évaluation de l’Union économique eurasiatique, créée par la Russie, qui regroupe à la fois des pays d’Europe et d’Asie centrale et entend poursuivre son expansion;

l’absence de mention de la gestion de la demande d’énergie et des intérêts en concurrence pour les vastes ressources en hydrocarbures découvertes en Asie centrale, mis à part la référence que fait la communication au soutien de «la connectivité énergétique tant entre les partenaires asiatiques qu’avec ceux-ci»;

l’absence de référence aux initiatives actuelles de connectivité dans les domaines des transports ou de l’énergie, telles que la commission intergouvernementale du corridor de transport Europe-Caucase-Asie (TRACECA) (2);

l’absence de toute tentative d’établir un lien entre les transports et les besoins d’infrastructures dans cette région du monde et, par exemple, l’objectif de développement durable 9, qui traite des infrastructures;

de même, les défis que l’Union européenne et l’Asie devront relever pour réaliser les objectifs qui découlent de l’accord de Paris sur le climat sont à peine évoqués, notamment en matière de pollution de l’environnement;

l’absence de référence au risque croissant de conflit armé, notamment à l’utilisation des technologies spatiales et numériques, ou à la nécessité d’ouvrir un dialogue avec les pays d’Asie à ce sujet;

l’absence de référence à la meilleure façon de collaborer avec les pays asiatiques de manière à soutenir les organisations internationales, notamment l’Organisation mondiale du commerce (OMC);

l’Inde ne fait l’objet que d’une mention furtive, en dépit de sa taille et de sa puissance potentielle, et l’Iran ne bénéficie que d’une seule mention, alors qu’il s’agit d’un acteur essentiel dont le rôle s’accroît dans la région au sens large.

1.3.

Le CESE se félicite toutefois que la communication mette l’accent sur une connectivité durable, complète et fondée sur des règles. Elle fait valoir, à juste titre, l’importance de promouvoir «une économie circulaire, de faibles émissions de gaz à effet de serre et la résilience future face au changement climatique en vue d’atteindre les objectifs de développement durable (ODD) et les objectifs fixés dans l’accord de Paris sur le climat».

1.4.

Le CESE estime qu’il s’impose que l’Union européenne réponde de manière officielle à cette initiative «Une ceinture, une route».

1.4.1.

Nombreux sont ceux qui escomptaient que la communication à l’examen constitue un élément essentiel de la réponse de l’Union européenne à l’initiative «Une ceinture, une route», mais cette dernière n’y est pas mentionnée. À l’origine, cette initiative se nommait «Ceinture économique de la route de la soie», en référence à la «route de la soie» qui est historiquement la route qui relie l’Union européenne et l’Asie. L’Union européenne dispose déjà d’un partenariat stratégique avec la Chine. Alors que l’initiative «Une ceinture, une route» vise à établir concrètement des liens entre l’Asie et l’Europe, la communication à l’examen revêt un caractère bien plus vaporeux.

1.4.2.

Le CESE attire l’attention sur le lien particulier établi par la commission des affaires étrangères du Parlement européen (3) entre l’initiative «Une ceinture, une route» et le format «16 + 1» rassemblant la Chine et des pays d’Europe de l’est (dont onze États membres de l’Union européenne). Dans son rapport, celle-ci redoute que l’engagement de la Chine d’investir 3 milliards de dollars des États-Unis (USD) dans ces pays puisse susciter «des dettes importantes» contractées par les gouvernements européens concernés «auprès de banques publiques chinoises […] et qui créent peu d’emplois en Europe». La communication à l’examen met fortement l’accent sur la viabilité budgétaire et les financements innovants, tout en faisant fi de cette préoccupation.

1.4.3.

Le Comité estime qu’il est primordial d’établir un lien formel entre l’initiative «Une ceinture, une route» et les objectifs de développement durable. La communication met en avant les objectifs de développement durable. La table ronde UE-Chine, qui rassemble le CESE et le Conseil économique et social de Chine (CESC), a avalisé ce lien à deux reprises lors de récentes réunions.

1.4.4.

L’initiative «Une ceinture, une route» doit jouer dans les deux sens. Le CESE souscrit à l’avis de la Chambre de commerce de l’Union européenne en Chine, selon lequel l’avenir de cette initiative dépend de l’équivalence des flux commerciaux et d’investissement dans les deux sens, ce qui contraindra la Chine à ouvrir ses marchés. Le monde des affaires de l’Union a fait part de ses préoccupations et demandé un surcroît d’information et de transparence avant d’être en mesure de s’engager dans les projets menés sur la base de l’initiative «Une ceinture, une route». Ces préoccupations sont également pertinentes dans un contexte panasiatique.

1.5.

Le CESE recommande vivement de consacrer bien plus de ressources aux relations de l’Union européenne avec l’Asie, «où vivent,» comme le précise le Service européen pour l’action extérieure (SEAE), «deux tiers des pauvres de la planète». Par rapport à la part bien plus importante du budget de l’Union en faveur du développement qui est allouée à l’Afrique et à l’Amérique latine, les ressources attribuées à de nombreux pays asiatiques beaucoup plus pauvres sont insuffisantes.

1.6.

Le Comité considère que la Commission européenne devrait étendre les instruments économiques de politique étrangère à l’appui des entreprises européennes — et plus particulièrement des consortiums — qui existent déjà pour l’Afrique dans le cadre d’InvestEU, afin de couvrir l’Asie et d’autres parties du monde. Ce soutien devrait également être assuré en respectant les droits des travailleurs lors des procédures de marchés publics, y compris dans les pays tiers qui bénéficient d’investissements étrangers.

1.7.

La partie consacrée à l’énergie brille par sa brièveté. Le Comité presse l’Union européenne de mettre pleinement en œuvre sa grande expertise en matière de renforcement de la coopération au service de l’amélioration de l’efficacité énergétique et du déploiement de sources d’énergies renouvelables. Nous relevons également l’absence de toute mention des divers intérêts concurrents pour les vastes ressources en hydrocarbures découvertes en Asie centrale, et nous déplorons l’absence de référence à la question de l’eau, un autre bien stratégique hautement important, vital et potentiellement dangereux.

1.8.

Le CESE approuve les observations de la communication en matière de connectivité numérique, notamment l’appel à mettre en place «un environnement TIC pacifique, sûr et ouvert, tout en faisant face aux menaces qui pèsent sur la cybersécurité et en protégeant les droits de l’homme et les libertés en ligne, y compris les données à caractère personnel». Toutefois, il est fort décevant que rien ne soit dit de la manière d’agir à l’endroit des pays d’Europe ou d’Asie qui adoptent des approches très différentes de ces questions.

1.9.

Le CESE est surpris de lire que l’Union européenne «devrait s’employer à connecter le réseau transeuropéen de transport (RTE-T), bien développé, aux réseaux en Asie»; nous réitérons notre recommandation (4) formulée pour la première fois en 2011 selon laquelle les corridors de transport que proposent la Chine et l’Union européenne doivent être pleinement alignés, notamment, lorsque cela est possible, en ce qui concerne l’infrastructure ferroviaire.

1.9.1.

Le CESE réitère également sa recommandation de 2015 selon laquelle l’Union européenne devait accroître ses efforts pour obtenir des résultats de la commission intergouvernementale TRACECA «afin d’accélérer le développement d’une chaîne d’infrastructure viable, ce qui garantira un transport multimodal (notamment avec une infrastructure ferroviaire et routière) en reliant le corridor aux réseaux transeuropéens de transport».

2.   Contexte: l’importance de l’Asie pour l’Union européenne

2.1.

Le CESE apprécie de figurer expressément parmi les destinataires de la communication conjointe sur le thème «Relier l’Europe à l’Asie — Éléments fondamentaux d’une stratégie de l’Union européenne», publiée brièvement après la tenue du 12e sommet Asie-Europe (ASEM) (5), à Bruxelles, en octobre 2018.

2.2.

Cette initiative visant à définir une stratégie de l’Union européenne pour connecter l’Europe et l’Asie intervient à point nommé. Le monde connaît à l’heure actuelle des mutations structurelles fondamentales. Le renforcement de la puissance économique et du pouvoir d’achat de l’Orient ne cesse de s’accélérer; l’ordre commercial mondial affronte ses plus grands défis du fait de l’imposition unilatérale par le gouvernement des États-Unis de droits de douane à l’importation et de sa remise en cause de l’OMC; l’Union européenne doit relever des défis internes sans précédent, tandis que de nombreux pays (comme par exemple le Royaume-Uni et la Turquie) connaissent également de grandes mutations internes, ou, à l’instar de la Russie ou de l’Iran, réaffirment leur place dans le monde.

2.2.1.

La connectivité entre l’Union européenne et l’Asie existe depuis des millénaires. Avant l’ouverture de la voie maritime en 1497, elle était matérialisée en premier lieu par ce que l’on appelle aujourd’hui les routes de la soie. Ces dernières avaient une portée plus large que le commerce; elles englobaient tous les échanges engageant des biens, des idées et des peuples, et recouvraient notamment les interactions culturelles, médicales et religieuses, l’accès aux ressources essentielles et les innovations technologiques. Au départ de l’Asie, les routes vers l’Occident permettaient également d’accéder à l’Afrique, un élément que l’on retrouve à nouveau à l’œuvre dans le cadre de l’initiative chinoise «Une ceinture, une route».

2.3.

Quatre grands pays asiatiques figurent par les dix premiers partenaires commerciaux de l’Union européenne, à savoir la Chine, le Japon, la République de Corée et l’Inde. Sept autres pays asiatiques figurent parmi les trente premiers. Avec certains de ces pays, l’Union européenne a déjà négocié d’importants accords de libre-échange (ALE) ou des accords de partenariat économique (APE), que ce soit avec la République de Corée (no 8), entré en vigueur en 2011, avec le Japon (no 6), désormais en vigueur, ou encore avec Singapour (no 14) et le Viêt Nam (no 19), pour lesquels il convient encore de recueillir le consentement du Parlement européen. À l’heure actuelle, les négociations d’ALE de l’Union européenne avec l’Indonésie (no 29), la Malaisie (no 21), la Thaïlande (no 24) et d’autres pays de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE), soit se poursuivent, soit se trouvent dans l’impasse.

2.3.1.

Chacun des ALE ou des APE conclus prévoit un solide chapitre sur le commerce et le développement durable, qui accorde un rôle actif à la société civile en matière de suivi dans le cadre duquel le CESE est à son tour fortement engagé [il a largement traité de cette question dans de récents avis (6)]. Des accords distincts de protection des investissements (API) ont également été conclus avec Singapour et le Viêt Nam, sans qu’il ait encore été possible d’y parvenir avec le Japon.

2.3.2.

En revanche, les négociations menées avec la Chine (no 2) en vue d’un accord complet et distinct d’investissement ont débuté en 2013, mais ne progressent que lentement: le 20e cycle des négociations est en cours. Les négociations en vue de la conclusion d’un ALE avec l’Inde (no 9), lancées en 2007, sont toutefois dans l’impasse depuis 2013.

2.3.3.

Le CESE est fort surpris de relever que la communication à l’examen ne fait état d’aucun de ces accords ni de ces négociations.

2.4.

L’Asie représente quelque 60 % de la population mondiale, quelque 35 % des exportations de l’Union et 45 % de ses importations. Outre des partenaires industrialisés à hauts revenus et des économies émergentes dynamiques, l’Asie abrite également «deux pauvres sur trois dans le monde», comme le fait valoir le Service européen pour l’action extérieure (SEAE) sur son site internet (7). Ce dernier constate que la coopération avec l’Asie en matière de développement continue par conséquent de figurer parmi les préoccupations premières de l’Union, ce qui se traduit par l’allocation de plus de 5 milliards d’euros, et note de surcroît que des politiques sont mises en place conjointement afin de relever des défis communs tels que le changement climatique, le développement durable, la sécurité et la stabilité, la gouvernance et les droits de l’homme, ainsi que la prévention des catastrophes naturelles et d’origine humaine et la réaction face à celles-ci. Or, les montants alloués à l’Afrique et à l’Amérique latine sont, par comparaison, beaucoup plus élevés.

2.5.

L’Asie abritant des peuples et des cultures extrêmement divers, il n’existe pas de solution universelle applicable à tous. Elle n’est aucunement à l’image de l’Union européenne. Le respect des droits de l’homme et l’approche concernant les questions sociales varient énormément entre les différentes régions d’Asie. Mis à part les puissances économiques d’Asie orientale et l’Inde (où toutefois le développement économique doit encore tenir ses promesses), ces pays sont d’une diversité extrême. Même au sein de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est, Singapour côtoie le Myanmar, le Laos et le Cambodge, les trois pays les moins développés.

2.6.

Pour sa part, le Comité a récemment élaboré plusieurs avis touchant à l’Asie, notamment en ce qui concerne les négociations que mène l’Union européenne en matière de commerce et d’investissement, ainsi que deux avis sur l’Asie centrale (8), le deuxième ayant été élaboré en 2015 à la demande de la Lettonie qui exerçait alors la présidence du Conseil de l’Union européenne.

3.   Observations générales: des éléments fondamentaux?

3.1.

Il y a lieu de se féliciter que la communication mette l’accent, bien que de manière assez générale, sur une connectivité durable, complète et fondée sur des règles. Il s’agit là notamment de la protection de l’environnement, de la sûreté et de la sécurité, tout comme des droits sociaux et individuels et de la nécessité d’une concurrence équitable et transparente. Elle fait également valoir l’importance de promouvoir «une économie circulaire, de faibles émissions de gaz à effet de serre et la résilience future face au changement climatique en vue d’atteindre les objectifs de développement durable (ODD) et les objectifs fixés dans l’accord de Paris sur le climat».

3.2.

Le CESE se serait fortement inquiété si la communication n’avait pas mentionné tous ces éléments, tout particulièrement lorsque l’on sait que ces questions essentielles n’ont cessé d’être mises en avant et développées depuis 2006, date à laquelle la Commission a publié sa communication sur le commerce intitulée «Une Europe compétitive dans une économie mondialisée». Cette dernière visait à faire en sorte que les bénéfices de la libéralisation des échanges commerciaux et les valeurs européennes «soient bien répercutés sur les citoyens. Aspirant à la justice et à la cohésion sociale sur notre territoire, nous devons en outre chercher à promouvoir nos valeurs — y compris les normes en matière sociale et environnementale et la diversité culturelle — dans le monde entier» (9). La communication de 2015 sur «Le commerce pour tous» développe ces questions (10).

3.3.

Par conséquent, nous approuvons vivement l’axiome sous-jacent de la communication conjointe à l’examen, qui relève du registre de l’exhortation. Malgré cela, il semble qu’elle soit fortement déconnectée de nombreux développements récemment intervenus en Asie, notamment avec ceux qui peuvent constituer au fil du temps des défis stratégiques pour l’Europe elle-même. Parmi ces développements figurent notamment l’initiative «Une ceinture, une route», l’Organisation de coopération de Shanghai, la connectivité accrue entre la Russie, la Chine, l’Asie centrale, la Turquie, l’Iran et même l’Inde, particulièrement en ce qui concerne l’énergie et les transports.

3.3.1.

C’est une grande déception que n’ait pas été saisie l’occasion d’exposer une vision réelle et approfondie des développements futurs des relations de l’Union européenne avec l’Asie et de leur connectivité. Nous ne relevons aucune étude de ce que les pays asiatiques attendent peut-être, quant à eux, de l’Union européenne: des investissements, des marchés, une aide au renforcement des capacités? Le document à l’examen apparaît davantage comme une liste d’«éléments fondamentaux» déjà en place que comme l’exposé des ambitions et des souhaits concrets de l’Union européenne pour l’avenir. Il ne s’y manifeste que très peu de pensée prospective qui soit originale et encore moins qui sorte des sentiers battus.

Peut-être que cela n’a jamais été le but de la communication conjointe, mais nous estimons que de nombreuses occasions essentielles ont été manquées. Celles-ci ont déjà été exposées en détail plus haut.

4.   Connectivité

4.1.

La connectivité est le thème central de la communication à l’examen. Elle s’entend telle que définie lors de la réunion ministérielle du Dialogue Asie-Europe (ASEM) en novembre 2017. Bien que ce thème ait été retenu pour le sommet de l’ASEM en 2018, la communication fait l’impasse sur ce forum. En l’occurrence, la connectivité couvre un large éventail de questions, réparties en six domaines spécifiques. Ceux-ci ont trait notamment aux infrastructures ferroviaires, routières, aériennes et maritimes, aux infrastructures énergétiques (électricité, gaz), aux technologies de l’information et de la communication (TIC), à l’intelligence artificielle et aux réseaux intelligents, ainsi qu’aux relations commerciales et d’investissement, et à la dimension capitale des relations interpersonnelles.

4.2.

À la «connectivité durable», la communication joint la «viabilité budgétaire», qu’elle développe dans une section ultérieure intitulée «Partenariats internationaux en matière financière» et qu’elle étudie en profondeur. Alors que cette section comprend une référence à la Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures, qui n’a guère les faveurs des États-Unis, aucune mention n’est faite des préoccupations exprimées par le Parlement européen (11) au sujet de l’initiative chinoise «16 + 1», qui crée des dettes importantes mais peu d’emplois en Europe, et dont les effets ne s’arrêtent et ne s’arrêteront pas aux frontières de l’Union européenne. Ces préoccupations sont nées à la suite de l’engagement qu’a pris la Chine lors du sommet de 2017 d’investir 3 milliards d’USD dans les infrastructures dans les seize pays européens concernés, le Parlement européen ayant alors souligné que de tels projets «ne doivent pas être attribués dans le cadre d’un appel d’offres non transparent».

4.2.1.

Le Parlement européen invitait les États membres à œuvrer bien plus étroitement de manière «à veiller à ne pas compromettre les intérêts nationaux et européens pour un soutien financier à court terme». Cette préoccupation d’ensemble trouve un écho dans la proposition de l’Union européenne relative au filtrage en son sein des investissements directs étrangers (12).

4.2.2.

Le Comité constate que si des instruments de soutien aux entreprises et consortiums européens existent dans le cas de l’Afrique, l’Union européenne n’a rien prévu de tel concernant ses relations avec l’Asie. Ne serait-ce que parce que l’absence d’instruments de ce type désavantage les entreprises européennes par rapport aux entreprises chinoises, qui sont soutenues par l’initiative «Une ceinture, une route», le Comité estime que la Commission doit désormais élargir la politique en vigueur pour l’Afrique et étendre le programme InvestEU afin de couvrir les risques liés aux investissements tant en Asie que dans d’autres parties du monde. Ce soutien devrait également être assuré en respectant les droits des travailleurs lors des procédures de marchés publics, y compris dans les pays tiers qui bénéficient d’investissements étrangers.

4.3.

En revanche, la «connectivité complète» comprend la connectivité des transports, du numérique et de l’énergie. Pour ce qui est de la connectivité numérique, la section 3.2 de la communication évoque des interconnexions de réseaux à haute capacité, un accès universel et abordable à l’internet et «un environnement TIC pacifique, sûr et ouvert, tout en faisant face aux menaces qui pèsent sur la cybersécurité et en protégeant les droits de l’homme et les libertés en ligne, y compris les données à caractère personnel». Toutefois, rien n’est dit de la manière d’agir à l’endroit des pays qui adoptent des approches très différentes de ces questions.

4.4.

En matière de transports, la communication relève que 70 % des échanges s’effectuent par voie maritime et plus de 25 % par voie aérienne, une situation inévitable du fait des distances en question. Nous notons cependant qu’en matière de formalités douanières, il n’a été apparemment nullement tenu compte de l’accord multilatéral sur la facilitation des échanges de l’OMC, entré en vigueur en février 2017.

4.4.1.

La communication reconnaît que le potentiel de croissance dans le domaine des transports est considérable, tout en relevant que «le transport ferroviaire demeure relativement marginal». Pour de nombreux pays d’Asie, le transport maritime est bien plus approprié et un navire peut transporter un nombre 200 fois plus important de containers que ne peut le faire un train. Toutefois, le transport maritime constitue un problème mondial et non asiatique. La communication indique que «le transport routier est généralement approprié pour de moyennes distances […] et en tant que réseau de transport secondaire […]». Mais pourquoi n’est-il nullement fait mention de la commission intergouvernementale TRACECA (commission intergouvernementale du corridor de transport Europe-Caucase-Asie) (13)?

4.4.2.

L’une des recommandations essentielles de l’avis du CESE sur l’Asie centrale (14) adopté en 2015 prévoyait que l’Union européenne devait accroître ses efforts pour obtenir des résultats de la commission intergouvernementale TRACECA «afin d’accélérer le développement d’une chaîne d’infrastructure viable, ce qui garantira un transport multimodal (notamment avec une infrastructure ferroviaire et routière) en reliant le corridor aux réseaux transeuropéens de transport».

4.4.3.

Le CESE y faisait valoir que «TRACECA reste une initiative importante aux yeux de l’Union européenne. Il s’agit d’un programme international qui vise à renforcer les relations économiques, le commerce, le transport et les communications depuis le bassin de la mer Noire vers le Caucase du Sud et l’Asie centrale sur la base des systèmes de transport existants, de la volonté politique et des aspirations communes de ses 13 États membres». S’il existe à cet égard des problèmes de corruption, il convient de les aborder directement.

4.4.4.

Le CESE est également surpris de ne trouver qu’une simple proposition selon laquelle l’Union européenne «devrait s’employer à connecter le réseau transeuropéen de transport (RTE-T), bien développé, aux réseaux en Asie». Notre avis de 2015 répétait notre «recommandation de 2011 selon laquelle les corridors de transport que proposent la Chine et l’Union européenne doivent être pleinement alignés, notamment, lorsque cela est possible, en ce qui concerne l’infrastructure ferroviaire». Le CESE réitère à nouveau cette recommandation en 2019.

4.4.5.

Ce même avis ajoutait que: «Créer une infrastructure ferroviaire stratégique et routière moderne et interopérable le long de la route de la soie revêt un intérêt majeur pour la Chine, l’Union européenne et la Russie. La réussite de l’intégration de cette région grâce à une infrastructure moderne et fiable devrait ouvrir la voie non seulement à une plus grande intégration économique régionale mais également à la promotion de la mobilité des personnes et des échanges multiculturels, ce qui créera un meilleur environnement pour faire progresser l’état de droit et la démocratie.» Dans le contexte de l’ODD 9 (bâtir une infrastructure résiliente, promouvoir une industrialisation durable et encourager l’innovation), cette question a depuis lors encore gagné en urgence.

4.4.6.

Nous déplorons également que rien n’ait été dit de l’extension des connexions routières et ferroviaires en direction de l’Inde et de l’Asie du sud-est, en dépit des récents et considérables travaux de construction de routes, tant en Asie centrale qu’en Iran. À cet égard, la dénonciation par les États-Unis du plan d’action global commun (15) a pu jouer un rôle crucial.

4.5.

La section (3.3) consacrée à la connectivité énergétique brille par sa brièveté. Le CESE avait précédemment indiqué que «la viabilité des liens de l’Union européenne avec les réserves d’énergie importantes de l’Asie centrale doit être fondée sur des considérations pratiques et économiques. L’Union européenne a raison de participer au développement du secteur de l’énergie dans ces pays, ne fût-ce qu’en raison du fait que leurs réserves offrent à l’Europe un approvisionnement complémentaire (et non pas alternatif), bien que cette option soit compliquée par des considérations de transit et de transport. Cependant, il importera d’éviter tout risque de malentendu avec la Chine au titre de notre intérêt mutuel à l’égard de l’accroissement des approvisionnements en énergie provenant d’Asie centrale».

4.5.1.

À nouveau, le CESE renouvelle sa recommandation que «l’Union européenne mette en œuvre sa grande expertise en matière de renforcement de la coopération au service de l’amélioration de l’efficacité énergétique et du déploiement de sources d’énergies renouvelables, en raison du fort potentiel encore inexploité dans la région».

4.5.2.

C’est avec surprise que le CESE relève l’absence de mention de l’eau, bien que celle-ci soit un bien vital pour la plus grande part de l’Asie et puisse constituer une réelle source de conflit. La gestion de l’eau, tout comme la viabilité environnementale, revêt une importance capitale, notamment dans ses dimensions d’efficacité et de gaspillage.

4.5.3.

Les pénuries d’eau se verront aggravées par le changement climatique. Un risque de conflit existe déjà en Asie centrale entre les pays riches en eau, mais dont les ressources en hydrocarbures sont insuffisantes, et ceux qui possèdent du pétrole et du gaz, mais manquent d’eau. La question de la construction potentielle de barrages sur d’importants cours d’eau, tels que le Mékong, demeure en suspens, alors que l’on peut s’attendre à ce que la fonte du «troisième pôle», à savoir la calotte glaciaire de l’Himalaya, pose également un problème particulier.

5.   L’initiative «Une ceinture, une route» et une réflexion plus générale sur les relations UE-Asie

5.1.

Le CESE ne sera pas le seul à être surpris que la communication à l’examen ne mentionne pas l’initiative «Une ceinture, une route», car nombreux sont ceux qui s’attendaient à ce que cette communication constitue un élément essentiel de la réponse de l’Europe.

5.1.1.

Lorsque le président Xi l’a lancée pour la première fois en 2013 à Astana, cette initiative se nommait «Ceinture économique de la route de la soie», en référence aux «routes de la soie» qui sont historiquement les routes qui relient l’Union européenne et l’Asie.

5.1.2.

L’initiative «Une ceinture, une route» s’appuyait à l’origine sur un financement de 16,3 milliards d’USD, devenu depuis bien plus important; et il s’agit là d’espèces sonnantes et trébuchantes. Destinée non seulement à resserrer les liens avec l’Europe, elle s’inscrivait dans le cadre d’une vision plus large afin d’étendre la coopération régionale entre la Chine et d’autres pays d’Asie, ainsi qu’avec l’Afrique, pour renforcer la connectivité régionale, approfondir les relations commerciales et économiques et développer les liens interpersonnels. Elle vise désormais à établir des échanges commerciaux et à construire des infrastructures entre plus de soixante-dix pays par voie terrestre et maritime, en apportant un surcroît d’investissements, de développement, de connectivité financière et interpersonnelle; il s’agit là d’un signal fort de la volonté de la Chine de jouer un rôle plus important à l’échelle mondiale, en dépit des préoccupations qu’expriment de nombreux acteurs (notamment l’Inde et le Japon) quant aux conditions politiques et financières en rapport.

5.1.3.

Le Comité estime qu’il s’impose que l’Union européenne réponde de manière officielle à cette initiative. Le partenariat stratégique UE-Chine est important. Alors que l’initiative «Une ceinture, une route» vise à établir concrètement des liens en matière d’infrastructures, de transport et de commerce, la communication à l’examen revêt un caractère bien plus vaporeux. L’Union européenne souhaite-t-elle qu’à l’avenir, tous les chemins puissent mener à Pékin plutôt qu’à Rome?

5.2.

L’initiative «Une ceinture, une route» est un élément capital de la connectivité entre l’Union européenne et l’Asie. Il a déjà été fait référence aux préoccupations formulées par le Parlement européen. La Chambre de commerce de l’Union européenne en Chine, à son tour, a souligné à quel point il est important que l’initiative «Une ceinture, une route» soit caractérisée par la réciprocité, estimant que son avenir dépend de l’équivalence des flux commerciaux et d’investissement dans les deux sens, ce qui contraindra la Chine à ouvrir ses marchés.

5.2.1.

La Chambre considère que le succès de l’initiative sera largement tributaire de l’ouverture des marchés, de l’équilibre des échanges, de la transparence et de la réciprocité. Elle fait valoir que l’Asie et le reste du monde ont grandement besoin d’infrastructures solides, que l’amélioration de la connectivité peut contribuer considérablement à la croissance économique et que par conséquent, une telle approche est conforme aux intérêts de tous les participants à cet ambitieux projet. Elle demande dès lors la mise en place de procédures transparentes de passation des marchés publics qui permettront aux entreprises européennes et chinoises, et plus particulièrement aux entreprises privées, d’évoluer dans des conditions de concurrence équitables, et attribueront les projets aux meilleurs soumissionnaires. À défaut de cela, d’après la Chambre, il est vraisemblable que des fonds seront dépensés inutilement et que des projets échoueront (16).

5.2.2.

La communication à l’examen évoque également dans sa section 5.3 «des conditions équitables pour les entreprises». Le monde des affaires de l’Union a fait part de ses préoccupations et a également demandé un surcroît de transparence et d’association des entreprises à un stade précoce aux projets de l’initiative «Une ceinture, une route» afin de répondre aux exigences de diligence et d’évaluation de la rentabilité commerciale et de veiller à ce que s’y appliquent également une économie de marché fondée sur le droit et des marchés publics non discriminatoires.

5.3.

La communication met en avant les objectifs de développement durable. Le CESE estime qu’il est essentiel d’établir un lien formel entre les ODD et l’initiative «Une ceinture, une route». La déclaration commune de 2017 de la table ronde UE-Chine (17)«insiste notamment pour que la mise en œuvre de cette initiative prenne en compte la réalisation du programme des Nations unies à l’horizon 2030 et de ses objectifs de développement durable, ainsi que la mise en œuvre de l’accord de Paris sur le changement climatique».

5.3.1.

La déclaration conjointe de 2018 (18) constatait en outre qu’«en ce qui concerne les importantes initiatives en matière d’infrastructures, l’Union européenne et la République populaire de Chine, qui sont l’un pour l’autre des partenaires importants dans le domaine du commerce et de l’investissement, devraient continuer à aligner la conception et la mise en œuvre de leurs initiatives essentielles et à renforcer leur coopération en matière de commerce, de facilitation des investissements, de commerce électronique, de connectivités, d’infrastructures, de technologies de l’information, de l’énergie, des contacts interpersonnels et dans d’autres domaines». Elle ajoute que les pouvoirs publics des deux parties devraient «veiller au caractère durable sur le plan budgétaire et environnemental de toutes les initiatives et projets communs, et contribuer ainsi à la réalisation des ODD». Elle fait valoir qu’«aussi bien le programme à l’horizon 2030 que l’accord de Paris mettent en lumière le besoin pressant d’infrastructures mondiales et pointent la nécessité de prendre en compte l’ensemble des ODD dans le cadre de l’initiative «Une ceinture, une route» et de la stratégie pour connecter l’Europe et l’Asie».

5.3.2.

La table ronde concluait que «pour que les grands projets profitent aux deux parties, ils se doivent de produire des avantages mutuels et d’être transparents, interopérables, réciproques et durables, fondés sur la consultation, la participation et les bénéfices partagés».

5.4.

En ce qui concerne la réflexion plus générale au sujet de la connectivité entre l’Union européenne et l’Asie, il est évident que de nombreuses questions qui se posent dans le contexte de l’initiative «Une ceinture, une route» ont une application bien plus large. Par exemple, la communication met l’accent sur les ODD sans explorer en détail leur lien avec l’initiative. Parmi les ODD les plus pertinents, non seulement pour l’initiative «Une ceinture, une route», mais aussi pour la connectivité de toute l’Asie, on peut citer ceux qui suivent:

l’objectif 6 (eau propre et assainissement);

l’objectif 7 (garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes à un coût abordable);

l’objectif 9 (bâtir une infrastructure résiliente, promouvoir une industrialisation durable et encourager l’innovation);

l’objectif 8 (promouvoir une croissance économique soutenue, partagée et durable, l’emploi et un travail décent pour tous); et

l’objectif 14 (conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines).

5.4.1.

De nombreux autres ODD doivent également être pris en compte, notamment l’objectif 5 (parvenir à l’égalité des sexes), l’objectif 11 (villes et communautés durables), l’objectif 12 (établir des modes de consommation et de production durables) et l’objectif 15 (gérer durablement les forêts, lutter contre la désertification, enrayer et inverser le processus de dégradation des terres et mettre fin à l’appauvrissement de la biodiversité).

5.5.

C’est à juste titre que la communication à l’examen met fortement l’accent sur «une connectivité fondée sur des règles». À cet égard, un rôle considérable incombe à l’OMC, qui est aujourd’hui menacée par le gouvernement des États-Unis sous la présidence de M. Trump. Une mission essentielle de l’OMC consiste à promouvoir la transparence dans le commerce international, notamment grâce à son système d’«examen par les pairs», par lequel les pratiques commerciales de ses membres font régulièrement l’objet d’un examen. L’OMC est le bon forum pour traiter des préoccupations telles que celles soulevées par les États-Unis à l’endroit de la Chine, notamment en matière de dumping et de subventions déguisées.

5.5.1.

Au vu de toutes ces considérations et pour de nombreuses autres raisons géopolitiques, compte tenu de la croissance exponentielle des activités commerciales dans un grand nombre d’États d’Asie, le soutien apporté à l’OMC sera solide, et un appui asiatique largement répandu aidera l’Union européenne à prendre la défense de l’OMC, de son rôle et de ses principales activités.

5.5.2.

L’une des cibles spécifiques couvertes par l’ODD 17 (revitaliser le partenariat mondial pour le développement durable) consiste à «promouvoir un système commercial multilatéral universel, réglementé, ouvert, non discriminatoire et équitable sous l’égide de l’Organisation mondiale du commerce». Comme l’a souligné la déclaration ministérielle de l’OMC à Nairobi (19), «le commerce international peut contribuer à assurer une croissance durable, solide et équilibrée pour tous»; elle insiste dans le même temps sur le fait qu’il serait beaucoup plus difficile d’y parvenir en l’absence d’un mécanisme commercial multilatéral efficace.

6.   Renforcement des pouvoirs de la société civile

6.1.

Comme indiqué, tous les ALE et les APE conclus par l’Union européenne depuis 2011 comportent un solide chapitre sur le commerce et le développement durable, qui prévoit un rôle actif de suivi pour la société civile.

6.1.1.

Néanmoins, le rôle et la notion même de société civile diffèrent fortement en Asie et en Europe ou ailleurs dans le monde. La mise sur pied d’un véritable forum de la société civile dans le cadre de l’ALE entre l’Union européenne et la Corée du Sud a été couronnée de succès, bien que ce fût une entreprise de longue haleine. La mise en place d’un mécanisme similaire entre l’Union européenne et le Japon est en cours; celui-ci s’appuie sur des contacts intensifs et fructueux, établis depuis longtemps. Ni pour Singapour ni pour le Viêt Nam, il n’existe de mécanisme sur lequel s’appuyer à la suite de la ratification. D’autres pays de l’ASEAN, notamment l’Indonésie, suivront probablement. Bien qu’elle constitue l’élément phare de la connectivité de l’Union européenne avec la société civile en Asie, la communication à l’examen demeure muette à ce sujet.

6.2.

Le CESE salue l’insertion au sein de cette communication de la notion de connectivité entre les personnes. Cette dernière touche spécialement «la mobilité des étudiants, des universitaires et des chercheurs ainsi que la connectivité entre eux» (section 3.4), car elles «sont essentielles à la compréhension mutuelle et à la croissance économique», en mettant en exergue le programme Erasmus et les «actions Marie Skłodowska-Curie». La connectivité entre les personnes naît le plus souvent du commerce, du tourisme ou du sport, bien que l’Union européenne ait également mis sur pied un grand nombre d’initiatives axées sur le dialogue avec la Chine, l’Inde ou d’autres pays asiatiques.

6.2.1.

L’engagement de la jeunesse, par la voie notamment de l’éducation et de programmes d’échange, revêt une importance toute particulière. À cet égard, le programme Erasmus+ de l’Union européenne, révisé et très attendu, est essentiel. Il contribue à développer des liens plus approfondis en matière d’éducation et la mobilité dans l’enseignement supérieur, ce qui devrait s’accompagner d’une facilitation des visas et des laissez-passer en faveur des étudiants les plus doués. Toutefois, ce programme a une portée mondiale, et compte tenu de la diversité qui caractérise le continent asiatique, il est difficile, voire peu souhaitable, de l’intégrer dans un contexte asiatique spécifique.

6.2.2.

Cette démarche doit toutefois jouer dans les deux sens: l’Asie peut aussi offrir des compétences de pointe. Nombreux sont les pays asiatiques davantage intéressés par la reconnaissance mutuelle des qualifications, l’amélioration de la mobilité de la main-d’œuvre et l’accès aisé aux visas, comme en témoigne déjà l’enlisement des négociations avec l’Inde.

6.3.

Toutefois, l’Union européenne doit faire davantage pour gagner les cœurs et les esprits en Asie. La communication à l’examen est décevante en ce qu’elle n’avance pas grand-chose en matière de droits de l’homme (peut-être en raison de la diversité qui existe entre les pays d’Asie), d’état de droit, de bonne gouvernance et de démocratisation. L’Union européenne doit encourager le renforcement de la confiance. L’Asie dans son ensemble est confrontée à des difficultés en raison de la douloureuse et vaste transformation, dans de nombreux pays, d’économies planifiées en économies nationales de marché, entravée comme toujours par des périodes endémiques de troubles ethniques, environnementaux et économiques, sans parler des problèmes de corruption.

Bruxelles, le 20 mars 2019.

Le président

du Comité économique et social européen

Luca JAHIER


(1)  JOIN(2018) 31 final.

(2)  www.traceca-org.org/en/traceca/ (disponible en anglais et en russe).

(3)  PE 2017/2274 (INI), 11 juillet 2018.

(4)  Avis du CESE sur «La contribution de la société civile au réexamen de la stratégie UE-Asie centrale» (JO C 242 du 23.7.2015, p. 1), et sur le thème «Rôle et relations de l’Union européenne vis-à-vis de l’Asie centrale et contribution de la société civile» (JO C 248 du 25.8.2011, p. 49).

(5)  Ce sommet Asie-Europe rassemble trente États européens et vingt-et-un États asiatiques.

(6)  Notamment les avis sur les thèmes i) «Le rôle des groupes consultatifs internes dans le suivi de la mise en œuvre des accords de libre-échange»; ii) «Le commerce pour tous — Vers une politique de commerce et d’investissement plus responsable», (JO C 264 du 20.7.2016, p. 123), et iii) «Chapitres sur le commerce et le développement durable dans les accords de libre-échange conclus par l’Union européenne» (JO C 227 du 28.6.2018, p. 27).

(7)  https://eeas.europa.eu/regions/asia/334/asia_en (disponible pour l’heure uniquement en anglais).

(8)  Voir note 4 de bas de page.

(9)  COM(2006) 567 final, paragraphe 3.1.iii).

(10)  COM(2015) 497 final.

(11)  Voir note 3 de bas de page.

(12)  COM(2017) 487 final.

(13)  Voir note 2 de bas de page.

(14)  Voir note 4 de bas de page.

(15)  Le plan d’action global commun signé en 2015 avec l’Iran.

(16)  Comme réaffirmé le 27 mai 2017.

(17)  15e Table ronde UE-Chine.

(18)  16e Table ronde UE-Chine

(19)  Déclaration ministérielle de Nairobi.


5.7.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 228/103


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) no 1303/2013 en ce qui concerne les ressources affectées à la dotation spécifique allouée à l’initiative pour l’emploi des jeunes»

[COM(2019) 55 final — 2019/0027 (COD)]

(2019/C 228/15)

Saisine

Parlement européen, 11.2.2019

Conseil de l’Union européenne, 19.2.2019

Base juridique

Articles 177 et 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Emploi, affaires sociales et citoyenneté»

Adoption en session plénière

20.3.2019

Session plénière no

542

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

132/0/1

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et n’appelle aucun commentaire de sa part, le Comité, lors de sa 542e session plénière des 20 et 21 mars 2019 (séance du 20 mars 2019), a décidé, à l’unanimité, de rendre un avis favorable au texte proposé.

Bruxelles, le 20 mars 2019.

Le président

du Comité économique et social européen

Luca JAHIER