Découvrez les temps forts du FHA25 !

Toute l’équipe du festival vous adresse ses meilleurs vœux pour cette nouvelle année ! En 2025, nous vous donnons rendez-vous les 6, 7 et 8 juin pour une 14e édition consacrée à l’Autriche et au thème « Le vrai, le faux ». Alors pour patienter jusqu’au mois de juin, découvrez dès à présent quelques uns des temps forts de la programmation.

L’Autriche

De la préhistorique Vénus de Willendorf à la Sécession viennoise, de l’art médiéval à la scène artistique contemporaine, le festival offrira un vaste panorama des arts autrichiens jusqu’à nos jours. Il s’interrogera également sur les dessous des fastes de l’empire habsbourgeois et explorera les voix dissidentes des années 1960 et 1970.  Artistes, chercheurs, conservateurs et acteurs culturels de l’Autriche ont répondu avec enthousiasme à notre invitation à venir à Fontainebleau pour évoquer l’histoire culturelle, exceptionnellement riche et complexe, de leur pays. Avec leurs homologues français, ils retraceront le parcours d’artistes célèbres ou méconnus et leur contribution à l’histoire de l’art.

La programmation mettra également à l’honneur la création contemporaine. Les festivités s’ouvriront avec une conférence inaugurale de l’artiste Markus Schinwald, qui se définit lui-même comme un « constructeur de prothèses pour des cas indéfinis »[1] et une projection de certains films expérimentaux de VALIE EXPORT, figure majeure de l’art féministe autrichien. Une série de courts-métrages récents, proposés par le Forum culturel autrichien à Paris, ainsi que des performances et concerts viendront compléter les conférences et débats durant ces trois jours.

Les artistes féministes radicales dans l’Autriche des années 1970 
Une conférence de Edith Futscher (Universität für angewandte Kunst Wien) 

Le programme des conférences mettra à l’honneur les artistes autrichiens d’après-guerre dont les œuvres conservent une résonance puissante aujourd’hui. Edith Futscher, historienne de l’art spécialisée en études de genre à l’Université des Arts Appliqués de Vienne, consacrera sa conférence aux avant-gardes féministes autrichiennes des années 1970. Particulièrement actives et engagées, ces artistes se sont structurées en groupes et réseaux, organisant leurs propres évènements. En 1975, plusieurs d’entre elles contestent fortement l’exposition organisée à Vienne à l’occasion de L’Année internationale de la femme, proclamée par les Nations unies. La controverse conduit à la création de l’association IntAkt (Groupe d’initiative international des femmes artistes), encore active aujourd’hui. Cette intervention sera également l’occasion de revenir sur les figures emblématiques de la scène artistique d’après-guerre, telles que Renate Bertlmann et Birgit Jürgenssen, ainsi que les incontournables VALIE EXPORT et Maria Lassnig. Un hommage particulier sera rendu à ces deux grandes figures de l’art contemporain autrichien, dont les films expérimentaux feront l’objet de projections spéciales au Cinéma Ermitage.

Valie Export, Smart Export, autoportrait, 1970, épreuve gélatino argentique, Albertina, Vienne

Le vrai, le faux

Le thème du vrai et du faux touche au cœur des enjeux fondamentaux de l’histoire de l’art ; la question de l’authenticité des œuvres fascine autant qu’elle interroge. De nombreuses problématiques qui irriguent tous les champs de la discipline seront abordées durant le festival : faux, pastiches, contrefaçons, mais aussi restaurations, recherches de provenance et véracité documentaire. Aujourd’hui, les nouvelles technologies et l’intelligence artificielle bouleversent les certitudes en matière de traitement des images et d’analyse scientifique, ouvrant de nouveaux champs de recherche.

Faux peintre et vrai âne : l’affaire Boronali
Une conférence de Maximilien Theinhardt (Musée National d’Art Moderne)

L’« affaire Boronali » compte parmi les plus célèbres canulars de l’histoire de l’art. Son initiateur, Roland Dorgelès, lui consacre tout un chapitre dans son recueil de souvenirs montmartrois Bouquet de Bohème, publié en 1947. « Littéralement désespéré de voir, l’un après l’autre, [ses] camarades s’engager dans l’impasse », à savoir « Albert Gleizes, Juan Gris, Markous, Pierre Dumont et la délicate Marie Laurencin, et le solide Delaunay, démolisseur de Tours Eiffel », le journaliste décide de fomenter une « blague énorme, qui mettrait d’un seul coup les rieurs de [son] côté », tout en offrant une large publicité à son employeur, le magazine Fantasio. Dorgelès imagine alors le scénario suivant : lancer la carrière d’un artiste imaginaire à l’occasion du Salon des Indépendants de 1910. Accusé de n’aimer que la « peinture de singe » par Guillaume Apollinaire, le choix se porte tout naturellement sur un animal, mais pas n’importe lequel. Il s’agit de l’âne Lolo, mascotte du cabaret montmartrois Au Lapin Agile, haut lieu de la bohème géré par Frédéric Gérard, dit le père Frédé. Un pinceau ficelé à la queue, Lolo est l’auteur d’un chef d’œuvre : une marine intitulée Et le soleil s’endormit sur l’Adriatique. Lolo n’étant pas un nom sérieux pour un artiste, l’œuvre est signée « Joachim-Raphaël Boronali », une anagramme d’Aliboron, surnom dont affuble les « maîtres sots » et les ânes. La présentation sera l’occasion de démêler le vrai du faux de cette mystification et d’interroger les différents stratagèmes employés par les commanditaires du canular : campagne d’intoxication médiatique menée en amont, publication de preuves photographiques et d’un constat d’huissier, ou encore réécriture a posteriori de l’histoire. L’« affaire Boronali », où trompeurs et trompés ne sont pas forcément ceux que l’on croit, s’intègre dans une histoire de la blague artistique plus large dans laquelle la manipulation de la presse joue un rôle essentiel.

Lolo dit Joachim-Raphaël Boronali peignant "Et le soleil s'endormit sur l'Adriatique", photographie publiée dans Fantasio,1er avril 1910,n°89,p. 599.

cinéma

La Rue rouge (Scarlet Street, 1945) de Fritz Lang en version restaurée, présenté par Marie Anne Guerin, critique de cinéma 

Né à Vienne où il a étudié l’architecture comme son père, Fritz Lang s’est d’abord longtemps rêvé peintre, et a même travaillé auprès de Maurice Denis à Saint-Germain-en-Laye en 1913. C’est à Berlin en 1919 qu’il a démarré sa carrière de cinéaste avant de s’exiler en 1934 vers les États-Unis pour fuir le nazisme, à l’instar de Billy Wilder ou Otto Preminger, comme lui bientôt naturalisés américains. Avec La Rue rouge (Scarlet Street, 1945), Lang signe son dixième film hollywoodien en réalisant un remake de La Chienne de Jean Renoir (1931), film lui-même adapté du roman éponyme de Georges de La Fouchardière. La Rue rouge n’est toutefois pas une simple copie de La Chienne, et Lang fait bien plus que s’inspirer du scénario de Renoir : il déplace son intrigue tragique dans l’atmosphère propre au film noir qu’il a pleinement investie en arrivant aux États-Unis, retrouvant dans le genre la possibilité de peindre à nouveau les ombres, les lumières et les âmes tourmentées de son cinéma expressionniste, de Docteur Mabuse le joueur (1922) à M le maudit (1931). Dans sa filmographie, La Rue rouge suit immédiatement un autre film noir, La Femme au portrait (The Woman in the Window, 1944), son premier véritable succès aux États-Unis. Les deux films partagent le même trio d’acteurs (Edward G. Robinson, Joan Bennett et Dan Duryea) et décrivent tous deux de complexes et dangereuses entreprises de manipulation, mais l’un n’est en aucun cas la copie de l’autre. La Rue rouge met en scène les mésaventures d’un modeste employé de banque, Christopher Cross, peintre du dimanche, fasciné par une femme qui se joue de lui et s’approprie avec l’aide de son complice ses propres tableaux. Le film sera programmé au cinéma Ermitage à Fontainebleau (à deux pas du château) dans le cadre de la section cinéma : l’occasion de voir ou revoir l’un des plus grands films noirs hollywoodiens, où le vrai se dissimule derrière le faux, où foisonnent faux-semblants et mensonges.

La Rue rouge (Scarlet Street), Fritz Lang, 1945 © Les Films du Camélia

[1] https://ropac.net/artists/79-markus-schinwald/