Proposition de résolution - B10-0149/2024Proposition de résolution
B10-0149/2024

PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la décision d’exécution (UE) 2024/1822 de la Commission autorisant la mise sur le marché de produits contenant du maïs génétiquement modifié DP915635, consistant en ce maïs ou produits à partir de celui-ci, conformément au règlement (CE) nº 1829/2003 du Parlement européen et du Conseil

21.10.2024 - (2024/2839(RSP))

déposée conformément à l'article 115, paragraphes 2 et 3, du règlement intérieur

Commission de l'environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire
Députés responsables: Martin Häusling, Biljana Borzan, Anja Hazekamp


Procédure : 2024/2839(RSP)
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B10-0149/2024
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B10‑0149/2024

Résolution du Parlement européen sur la décision d’exécution (UE) 2024/1822 de la Commission autorisant la mise sur le marché de produits contenant du maïs génétiquement modifié DP915635, consistant en ce maïs ou produits à partir de celui-ci, conformément au règlement (CE) nº 1829/2003 du Parlement européen et du Conseil (2024/2839(RSP))

Le Parlement européen,

 vu la décision d’exécution (UE) 2024/1822 de la Commission autorisant la mise sur le marché de produits contenant du maïs génétiquement modifié DP915635, consistant en ce maïs ou produits à partir de celui-ci, conformément au règlement (CE) nº 1829/2003 du Parlement européen et du Conseil[1],

 vu le règlement (CE) no 1829/2003 du Parlement européen et du Conseil du 22 septembre 2003 concernant les denrées alimentaires et les aliments pour animaux génétiquement modifiés[2], et notamment son article 7, paragraphe 3, et son article 19, paragraphe 3,

 vu que le comité permanent des végétaux, des animaux, des denrées alimentaires et des aliments pour animaux, visé à l’article 35 du règlement (CE) nº 1829/2003, a décidé, par vote du 26 avril 2024, de ne pas rendre d’avis, et que le comité d’appel a décidé, par vote du 29 mai 2024, de ne pas non plus rendre d’avis,

 vu l'article 11 du règlement (UE) n° 182/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2011 établissant les règles et principes généraux relatifs aux modalités de contrôle par les États membres de l’exercice des compétences d’exécution par la Commission[3],

 vu l’avis adopté par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) le 30 novembre 2023 et publié le 17 janvier 2024[4],

 vu ses résolutions précédentes s’opposant à l’autorisation d’organismes génétiquement modifiés (ci-après «OGM»)[5],

 vu l'article 115, paragraphes 2 et 3, de son règlement intérieur,

 vu la proposition de résolution de la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire,

A. considérant que, le 20 décembre 2020, la société Pioneer Overseas Corporation, Inc. établie en Belgique, agissant au nom de Pioneer Hi-Bred International, établie aux États-Unis, a soumis à l’autorité nationale compétente des Pays-Bas, en vertu des articles 5 et 17 du règlement (CE) n° 1829/2003, une demande de mise sur le marché de denrées alimentaires, d’ingrédients alimentaires et d’aliments pour animaux contenant du maïs génétiquement modifié DP915635 (ci-après le «maïs génétiquement modifié»), consistant en ce maïs ou produits à partir de celui-ci (ci-après la «demande»). que la demande portait également sur la mise sur le marché de produits contenant du maïs génétiquement modifié DP915635 ou consistant en ce maïs pour des utilisations autres que l’alimentation humaine et animale, à l’exception de la culture;

B. considérant que, le 30 novembre 2023, l’EFSA a adopté un avis favorable, qui a été publié le 17 janvier 2024;

C. considérant que le maïs génétiquement modifié contient des gènes conférant une résistance au glufosinate et produit la toxine insecticide IPD079Ea dérivée de la fougère Ophioglossum pendulum; que la modification génétique comportait un processus en plusieurs étapes utilisant le CRISPR/Cas pour introduire une «plate-forme d’atterrissage» sur le site cible, où les constructions génétiques permettant la production des nouveaux caractères sont insérées par la suite;

Manque d’évaluation de l’herbicide complémentaire

D. considérant que le règlement d’exécution (UE) nº 503/2013 de la Commission[6] impose une évaluation de l’influence éventuelle des pratiques agricoles attendues sur l’expression des critères étudiés; que, selon ce règlement d’exécution, cette évaluation est particulièrement utile pour les plantes tolérantes aux herbicides;

E. considérant que la grande majorité des cultures génétiquement modifiées l’ont été afin de les rendre tolérantes à un ou plusieurs herbicides «complémentaires» qui peuvent être utilisés tout au long de la culture de la plante génétiquement modifiée sans que celle-ci ne meure, comme ce serait le cas pour une culture non tolérante aux herbicides; qu’il ressort de plusieurs études que les cultures génétiquement modifiées tolérantes aux herbicides entraînent une augmentation de l’utilisation d’herbicides «complémentaires», du fait notamment de l’apparition de plantes adventices tolérantes aux herbicides[7];

F. considérant que les cultures génétiquement modifiées tolérantes aux herbicides enferment les agriculteurs dans un système de gestion des plantes adventices qui dépend en grande partie ou entièrement des herbicides, en raison de l’imposition d’un supplément pour les semences génétiquement modifiées qui ne peut se justifier que si les agriculteurs qui achètent ces semences pulvérisent également les herbicides complémentaires; qu’une dépendance accrue à l’égard des herbicides complémentaires dans les exploitations qui cultivent des OGM accélère l’émergence et la propagation de plantes adventices résistantes à ces herbicides, ce qui rendra nécessaire d’utiliser encore plus d’herbicides, un cercle vicieux appelé «le tapis roulant à herbicides»;

G. considérant que les effets néfastes d’une dépendance excessive aux herbicides dégraderont la santé des sols, la qualité de l’eau et la biodiversité des sols comme la biodiversité de surface, et entraîneront une augmentation de l’exposition humaine et animale, éventuellement aussi par la plus grande présence de résidus d’herbicides sur les denrées alimentaires et les aliments pour animaux;

H. considérant que le glufosinate est classé comme toxique pour la reproduction de catégorie 1B et correspond dès lors aux critères d’exclusion énoncés dans le règlement (CE) nº 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil[8]; que l’autorisation de l’utilisation du glufosinate dans l’Union est arrivée à échéance le 31 juillet 2018;

I. considérant que l’évaluation des résidus d’herbicides et des métabolites trouvés dans les plantes génétiquement modifiées est considérée comme ne relevant pas des compétences du groupe scientifique de l’EFSA sur les organismes génétiquement modifiés et qu’elle n’est donc pas réalisée dans le cadre de la procédure d’autorisation des OGM;

Questions en suspens concernant l’évaluation de la toxine IPD079Ea

J. considérant que la toxine Ophioglossum pendulum (IPD079Ea) ne fait pas partie de la flore européenne et n’a jamais été introduite auparavant dans la chaîne alimentaire humaine ou animale; que le mode d’action de l’IPD079Ea n’a été que mal décrit; que les États membres soulignent que l’introduction de cette protéine dans l’agriculture et la chaîne alimentaire nécessiterait beaucoup plus de données concernant le mode d’action et la spécificité des toxines;

Observations des autorités compétentes des États membres et des parties prenantes

K. considérant que les États membres ont soumis de nombreuses observations critiques à l’EFSA au cours de la période de consultation de trois mois, notamment le fait qu’un avis sur la sécurité du maïs génétiquement modifié ne peut être rendu compte tenu des lacunes dans les données figurant dans le dossier relatif aux exigences du règlement d’exécution (UE) n° 503/2013, que le plan de surveillance doit être étoffé et que les effets du glufosinate sur le macrobiote intestinal des consommateurs et sur la microflore du sol n’ont pas été pris en considération par l’EFSA, alors que ceux-ci sont clairement affectés;

Garantir des conditions de concurrence équitables au niveau mondial et respecter les obligations internationales de l’Union

L. considérant que, dans les conclusions du dialogue stratégique sur l’avenir de l’agriculture dans l’UE[9], la Commission est invitée à reconsidérer son approche de l’accès des importations et des exportations agroalimentaires aux marchés étant donné les difficultés découlant de normes divergentes entre l’Union et ses partenaires commerciaux; que, lors des manifestations de 2023 et 2024, l’une des grandes revendications des agriculteurs concernait l’instauration, à l’échelon mondial, de relations commerciales plus équitables et compatibles avec les objectifs d’un environnement sain;

M. considérant que, selon un rapport de 2017 de la rapporteuse spéciale des Nations unies sur le droit à l’alimentation, les pesticides dangereux ont des effets catastrophiques sur la santé, notamment dans les pays en développement[10]; que l’objectif de développement durable 3.9 des Nations unies vise, d’ici 2030, à réduire nettement le nombre de décès et de maladies dus à des substances chimiques dangereuses, à la pollution et à la contamination de l’air, de l’eau et du sol[11];

N. considérant que le cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal (ci-après le «cadre de Kunming-Montréal»), adopté lors de la COP 15 de la convention des Nations unies sur la diversité biologique en décembre 2022, comprend un objectif mondial de réduction des risques liés aux pesticides d’au moins 50 % d’ici 2030[12];

O. considérant que le règlement (UE) nº 1829/2003 dispose que les denrées alimentaires ou les aliments pour animaux génétiquement modifiés ne doivent pas avoir d’effets négatifs sur la santé humaine, la santé animale ou l’environnement, et oblige la Commission, lorsqu’elle prépare sa décision, à tenir compte de toute disposition pertinente du droit de l’Union et d’autres facteurs légitimes utiles pour la question examinée; que les obligations de l’Union en vertu des objectifs de développement durable des Nations unies et de la convention des Nations unies sur la diversité biologique devraient faire partie de ces facteurs légitimes;

Réduction de la dépendance à l’égard des aliments pour animaux importés

P. considérant que l’un des enseignements tirés de la crise de la COVID–19 et de la guerre qui se poursuit en Ukraine est que l’Union doit mettre fin à sa dépendance à l’égard de certaines matières critiques; que, dans sa lettre de mission à Christophe Hansen, commissaire désigné, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, lui demande d’examiner les moyens de réduire les importations de produits de base critiques[13];

Processus décisionnel non démocratique

Q. considérant qu’au cours de sa huitième législature, le Parlement a adopté au total 36 résolutions par lesquelles il s’est opposé à la mise sur le marché d’OGM destinés à l’alimentation humaine et animale (33 résolutions) et à la culture d’OGM dans l’Union (trois résolutions); qu’au cours de sa neuvième législature, le Parlement a adopté 38 résolutions par lesquelles il s’est opposé à la mise sur le marché d’OGM;

R. considérant que, si elle reconnaît elle-même les lacunes démocratiques, le soutien insuffisant des États membres et les objections du Parlement, la Commission continue d’autoriser les OGM;

S. considérant qu’il n’est pas nécessaire de modifier la législation pour que la Commission puisse s’abstenir d’autoriser des OGM en l’absence d’une majorité qualifiée d’États membres favorables au sein du comité d’appel[14];

T. considérant qu’au terme du vote du 26 avril 2024 au sein du comité permanent des végétaux, des animaux, des denrées alimentaires et des aliments pour animaux visé à l’article 35 du règlement (CE) nº 1829/2003, aucun avis n’a été rendu, ce qui signifie que l’autorisation n’a pas été soutenue par une majorité qualifiée d’États membres; que, lors de son vote du 29 mai 2024, le comité d’appel n’a pas non plus rendu d’avis;

U. considérant que, le 2 juillet 2024, la Commission a autorisé la mise sur le marché du maïs génétiquement modifié;

1. considère que la décision d'exécution (UE) 2024/1822 excède les compétences d'exécution prévues dans le règlement (UE) n° 1829/2003;

2. considère que la décision d’exécution (UE) 2024/1822 n’est pas conforme au droit de l’Union, en ce qu’elle n’est pas compatible avec l’objectif du règlement (CE) nº 1829/2003, qui est, conformément aux principes généraux prévus dans le règlement (CE) nº 178/2002 du Parlement européen et du Conseil[15], d’établir les bases afin d’assurer un haut niveau de protection de la vie et de la santé des personnes, de la santé et du bien-être des animaux, de l’environnement et des intérêts des consommateurs en relation avec les denrées alimentaires et les aliments pour animaux génétiquement modifiés, tout en garantissant le bon fonctionnement du marché intérieur;

3. demande à la Commission d'abroger la décision d'exécution (UE) 2024/1822;

4. prie la Commission de ne pas autoriser les cultures génétiquement modifiées tolérantes aux herbicides, car cela entraînerait une hausse de l’utilisation d’herbicides complémentaires et augmenterait donc les risques pour la biodiversité, la sécurité alimentaire et la santé des travailleurs, conformément à l’approche «Une seule santé»;

5. souligne, à cet égard, que le fait d’autoriser l’importation de toute plante génétiquement modifiée qui a été rendue tolérante aux herbicides interdits dans l’Union, tels que le glufosinate, pour être utilisée dans des denrées alimentaires ou des aliments pour animaux, est incompatible avec les engagements internationaux pris par l’Union dans le cadre, entre autres, des objectifs de développement durable des Nations unies et de la convention des Nations unies sur la diversité biologique, y compris le cadre de Kunming-Montréal récemment adopté[16];

6. attend de la Commission qu’elle tienne d’urgence l’engagement qu’elle a pris de présenter une proposition visant à garantir que les produits chimiques dangereux interdits dans l’Union européenne ne soient pas produits à des fins d’exportation[17];

7. se félicite que la Commission ait finalement reconnu, dans une lettre du 11 septembre 2020 à l’attention des députés, que les décisions d’autorisation relatives aux OGM doivent tenir compte de la durabilité[18]; se déclare toutefois profondément déçu que la Commission ait depuis continué d’autoriser l’importation d’OGM dans l’Union, malgré les objections formulées à de multiples reprises par le Parlement et le vote d’une majorité des États membres contre ces autorisations;

8. demande instamment à la Commission, une fois encore, de tenir compte des obligations qui incombent à l’Union en vertu d’accords internationaux, tels que l’accord de Paris sur le climat, la convention des Nations unies sur la diversité biologique et les objectifs de développement durable des Nations unies; demande une nouvelle fois que les projets d’actes d’exécution soient accompagnés d’un exposé des motifs expliquant comment ils respectent le principe de «ne pas nuire»[19];

9. charge sa Présidente de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission ainsi qu’aux gouvernements et aux parlements des États membres.

 

 

Dernière mise à jour: 5 novembre 2024
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